AccueilLes élites politiques du Sud de la France et les conflits armés en Méditerranée de la Révolution française à nos jours

Les élites politiques du Sud de la France et les conflits armés en Méditerranée de la Révolution française à nos jours

Political elites from Southern France and armed conflicts in the Mediterranean world from the French Revolution until nowadays

Le élite politiche nella Francia meridionale di fronte ai conflitti armati nel Mediterraneo, dalla Rivoluzione francese ai nostri tempi

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Publié le lundi 31 août 2015 par Elsa Zotian

Résumé

L’objectif de ce colloque est d’éclairer la spécificité de la culture politique des élites méditerranéennes françaises, en analysant leurs réactions face aux conflits armés qui traversent la Méditerranée à l’époque contemporaine. Il s’intéressera essentiellement à l’attitude des élus au cours de ces conflits. Liée à leurs convictions politiques, religieuses, à des solidarités géographiques ou culturelles, elle interroge la façon dont ils relaient ou non la politique gouvernementale, leur gestion des répercussions de ces conflits sur le territoire, leur engagement personnel aux côtés de certains des belligérants, mais aussi les usages mémoriels de ces événements et les traces ou fractures durables qu’ils ont pu laisser.

Annonce

Colloque international organisé à Nice les 24 et 25 mars 2016

Argumentaire

Depuis 1789, les États riverains de la Méditerranée ont été affectés, à des dates diverses, par la montée des nationalismes et par un processus de modernisation importée et souvent contrainte qui déstabilise les structures socio-économiques traditionnelles. C’est l’une des raisons des nombreux conflits armés que connaît l’espace méditerranéen à l’époque contemporaine. Le sud a notamment été le théâtre des nombreux affrontements liés aux processus de colonisation puis de décolonisation, alors que le nord est l’un des points chauds des « guerres civiles européennes »  qui partagent le continent au cours des XIXe et XXe siècles. Elles opposent la « Civilisation » à la « Barbarie », le « Progrès » à la « Réaction », les « révolutionnaires » puis les « libéraux » aux « contre-révolutionnaires » ou « conservateurs », par la suite le « communisme » au « fascisme », les « résistants » aux « collaborateurs », etc. La dimension idéologique de ces luttes explique en partie leur caractère transnational. Il est éminemment sensible en France, une des puissances dominantes de cet espace. Le gouvernement proclame parfois une neutralité problématique, comme lors des événements italiens de 1860 ou de la guerre civile espagnole de 1936. En d’autres occasions, il s’implique activement dans ces affrontements, diplomatiquement ou militairement, même lorsqu’il n’en est pas l’initiateur ou l’un des principaux protagonistes. Ses choix suscitent des débats politiques intérieurs, auxquels participent les simples citoyens comme les forces politiques organisées. C’est particulièrement le cas dans le sud de la France (Algérie comprise durant la période coloniale), interface terrestre, via les Alpes ou les Pyrénées, ou maritime avec le reste de la Méditerranée. Particulièrement dans les zones frontalières, l’espace méridional apparaît ainsi selon les cas comme une base arrière, par laquelle transitent aides matérielles ou combattants, mais aussi comme un espace de repli, accueillant, au moins temporairement, les victimes de ces conflits, simples civils ou belligérants.

L’étude des élites politiques locales (principalement les élus comme les maires, les conseillers généraux, ou les parlementaires) apporte un éclairage essentiel sur ces formes d’implication dans les conflits méditerranéens. Leurs activités les amènent naturellement à faire face aux répercussions de tous ordres qui peuvent affecter leur territoire. Dans le même temps, leurs engagements politiques, syndicaux ou religieux, les affinités culturelles ou géographiques (songeons aux élus de Catalogne française par exemple) en font souvent des acteurs majeurs des formes de solidarité transnationales qui s’expriment lors de ces événements. Organisé par l’ANR ICEM, qui étudie les identités et les cultures des élites politiques en Méditerranée à l’époque contemporaine, ce colloque vise à éclairer leur rôle dans ces circonstances, et notamment montrer dans quelle mesure elles manifesteraient une sensibilité particulière lors de ces conflits. Pour ce faire, on privilégiera les approches suivantes, qui peuvent s’additionner ou s’articuler :

Les élites politiques, intermédiaires entre l’État et la population

Les élites politiques sont parfois les relais de la politique gouvernementale. C’est notamment le cas de fonctionnaires comme les magistrats, les militaires, les membres de l’administration préfectoral, et de ceux, parfois les mêmes, qui détiennent des mandats électifs, comme les maires ou les parlementaires. Les uns comme les autres sont souvent chargés de s’informer, de surveiller, ou de mettre en place à l’échelle locale certaines politiques gouvernementales : accueil des réfugiés, installation de services de l’État spécialisés, etc. Ces dernières n’ont parfois qu’une existence éphémère, mais ne peuvent-elles annoncer en diverses occasions les évolutions de l’action de l’État, en matière de contrôle des populations ou d’action sociale, par exemple ? Cependant les élites ne sont pas de simples relais, elles jouent aussi un rôle d’intermédiaire. Amenées à expliquer, à justifier ou à critiquer la politique gouvernementale auprès de la population, elles font aussi remonter à Paris les préoccupations de cette dernière, ce qui contribue parfois à infléchir l’action du pouvoir. La tribune parlementaire s’avère dans cette optique un lieu privilégié, mais on peut aussi songer aux multiples adresses, pétitions ou rapports rédigés ou propagés par les élites. L’étude de ces différentes questions pourra notamment être sous-tendue par une réflexion sur l’impact de ces relations entre l’État et les acteurs politiques locaux, sur l’intégration de ces derniers à une culture politique nationale, ou au contraire sur l’affirmation à cette occasion d’une spécificité méridionale.

Les élites politiques et la gestion des répercussions des conflits

Les élites politiques peuvent agir aussi indépendamment de l’État, voire en contradiction avec une politique nationale contraire à leurs convictions. Par ailleurs, ces conflits ont des répercussions particulièrement marquées dans le sud de la France. Ils mettent par exemple à mal certaines activités économiques, en stimulent d’autres, parfois clandestines. Les passages de volontaires ou l’installation plus ou moins durables de réfugiés ont aussi des conséquences socio-économiques importantes. Comment les élites gèrent-elles ces obligations, ces difficultés spécifiques ? On pourrait songer pour les maires à la question des certificats de décès des réfugiés ou autres individus de passage sur le sol de ces communes. Elles se présentent aussi bien dans le temps court lors d’événements paroxystiques que dans la longue durée. On s’interrogera sur la façon dont ces élites politiques y ont fait face, mais aussi sur les interactions entre ces tâches nouvelles et les autres obligations des élus. On s’intéressera tout particulièrement à la façon dont ces activités affectent leurs relations avec le pouvoir central et les autorités militaires, voire les amènent à nouer des contacts avec les protagonistes des pays voisins.

L’engagement des élites politiques dans ces conflits

Les élites politiques du sud de la France peuvent aussi prendre parti dans ces affrontements. Cette implication peut être directement liée aux fonctions publiques exercées, mais aussi ne se manifester qu’à titre privé. Aussi convient-il de prendre en compte non seulement les actions des individus exerçant des fonctions électives, mais aussi celles qu’ils ont pu avoir avant ou après l’exercice de leur mandat, voire celles d’acteurs majeurs de la vie politique méridionale (cadres de partis, journalistes, etc.). Les formes de ces engagements sont variables, synchroniquement et diachroniquement. Elles se bornent parfois à une prise de parole publique, dont on peut interroger les finalités : dans quelle mesure, par exemple, relève-t-elle d’une stratégie électorale ? L’implication peut être plus active, allant jusqu’au départ pour l’étranger, à travers des enrôlements militaires ou humanitaires. On pourra se demander dans quel cadre il s’effectue, et dans quelle mesure cette expérience devient après-coup un élément structurant le rapport à la politique, voire un argument électoral. L’engagement peut aussi prendre des formes intermédiaires, comme l’organisation de manifestations de soutien, les grèves, les collectes de fonds, les aides matérielles diverses ou la fourniture de documents administratifs. Ces actions impliquent souvent des rapports, notamment dans les espaces frontaliers, avec les élites politiques des autres pays méditerranéens. Cet engagement a pu être plus ou moins formalisé, avoir une dimension essentiellement individuelle ou au contraire s’inscrire dans des formes collectives, qui peuvent avoir une influence durable sur les liens de sociabilité, les réseaux électoraux et l’action des élus. Ces différentes interrogations permettent-elles plus fondamentalement de mettre en évidence une culture politique spécifique des élus méridionaux, marquée par l’attention particulière consacrée à la Méditerranée ? L’étude des interventions parlementaires des législateurs méridionaux peut s’avérer ici fort éclairante, de même que l’analyse de l’implication des méridionaux dans des réseaux nationaux voire transnationaux, ou de leurs rapports avec les acteurs politiques du reste de l’espace méditerranéen.

Les élites politiques et la mémoire des conflits

Cette spécificité culturelle des élites politiques méditerranéennes se manifeste-t-elle aussi sur le plan mémoriel, surtout lorsqu’une partie significative de leurs administrés ou de leurs ancêtres s’est trouvée impliquée dans ces conflits ? Se traduit-elle par des références durables des élites à des conflits passés, et au rôle qu’elles-mêmes, leurs ancêtres ou leur famille politique ont pu y jouer ?  On songe naturellement à la publication des mémoires, récits et autres écrits autobiographiques. On pourra aussi s’intéresser aux diverses cérémonies commémoratives, à l’odonymie, à la statuaire ou plus généralement à la constitution de lieux de mémoire spécifiques, mais aussi aux aides diverses dont ont pu bénéficier diverses communautés ou associations mémorielles. Il conviendra notamment de s’interroger sur l’implication des élus dans les affrontements autour d’un passé qui ne passe pas, ou au contraire leur volonté de pacification, en se demandant notamment si ces attitudes recoupent les lignes de clivage politique. Les guerres civiles espagnoles des XIXe et XXe siècles ou la guerre d’Algérie plus récemment pourraient notamment fournir des analyses substantielles.  Des perspectives comparatives seraient également les bienvenues, aussi bien sur le plan historique, par des comparaisons portant sur les mémoires de différents conflits, que sur le plan géographique, en comparant les points communs et les différences entre les mémoires qui s’expriment dans le(s) sud de la France et celles qu’on observe dans le reste de l’espace hexagonal, voire dans les pays voisins, on songe notamment à ceux où s’est déroulé le conflit armé initial.

Même si les études biographiques peuvent apporter un éclairage novateur sur ces différentes questions, on privilégiera les études collectives, consacrées aux solidarités ou au contraire aux rivalités qui se nouent sur ces sujets parmi les élites, ou entre celles-ci et le pouvoir central. Ces convergences ou ces oppositions peuvent résulter des opinions politiques des uns et des autres, de solidarités géographiques, religieuses, culturelles, etc. On retiendra tout particulièrement les approches qui confirment (ou infirment) l’existence d’une ou de culture(s) politique(s) spécifiquement méditerranéenne(s).

Conditions de soumission

Les propositions de communications sont à soumettre, de préférence en français, à : pierre.triomphe34@orange.fr et j-p.pellegrinetti@orange.fr

Elles ne devront pas excéder 5 000 signes et devront comporter un bref descriptif des sources envisagées.

Le dépôt des propositions s’effectuera jusqu’au 20 octobre 2015.

Les candidats seront informés de la décision du comité organisateur au plus tard le 15 novembre 2015.

Le comité organisateur s’engage à prendre en charge les frais de restauration et deux nuits d’hébergement. Les frais de voyage restent à la charge des participants ou de leurs Centres de recherche.

Comité scientifique

  • Pierre-Yves Beaurepaire (CMMC, Université Nice Sophia Antipolis),
  • Jean-Claude Caron (CHEC, Université de Clermont-Ferrand),
  • Bruno Dumons (LARHRA, CNRS Lyon),
  • Jean-Marie Guillon (TELEMME, Université Aix-Marseille),
  • Claire Marynower (IEP Grenoble),
  • Jean-Paul Pellegrinetti (CMMC, Université Nice Sophia Antipolis),
  • Simon Sarlin (ISP, Université Paris Ouest Nanterre La Défense),
  • Pierre Triomphe (CRISES, Université Paul Valéry-Montpellier III)

Partenaires

  • ANR ICEM ; CMMC (Université Nice Sophia Antipolis) ;
  • CRISES (Université Paul Valéry-Montpellier III) ;
  • TELEMME (Aix-Marseille Université)

Lieux

  • 98 bd Edouard Herriot
    Nice, France (06)

Dates

  • mardi 20 octobre 2015

Mots-clés

  • élites, guerre

Contacts

  • Jean-Paul Pellegrinetti
    courriel : j-p [dot] pellegrinetti [at] orange [dot] fr
  • Pierre Triomphe
    courriel : pierre [dot] triomphe34 [at] orange [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Adeline Beaurepaire-Hernandez
    courriel : adeline [dot] beaurepairehernandez [at] gmail [dot] com

Pour citer cette annonce

« Les élites politiques du Sud de la France et les conflits armés en Méditerranée de la Révolution française à nos jours », Appel à contribution, Calenda, Publié le lundi 31 août 2015, http://calenda.org/337798