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Autorités et régulation du travail dans le champ de la construction

Agencies and labour regulation in building sites

(XIIIe - XIXe siècle)

13th - 19th centuries

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Publié le vendredi 10 mars 2017 par Anastasia Giardinelli

Résumé

A travers l’évolution historique que connaissent les sociétés occidentales européennes du Moyen Age à l’aube de l’ère contemporaine, il n’a jamais été imaginé que le travail dans le secteur de la construction – bien qu’il soit souvent reconnu comme ayant occupé un rôle déterminant en matière économique - puisse avoir été aménagé, contrôlé et géré par des institutions diverses qui ont croisé ou superposé leurs influences. Institutions publiques, corps intermédiaires et acteurs privés agissent sous diverses formes sur les marchés du travail, parfois en coopération, parfois en concurrence, parfois ouvertement en conflit, tous impliqués de différentes façons dans la régulation du travail et l’encadrement de la main d’œuvre. Il conviendra de s’intéresser à la nature des autorités régulatrices, à leur chevauchement de compétence  et à l’étendue de leurs pouvoirs en relation avec la nature du travail sur les chantiers (forcée, encadrée, libre). 

Annonce

Présentation

A travers l’évolution historique que connaissent les sociétés occidentales européennes du Moyen Age à l’aube de l’ère contemporaine, il n’a jamais été imaginé que le travail dans le secteur de la construction – bien qu’il soit souvent reconnu comme ayant occupé un rôle déterminant en matière économique - puisse avoir été aménagé, contrôlé et géré par des institutions diverses qui ont croisé ou superposé leurs influences. Institutions publiques, corps intermédiaires et acteurs privés agissent sous diverses formes sur les marchés du travail, parfois en coopération, parfois en concurrence, parfois ouvertement en conflit, tous impliqués de différentes façons dans la régulation du travail et l’encadrement de la main d’œuvre. Il conviendra de s’intéresser à la nature des autorités régulatrices, à leur chevauchement de compétence  et à l’étendue de leurs pouvoirs en relation avec la nature du travail sur les chantiers (forcée, encadrée, libre). Le domaine de la construction, tant par son importance dans le secteur économique que par l’ampleur des travaux auxquels il a donné lieu depuis les années 2000 au niveau européen, constitue un champ privilégié de nos interrogations structurelles.

  1. Institutions publiques : Quelle que soit la nature de la structure des terres (administrative, fiscale, judiciaire) sur lesquelles nous nous situons, les autorités publiques - autrement dit, celles provenant d’en haut - ont toujours depuis l’Antiquité décidé d’avoir un œil sur la gestion de leur patrimoine qu’il s’agisse de la cité la plus étendue au plus petit des hameaux ruraux. De fait, les conseils du prince, les ministères, les académies, comme les juridictions ont toujours normé les espaces bâtis, comme ceux non bâtis sous le prétexte d’un ordre public de salubrité ou de sécurité et qui couvre aussi bien des considérations tant architecturales, urbanistiques que constructives. Les autorités publiques sont impliquées dans la régulation des travaux de construction à plusieurs égards, en tant que législateurs, maîtres d’ouvrage voire responsables d’une embauche de travailleurs forcés. Tantôt centrés sur la fixation des salaires, tantôt afin de normaliser l’embauche ou le licenciement, tantôt pour définir un contrat de louage d’ouvrage type, tantôt encore pour contrôler la mobilité professionnelle et géographique des travailleurs, les pouvoirs publics se sont mobilisé, conscients de l’intérêt à agir pour la collectivité. Particulièrement dans le domaine public, la pluralité des institutions, a priori compétentes, engendre des conflits mais peut conduire également à la reconnaissance d’une spécialisation ? Comment les acteurs sociaux réagissent-ils ? S’il existe des espaces et des outils de négociation entre les acteurs et les pouvoirs publics, ce pluralisme institutionnel donne-t-il pour autant davantage de possibilités de manœuvre aux acteurs?
  2. Les « corps intermédiaires » (communautés de métier, corporations, confréries, syndicats, etc.) : Qu’ils soient organisés librement ou encadrés par des statuts, les métiers de la construction ont bénéficié d’un pouvoir important d’autorégulation, dans bien des cas. La force du regroupement par professions, jurées ou pas, dotées de structures hiérarchiques de fonctionnement et de pouvoirs assez déterminants donnent a priori à ces communautés de métiers la légitimité de gérer les modalités du travail des professions qui y sont affiliées. Que défendent ces associations ? Les intérêts communs ou privés de chacun des membres ? La main d’œuvre en fait-elle seulement partie ? La solidarité mise en place est souvent d’ordre paternaliste. Comment l’encadrement du travail est-il vécu de l’intérieur de ces groupes ? Pourtant ces communautés de métier sont mises à mal selon les périodes. Avec Turgot, par exemple en France, l’enjeu politique de la liberté économique mène l’Etat à les interdire, voire à réduire leur autorité pour un long moment. Une des faiblesses des groupes de métiers fut certes la volonté d’enfermer chacun d’entre eux dans des carcans de compétences très précis, comme à propos de l’apprentissage, des permissions ou interdictions de travailler. Se sont-ils intéressés à réguler la mobilité de la main-d'œuvre ? Considéraient-ils seulement les manœuvres ? On connait les mouvements importants de grèves dans ce secteur à la fin de l’Ancien régime et au XIXe siècle. Comment ces structures professionnelles, mises en veille par l’Etat, ont-elles pu continuer à jouer un rôle souterrain  actif ?
  3. L’entreprise et les marchés : De la petite structure familiale réduite à la figure du père et de ses enfants – voire à l’artisan unique - à la multinationale industrielle qui s’impose au XIXe siècle, une grande variété de situations a modelé le monde de la construction. A partir de quand et surtout sous quelles formes et à quel niveau peut-on admettre que l’entreprise a joué un rôle de guide en matière constructive ? L’étendue géographique des chantiers, leurs natures privées, publiques ou royales, la complémentarité des compétences associatives, la capacité d’assurer les avances financières, la constitution entrepreneuriale de structures gigantesques sont autant d’axes de réflexion pour envisager les actions des entreprises sur les marchés de la construction immobilière, et notamment sur la régulation du travail.

Par la nature des chantiers de construction, dont les besoins varient en fonction des saisons et de l'avancement des travaux, la main-d'œuvre utilisée doit répondre à certaines exigences propres au secteur (mais pas seulement) : elle doit être disponible immédiatement pour un emploi temporaire selon une rotation rapide des travailleurs. Comment les entreprises s’assurent-elles de la disponibilité de la main-d'œuvre? Quels sont les outils pour régler et gérer la mobilité de celle-ci ? Comment le recrutement du travail régit-il la dynamique de cette mobilité (géographique et professionnelle) ? A travers les filières migratoires ? Quels types de marchés du travail et quels acteurs agissent dans le bâtiment ?

Modalités de soumission

Tous les espaces géographiques sont les bienvenus. Si vous êtes intéressé(e) par cet appel, vous pouvez envoyer un abstract d’environ 400 mots (ou 2500 signes) avec un titre et indiquant clairement votre questionnement ainsi que les sources d’archives sur lesquelles vous allez appuyer votre argumentation, ainsi qu’une courte biographie signalant votre rattachement institutionnel

aux trois auteurs de cet appel : bernardi.philippe@wanadoo.fr, rcarvais@noos.fr et nicolettarolla@gmail.com

avant le 15 mai 2017.

Une réponse vous sera adressée sous quinzaine.

Comité scientifique et organisateur

  • Philippe Bernardi, Directeur de recherche CNRS, Laboratoire de médiévistique occidentale de Paris, Lamop (UMR 8589), université de Paris 1
  • Robert Carvais, Directeur de recherche CNRS, Centre de théorie et analyse du droit, CTAD (UMR 7074), université Paris-Nanterre
  • Nicoletta Rolla, doctorante, CRH, EHESS

Bibliographie succincte sur le sujet

  • BERNARDI Philippe, Maître, valet et apprenti au Moyen Âge. Essai sur une production bien ordonnée, Toulouse, CNRS-Université Toulouse-Le Mirail, 2009, Collection Méridiennes, série Histoire et techniques.
  • BERTELS, Inge, “Building Contractors in late-Nineteenth-century Belgium: from Craftsmen to Contractors”, Construction History. 26, April 2012, p. 1-18.
  • BERTELS, Inge, DENEWETH, Heidi, HOREMANS, Boris & VAN DE VOORDE, Stéphanie, « Pour une historiographie de l'entrepreneur du bâtiment (1400-2000) », in Les temps de la construction. Processus, acteurs, matériaux: Recueil de textes issus du deuxième congrès francophone d'histoire de la construction. Fleury, F., Baridon, L., Mastrorilli, A., Mouterde, R. & Reveyron, N. (eds.). Paris: Picard, 2016, p. 1189-1999.
  • BETHUME, Kim, Gestion et entretien des bâtiments royaux dans les Pays-Bas autrichiens (1715-1794). Le Bureau des ouvrages de la cour, Bruxelles, Editions de l’université de Bruxelles, Coll. Etudes sur le XVIIIe siècle, 2001.
  • BOATO, Anna, Costruire « alla moderna » . Materiali e techniche a Genova tra XV e XVI secolo, All’Insegna del Giglio, Biblio. Di archeologia dell’architettura, Firenze, 2005.
  • BRUNO Anne-Sophie et ZALC Claire (ed.), Petites entreprises et petit entrepreneurs étrangers en France (XIX-XX siècle), Paris, Publibook, 2006.
  • CARVAIS, Robert, La Chambre royale des Bâtiments. Juridiction professionnelle et droit de la construction à Paris sous l’Ancien Régime, thèse de doctorat d’Etat en droit, Université de Panthéon-Assas (Paris-II), 2001, (à paraître aux éditions Droz).
  • CARVAIS Robert, GUILLERME André, NEGRE, Valérie et Joël SAKAROVITCH (eds.), Nuts & Bolts of Construction History. Culture,Technology & Society. Proceedings of the 4th International Congress on Construction History, Paris, Picard, 2012.
  • CASAMENTO Aldo (ed.), Il cantiere della città. Strumenti, maestranze e tecniche dal Medioevo al Novecento, Roma: Kappa, 2014.
  • CAVACIOCCHI Simonetta (dir.), L’Edilizia prima della Rivoluzione industriale secc. XIII-XVIII, Atti della « Trentaseiesima Settimana di Studi », Istituto Internazionale di Storia Economica « F. Datini », Prato (Italie), Le Monnier, 2005.
  • CHAUVIN Sébastien, Les agences de la précarité. Journaliers à Chicago, Paris, Seuil, 2010.
  • CHATEAU-DUTIER, Emmanuel, Le Conseil des bâtiments civils et l'administration de l'architecture publique en France dans la première moitié du XIXe siècle (1795-1848), thèse Histoire de l’art, Paris EPHE, 2016.
  • CLARKE Linda, Building Capitalism. Historical Change & the Labour Process in the Production of the Built Environment, London, Routledge, 1992.
  • COMET Catherine, « Capital social et profits des artisans du bâtiment : le poids des incertitudes sociotechniques », Revue française de Sociologie, 49 (2007), p. 67-91.
  • CROUZET-PAVAN Elisabeth (dir.), Pouvoir et édilité. Les grands chantiers dans l’Italie communale et seigneuriale, Rome, Publications de l’École française de Rome, 2003, Collection de l’École française de Rome 302.
  • DECOMMER Maxime, Les architectes au travail. L’institutionnalisation d’une profession, 1795-1940, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, coll. "Art et Société", 2017.
  • DUC Marcelle, Le travail en chantier, Toulouse : Octarès, 2002.
  • ERIOLI Elisa, Falegnami e muratori a Bologna nel Medioevo: statuti e matricole (1284-1377), Bologna, Patron Editore, 2014.
  • HARISSON Casey, The Stonemasons of Creuse in Nineteenth-Century Paris, Newark, University of Delaware Press, 2008
  • GAROFALO Emanuela (dir.), Le arti del costruire. Corporazioni edili, mestieri e regole nel Mediterraneo aragonese (XV-XVI secolo), Palermo : Edizioni Caracol, 2010.
  • IZQUIERDO ARANDA Teresa, La fusteria a la València medieval (1238-1520), Valence, Universitat Jaume I, 2014.
  • JOUNIN Nicolas, TOURETTE Lucie, Marchands de travail, Paris, Seuil, 2014.
  • Mc KELLAR, Elizabeth, The Birth of modern London. The development and design of the city. 1660-1720, Manchester, Manchester University Press, 1999.
  • MARTINI Manuela, Bâtiment en famille. Migrations et petite entreprise en banlieue parisienne au XXe siècle, CNRS Éditions, collection Alpha, 2016.
  • MEUNIER Florent, Martin & Pierre Chambiges : architectes des cathédrales flamboyantes, Paris, Picard, 2015.
  • NEGRE Valérie, L’Art et la matière - Les artisans, les architectes et la technique (1770-1830), Paris, Classiques Garnier, coll. "Histoire des techniques", 2016.
  • MOCCARELLI Luca, “Wages and labour market in the building trade in 18th century Milan”, Jahrbuch fur Wirtschaftsgeschichte, 54 (2004), p. 61-81.
  • POTOFSKY Alan, Constructing Paris in the age of Revolution, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2009.
  • Serra Desfilis Amadeo (dir.), Arquitectura en construcción en Europa en época medieval y moderna, Valence, Universitat de València, 2010.
  • VICTOR Sandrine, La construction et les métiers de la construction à Gérone au XVe siècle, Toulouse, éditions Méridiennes, FRAMESPA, 2008.
  • VROOM Wim, Financing Cathedral Building in the Middle Ages. The Generosity of the Faithful, Chicago, Chicago University Press, [1981] 2010.
  • WOODWARD Donald, Men at Work: Labourers and Building Craftsmen in the Towns of Northern England, 1450 - 1750, Cambridge and New York: Cambridge University Press, 1995.

Lieux

  • Congrès de l'European Labour History Network - Association Française pour l’Histoire des Mondes du Travail (AFHMT)
    Paris, France (75)

Dates

  • lundi 15 mai 2017

Fichiers attachés

Mots-clés

  • histoire de la construction, ELHN 2017

Contacts

  • Robert Carvais
    courriel : rcarvais [at] noos [dot] fr
  • Nicoletta Rolla
    courriel : nicolettarolla [at] gmail [dot] com
  • Philippe Bernardi
    courriel : bernardi [dot] philippe [at] wanadoo [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • carvais robert
    courriel : rcarvais [at] noos [dot] fr

Pour citer cette annonce

« Autorités et régulation du travail dans le champ de la construction », Appel à contribution, Calenda, Publié le vendredi 10 mars 2017, http://calenda.org/398542