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Anonyme, Une Visite aux hôpitaux de Londres dans Revue des Deux Mondes, 5e période, tome 28, (p. 875-907) 1905


UNE
VISITE AUX HÔPITAUX
DE LONDRES

Juin. — La saison bat son plein. Les rues fourmillent de toilettes claires. Il est trois heures : tout Londres élégant est dehors. Au coin de Hyde Park et de Knightsbridge, les petits cabs rapides passent, presque enchevêtrés les uns dans les autres, tandis que j’attends l’omnibus bariolé de réclames qui me conduira vers le Royal Free Hospital.

Un long trajet dans ce véhicule amusant, et le bois goudronné de la route se change en durs pavés qui nous cahotent sans merci. Au coin de Gray’s Inn Road, nous descendons. L’artère large où montent des tramways nous laisse bientôt voir, à sa droite, un grand bâtiment à façade de briques. C’est là. Devant la voûte d’entrée, des dames en chapeau fermé, pauvres vendeuses venues des faubourgs, nous tendent des roses rouges, éclatantes et fraîches. Un miséreux me présente un grand lys, tout blanc, au parfum profond. Il en a toute une gerbe. Joli accueil. Est-ce sous ces auspices qu’on voit la maladie à Londres ?

Nous entrons. Dans la cour, grande et carrée, à droite une porte laisse voir un large escalier. Les marches de pierre en sont usées. Cet hôpital, l’un des premiers hôpitaux gratuits de Londres, date de 1828[1].

Premier étage : « Matron’s office, » le bureau de la directrice, de la matrone, puisque aussi bien notre français n’a pas de mot spécial pour qualifier la fonction. Une matrone ici a la charge morale de tout l’hôpital qu’elle dirige, — personnel et malades. — Le bataillon des nurses est sous ses ordres, et ce n’est pas une sinécure. La surveillance générale des services et des salles est sous sa responsabilité. A elle de veiller au bien-être des malades, à toute la bonne tenue de l’ensemble. A elle d’examiner les candidates infirmières, d’instruire de leurs devoirs celles qui sont acceptées, de juger ensuite si le certificat d’usage peut avec justice leur être décerné à la sortie.

J’ai parlé de bataillon, j’aurais pu dire armée, et la comparaison vaut dans les détails : même discipline, même régularité et le nombre y est. Chaque service a son colonel, une infirmière en chef ou surveillante responsable, sister, qui commande aux infirmières en pied, nurses et aux postulantes, probationers, chargées de l’aider. La proportion des gardes est de une pour trois malades. Cet hôpital en a 48 pour 160 lits environ. C’est un des petits hôpitaux de Londres. À ces infirmières, vivant dans l’hôpital, ajoutez trente femmes de service, qui viennent du dehors pour faire les gros ouvrages, le matin. Les nurses n’ont aucun nettoyage à leur charge, hormis les petites besognes que peut parfois entraîner le service direct d’un malade. Combien nous sommes loin du surmenage de France !

La matrone, miss W…, nous a fait un accueil charmant. Son petit salon élégant est plein de fleurs. Avec elle nous allons parcourir l’hôpital.

Une première salle, — et c’est gai comme un hôpital d’opéra ! Les lits sont espacés, pas plus de seize dans la grande pièce. Tout brille, les tables de bois verni, les cadres des tableaux couvrant les murs, les coiffes blanches des jolies nurses… tout sourit d’un sourire de convalescence joyeux. Et ce piano ? Est-ce donc une fête ? Quelle fée a passé là tout à l’heure et qu’a-t-elle apporté ?… Des fleurs, par gerbes, par brassées, des fleurs ont mis leur magie partout. Les roses rouges dans des jattes, les œillets sur toutes les tables, les jolis pavots clairs près de chaque malade et les grands lys blancs, fleurs de paradis, penchant leurs longues tiges assouplies, comme une protection, blancheur symbolique et qui ne détonne pas… Les grandes fenêtres ouvertes emportent le parfum, la brise en doit être chargée, aux alentours…

De cette salle, nous passons dans une autre. Même aspect. On est ébloui. Comment la mort ose-t-elle entrer là ?

Et d’autres salles encore. Il y a neuf services de seize à vingt lits chacun. Partout les gaies couleurs qui brillent, et le piano, et les fleurs. Mais la mort entre, cependant… Ici, elle est bien proche d’un enfant qui ne sourit plus. La fièvre qui le tient ne le quittera pas, le regard perdu n’est plus là. Je regarde la feuille qui pend devant le lit : broncho-pneumonie. Et l’organisme était chétif. De chaque côté du lit se tiennent les parens. Sur les genoux de la mère un bébé trop pâle suce gravement son biberon vide. Nous sommes bien dans un faubourg de Londres et la misère est proche.

Le petit malade a quatre ans environ : il est dans une salle d’hommes. Pas de service spécial pour les enfans, ici. Jusqu’à trois ans on les reçoit dans les salles de femmes. A partir de trois ans, on les répartit suivant leur sexe. Chaque service possède ainsi deux ou trois enfans de tous âges.

La visite des salles est terminée Nous voici au quartier des nurses. Chacune a sa chambre, petite et coquette, meubles vernis ou laqués, des bibelots, des livres et des fleurs : un enchantement partout !

Voici le salon de lecture. La petite bibliothèque est variée : Science et pratique chirurgicale. La vie en Chine. Traité des maladies du rein, et des romans. On est éclectique, ici ! Sur un divan, une jeune nurse est étendue, un livre à la main. Elle ne bouge pas à notre approche, elle se sent chez elle et dans son droit. C’est leur domaine, leur sanctuaire. Pas de fausse honte à être trouvée là, au repos. Chacune a trois heures de temps libre, chaque jour.

J’ai demandé à voir la salle d’opérations, l’amphithéâtre. Au rez-de-chaussée. Nous entrons. Autour du lit spécial, tout préparé, des jeunes filles, en blouse d’étudiantes, attendent en causant, groupées. Une opération va avoir lieu, le chirurgien est annoncé. Je devrais dire la chirurgienne, car voici une particularité de cet hôpital, les étudians y sont des jeunes filles et plusieurs des médecins en chef y sont des femmes. Les yeux

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  1. Il semble qu’il soit le premier fondé sur le principe de la gratuité absolue, si l’on en juge par le fait suivant, relaté à l’origine de son histoire : « Une nuit d’hiver de 1827, un jeune chirurgien, William Marsden, aperçut, étendue sur les marches du cimetière Saint-André, une pauvre fille de dix-huit ans à peine, malade et mourant de faim. Il la conduisit dans plusieurs hôpitaux, mais faute des papiers ou formalités nécessaires, et qu’une indigente ne pouvait facilement obtenir, tous lui refusèrent l’entrée. Repoussée de partout, elle mourut deux jours après dans un logement où il l’avait placée. » Suit l’histoire de la fondation de l’hôpital gratuit, provoquée par le Dr Marsden à la suite de ce fait pitoyable.