06 mars 2023

Réforme des retraites : le CDI senior, entre hold-up et effet d'aubaine !

Profitant du débat sur la réforme des retraites, la droite sénatoriale a voté un CDI senior concernant les 60 ans et plus. Celui-ci donnerait lieu une exonération de cotisation pour les entreprises et serait financé par ... un siphonnement de la branche famille de la Sécurité sociale.

En termes d'emploi des seniors, la seule question qui mérite d'être posée est : si un(e) salarié(e) est parfaitement compétent(e) pourquoi devrait-on, quel que soit son âge, aider financièrement les entreprises pour le(la) conserver à l'effectif  ou l'embaucher ? 

 

Et pourtant, pour les organisations patronales qui ont ardemment milité pour le report de l'âge de la retraite à 64 ans, cela tombe sous le sens. Car, au delà de n'avoir absolument aucune envie de prendre le moindre engagement concernant le maintien dans l'emploi des plus de 60 ans, au MEDEF comme à la CPME on ne cesse de réclamer des exonérations de cotisations pour conserver ou embaucher des seniors.

Les sénateurs de droite dont la proximité avec les organisations patronales n'est pas un secret viennent de leur donner raison en votant un « CDI senior » exonéré de cotisation familiale. Outre un hold-up sur les fonds de la branche famille de la Sécurité sociale qui selon le ministre des Comptes public serait au mieux de 800 millions et au pire de 2,2 milliards. Ce CDI version Sénat n'est ni plus ni moins que ce qu'on appelle un effet d'aubaine dénoncé, par le ministre qui indique que l'application de cette mesure mettrait la branche famille dans le rouge !

Nous saurons lors du retour du texte à l'Assemblée nationale si ce hold-up à effet d'aubaine est ou non validé. En attendant, les demandes des organisations patronales et le vote des sénateurs de droite sont des insultes aux seniors à qui on demande deux ans de travail en plus ! Encore une fois, si un(e) salarié(e) est parfaitement compétent, quel que soit son âge, pourquoi devrait-on aider financièrement les entreprises à le(la) recruter ?

On se demande quand et où la plaisanterie va s'arrêter.

Comme nous l'écrivions dans un précédent billet : « La réalité c'est que les organisations patronales et les entreprises qu'elles représentent n'envisageront de bouger qu'à partir du moment ou un gouvernement digne de ce nom conditionnera les aides aux entreprises dont le montant oscille entre 150 et 200 milliards à des mesures concrètes comme l'emploi des seniors »

Avec ce gouvernement et cette majorité, nous n'en sommes malheureusement pas là puisque la loi de finances pour 2023 a prévu une suppressionde la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) sur deux ans (2023-2024) sans aucune contre partie, vous vous en doutez bien.

Il n'est pas certain que les défilés et manifestations de demain seront déterminants pour faire reculer le gouvernement, sa majorité et les sénateur de droite. Il est clair que ce pouvoir, ses alliés de circonstance et les organisations patronales ne prendront conscience de la colère des salariés que lorsque le pays sera vraiment à l'arrêt. 

 

Crédit et copyright photo

Sénat  

28 février 2023

Réforme des retraites  : quand le patronat prend les seniors pour des jambons

 L'emploi des seniors est au cœur de la réforme des retraites bien que celui-ci ne soit pas la première préoccupation du gouvernement et des organisations patronales. La CPME fervent défenseur de la retraite à 64 ans qui s'opposait à un index seniors peu contraignant propose un «label» encore plus cosmétique.

La CPME n'a jamais fait mystère du fait qu'elle soutenait le report de l'âge de la retraite à 64 ans mais sans aucune obligation concernant les seniors en emploi ou au chômage. Si l'organisation patronale s'est dans un premier temps réjouie de ne pas être concernée par le timide index senior du gouvernement puisque celui-ci n'était applicable qu'aux entreprises de 300 à plus de 1000 personnes.

 

Elle nous a fait un « coup de calgon » en apprenant que cet index pourrait être appliqué aux entreprises de 50 personnes. Car ce dont la CPME ne veut pas entendre parler c'est une publication des effectifs qui pourrait éventuellement montrer le peu d'enthousiasme des PME à conserver leurs salariés âgés ou à en recruter.

La CPME a été en partie sauvée par le refus de vote de l'article 2 du projet de réforme concernant l'index seniors à l'Assemblée nationale. Néanmoins, dans la mesure ou le texte est au Sénat et que l'index seniors est réintroduit dans le texte, la CPME monte à nouveau au créneau au travers d'une interview de Jean Eudes du Mesnil du Buisson son secrétaire général sur Radio Classique.

Interrogé sur l'emploi des seniors, après avoir rappelé que son organisation considère que pour conserver les seniors à l'effectif jusqu'à 64 ans il faut une baisse de cotisation. il a bien entendu dénoncé l'index seniors et proposé de le remplacer par un … « label senior » qui serait : « un dispositif incitatif qui permettrait de mettre en avant les entreprises vertueuses en matière d’emploi des seniors » Et pourquoi pas une AOC tant qu'on y est ou même un label rouge comme le jambon ?

Les mauvais esprits, au sens patronal du terme, dont je fais partie feront remarquer que ce « label » ne fait aucune référence à la qualité des emplois, à l'adaptation des horaires ou des postes de travail ou de formation. Conditions essentielles pour permettre aux salariés de 57 ans et plus d'atteindre les 64 ans réclamés à cor et à cri par la CPME. Mais qu'à cela ne tienne, à la CPME on a du beaucoup s'amuser de cette nouvelle trouvaille dont monsieur du Mesnil du Buisson nous a fait part.  

Alors, que les sénateurs votent ou pas un index senior limité ou pas à 300 ou 50 salariés ne changera pas les choses. Les entreprises ne font et ne feront aucun effort pour maintenir les 57 à 64 ans dans l'emploi. Et ça, c'est une réalité beaucoup moins cosmétique que les index ou labels. La légende du bien vieillir au travail reste une imposture !

15 février 2023

Emploi seniors : oui les entreprises ont une obligation !

Si les organisations patronales ont milité pour le report de l'âge de la retraite, elles refusent toute forme de contrainte sur l'emploi des seniors. Or sans obligation ni contrainte pour les employeurs ce sont des milliers de salariés en fin de carrière qui vont plonger dans la précarité.

Les députés viennent de rejeter l'index senior, seule proposition du texte du gouvernement sur l'emploi des seniors. Cette mesurette dont organisations patronales et syndicats de salariés ne voulaient pas, pour des raisons bien différentes reposait sur le seul aspect déclaratif des effectifs. En effet, le patronat n'en voulait pas pour des raisons de « complications administratives » et les syndicats parce cela ressemblait surtout à un cautère sur une jambe de bois.

Nul doute que l'avenir des seniors confrontés au report de l'âge de départ à la retraite méritait mieux. Surtout que le MEDEF et la CPME après avoir chanté les louanges du report à 64 ans se trouvent dans l'obligation de montrer que les entreprises ont la volonté de conserver à l'effectif des seniors dont elles avaient pris l'habitude de se délester, entre 55 et 57 ans, au travers de ruptures conventionnelles individuelles ou collectives. Sans oublier le recrutement de seniors sans emploi, du même âge, les plus exposés au chômage de longue durée.

Problème : si les organisations patronales se sont réjouies du report à 64 ans, pas question de prendre quelque engagement que ce soit.

Un exemple ?

L’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) qui, rappelons le regroupe les entreprises françaises de la métallurgie et représente (selon ses chiffres) 42 000 entreprises et 1 600 000 salariés citée dans un article du Parisien : « L'UIMM a mis en garde contre le « coût financier que représente pour les entreprises l’allongement de la durée de vie au travail …  L’UIMM ne peut pas « admettre que cette réforme entraîne des coûts supplémentaires pour les entreprises, en particulier celles de l’industrie qui souffrent déjà d’un retard de compétitivité significatif par rapport à leurs concurrents, y compris Européens ...» 

Du côté de la CPME, alors que ses dirigeants nous expliquent, avec des sanglots dans la voix que lorsqu'un senior par en retraite, c'est une partie de mémoire de l'entreprise qui s'en va. On n'a aucun complexe à réclamer : « une exonération des cotisations patronales au régime d’assurance chômage durant la période d’emploi d’un senior » pour leur maintien dans l'emploi. Les sanglots ont une limite … financière.

Dans l'immédiat, il faudra se contenter de petites phrases du genre : « Nous savons qu'il faut que nous nous attelions à la question de l’emploi des seniors» prononcée par la porte parole du MEDEF

Faites nous confiance répètent en chœur les organisations patronales à la manière du serpent Kaa du livre de la jungle. Qui est assez naïf pour croire à ce discours ?

La réalité c'est que les organisations patronales et les entreprises qu'elles représentent n'envisageront de bouger qu'à partir du moment ou un gouvernement digne de ce nom conditionnera les aides aux entreprises dont le montant oscille entre 150 et 200 milliards à des mesures concrètes comme l'emploi des seniors.

Alors, oui, les entreprises qui ont bataillé pour reporter l'âge de départ à la retraite ont une responsabilité qu'elles doivent assumer au minimum jusqu'au 64 ans de leurs salariés. Oui, les entreprises ont une responsabilité vis à vis des chômeurs seniors qu'elles doivent mettre sur un pied d'égalité en termes de recrutement avec tous les autres demandeurs d'emploi, jusqu'à leur départ à la retraite.

Faute de quoi dans quelques années, on recommencera les bricolages statistiques basés sur des seniors en formation sans issue ou en invalidité temporaire et surtout des milliers de seniors en fin de droits qui deviendront suivant le terme dévolu : NERP (ni emploi ni retraites ou en préretraite ) et dépendront uniquement des aides sociales.

Alors, Mesdames et Messieurs du gouvernement et des organisations patronales qui voulez faire travailler plus longtemps les salariés à vous de nous montrer que le terme responsabilité que vous aimez tant utiliser n'est pas un vain mot. 

 

Crédit et copyright photo

HHR 

13 février 2023

Retraites : mettre la capitalisation à la porte et la voir revenir par la fenêtre !

Réforme des retraites oblige, on peut lire ça et là des opinions ou prises de paroles présentant la capitalisation comme un des outils dans le cadre de la réforme des retraites. La France a pourtant déjà donné avant le choix de la répartition. Quel est l'enjeu pour les promoteurs de la capitalisation ? Un pactole fabuleux sur lequel lorgnent tous les organismes financiers.

Cela fait des années que sur Slovar les Nouvelles nous évoquons les propos des laudateurs de la retraite par capitalisation. Qui sont-ils ? Des économistes et officines libéraux, quelques politiques convaincus par ceux-ci et les organisations patronales, MEDEF en tête auquel les bancassureurs sont adhérents (Fédération Bancaire Française et France Assureurs)

 


L'idée relayée régulièrement et depuis le début des débats sur la réforme des retraites est la suivante : Mettre en place des fonds de pension « à la française » obligatoires dans lesquels tous les salariés épargneraient durant toute une vie de travail pour obtenir un complément individuel de retraite. Ceci ayant pour but, selon eux, de régler le problème des retraites dans le futur. 

L'épargne retraite par capitalisation existe déjà sous plusieurs formes : contrats d'assurance vie, PERP, PERCO et depuis peu PER. Leur particularité ? C'est qu'ils reposent sur le volontariat. Or, on pouvait lire dans une tribune publiée dans Les Echos : « Bien que les ménages Français soient les champions de l’épargne, celle des retraites reste paradoxalement marginale … » Et c'est là que le bât blesse pour tous les organismes financiers ! Car, si on compare l'encours PER, celui des Livrets A et LDD et l'assurance vie qu'observe t-on pour 2022 ?

PER individuels : 43,6 Milliards d’euros.

LivretA et LDD : 500 milliards d'euros.

Assurancevie : 1848 Milliards d'euros

Victoire sans appel des placements les plus souples. Ce qui énerve prodigieusement les promoteurs des produits de retraite par capitalisation. C'est pourquoi la petite musique du « pilier obligatoire de capitalisation » revient sur le devant de la scène. En effet, puisque les plans d'épargne retraite ne séduisent pas assez de gens, rendons les obligatoires pour tous les salariés.

Le seul problème, c'est que comme toute épargne, la capitalisation est liée aux revenus des salariés et aux divers aléas de la vie professionnelle. De plus celle-ci pour être efficace réclame comme tout placement de longue durée un effort constant. Or, qui aujourd'hui peut prédire ce que sera sa trajectoire professionnelle ou personnelle dans 20, 30 ou 40 ans ? Qui peut affirmer que les marchés financiers, sans la garantie de l'état seront en mesure de servir des pensions correctes sur la même durée ?

Certains s'appuient sur les rapports du COR (Conseil d'orientation des retraites ) pour mettre en avant la capitalisation comme outil complémentaire de la retraite par répartition. Nous avons retrouvé ce qu'écrivait (page 14) le Conseil d'orientation des retraites dans un document de travail : « Capitalisation et répartition dans l’histoire du système français des retraites avant 1945 - Séance plénière du 15 décembre 2022 »

« Le vice fondamental des systèmes de capitalisation est qu’ils vendent de l’avenir en le faisant payer par du présent. Tout le monde peut spéculer sur l’avenir mais seule la spéculation à court terme est relativement fiable. À long terme il n’y a pas de futuribles solides. Pourquoi enfermer une population tout entière dans un risque que les utilisateurs n’ont pas la faculté personnelle d’évaluer ? 

Or, l’horizon d’une vie de travail est de 30 à 40 ans, et c’est aussi le délai pour qu’un
système en capitalisation atteigne sa maturité. Calculée sur un terme long, elle est un pari »

Les chantres de la retraite par capitalisation savent parfaitement qu'ils n'arriveront pas à l'imposer dans l'immédiat. Par contre, au gré du report de l'âge légal de la retraite qui n'en doutons pas, augmentera encore de deux ans à l'horizon 2030, la cible des jeunes générations est quasiment acquise. Et dès lors, lassés, ces générations seront demandeuse de plus de capitalisation.

Qu'est ce cela changera ? Pour les petits salaires ou ceux qui auront subit des périodes sans emploi ce sera une pension complémentaire minable malgré un sacrifice financier important. Pour les organismes financiers collecter et gérer des fonds captifs sur de telles durée ce sera un pactole colossal.

Aux salariés de savoir si après avoir fermé la porte à la rente des organismes et marché financiers ils souhaitent ou non leur fermer la fenêtre


08 février 2023

Pôle Emploi : jouer au ballon pour postuler à un emploi ?

 A Vannes, en Bretagne, les équipes de Pôle Emploi ont organisé une rencontre de basket entre chômeurs et recruteurs. Nom de cette initiative : « du stade à l'emploi ». Enjeu : trouver du personnel pour des entreprises de burgers ou de bricolage.

C'est le supplément économique du journal du Parisien du 8 février qui nous l'explique : : « le jeudi 26 janvier, sur le terrain de basket, sept équipes d'une petite dizaine de joueurs qui ne se sont jamais vus ... Leur particularité ? Les trois quarts sont des demandeurs d'emplois et le reste des recruteurs … mais personne ne sait qui est qui »

 


En lisant ce matin cet article, j'avoue avoir manqué de lâcher ma tasse de café.

Pour avoir connu au cours de ma carrière professionnelle quelques passages par Pôle Emploi et avoir été ballotté d'un stage de recherche d'emploi dont le but était de « rechercher au fond de soi les raisons de son échec. » à un stage de motivation au cours duquel un « formateur » nous expliquait que : « la recherche d'un emploi est un métier à plein temps », que nous n'avions « aucune méthodologie » et que nous étions « responsables de notre sort ». Le tout ponctué par un coup de téléphone par an, sachant que ma conseillère attitrée suivant environ 400 personnes. Je me demandais si les méthodes de Pôle Emploi avaient changé, du moins évolué. Oui et de quelle façon !

La réforme de l'assurance chômage ayant diminué les droits de tous les chômeurs de 25 % depuis le 1er février et les radiations à Pôle Emploi ayant atteint un record en 2022 il faut donc comme l'explique le gouvernement mettre en place rapidement des solutions pour arriver au « plein emploi ». 

Mais revenons à Vannes ou des postes étaient à pourvoir. 80 très exactement selon l'article du Parisien. Quelles étaient les entreprises qui proposaient des postes : le CCAS de Vannes, Burger King, Leroy-Merlin, E. Leclerc, Mc Donald's et l'Armée de terre.

Dans cette situation, on pourrait penser qu'il suffisait à Pôle Emploi de croiser ses fichiers de demandeurs avec les offres et d'adresser des candidats pour entretien aux entreprises. Or, comme l'explique le Parisien, l'équipe locale de Pôle Emploi a préféré organiser une journée du type « patron incognito ».

Extrait du programme de la journée : « 10H30 : après avoir revêtu des maillots de différentes couleurs et des petites pancartes avec leurs prénoms, les joueurs procèdent à un petit échauffement avant d'alterner … différents ateliers. Dans celui-ci, ballon en main, on doit fermer les yeux et et réaliser un parcours d'obstacles guidé par son binôme » du côté des recruteurs on trouve ce jeu : «  … d'observation et de communication très sympa » Une autre recruteuse indique : « on voit rapidement qui a l'esprit d'équipe, qui est moins à l'aise pour prendre le lead ...c'est une belle façon de rencontrer des postulants à mon sens »

L'article indique que les recruteurs ont pris beaucoup de plaisir au cours de cette rencontre mais n'indique pas le niveau d'humiliation auquel les demandeurs d'emploi ont été soumis en fonction de leur adresse ou de leurs capacités physiques. Il n'indique pas non plus combien ont obtenu un des postes proposés ni ce qu'on ressenti ceux qui, à l'issue de cette pitrerie, ont échoué à cet exercice.

Pour ceux-là ce sera le stage de motivation au cours duquel on mettra en avant leur manque d'implication ? Les motivera t-on pour la prochaine initiative qui pourrait être basée sur une course en sac, du tir à la corde et pourquoi pas de la boxe Thaï ? Et pourquoi pas, puisque c'est à la mode une journée de survie en forêt ?  Enfin sachez que ce nouveau genre de job-dating existe depuis 2020, en Rhône-Alpes, basé lui, sur ... l'athlétisme.

 Le bilan ? On l'ignore. Mais visiblement les équipes de Pôle Emploi et les recruteurs prennent beaucoup de plaisir. Quant aux demandeurs d'emploi ....


Crédit et copyright photo

Opération le 22 novembre à Lannion 

Le Télégramme  

03 février 2023

Emploi des seniors : Poker menteur entre le gouvernement et le patronat

L'index senior du gouvernement dans le cadre de la réforme des retraites met en fureur les organisations patronales. Auraient-elles peur de voir révéler que les seniors font de moins en moins partie de leurs effectifs et que l'argument du sauvetage du système des retraites n'est qu'une parfaite hypocrisie ?

Perdre son emploi au delà de 55 ans est la pire des choses qui puisse arriver à un salarié. En effet, c'est l'âge où les entreprises brandissent leurs habituels arguments sur le manque de formation, d'adaptabilité, de risque de maladies et de prétentions salariales trop élevées. Pour vendre sa réforme, le gouvernement insiste sur les moyens de maintenir les seniors dans l'emploi jusqu'à 64 ans et plus. Problème, les entreprises qui soutiennent la réforme se défilent. 

 


Le 24 janvier dernier, nous évoquions l'unique solution proposée par le gouvernement : un index seniors. Cet index, applicable dans un premier temps aux entreprises de 1000 salariés devait être étendu à celles de 300. Rappelons que cet index est une mesurette cosmétique et qu'une éventuelle sanction serait appliquée aux seules entreprises qui refuseraient de le publier. Les PME qui représentent la majorité des entreprises se trouvaient majoritairement exclues du dispositif et n'avaient donc aucun compte à rendre sur leurs effectifs.

Les syndicats de salariés ainsi que nombre d'élus de tous bords se sont élevés contre le peu d'impact de cette mesure ce qui a poussé plusieurs ministres dont la Première à envisager d'élargir l'index en dessous de 300 salariés et hier soir à évoquer, éventuellement, le chiffre de 50 salariés.

Fureur du président de la CPME dans un communiqué de presse : « Placer les PME sous surveillance en brandissant la menace de sanctions ne résoudrait en rien le problème. Et ne ferait qu’instituer de la défiance au lieu de rétablir de la confiance. Les petites entreprises ne peuvent ni ne doivent servir de variable d’ajustement dans le débat parlementaire en cours »

Le même président égratignant au passage les grandes entreprises adhérentes au concurrent MEDEF : « Et ce, d’autant plus qu’il est évident que les « plans de départs volontaires » incitant les seniors à quitter l’entreprise, ne les concernent pas  (les PME)» 

A notre connaissance, pour l'instant, la seule variable d'ajustement ce sont les salariés à qui on veut imposer deux ans de travail supplémentaires. De plus, les sanctions concerneraient le refus de publication de l'index. Alors pourquoi cette réaction ?

Tout simplement parce que la CPME, comme le MEDEF, craint que l'index ne révèle le fait que les entreprises quelle que soit leur taille, ne jouent pas le jeu du maintien de l'emploi des seniors. Dans ce cas, à quoi aura servi cette réforme si ce n'est pousser un peu plus de seniors vers la précarité ?

La réalité c'est que les entreprises adhérentes ou non au MEDEF ou à la CPME n'ont absolument aucune envie de prolonger les seniors à l'effectif ou d'en recruter. Et les organisations patronales le savent. C'est pourquoi elles jouent les vierges effarouchées et promettent monts et merveilles à condition de les laisser faire et de percevoir de nouveaux subsides de l'état.

La CPME parle de "pragmatisme" en opposition au "dogmatisme" qui animerait le gouvernement.

C'est au nom de ce fameux pragmatisme que moins de 35% des salariés à partir de 60 ans ont encore un emploi. C'est au nom de ce pragmatisme que la plupart des seniors proches de la retraite pointent à Pôle Emploi ou perçoivent les minima sociaux en attendant le départ à la retraite.

La technique du : « c'est pas moi c'est l'autre » et celle du : «nous avons un travail important à faire pour améliorer les choses à condition que l'état nous verse des subsides » ont des limites. Celles du respect des salariés qui ont donné 30 ou 40 ans de leur vie à des entreprises et se retrouvent dans un no man's land.

Si le maintien des seniors dans l'emploi demande autant de temps aux entreprises pourquoi n'ont t-elles pas travaillé sur le sujet depuis longtemps ? Si un senior remplit parfaitement sa tâche sur la durée pourquoi l'état diminuerait- il leurs cotisations sociales ?

Le Président de la République et son gouvernement savent parfaitement, chiffres à l'appui, que les entreprises ne feront aucun effort en contrepartie du report de l'âge de départ à la retraite. L'index senior fera long feu, les entreprises satisfaites expliqueront qu'elles ont encore besoin de plus de temps pour mettre en place des dispositifs seniors et en appelleront à l'état pour les financer … CQFD !

 

Autres sources

Interview Vidéo  du Président de la CPME


01 février 2023

Nouvelles règles d'indemnisation du chômage : la machine à fabriquer des précaires !

 

C'est à partir d'aujourd'hui que s'appliquent les nouvelles règles de l'assurance chômage. Au menu : baisse de la durée d'indemnisation pour tous et précarité à la clé.

L'argument du gouvernement pour justifier les nouvelles règles d'indemnisation du chômage est le suivant : « faire face aux difficultés de recrutement des entreprises et atteindre le plein emploi d'ici 2027 » nous explique Europe1

J'expliquais, dans un précédent billet que la « pénurie de candidats » évoquée par les organisations patronales et le gouvernement qui est sans commune mesure avec le nombre de chômeurs (catégories A, B, C) est liée, en grande partie, au fait que la majorité des emplois dits en tension sont proposés par des secteurs qui ne trouvent pas preneurs depuis des décennies ou qui proposent des conditions de travail peu attrayantes (horaires décalés, délirants ou partiels ) et surtout mal rémunérées.

Qu'à cela ne tienne. Le gouvernement, sous la pression des organisations patronales, qui affirme atteindre le plein emploi à court terme a décidé de s'en prendre aux chômeurs. Si la machines à radiation a fonctionné a plein régime, c'est maintenant au tour de la durée d'indemnisation d'entrer dans la danse.

Que se passe t-il concrètement à partir de ce 1er février 2023 ?

La réponse se trouve sur le site du ministère du travail : « À compter du 1er février 2023, à l’ouverture du droit en métropole, la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi sera réduite de 25 % par rapport aux règles applicables antérieurement, tout en restant toujours supérieure à 6 mois. A l’expiration de son droit, le demandeur d’emploi pourra bénéficier d’un complément de fin de droit prolongeant sa durée d’indemnisation en cas de dégradation de l’état du marché du travail, c’est-à-dire lorsque le taux de chômage dépasse 9 % ou en cas de dégradation très rapide de la situation du marché du travail »

En clair : la fin de droits va intervenir plus vite pour tous les chômeurs! Mais quid des chômeurs seniors qui risquent en plus d'être d'être impactés par le report de l'âge de la retraite  ?

Denis Gravouil, négociateur pour la CGT de l’assurance-chômage en expliquait dans le journal La Marseillaise les conséquences : « Parmi les plus touchés : les seniors qui, à plus de 55 ans, avaient 36 mois d’allocation-chômage, cela va se réduire de 25 % et donc passer à 27 … Des gens qui ont 55 ans au 1er février qui auront été licenciés ... n’auront que 27 mois ... »

Le MEDEF comme la CPME promoteurs de ces nouvelles règles ainsi que celle du report de l'âge de la retraite à 64 ans sont peu prolixes sur le sujet avec, toutefois, quelques propositions carrément outrancières.

Du côté du MEDEF on propose : « …  le versement par Pôle emploi (ou l’assurance chômage) d’une “aide compensatoire” aux seniors (jusqu’au moment du départ en retraite) qui acceptent un emploi moins bien payé que leur travail précédent »

La CPME de son côté, propose, entre autre : « … une exonération des cotisations patronales au régime d’assurance chômage durant la période d’emploi d’un senior ... »

Ces propositions sont particulièrement insultantes envers ceux qui ont 55 ans ou plus et ont perdu leur emploi, très souvent pour des raison indépendantes de leur volonté mais dont les entreprise ne veulent pas pour des raisons de « manque de compétence » de « risque de pathologies » et bien entendu de salaires « trop élevés » En fin de compte, les organisations patronales se comportent dans cette affaires comme de vulgaires chasseurs de primes.

Mais il est vrai que les entreprises y ont pris goût. Il n'y a qu'a regarder le dévoiement de la formation en alternance (apprentissage) montré du doigt par la Cour des comptes : « Favorisé par les aides exceptionnelles versées aux employeurs d’alternants depuis l’été 2020, l’essor sans précédent des entrées en apprentissage - + 98 % depuis 2019 - a surtout concerné les formations après le baccalauréat, destinées à des étudiants pourtant moins concernés par les difficultés d’insertion sur le marché du travail que les jeunes de niveau CAP ou baccalauréat. Cet essor a entraîné plus qu’un doublement des dépenses associées, qui devraient atteindre 11,3 Md€ en 2021, en grande partie à l’origine de l’impasse financière que connaît actuellement le système d’alternance et de formation professionnelle »

Vous conviendrez qu'avec une telle opportunité, embaucher un chômeur qui n'apporte pas de subsides a beaucoup moins d'intérêt.

Et que deviendront-ils les chômeurs qui n'apportent pas de « dot » ?

Eh bien, ce sera pour beaucoup, la précarité des petits boulots sans lendemain avec, pour horizon le RSA qui sera, bien entendu, à court terme, conditionné à 15 ou 20h d’activités hebdomadaires. Sachant qu'en cas de non-respect de cette condition d’activité, les bénéficiaires pourront voir leurs allocations diminuer voire disparaître en attendant, peut être d'avoir 64, 65, 66 ou 67 ans pour partir en retraite

La machine à fabriquer des précaires est en marche, à nous de l'arrêter !

 

Crédit image

BERTH Dessinateur

27 janvier 2023

Pénuries de candidats : aux entreprises de se remettre en question !

Le gouvernement et les organisations patronales hurlent à la pénurie de candidats dans certains métiers ou branches d'activité en oubliant de reconnaître que celle-ci est directement liée à des conditions de travail difficiles ou de faible rémunération. 

 

Souvenez-vous, il y a encore peu de temps, vous aviez beau envoyer des tonnes de CV aux entreprises, vous ne receviez au mieux qu'un message laconique de refus et le plus souvent aucune réponse. À la même période, les CDD de courte durée étaient légion et le montant des salaires à son plus bas niveau. Aujourd'hui, si vous écoutez nos gouvernants et les organisations patronales, ceux-ci ne parlent plus que de pénurie de candidats. 

 


Pénurie à comparer toutefois avec les chiffres du chômage au quatrième trimestre 2022 : « … le nombre de personnes inscrites à Pôle emploi et tenues de rechercher un emploi (catégories A, B, C) s’établit à 5 113 400... »

Si nous excluons les éternels moutons à cinq pattes du type : data scientists, analystes des données ou plus exotique : les métiers du metavers, quels sont les secteurs les plus demandeurs ?

Prenons comme référence un dossier réalisé en 2022 par France Bleu et France 3. Extraits : « En dehors des emplois saisonniers, les métiers les plus recherchés sont les métiers des services aux entreprises, comme les agents d’entretiens de locaux, les ouvriers non qualifiés de l’emballage et les manutentionnaires. Les métiers de l’hôtellerie-restauration ainsi que ceux du soin et de l’accompagnement, notamment les aides à  domicile et aides ménagères, sont également très recherchés  »

Pour mémoire, France Info publiait en 2013 l'article suivant : « Les métiers en tension d'ici 2015 »

Quels étaient-ils ?

« Hôtellerie, restauration, aide à domicile, commerce : cette France qui recrute ... En tête : les assistantes maternelles et aides à domicile, les agents de service et d'entretien … » Ce à quoi on peut ajouter : les transports et le BTP

En résumé, le temps passe mais certains métiers continuent d'être fuis. Les raisons ? Elles sont connues : horaires décalés, délirants ou partiels, accélération des cadences, manque de respect et salaires trop faibles. Ajoutons à cela les difficultés de vieillir dans ces métiers où plus qu'ailleurs l'usure professionnelle est la règle. Et bien que notre Président n'aime pas le mot pénibilité, c'est pourtant bien ce mot qu'il faut utiliser le tout sur fond de report de l'âge de la retraite à 64 ans.

Pénurie de candidats ? Oui, vous répondront les entreprises mais surtout de candidats : « jeunes, flexibles, mobiles et bien formés ». Et les seniors expérimentés dont les entreprises se sont séparés en utilisant des ruptures conventionnelles individuelles puis collectives ? Il sont encore nombreux ces 55 ans à 60 ans à galérer pour trouver un emploi.

Car ne nous voilons pas la face, si les entreprises pleurent misère, on ne peut pas dire qu'elles sont très motivées à l'idée conserver ou d'intégrer des seniors à l'effectif. Nous en avons pour preuve la dernière intervention de Dominique CARLARC'H la porte parole du MEDEF qui déclarait  : « Nous savons qu'il faut que nous nous attelions à la question de l’emploi des seniors, parce que, mise à part la crise de l'énergie, un de nos principaux problèmes c'est le recrutement » Comme par hasard, cette déclaration fait suite à des menaces de sanctions sur l'emploi des seniors dans le cadre du passage à 64 ans que le MEDEF, notamment, a soutenu.

Bref, en attendant que les organisations patronales et leurs adhérents veuillent bien se pencher sur l'avenir professionnel des seniors, une certitude : la pénurie de candidats va continuer de façon durable, quel que soit le contexte économique. Le monde a changé. Le dialogue social façon : « mon bureau vous est toujours ouvert … mais là j'ai pas le temps » n'est plus une réponse. Les conditions de travail et la considération sont aujourd'hui, pour les salariés, aussi importantes que la rémunération.


24 janvier 2023

Retraite et index seniors  : cynisme ou foutage de gueule  ? Les deux mon capitaine !

 L'emploi des seniors en France est parmi les plus faibles des pays de l'OCDE. Alors que le chômage fait rage dans cette partie de la population en fin de carrière le gouvernement vient de dégainer sa solution  : un index seniors.

C'est un chiffre que plus personne ne conteste  : 65 % des travailleurs âgés de 60 à 64 ans ne sont plus dans l'emploi. La très grande majorité est au chômage avec, pour les mieux lotis les indemnités de l'assurance chômage et pour un certain nombre d'autres le RSA.



Lorsqu'on évoque la situation de l'emploi des 50 ans et plus avec les organisations patronales, favorables, rappelons-le, au report de de l'âge de départ à la retraite à 64 ans on obtient en général un florilège de lieux communs que j'ai déjà évoqué dans un billet de 2014

Ils sont plus sujets que les autres aux maladies : Cet argument est aussi sordide que celui qui consiste à éliminer des femmes jeunes au fait qu'elles ont des enfants en bas âge ou qu'elles pourraient être enceintes. En gros un plus de 50 ans ça risque plus de pathologies lourdes qu'un jeune. C'est, nous l'ont affirmé des employeurs ou DRH, sous le sceau du secret, un critère d'élimination fréquent.

Ils ont des prétentions salariales trop importantes : C'est dommage pour les employeurs, mais jeune avec 20 ans d'expérience, ça n'existe pas encore. Et l'expérience, ça a un prix. Toutefois, essayez si vous êtes un senior au chômage de proposer de travailler au SMIC (ça été mon cas) pour redémarrer, vous verrez vite que l'objection du salaire élevé n'était qu'une allégation mensongère.

Ils ne maîtrisent pas les outils de communication modernes : C'est de moins en moins vrai ! En effet, l'utilisation des nouvelles technologies est de plus en plus répandue en entreprise et les 50 ans et plus les utilisent aussi bien à titre professionnel que personnel (ordinateurs, tablettes, smartphones). En admettant que certains employés ne soient pas parfaitement familiers des nouveaux outils de communication, rien n'empêche de les former ! Encore une fois, il s'agit d'une allégation mensongère

Face à ce blocage, que propose le gouvernement  ?

Un "index senior" qui calculerait par entreprise le taux d'emploi des plus de 60 ans comme nous l'explique le site de BFM. Comment cela fonctionnerait-il  ?

«  ...Cet index mesurerait l'évolution des embauches et de l'emploi des seniors dans l'entreprise, mais sans être contraignant comme l'index de l'égalité professionnelle, qui peut donner lieu à des pénalités financières allant jusqu'à 1% de la masse salariale. Une manière de pointer les bons et les mauvais élèves sans les sanctionner en bonne et due forme. La locataire de Matignon demande tout de même aux "entreprises, de se saisir (du) sujet" de l'emploi des seniors et demande aux employeurs redonner de "toute leur place aux seniors" dans leurs entreprises … » Ajoutons que cet index ne serait applicable qu'aux entreprises de plus de trois cent salariés ce qui exclut la très grande majorité des entreprises.

En résumé : un machin pour lequel les plus grandes entreprises obtiendront des dérogations auprès de Bercy dans la mesure où le MEDEF a d'ores et déjà hurlé à la mort à l'annonce de la création de l'index. La CPME de son côté rayonne de bonheur puisque les TPE/PME seront exclues du dispositif.

Devant un tel gadget, les syndicats de salariés ainsi que nombre d'économistes sont montés au créneau pour expliquer qu'on ne pouvait pas se contenter d'une telle mesurette face à un problème qui touche et va toucher ceux à qui on va demander de travailler jusqu'à 64 ans et plus.

Devant le tollé, le gouvernement a communiqué sur le sujet indiquant : ouvrir « ...la porte dimanche à des mesures plus « coercitives » afin de favoriser l’emploi des seniors dans les entreprises ... »

Ok, quand et de quel ordre ?

C'est l’inénarrable porte parole du gouvernement, Olivier VERAN qui a apporté les premières réponses : « Mais pourquoi pas », a répondu dimanche le porte-parole du gouvernement Olivier Véran sur BFMTV. « Vous savez que nous ne sommes pas sur une ligne coercitive de but en blanc, on a plutôt tendance à faire confiance aux gens. Mais s’il faut qu’on mette en place des garde-fous pour assurer que les seniors ont toute leur place dans l’entreprise ... »

De son côté, Gabriel Attal a fait les gros yeux : « C’est quand même fort de café que la France soit un pays dans lequel on ne reconnaîtrait pas à des gens qui ont de l’expertise, de l’expérience, du savoir faire et ont envie de bosser cette capacité à le faire valoir »

Et ? Réponse rien ! Les entreprises si promptes à défendre le « travailler plus longtemps » vont donc pouvoir continuer à tourner le dos aux salariés et chômeurs âgés sans aucune obligation ou sanction. Les organisations patronales vont pouvoir continuer à nous parler de la « valeur travail » et des restrictions qu'il faut apporter à l'indemnisation des chômeurs compte tenu de la pénurie de candidats dans des emplois ... où les seniors n'ont pas leur place.

Du cynisme ou du foutage de gueule ? Les deux mon capitaine.


Crédit image 

Man Dessinateur

22 novembre 2022

Assurance chômage et « réforme » des retraites : on achève bien les seniors !

 Le Ministre du travail et les organisations patronales affichent leur contentement sur la future baisse des droits au chômage. Elle devrait principalement affecter les seniors qui proches de la retraite se retrouveront plus nombreux en fin de droits.

«Patronat heureux, syndicats furieux» écrit le site Info-RH qui ajoute : « ... côté syndical, on dénonce unanimement une réforme « punitive » qui ne réglera pas les problèmes des tensions sur l’emploi; tandis que dans le camp des employeurs, on salue une réforme qui permettra aux entreprises de trouver les compétences dont elles manquent cruellement ... » et d'ajouter : « ... il n'y a pas de dispositif spécifique concernant les seniors, qui seront donc soumis aux mêmes règles que les autres demandeurs d'emploi, alors qu’ils appartiennent à une catégorie particulièrement touchée par le chômage de longue durée ... »

 


Car, c'est bien cette catégorie de salariés qui va prendre de plein fouet cette «innovation» sociale. En effet, s'il est difficile de conserver son emploi au delà de 55 ans, en trouver un lorsqu'on est chômeur au même âge tient de la gageure. Le rédacteur de ces lignes qui a connu pour cause de licenciement économique le chômage à 56 ans peut en témoigner. C'est encore le cas aujourd'hui pour de nombreux seniors qui même en étant hyper actifs dans leur recherches d'emploi n'obtiennent aucune réponse positive, ne serais ce pour un entretien.

Ceci étant confirmé par les conseillers de Pôle Emploi qui après s'être assuré d'une «recherche dynamique» concèdent qu'au delà d'un «certain âge» retrouver quelque chose est assez ...hypothétique.

N'oublions que cette baisse des droits va s'accompagner rapidement d'une remise en cause des conditions de départ à la retraite. En effet, il est plus que probable que l'âge de départ sera reporté à 64 ou 65 ans ce qui va impacter une fois de plus les seniors dont on sait que la plupart ne sont plus en activité lors de leur départ à la retraite, pour l'instant fixé à 62 ans.

Mais revenons en aux organisations patronales si promptes à se réjouir de la réduction des droits au chômage et du report de l'âge de départ à la retraite. Leur première réaction a été, en ce qui concerne les seniors, de refuser toute contrainte en termes de maintien dans l'emploi ou de recrutement de chômeurs âgés.

Quelles conséquences à terme de cette politique de gribouille ?

Un peu plus de seniors en fin de droits à qui on imposera, pourquoi pas, en échange du RSA, de 10 à 20 heures de travail par semaine ? Où est la dignité dans tout ça ? Qu'on puisse se féliciter d'une régression social est une insulte à tous ceux qui rament pour trouver un boulot qu'on leur refuse parce que les entreprises leur reprochent d'avoir à court terme une pathologie handicapante, de vouloir être payés trop cher, de ne pas être adaptables ou flexibles et autres arguments pourris qui relèguent une partie des travailleurs dans la plus grande des précarité.

Nous avons tous été, sommes ou seront des travailleurs seniors. A nous tous de faire savoir au duo gouvernement/organisations patronales que nous ne sommes pas et ne serons jamais de simples variables d'ajustement au gré d'une période «rouge» ou «verte» !


Sources

Info-RH

Crédit Photo

Le Petit Bleu

09 octobre 2022

Travailler plus longtemps ? L'imposture continue !

 

Comment tenter de convaincre les salariés de travailler plus longtemps alors qu'un peu plus de 30% sont encore en activité à partir de 60 ans ? C'est à quoi s'est essayé Olivier Dussopt dans une interview au JDD avec des arguments bien minces.

Pour ceux qui l'ignoreraient encore, Olivier Dussopt est le ministre du travail. Il est responsable de la mise en place de l'obsession élyséenne sur les retraites et l'assurance chômage.

Et pourtant, il n'y a pas si longtemps, Olivier Dussopt alors député socialiste interpellait Eric Woerth ministre du travail sur le report de l'âge de la retraite en ces mots : «Cette volonté de reculer l'âge de la retraite est doublement injuste … Elle écarte d'emblée la recherche d'autres recettes, notamment la mise à contribution de l'ensemble des revenus et en particulier de ceux issus du capital ... » 

Notons au passage que c'est le même Dussopt qui dans son interview de 2022 au JDD déclare : « Si certains connaissent d’autres moyens pour équilibrer et améliorer notre système sans peser sur le niveau des pensions ou sur le coût du travail, je les invite à nous dire lesquels ! »

Oui mais, aujourd'hui remettre en cause les choix économiques du Président pour qui le ruissellement de la StartUp nation et le fait de traverser la rue pour trouver un emploi suffisent.


 Que dit Olivier Dussopt sur le faible taux d'emploi des seniors ?

« Nos mauvais résultats s’expliquent par plusieurs causes. D’abord, des dispositifs qui peuvent être perçus comme des encouragements, pour les employeurs, à se séparer des seniors. C’est le cas par exemple de la durée maximale d’indemnisation chômage, qui, à partir de 55 ans, passe de vingt-quatre à trente-six mois. S’il est légitime d’avoir des règles spécifiques, cette perspective peut être vue comme une voie de délestage ... »

Ah bon ? Depuis quand 55+3=62 ?

Ce propos est une insulte à tous ceux qui ont perdu leur emploi à cause de réductions d'effectifs ou par liquidation de leur entreprise. Lorsqu'on sait la difficulté pour retrouver quelque chose entre 55 et 58 ans, comment peut on dire des énormités de cet ordre. Venez, Monsieur le ministre rencontrer des « fin de droits » et leur tenir les mêmes propos avant de pérorer !

«  … notre système économique n’a pas la culture de l’emploi des seniors. On considère trop souvent que le temps de travail restant à un salarié de plus de 55 ans ne justifie pas un investissement dans sa formation. Cette question rejoint d’ailleurs la lutte contre l’usure professionnelle. Les seniors disposent de compétences qu’il leur faut transmettre aux plus jeunes... »

Peut être peut-on rappeler à Olivier Dussopt le "contrat de génération" créé à l'époque où il était député de la majorité de gauche dont le but était : « favoriser l’emploi des jeunes en CDI, maintenir dans l’emploi ou recruter des seniors, transmettre les compétences et les savoir-faire » que les entreprises ont sabordé préférant aujourd'hui les contrats d'apprentissage qui ne concernent que les populations jeunes.

Nous passerons vite sur les propositions qui ne coûtent pas cher puisque personne n'est en mesure de les faire appliquer

« investir massivement dans la prévention, en améliorant les conditions de travail et en renforçant la formation et les reconversions car certains métiers resteront toujours pénibles. On pourrait aussi renforcer les droits à la formation de ces salariés afin qu’ils puissent se réorienter... »

Pour enfin arriver au cœur du sujet au travers d'une excellente question de la journaliste du JDD : « Et pour favoriser leur retour à l’emploi ? »

Réponse du ministre ?

« Une des pistes pourrait être de permettre à un senior qui accepte un emploi moins bien payé de conserver une partie de son indemnité chômage afin de compenser le manque à gagner .. » On doit jubiler au MEDEF dont c'est l'une des propositions phare. Car comme effet d'aubaine on n'a jamais trouvé mieux !

Quant aux critères de pénibilité, la réponse au JDD est un chef d’œuvre de mauvaise foi : « Ils étaient extrêmement compliqués à mettre en œuvre. Les chefs d’entreprise parlaient d’un Everest administratif. Il faut trouver d’autres solutions »

En clair, on va contraindre les salariés et les chômeurs seniors sans engager de la moindre façon les employeurs à les conserver à l'effectif ou à les recruter. On va voir fleurir à nouveau des formations ou des stages de reconversion qui ne serviront qu'à améliorer les statistiques. 

Les futurs dégâts tout le monde les connaît. Mais qu'à cela ne tienne puisqu' Edouard Philippe Ce matin dans Le Parisien considère que 67 ans comme âge de départ serait encore mieux.

En fin de compte, tout ce beau monde se moque de l'avenir du modèle social français. Ce qui leur importe c'est de lasser les populations afin que celles-ci sollicitent un autre système. Les marchés financiers et leurs opérateurs bancassureurs piaffent d'impatience de mettre la main sur le colossal trésor que représentent le système de santé et les retraites par capitalisation.

A nous tous d'être vigilants et de refuser un avenir que certains rêvent déjà de nous imposer.

Sources

JDD Interview d' Emmanuelle Souffi

Crédit photo : Depositphotos