Résumés
Le Parc national de Port-Cros et l’île de Porquerolles forment un ensemble «protégé» dont la protection est justement l’objet de controverses. Cet article a pour objectif de montrer la manière dont deux argumentaires distincts se sont construits localement sur les îles d’Hyères en s’articulant autour d’une idée centrale, celle d’un «endémisme» de deux ordres, culturel et naturel, objet de négociation entre le parc et les habitants, et ce, sur fond d’insularité et de préservation.
Les résidents permanents sont au nombre de trente-cinq sur Port-Cros et trois cents à Porquerolles. Nous présentons d’abord les tensions qui émergent entre les tenants d’une logique d’usage et ceux d’une logique de résidence, tensions qui sont générées par les discussions relatives au nébuleux concept de l’« ayant droit ». La difficile résolution de cette question de l’ayant droit a amené les habitants de Port-Cros et de Porquerolles à travailler sur un second front, celui de la reconnaissance de l’insulaire au titre « d’espèce endémique » comme les autres, démarche qui nous conduira, dans un second temps, à explorer les prémices d’une réflexion menée par les habitants sur la pertinence d’intégrer l’homme dans ce périmètre de nature. Port-Crosiens et Porquerollais aspireraient à être classés au titre d’« espèce Natura 2000» en raison de leur qualité d’« espèce insulaire menacée » (sic). Au-delà d’une part d’ironie et de l’aspect quelque peu provocateur de cette proposition se cache un réel souci de reconnaissance. Cette démarche, dans laquelle ils s’inscrivent résolument, ne relève pas d’une tentative de folklorisation de l’insulaire, mais puise plutôt dans un registre patrimonial. L’usage de ces deux types de catégorisation permet de mettre en lumière la manière dont peuvent être réinterprétés localement les textes législatifs et les statuts de protection en vigueur.
Endemisms…
The island Park of Port-Cros and the neighbouring island of Porquerolles, off the town of Hyeres on the southern coast of France, are both «protected» areas, but this protection is an object of controversy. This paper aims to show the way two distinct arguments were locally built on the islands and articulated to a central idea: the one of a double endemism, both cultural and natural, actively negociated between the Park and the inhabitants, on a background of insularity and conservation.
There are 35 permanent residents on Port-Cros and 300 on Porquerolles. We first present the tensions generated by discussions about the nebulous concept of « legal claimant » (ayant-droit) which arose between the upholders of rights of usage and those of rights of residence. The difficulties met in resolving this conflict led the inhabitants of Port-Cros and Porquerolles to invest a second front, the recognition of islanders as an « endemic species », thus raising the question of the relevance of integrating man into the perimeter of Nature. The inhabitants of Port-Cros and Porquerolles say they aspire to be classified as « Natura 2000 species » (referring to the Europe-wide network of natural heritage preservation sites) since they are a « threatened insular species » (sic). A real concern for recognition appears beyond the somewhat ironical and provocative dimension of their proposal. Their approach is not to attempt to «folklorize» the islanders but rather draws on the heritage register. The use of these two types of categorizations highlights the way in which the implementing of legislation and of a protected status can be locally reinterpreted.
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NdlR
Quand un parc naturel enclôt des habitants qui se revendiquent d’une culture insulaire, comment réagit la communauté ? Comment se situe-t-elle entre « espèce endémique » et « ayants droit juridiques » ?
Ce document sera publié en ligne en texte intégral en décembre 2010.
Plan
Contexte : une double insularité
L’ayant droit ou l’endémisme de « culture »
L’insulaire, homme endémique des îles
Du tacite à l’écrit, histoire d’un ordre négocié
Remerciements :
Je tiens à remercier les habitants de ces deux îles ainsi que le Parc national de Port-Cros et ses agents pour leur accueil et leur disponibilité dans le cadre de cette recherche.
Photo d’ouverture: Parc national de Port-Cros, 2008. © F. Joulian
Comment analyser les débats environnementaux ? Les acteurs en espaces naturels protégés apprennent à se servir des répertoires juridiques et scientifiques existants et se réapproprient certaines notions pour les investir de sens nouveaux et asseoir leur légitimité. Mon propos portant sur les « endémismes » revendiqués par eux s’inscrit dans le cadre d’une thèse entamée en mai 2007 sur les territoires gérés par le Parc national de Port-Cros (Fig. 1 et 2), recherche qui se situe dans la mouvance d’une anthropologie écologique mettant l’accent sur le principe de l’interaction, à l’instar de Roy Ellen pour lequel « the emphasis is now firmly on people as parts of larger systems, on culture in nature, on the cultural construction o (...)
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Pour citer cet article
Référence électronique
Aude Mottiaux, « Endémismes… », Techniques & Culture [En ligne], 50 | 2008, mis en ligne le 31 décembre 2010, Consulté le 26 décembre 2009. URL : http://tc.revues.org/3966
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