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Castoriadis et les sciences sociales

Castoriadis and social sciences - study day of the Société collective

Journée d'étude du collectif Société

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Publié le jeudi 10 novembre 2016 par João Fernandes

Résumé

Après sa rupture définitive avec Marx et le marxisme au milieu des années 1960, Castoriadis s’est efforcé de repenser les conditions de l’agir pratique révolutionnaire dans le cadre d’une théorie de la société qui pose l’« imaginaire » comme son principe de genèse et d’identité. À l’occasion de l’élaboration de sa nouvelle théorie du social et de l’histoire, Castoriadis a pu écrire que les sciences sociales sont toutes passées, sans exception, à côté de leur objet d’étude : l’être du social et l’histoire comme création. Nous invitons les participants de cette journée d’étude à réfléchir sur les raisons qui ont pu pousser Castoriadis à formuler un jugement aussi radical sur l’histoire des sciences sociales, mais aussi à expliciter les implications théoriques de cette critique sans concession. Nous pourrons, inversement, étudier le rapport des sciences sociales à l’œuvre de Castoriadis.

Annonce

Argumentaire

Cette journée d’étude portera sur le rapport de Cornelius Castoriadis aux sciences sociales, mais aussi sur celui des sciences sociales d’hier ou d’aujourd’hui à l’auteur de L’institution imaginaire de la société.

1. Castoriadis et les sciences sociales

Après sa rupture définitive avec Marx et le marxisme au milieu des années 1960, Castoriadis s’est efforcé de repenser les conditions de l’agir pratique révolutionnaire dans le cadre d’une théorie de la société qui pose l’« imaginaire » comme son principe de genèse et d’identité. À l’occasion de l’élaboration de sa nouvelle théorie du social et de l’histoire, Castoriadis a pu écrire que les sciences sociales sont toutes passées, sans exception, à côté de leur objet d’étude : l’être du social et l’histoire comme création. Nous invitons les participants de cette journée d’étude à réfléchir sur les raisons qui ont pu pousser Castoriadis à formuler un jugement aussi radical sur l’histoire des sciences sociales, mais aussi à expliciter les implications théoriques de cette critique sans concession.

Voici quelques pistes de recherches susceptibles d’être approfondies :

a. À un premier niveau, il serait tout simplement possible de retourner aux textes des auteurs que Castoriadis critique et se demander si ses critiques sont justifiées.

b. Si Castoriadis affirme que sa théorie sociale est nouvelle, nous pouvons également nous demander dans quelle mesure elle n’hérite pas non plus des grands thèmes des sciences sociales pour les retravailler selon sa propre perspective (qui est celle de la création et de l’imaginaire). Nous pourrons par exemple nous demander en quoi la thèse castoriadienne d’une origine sociale des catégories de la connaissance n’est-elle pas un héritage durkheimien ou bien marxien. Nous pourrons aussi nous interroger sur le rapport de Castoriadis à la « tradition sociologique » (selon l’expression de Nisbet), par exemple lorsqu’il affirme que la tâche de la sociologie est de penser l’unité de la société. La place qu’occupe l’anthropologie culturelle dans la genèse de sa théorie pourrait également être l’objet d’une discussion : Malinowski et Radcliffe-Browne sont en effet des interlocuteurs privilégiés de Castoriadis à l’occasion de la première formulation de sa théorie dans « Marxisme et théorie révolutionnaire ». Est-il en outre bien vrai que les sciences sociales ont été incapables de penser l’innovation et la création historique ? De même, Castoriadis est-il bien justifié à dire qu’il est le premier à avoir pensé le social comme un domaine de l’être irréductible aux individus ?

c. Toujours dans le registre de la « filiation », nous pourrions nous interroger sur la place de Castoriadis dans la querelle méthodologique entre les approches « compréhensives » et « explicatives » en sciences sociales. Si Castoriadis opte clairement pour une approche « compréhensive », une tâche de la sociologie étant l’identification et la compréhension des « significations imaginaires sociales », il demeure qu’il se situe aussi en rupture avec les grandes sociologies compréhensives. Contre Weber, Castoriadis soutient que la « compréhension » ne devrait pas tant être une méthode visant à établir des rapports de causalité par la reconstitution du sens que les agents sociaux confèrent à leur action que l’« élucidation » des successions non causales des « significations imaginaires » dans l’histoire.

d. La théorie de l’institution imaginaire de la société n’est pas conçue par Castoriadis comme une énième théorie du social et de l’histoire, mais bien comme une conceptualisation pertinente des conditions objectives de l’agir révolutionnaire qui doit, pour cette raison, se substituer à la théorie marxienne du dépassement dialectique des contradictions du capitalisme. On pourra se demander, comme a déjà pu le faire Habermas, si Castoriadis parvient à fournir une théorie satisfaisante pour une telle pratique.

2. Les sciences sociales et Castoriadis

L’étude des rapports que Castoriadis entretient avec les sciences sociales serait incomplète si nous ne nous proposions pas d’étudier le rapport des sciences sociales à Castoriadis.

D’autres suggestions heuristiques :

a. Nous pourrions étudier l’influence, déclarée ou non, de Castoriadis sur la pensée d’auteurs renommés de la sociologie contemporaine. Hans Joas a fait remarquer que la lecture de Castoriadis a été importante pour Alain Touraine. De même, nous pourrions nous intéresser à la lecture qu’en a faite Michel Freitag.

b. Parallèlement à l’étude des influences, nous pourrions interroger les proximités thématiques entre certaines recherches sociologiques ou historiques contemporaines et la conceptualisation du social-historique par Castoriadis. La notion d’« imaginaire » sur laquelle repose la théorie castoriadienne du social a-t-elle le même sens et le même rôle que la notion d’ « imaginaire » telle qu’on la trouve chez Charles Taylor ou bien encore dans les « sociologies de l’imaginaire » (Gilles Durand, Michel Maffesoli) ?

c. Au-delà des simples influences, emprunts et proximités thématiques, nous pourrions imaginer, certes de manière plus ambitieuse, ce que pourrait être un programme « castoriadien » de recherche en sciences sociales. Inversement, il serait opportun de comprendre les raisons de l’inexistence d’un tel programme. En effet, bien que certains chercheurs en sociologie clinique (Florence Giust-Desprairies) ou bien en ingénierie de la prévention du risque nucléaire (Didier Delaitre, Franck Guarnieri, Sébastien Travadel) fassent actuellement usage d’une terminologie ou d’une conceptualité d’inspiration castoriadienne, leurs recherches ne reposent pas à proprement parler sur une « méthode » castoriadienne. L’absence d’une telle méthode chez les chercheurs les plus susceptibles de l’adopter ou de l’élaborer ne serait-elle pas, finalement, la preuve d’une stérilité méthodologique de la théorie de l’imaginaire social de Castoriadis ?

Conditions de soumission

Les personnes intéressées à intervenir lors de cette journée d’étude sont invitées à nous envoyer

avant le 15 janvier 2017 

le résumé de leur communication à l’adresse suivante : ateliercastoriadis@gmail.com (entre 300 et 500 mots).

Date et lieu

17 et 18 février 2017, Université du Québec à Montréal

Comité scientifique et d’organisation

  • Geneviève GENDREAU, Université d'Ottawa, doctorante sociologie.
  • Thibault TRANCHANT, Université de Rennes 1/Université de Sherbrooke, doctorant, philosophie.

Lieux

  • Université du Québec à Montréal - 1255, rue Saint-Denis
    Montréal, Canada (H2X 3R9)

Dates

  • dimanche 15 janvier 2017

Mots-clés

  • Castoriadis, sciences sociales, imaginaire, social-historique, création, épistémologie, ontologie

Contacts

  • Geneviève Gendreau
    courriel : ateliercastoriadis [at] gmail [dot] com

Source de l'information

  • Geneviève Gendreau-Beauchamp
    courriel : ateliercastoriadis [at] gmail [dot] com

Pour citer cette annonce

« Castoriadis et les sciences sociales », Appel à contribution, Calenda, Publié le jeudi 10 novembre 2016, http://calenda.org/382484