Résumés
Les espaces protégés sont des objets d’observation privilégiés, au sein desquels des logiques d’utilisation du territoire et des intérêts divergents s’expriment et les conflits se révèlent. En suivant les transformations des actions et des discours du Parc national des Écrins au fil de ces dernières décennies, cet article s’intéresse tout particulièrement aux politiques et aux rhétoriques à travers lesquelles cette institution est devenue un acteur du processus de construction de l’espace. Dans les premières années de vie du parc (années 1970), la « nature » apparaît comme étant au centre de ses préoccupations. Le passage de l’idée d’une nature à préserver à la notion de « patrimoine naturel » d’abord, et « culturel » ensuite, accompagne les transformations qui se sont produites dans les logiques et dans les formes de protection de la nature des années 1960 à nos jours. En même temps, il est le signe de changements, radicaux à certains égards, dans les rapports entre le parc et le contexte local.
Comment l’idée de nature se modifie-t-elle au sein de ce processus ? Quel sens prend-elle aujourd’hui ? Aux transformations des notions utilisées correspondent des changements de posture et d’actions, qui sont à leur tour révélateurs des changements survenus au niveau des enjeux (politiques et économiques). La vision patrimoniale de l’espace semble favoriser une prise en compte simultanée des aspects naturels et humains. Alors qu’au moment de sa création le parc était perçu au niveau local comme un obstacle au développement économique, la nouvelle vision patrimoniale lui permet de se présenter comme l’un des acteurs de ce développement et de réintroduire la dimension économique.
À travers la nature, l’environnement, les savoirs et les savoir-faire, tous connotés en termes culturels et patrimoniaux, les acteurs sociaux construisent différents niveaux d’identité et modèlent le territoire. Les politiques de la localité que le parc met en œuvre à travers ses actions et ses discours révèlent des jeux de pouvoir dans lesquels le parc est un acteur local parmi d’autres, tout en étant l’expression du pouvoir de l’État.
Economy and Power within the Parc National des Ecrins
Protected spaces are privileged objects for observing uses of territory, their logics as well as the divergent interests and conflicts around them. This article looks at changing actions and discourses in the Parc National des Ecrins over the last few decades, in order to examine the policies and rhetorics that have transformed this institution into an actor in the construction of space. In the first years of the park’s existence (1970s), “nature” appears to have been at the centre of its preoccupations. The shift from the idea of a nature that had to be preserved to the notion first of a “natural” and then of a “cultural heritage” accompanied the transformations of logics and forms of protection of nature from the 1960s until today. At the same time, it indicates the sometimes radical changes in the relations between the park and the local context.
How is the idea of nature modified within this process ? What does it mean today? Changes in notions correspond to changes in postures and actions, which in their turn reveal changed stakes (political and economic). The vision of space as heritage seems to favour the simultaneous consideration of natural and human aspects. While at the local level, the park was perceived at its creation as an obstacle to economic development, the new vision of heritage allowed it to present itself as one of the actors of this development and reintroduce the economic dimension.
Social actors construct different levels of identity and produce their space and place through nature, environment, knowledge and skills, transformed into heritage. This politics of locality shows the power competitions in which the park is one of the actors.
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NdlR
Cet article sur les Écrins retrace les processus de patrimonialisation de la nature et de définition de l’espace protégé, en déployant les logiques économiques et les enjeux politiques qui les accompagnent.
Ce document sera publié en ligne en texte intégral en décembre 2010.
Plan
La nature contre l’économie
Le patrimoine pour l’économie
Des limites qui changent
Remerciements :
Je tiens à remercier tout particulièrement les responsables et les personnels du Parc pour leur disponibilité et leur aide précieuse tout au long de mon travail. Une partie de cette recherche a été possible grâce à une bourse de la Fondation Fyssen.
© Parc national des Écrins, JF Dutilh, Géographisme
Les espaces protégés sont des lieux d’observation privilégiés, au sein desquels s’expriment des logiques d’utilisation du territoire et des intérêts divergents et à travers lesquels les conflits se révèlent souvent. En suivant les transformations des actions et des discours du Parc national des Écrins au cours des dernières décennies, il s’agit ici de comprendre et démêler une partie des luttes symboliques et réelles qui caractérisent son histoire. L’analyse se concentre sur les modifications de l’idée de nature et la qualification de cette dernière en termes patrimoniaux. Aux transformations des notions utilisées par le parc correspondent des changements de posture et d’ (...)
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Pour citer cet article
Référence électronique
Valeria Siniscalchi, « Économie et pouvoir au sein du parc national des Écrins », Techniques & Culture [En ligne], 50 | 2008, mis en ligne le 31 décembre 2010, Consulté le 26 décembre 2009. URL : http://tc.revues.org/3941
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