Le Medef claironne à qui veut l'entendre que les entreprises françaises seraient capables de créer un million d'emplois en cinq ans. Comment ? Tout simplement en baissant les cotisations patronales, les dépenses publiques et bien entendu en précarisant les salariés au nom de la compétitivité !
En lisant la lettre aux chefs d'entreprises que le Medef a rendu publique sur son site web, on se demande combien de fois ses rédacteurs ont du rire à s'en tenir les côtes. En effet, expliquer que le taux de chômage et la faiblesse des embauches ne sont dues qu'aux méchants politiques socialistes qui empêchent les gentils patrons d'employer un million de salariés, il a de quoi déclencher l'hilarité, du moins, au siège du Medef.
En fait, il s'agit ni plus ni moins d'une énieme resucée des revendications patronales à la mode Gattaz ... Yvon, père de l'actuel président du Medef qui expliquait entre autre, dans les années 80 que : pour embaucher plus il faillait pouvoir licencier plus facilement.
Pour mémoire nous rappelait Laurent Maudit dans Marianne : « (...) Yvon Gattaz, promet que les entreprises créeront des centaines de milliers d'emplois nouveaux, qu'il dénomme sans trop de gêne des Enca (pour «emplois nouveaux à contraintes allégées»), si la puissance publique engage une forte déréglementation du marché du travail (...) »
Etonnant non ?
Gardons nous de tout enthousiasme car si Pierre Gattaz écrit : « (...) L’ambition que nous vous proposons est de créer 1 million d’emplois en 5 ans (...) » Il précise aux candides qu'il : «(...) ne s’agit pas non plus d’un engagement inconditionnel (...) »
Nous passerons vite sur le passage « Calimero » : « (...) Les chefs d’entreprise sont encore aujourd’hui trop souvent critiqués alors qu’ils devraient être cités en exemple et mis à l’honneur par la nation (...) » pour en venir à cet engagement qui n'est pas inconditionnel
Car, pour atteindre ce nirvana, les salariés doivent d'abord comprendre qu'ils doivent revoir à la baisse leurs conditions de travail et de chômage.
Ce qui débloquerait les embauches, selon Gattaz, ce serait : « (...) La simplification d’une réglementation devenue délirante, puisque nos 85 codes et nos 400 000 normes croissent de 3 % à 5 % par an et asphyxient nos entreprises (...) »
En clair comme disait papa Gattaz : pour embaucher plus, il faudrait pouvoir licencier plus facilement. Ce à quoi il faut ajouter la fameuse « insécurité de l'employeur face aux prud'hommes » et les interventions « fâcheuses » des juges qui peuvent retoquer un plan social mal ficelé
De même, il serait nécessaire de : « (...) rétablir les comptes de nos régimes déficitaires : que ce soit le système de retraite, l’assurance chômage, ou l’assurance maladie. Là encore, le courage, la détermination, la constance dans l’effort sont indispensables (...) »
En admettant que les politiques et les salariés acceptent les conditions du Medef, en quoi la promesse de créer 1 million d'emplois engage t-il celui-ci ?
En rien, puisque le Medef est un syndicat d'employeurs qui ne fédère pas l'ensemble des entreprises françaises. Ce qui signifie qu'en cas de baisse massive des cotisations sociales, de démantèlement du code du travail, de la suppression de l'intervention des juges en cas de plan social douteux, de simplification des licenciements, d'une diminution des indemnités chômage, et du passage à 65 ans de l'âge légal de la retraite, le Medef n'aurait aucun moyen de contraindre les employeurs français à embaucher qui que ce soit !
De même, les allègements d'effectifs qu'autoriserait la plus grande liberté de se séparer de leurs salariés à bon compte ne garanti pas que le million d'emploi crée en cinq ans compenserait le nombre de salariés envoyés entre temps à Pôle Emploi !
Par contre, les salariés embauchés seraient plongés dans une précarité sans nom qui néanmoins les rendraient compétitifs pour les entreprises et le plus grand bonheur des actionnaires.
En fin de lettre, Pierre Gattaz donne aux chefs d'entreprises les clés du lobby qu'il entend mettre en place : « (...) Allez voir les élus, nos maires, nos députés, nos sénateurs, quels qu’ils soient, pour leur présenter notre projet commun de créer 1 million d’emplois en 5 ans et leur expliquer les réformes indispensables à mener pour relever ce défi collectif (...) »
Et de conclure : « (...) Vive l’entreprise, vive la France ! »
Assurément, au Medef, ils ont vraiment du se tenir les côtes en la rédigeant cette lettre ...
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