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samedi, juillet 28, 2012

Dico anti-capitaliste : Qu'est-ce que le communisme libertaire?



Chaque mois, un mot ou une expression est passée au crible par les anarchistes d'Alternative Libertaire (France).

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Qu'est-ce que le communisme libertaire?



Tout d’abord faut-il dire communisme libertaire ou bien anarcho-communisme ? Cela serait entrer dans des débats historiques et sémantiques un peu complexes. On va donc se borner à dire que les deux termes sont acceptables, le premier étant le plus ancien, puisqu’il est revendiqué dès 1876 en Italie par les membres italiens de l’Association internationale des travailleurs, parmi lesquels Errico Malatesta et Carlo Cafiero. Le côté historique étant mis de côté – un ouvrage ne suffirait pas pour raconter l’histoire de ce courant de pensée – attaquons-nous maintenant aux principes politiques défendus par le communisme-libertaire.

Premier principe, l’anti-autoritarisme. Étant en partie issus de l’internationale antiautoritaire, les communistes libertaires ne pouvaient pas se permettre d’être staliniens. Dans la pratique, on retrouve cette idée dans les modalités de lutte – assemblées générales, mandat révocable, fédéralisme – prônées par les communistes libertaires, ainsi que dans les modes d’organisation que ces derniers et ces dernières adoptent au sein de leurs organisations politiques.

Deuxième principe majeur, la lutte des classes, notion marxiste s’il en est. Contrairement à certains anarchistes individualistes, les communistes libertaires revendiquent une certaine filiation théorique marxiste, à travers la reconnaissance du principe de lutte des classes, du matérialisme historique. Ce principe se retrouve dans l’implication relativement importante des militants et des militantes de ce courant de pensée dans les différents syndicats dits « lutte de classes ». Ainsi en France, beaucoup de communistes-libertaires vont se retrouver à militer au sein de la CGT, de la CGT-FO ou de l’Union syndicale Solidaires.

Maintenant que l’on cerne un peu mieux ce qu’est un ou une communiste-libertaire, attardons nous sur les endroits, les syndicats, les organisations, les tendances où l’on peut espérer trouver cet étrange personnage. 

En fait, c’est comme les champignons, il faut connaître les bons coins. Premier coin qui fourmille de communistes libertaires, bien évidemment les organisations politiques se réclamant de cette orientation. Alternative libertaire bien sûr, mais aussi en France l’Organisation communiste libertaire, la Coordination des groupes anarchistes, Offensive libertaire et sociale ou encore la Fédération anarchiste. À l’étranger on peut aussi citer la Federación anarquista uruguaya en Uruguay ou l’Union communiste libertaire au Québec.

Mais leur présence ne se limite pas à des organisations spécifiques, puisque des organisations se revendiquant de l’anarcho-syndicalisme, comme la Confédération nationale du travail en France ou la Confederación general del trabajo dans l’État espagnol, défendent elles aussi le projet politique communiste libertaire.


Pour une définition un peu plus complète (et peut-être plus accessible), on peut consulter les Buts et principes de l'UCL :).

mardi, juin 26, 2012

Retour vers un féminisme matérialiste





À partir du dernier ouvrage de Roland Pfefferkorn, "Genre et rapports sociaux de sexe", nous proposons ici une façon de lire et de comprendre les multiples dimensions des inégalités persistantes entre hommes et femmes.


Dans "Genre et rapports sociaux de sexe", Roland Pfefferkorn propose une initiation aux concepts utilisés pour aborder les inégalités sociales hommes/femmes. En particulier, son approche met en avant l’apport des travaux issus du féminisme matérialiste. Cela le conduit à mettre en valeur les ambiguïtés de la notion de genre et à montrer les avantages théoriques de l’analyse en termes de rapports sociaux de sexe. Dans l’introduction, l’auteur met en perspective l’histoire de la sociologie en rappelant que ce n’est qu’à partir des années 1970, par l’action des militantes et de chercheuses féministes, que cette discipline est conduite à prendre en compte le fait social de l’inégalité homme/femme.

Rompre avec le naturalisme


Dans un premier chapitre, intitulé « Rompre avec le naturalisme », l’auteur est conduit à mettre en valeur la rupture que constitue l’approche féministe matérialiste par rapport aux perspectives antérieures, avant les années 1970, tournées vers les notions de rôles sociaux. S’inscrivant dans une continuité avec le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir, les théorisations de Christine Delphy, inspirées par un usage hétérodoxe de Marx, sont ici fondamentales. L’auteur rappelle comment ont été construits les concepts de « patriarcat », de « mode de production domestique », de « travail domestique » comme catégories autonomes du capitalisme. Néanmoins, elles se heurtent selon lui à certaines limites : « En sous estimant, de notre point de vue, les changements réels qui sont intervenus, même s’ils sont très partiels et parfois difficiles à interpréter, en négligeant l’accroissement des marges d’autonomie des femmes au cours des dernières décennies, Christine Delphy s’interdit de prendre en compte l’historicité et la dynamique du mode de production domestique, elle inscrit sa conceptualisation dans une perspective fondamentalement fixiste » (p. 38).

Ce n’est que dans les approches en termes de division sexuelle du travail et avec le concept de rapports sociaux de sexe que certaines apories sont résolues. Elles permettent ainsi de penser l’exploitation de femmes, de plus en plus nombreuses sur le marché de l’emploi, conjointement dans la sphère domestique et productive.


La notion de genre


Le second chapitre est consacré à l’étude de la notion de genre dont l’auteur met en valeur les ambivalences qui ont pu conduire au large succès de ce terme. Il est possible de souligner par exemple, parmi les analyses qu’il effectue, le contraste entre deux théorisations du genre. Cette notion semble pouvoir se confondre initialement avec celle de sexe social. L’auteur rappelle à ce propos les théorisations de Colette Guillaumin sur la construction de la «classe de sexe des femmes» par le sexage, c’est-à-dire «l’appropriation privée et collective» des femmes. Il montre cependant comment la notion de genre, telle qu’elle est utilisée dans les théories queer, conduit à réduire l’opposition entre féminin et masculin à ses dimensions normatives et aux questions d’identités sexuelles.

C’est ainsi qu’il est conduit, dans le troisième chapitre de son ouvrage, à l’analyse des critiques de cette notion. Il en distingue principalement trois. Tout d’abord, le biais culturaliste et en définitive idéaliste de cette notion dans les théorisations postmodernes, telles que les théories queer, conduit à négliger la base matérielle économique de la construction du genre. La seconde critique porte sur la renaturalisation qui s’effectue sous couvert de la distinction entre sexe biologique et genre comme construction sociale. Dernière dimension, la thèse postmoderne de la pluralité des genres dissout le rapport social de classe qui pourtant apparaît clairement à un niveau macro-sociologique.


Centralité du travail


Le dernier chapitre est ainsi consacré plus spécifiquement aux notions de «division sexuelle du travail» et de «rapports sociaux de sexe». L’auteur rappelle, en s’inspirant de Danièle Kergoat, que la notion de rapport social désigne «une tension qui traverse le champ social et qui érige certains phénomènes sociaux en enjeux autour desquels se constituent des groupes sociaux aux intérêts antagonistes» (p. 96).

Cette notion met en avant le caractère antagonique du social, et ainsi la centralité de la notion de travail. Les rapports sociaux de sexe se construisent à partir de la division sexuelle du travail, mais également du contrôle de la sexualité et de la fonction reproductive des femmes. En outre, Danièle Kergoat a montré comment les rapports sociaux de sexe, de «race» et de classe devraient être analysés dans leur consubstantialité et leur coextensivité les uns avec les autres.

En définitive, les analyses axées sur la conflictualité sociale en termes de rapports sociaux de sexe, par rapport à celle de «domination masculine», permettent de mieux penser l’articulation entre reproduction des rapports de domination et transformation de ces rapports dans le cadre de luttes collectives d’émancipation.

Dans sa conclusion, l’auteur revient sur la distinction entre articulation des rapports sociaux et théories de l’intersectionnalité. Ces dernières, issues du contexte intellectuel étasunien, ont pour conséquence d’accorder, comme les théories queer, une place prépondérante aux dimensions culturelles et identitaires.


Un courant radical oublié


En mettant l’accent sur les théories issues du féminisme matérialiste, l’ouvrage de Roland Pfefferkorn possède le mérite de mettre en lumière tout un courant radical d’analyse des inégalités hommes/ femmes, occulté dans les années 1980 par le différentialisme du french féminism, puis dans les années 1990 par la réception des théories queer et l’analyse bourdieusienne en termes de domination masculine. Pourtant, dans le sillage des analyses du patriarcat par la féministe américaine Kate Millet, auteure de La politique du mâle en 1970, les travaux de théoriciennes telles que Christine Delphy, Nicole-Claude Mathieu, Colette Guillaumin, Monique Wittig, ou encore Danièle Kergoat présentent la spécificité d’appuyer leurs critiques de l’inégalité sociale entre hommes et femmes sur une base économique, mais sans s’y réduire.

En particulier, avec la notion de «sexe social», ces théoriciennes ont montré avant les théories queer comment les identités sexuelles n’étaient que des constructions sociales.

Elles ont ainsi initié une critique de l’hétéronormativité qui ne se réduit pas à une simple critique des normes, mais qui trouve sa base dans une analyse des conditions socio-économiques des catégories sexuelles. Ainsi, oublie-t-on bien souvent que ce n’est pas uniquement du côté de Foucault, mais également de Monique Wittig, que Judith Butler a été chercher l’inspiration de sa théorie de la déconstruction du genre.


Irène
AL Paris Nord-Est

Alternative libertaire, juin 2012, N°218


Via http://www.anarkismo.net/article/23172

lundi, mai 16, 2011

[Alternative libertaire] Derrière le cirque médiatique : l’oppression sociale et patriarcale.

Vous avez probablement tous et toutes entendu parler de "l'affaire DSK", c'est-à-dire le directeur du FMI qui aurait possiblement agresser sexuellement une femme de chambre. Une histoire qui à mon avis rappelle sans aucun doutes, "Le journal d'une femme de chambre" de Mirbeau, une critique virulent de la bourgeoisie. À ce sujet, nos camarades d'Alternative libertaire, ont publié aujourd'hui un communiqué en solidarité avec les femmes victimes du patriarcat. Le voici:

DSK aurait tenté de violer une femme de chambre dans un hôtel de New York.
Une partie des politiques, prompt-es à condamner les petits voleurs ou les supposé-es fraudeurs du RSA, crient à la présomption d’innocence. D’autres vont à la curée, trop heureux et heureuses de voir disparaître un concurrent de poids. On en trouve même pour déplorer un piège qui nuit à l’image de la France.
Et personne pour rappeler qu’il s’agit d’abord d’un problème d’oppression sociale et patriarcale, lorsque des hommes riches et de pouvoir agissent selon ce qu’il croient être leur bon droit, agresser sexuellement une travailleuse qui les côtoie.
Alternative libertaire exprime sa solidarité à toutes les femmes agressées et à toutes les femmes de chambre que les hommes de pouvoir pensent faire partie des meubles. Et regarde avec mépris le cirque médiatico-politique qui démarre autour d’enjeux électoraux dont les travailleurs et travailleuses n’ont rien à attendre.
Alternative Libertaire, le 16 Mai 2011
Source 

vendredi, mars 11, 2011

[Alternative Libertaire] Analyse suite au Xème congrès.

[Repris du blogue de nos camarades de Voix de faits]
À chacun de leurs congrès, nos camarades d'Alternative libertaire revisitent la ligne politique et stratégique de leur organisation et essaient d'approfondir au moins une question. Leur Xe congrès, qui s'est tenu en plein mouvement des retraites, n'a pas faire exception. Les textes d'orientations adoptés, qui font habituellement l'objet d'une publication sous forme de livre, ont été mis en ligne il y a peu.

Bien que franco-français, on y trouve une réflexion libertaire contemporaine intéressante (quoi, que, y'a au moins un thème sur lequel nous divergeons... on vous laisse deviner lequel!).


vendredi, octobre 22, 2010

[France] Synthèse de la mobilisation au 21 octobre.

La mobilisation contre la réforme des retraites se poursuit et se radicalise de plus du côté de la France. Nous vous publions donc ici un texte de nos camarades d'Alternative libertaire sur les évènements d'hier, le 21 octobre.

MANIFESTATIONS

Plusieurs dizaines de milliers de lycéen-ne-s et étudiant-e-s en manifestation partout en France.

En région parisienne :

- rassemblement à Jussieu puis départ en manifestation à 14h des lycéens, étudiants et UL CGT du 6-7, convergence avec le cortège des territoriaux de Paris et d’Ile de France à Denfert.

- manifestations interprofessionnelles au départ de plusieurs villes Bobigny, Saint-Denis, Aubervilliers, Montreuil, Noisy, Bondy, Aulnay (PSA)…, convergentes devant la Bourse du travail et la préfecture

- Plus de 25 000 personnes en manifestation à Toulouse à l’appel de l’intersyndicale locale

mercredi, octobre 20, 2010

[France] Synthèse de la mobilisation au 20 octobre

Un "état des lieux" que nos camarades d'Alternative Libertaire ont publié, sur la situation de la mobilisation contre la réforme des retraites...

Ci dessous une synthèse, forcément parcellaire vue ampleur de la mobilisation, mais qui permet de porter un regard rapide sur son état.

MANIFESTATION DU 19 : La mobilisation se maintient à 3,5 millions de manifestant-e-s. Record à Marseille, Bordeaux, Douai… Pas d’effondrement du mouvement, beaucoup de tracts et d’appels misent maintenant sur un élargissement véritable au secteur privé (cf. Tract FNM Energie-CGT, SNUI-SUD Trésor Solidaires). Quelques boîtes privées mentionnées localement (voir ci-dessous).

GREVES :

- Raffineries et dépôts : Arrêts supplémentaires dans les raffineries dans la journée : 11 à midi, et la dernière, celle d’Exxon (Fos-sur-mer), fonctionne partiellement au débit minimum. Dépôt de Sète Frontignan « libéré » ce matin de son occupation de la nuit dernière (syndicats cheminots, enseignants. Mouvement dit illégal. Mardi soir on recense 4000 stations à sec (à midi c’était 1000). Principaux points de difficulté dans les régions de Rennes, Nantes et Toulouse. Plus faible en région parisienne.

- Energie : Près d’un-e salarié-e sur deux en arrêt de travail. Baisse de la production d’électricité liée au mouvement notamment dans le nucléaire. Au soir la centrale de Flamanville dans la Manche (site futur EPR) est en reconductible, ce qui impliquerai une baisse de la production de 50% d’électricité et obligerai EDF à l’importer de l’étranger.

- Transports routiers : Quelques participations à la grève en région mais peu d’infos (Tours, ex. bulletin le Havre : http://www.havredegreve.org/post/havre-de-greve-mercredi-20-octobre-2010 )

- Aéroports : La DGAC a demandé la réduction de 50 % du programme de vols à Orly et 30 % dans les autres aéroports métropolitains. À Lyon, 31 % du trafic total annulé. À Bordeaux, accès à l’aéroport coupé durant plus de deux heures dans la matinée par des manifestants de la CGT, FO, Sud, FSU et de la CNT.

- SNCF : la journée de mardi a marquée un net rebond du nombre de gréviste. On voit qu’il existe un noyau dur de grévistes qui fluctue avec la pratique d’une grève perlée s’appuyant sur les journées de mobilisation nationale. De nombreuses actions de blocages prennent les rails ou gares comme cibles.

- Les transports urbains sont sur un bas niveau de mobilisation (9% de grève annoncée à la Ratp, avec à côté un discours défaitiste de l’Unsa). Les transports urbains fonctionnent à plus de 50 % pour 93 % d’entre eux, une proportion supérieure aux dernières journées de grève selon l’Union des transports publics et ferroviaires (UTP). Cela est en parti lié à des manques de préavis pour la journée 19 ( aucun appel en reconductible n’ayant été déposé en amont). Villes les plus touchées : Marseille, La Rochelle, Clermont-Ferrand, Nice, Pau.

mardi, août 10, 2010

Georges Fontenis : une figure internationale du communisme libertaire nous a quittés.

C’est une des dernières personnalités du mouvement anarchiste des années 1940-1950 qui vient de disparaître avec Georges Fontenis, décédé à Tours le 9 août 2010 dans sa quatre-vingt-dixième année. Il restera, dans la mémoire du mouvement ouvrier, comme un infatigable combattant du communisme libertaire, un acteur du soutien aux indépendantistes algériens, un syndicaliste de l’École émancipée, un des animateurs de Mai 68 à Tours et un des piliers de la Libre-Pensée d’Indre-et-Loire. Jusqu’à ses derniers jours, il a été adhérent d’Alternative libertaire.

Issu d’une modeste famille ouvrière des Lilas, Georges Fontenis fut projeté dans le militantisme anarchiste par Juin 36 et l’enthousiasme pour la Révolution espagnole. Membre de la CGT clandestine sous l’occupation, ce jeune instituteur à Paris 19e devint, à la Libération, un des militants les plus en vue de la Fédération anarchiste (FA). Dès 1946, il fut élu secrétaire général de cette organisation, véritable pôle de résistance à l’hégémonie stalinienne dans le mouvement ouvrier de l’époque.

Très proche des Espagnols de la CNT-FAI en exil, Georges Fontenis fut, en 1946-1950, un des promoteurs de la CNT française (CNT-F), qui se présentait comme une alternative à la CGT stalinisée et à une CGT-FO atlantiste. Après l’effondrement de la CNT-F en 1950, il rejoignit la Fédération de l’Éducation nationale (FEN) et fut actif au sein de sa tendance syndicaliste révolutionnaire, l’École émancipée.

Georges Fontenis fut ensuite un des principaux protagonistes des luttes d’orientation qui déchirèrent l’organisation anarchiste en 1951-1953, et qui aboutirent à la transformation de la FA en Fédération communiste libertaire (FCL). Il devait en garder, par la suite, une réputation sulfureuse. Il s’en expliqua dans ses Mémoires, publiés une première fois en 1990. Réédités en 2008 par les éditions d’Alternative libertaire sous le titre Changer le monde, ces Mémoires constituent une pièce de premier ordre pour les historiens de l’anarchisme, mais aussi une forme de bilan politique de cette période, non exempt d’autocritique.
Quand éclata l’insurrection algérienne de la Toussaint 1954, la FCL s’engagea dans le soutien aux indépendantistes et Georges Fontenis mit sur pied, avec ses camarades, un des tout premiers réseaux de « porteurs de valises ». Ce n’est cependant pas son action clandestine, mais sa propagande au grand jour qui valut à la FCL d’être démantelée par la répression. Interpelé par la DST au terme de plusieurs mois de cavale, Georges Fontenis passa près d’un an en prison et fut définitivement proscrit de l’Éducation nationale en Région parisienne. Cette période a été racontée dans un documentaire de 2001, Une résistance oubliée (1954-1957), des libertaires dans la guerre d’Algérie.

Après sa libération, Georges Fontenis s’installa dans la région tourangelle, qu’il ne devait plus quitter. La FCL étant détruite, il continua néanmoins son action dans les réseaux de soutien à l’indépendance algérienne.

Il fut de nouveau appelé à jouer un rôle en mai-juin 1968, en étant un des principaux animateurs du Comité d’action révolutionnaire de Tours. Dans la foulée, il tenta de relancer un Mouvement communiste libertaire (MCL), fortement teinté de conseillisme, mais qui fut un échec. Il devait par la suite adhérer, en 1980, à l’Union des travailleurs communistes libertaires (UTCL), puis à Alternative libertaire.

La vie de Georges Fontenis a, pendant plusieurs décennies, été liée au mouvement ouvrier et à son courant libertaire. Il en a partagé les avancées, les reculs et les luttes passionnées. Militant politique, il savait tirer les enseignements des échecs sans céder au découragement. Mais l’itinéraire de Georges Fontenis fut aussi un itinéraire personnel. Façonné par l’anarchisme, il voulut le transformer en profondeur. Pour cela, il fut vivement décrié par certains, et considéré par d’autres, en France et ailleurs, comme une référence. Son bilan forme-t-il pour autant un bloc, à prendre ou à laisser ? Nullement. Mais Alternative libertaire et, au-delà, le courant communiste libertaire international savent ce qu’ils lui doivent, et c’est pour cette raison que nous rendons hommage à un homme qui, désormais, appartient à l’Histoire.

Les militants qui l’ont côtoyé dans ses combats en garderont, pour beaucoup, le souvenir d’un camarade chaleureux, bon vivant, doué d’humour et d’une grande lucidité. C’est encore l’image qu’il laisse dans le documentaire qui lui a été consacré en 2008, Georges Fontenis, parcours libertaire.

AL assure sa compagne Marie-Louise ainsi que sa famille de sa solidarité dans ce moment douloureux. Le mensuel Alternative libertaire saluera longuement Georges Fontenis dans son numéro de septembre. Nous envisagerons également l’organisation d’un événement public en son souvenir à l’automne, probablement à Tours.
Alternative libertaire, le 10 août 2010
 

mardi, juillet 06, 2010

[Conférence] Matinik Doubout:Lutte anticolonialiste et lutte de classe en Martinique et dans les Antilles.

(english version below) 


L’Union Communiste Libertaire-Montréal vous convie à une conférence estivale.

Quoi?Conférence avec l'auteur du livre Matinik Doubout.
Quand?Jeudi le 22 juillet 2010 @ 19h
Où?4525 rue St-Jacques à Montréal (métro Place St-Henri)

En février-mars 2009, la Martinique a été secouée par le plus puissant mouvement populaire du siècle dernier. Des milliers de Martiniquais-es se sont retrouvé-es dans un mouvement de grève générale qui s’est étendu comme une trainée de poudre dans les Antilles Françaises.

Nemo, enseignant, témoin et acteur de ces événements et militant d’Alternative libertaire présentera une conférence qui traitera de la lutte anticolonialiste et de la lutte des classes en Martinique ainsi que dans les Antilles. Il est l’auteur du livre Matinik Doubout, qui raconte au jour le jour le mouvement de 2009 et analyse les perspectives politiques et économiques qu’il a ouvertes.

Cette conférence abordera l’historique de ces luttes, la situation actuelle ainsi que les perspectives à l’ombre de la crise économique mondiale. Cette conférence sera suivie d’une période de discussion et de questions.

La conférence sera en français, mais une traduction chuchotée vers l'anglais sera disponible.

EDIT: Si vous souhaitez lire une critique du bouquin, voir le billet ici.

vendredi, juin 25, 2010

Dico anticapitaliste : Qu’est-ce que le matérialisme dialectique ?

Nos camarades d'Alternative Libertaire définissent chaque mois dans leur mensuel, un concept du mouvement communiste libertaire. En mai c'était le concept de matérialisme dialectique qui était défini.
Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible par Jacques Dubart.

En affirmant dans le Manifeste du parti communiste que « l’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire des luttes de classes », Marx et Engels voulaient montrer que l’histoire des sociétés humaines s’explique principalement au travers de l’analyse des conditions matérielles dans lesquelles vivent et travaillent les femmes et les hommes, de leur évolution et des contradictions que ces évolutions créent au sein des sociétés.
Une démarche matérialiste s’oppose à l’idéalisme de l’idéologie dominante, qui donne le rôle déterminant aux idées, aux grands hommes, voire aux puissances divines. Car les facteurs matériels influencent profondément les idées et les actes des humains.
Une analyse « dialectique » de l’histoire met en lumière au moins trois aspects complémentaires :
– Les faits sociaux ne sont pas figés. Ils évoluent et peuvent même changer de nature. Ainsi en sont-ils des inégalités sociales ou entre les hommes et les femmes présentées par la pensée dominante comme éternelles.
– Les contradictions internes qui traversent chaque situation sont le moteur de son évolution. Ainsi analyser les organisations syndicales « tout d’un bloc » et négliger la contradiction permanente entre leur aspect intégrateur et leur aspect lutte de classe ne permet pas d’en comprendre les évolutions possibles.
– Mais si les contradictions internes sont le moteur de l’évolution, c’est le contexte qui favorise ou étouffe tel ou tel aspect de la contradiction.
Car l’histoire n’est pas écrite d’avance. Ce ne sont pas des idées abstraites ou des interventions matérielles indépendantes de la volonté humaine qui font l’histoire.
Ce sont les femmes et les hommes : leurs actions, leurs idées, leurs décisions prennent leurs racines dans les conditions matérielles et économiques où ils vivent. Mais le rapport entre les idées et leur condition matérielle d’existence est lui aussi dialectique : elles s’influencent réciproquement ! Les idées ont leur dynamique propre. Il peut exister des décalages dans le temps entre l’apparition des idées et les conditions matérielles. Mais idées et institutions ne peuvent pas survivre éternellement aux conditions matérielles qui les ont suscitées.
Le matérialisme dialectique historique est simplement une méthode pour comprendre et agir. Sans cela, le risque est grand d’en rester à des explications unilatérales, subjectives, partielles et de s’enfermer dans des actions sans efficacité.
Au final, parler de matérialisme dialectique historique c’est simplement revendiquer un outil d’analyse pour faire avancer le projet communiste libertaire. On en déduira une stratégie fondée sur la transformation des conditions matérielles, à laquelle la propagande idéologique sera subordonnée.

lundi, juin 01, 2009

Dieudonné et sa clique de fachos montrent leur vrai visage


Retour des fachos dans les rues de Paris sous couvert électoral : à l'approche des élections européennes, Dieudonné est en campagne avec sa clique d'intégristes de tous bords.

Ce matin, Dieudonné en campagne tractait au marché Pyrénées dans le XXe arrondissement de Paris, accompagné de ses alliés politiques : jeunes nationalistes, jeunes identitaires, royalistes, hooligans du PSG, skinhead du FN, cathos et musulmans fondamentalistes.

C’est là le vrai visage de cette liste dite « antisioniste », en fait un ramassis de nazillons et d’intégristes de tout poil qui n’ont pas hésité à agresser un passant qui ne voulait pas de leur tract.

A quelques pas de là, des militantes et militants antifascistes se sont faits courser et tabasser par les antisémites armés alors qu’ils tentaient d’informer les passant-es des idées véhiculées par cette liste et de s’opposer à la diffusion de ces idées immondes. Côté antifascistes, on dénombre plusieurs blessés et plusieurs interpellations. Pendant ce temps, Dieudonné et ses soldats, taxant leurs opposants de « racistes et d’islamophobes » (sic !), continuait à se donner une posture victimaire, au cœur de sa campagne et de sa relation aux médias. Pas facile d’assumer des idées aussi sales et haineuses que les siennes !

Dans la même veine, un proche du RED (Rassemblement des Etudiants de Droite) se faisait interviewer par une télévision, la tête ensanglantée, protégé par la police, se disant simple passant agressé par « les anarchistes ».

Le 9 mai dernier, les fachos avaient été privés de défilé annuel (croix gammées, flambeaux et autres réjouissances), notamment sous la pression des antifascistes. Frustrés, ils avaient commis des « ratonnades » (passages à tabac racistes) et des dégradations en chantant des hymnes nazis dans le XIVe arrondissement.

Les évènements de ce matin ne font que dévoiler le vrai visage de Dieudonné et de sa ligue de fascistes ultra-violents. Nous continuerons à nous battre chaque jour, sur tous les terrains, contre l’extrême droite qui n’est plus à présenter. Quelle qu’elle soit (catho, musulmane, royaliste, nationaliste…), elle n’a pas sa place dans une société qui se veut démocratique, quand bien même se cache-t-elle derrière le paravent électoral. Nous serons toujours là contre la bête immonde !

Parce que ces gens là se revendiquent de Franco, d’Hitler, de Pinochet, pas de fascistes dans nos quartiers, pas de quartier pour les fascistes !
Le fascisme, c’est la gangrène, on l’élimine ou on en crève !

Alternative libertaire le 31 mai 2009

mercredi, mars 04, 2009

L’impasse afgane (4/6) : Une guerre pour les femmes ?


Un de nos camarade du collectif de Montréal, publiera 6 chroniques dans le mensuel d'Alternative Libertaire. La chronique s'intitule L'impasse Afghane. Nous publions donc ici la quatrième partie (Vous pouvez lire la première, la deuxième et la troisième partie)..

En octobre 2001, l’armée états-unienne et ses alliés envahissent l’Afghanistan en représailles aux attentats du 11 Septembre. Le prétexte étant mince, les États occidentaux ont également brandi la « libération des femmes afghanes ». Un mensonge de plus.

Le 29 janvier 2002, dans son discours sur l’état de l’Union, George W. Bush déclarait : « La dernière fois que nous étions réunis dans cet hémicycle, les mères et les filles de l’Afghanistan étaient captives chez elles ; il leur était interdit de travailler ou de faire des études. Aujourd’hui, les femmes sont libres et elles font partie du nouveau gouvernement de l’Afghanistan. » [1]

C’est que la « libération des femmes » était devenu un puissant prétexte idéologique à la guerre sanglante contre le régime taliban, mis en place en 1996, et qui avait pourtant auparavant été financé et soutenu par Washington.

Les féministes afghanes contre l’intervention US

Pourtant, la plus importante et la plus courageuse organisation féministe afghane, Rawa, s’était prononcée contre l’intervention militaire occidentale. Fondée en 1977, l’Association révolutionnaire des femmes afghanes (Rawa) se battait pour les droits des femmes et revendiquait l’établissement d’un gouvernement démocratique [2].

Puis vint l’occupation soviétique en 1978. Le régime du Parti démocratique populaire d’Afghanistan, à la botte de Moscou, permit que pour la première fois, les femmes afghanes soient libérées de la burqa et que les filles puissent apprendre à lire et à écrire, aller à l’université et devenir enseignantes ou scientifiques. Rawa poursuivit néanmoins son travail d’agitation, mobilisant à la fois contre l’occupant soviétique et contre les islamistes fondamentaux, ces « combattants de la liberté » financés par les États-Unis. Plusieurs des fondatrices de Rawa furent sauvagement assassinées en 1987 par le Khad (le KGB afghan) avec l’approbation des groupes fondamentalistes.

En 1992, les moudjahidins de l’Alliance du Nord, présentés comme des héros par l’Occident, prirent le pouvoir et limitèrent fortement les droits des femmes : obligation de se voiler, interdiction du maquillage et de rire en public. Les enlèvements, les meurtres, le viol et la vente des jeunes femmes pour la prostitution devinrent le lot quotidien des afghanes [3].

Les talibans ou l’occupation ?

La prise du pouvoir par les talibans en 1996 enleva les dernières parcelles de droits aux femmes. En parallèle, une campagne aux États-Unis (Feminist Majority) regroupant différentes personnalités se mit en branle pour dénoncer « l’apartheid sexiste » en Afghanistan, alors que Washington recevait avec les honneur les dirigeants talibans. Feminist Majority soutiendra la guerre de 2001, sous prétexte qu’elle permettrait aux femmes de reconquérir leurs droits, grâce à la mise en place d’une « démocratie ». Alors que Rawa, au même moment, dénonçait les bombardements, arguant que seule une insurrection populaire pouvait débarrasser l’Afghanistan d’Al-Qaida et des talibans. Une fraction entière des féministes occidentales s’aligna ainsi sur le discours de Washington, contre les intérêts des femmes afghanes [4].

Dire que cette guerre est nécessaire pour les femmes afghanes, c’est décider qu’il vaut mieux pour elles mourir sous les bombes, mourir de faim, mourir de froid, que de vivre sous le joug des fondamentalistes que l’Occident leur a imposées. Les dés ont été lancés, les États-Unis se donnant bonne conscience en justifiant leur guerre impérialiste au nom des femmes. Après sept ans de combats, de viols, de meurtres et de lapidations, cette guerre a-t-elle réellement permis aux femmes afghanes d’être libres ?

[1] www.america.gov/fr
[2] www.rawa.org/rawa_fr.htm
[3] Ellis D., Women of the Afghan War, Praeger Publishers, 2000.
[4] Dupuis Déri F., L’Éthique du vampire. De la guerre d’Afghanistan et quelques horreurs du temps présent, Lux, 2007.

mardi, février 03, 2009

L’impasse afghane (3/6) : Injustice sans limite


Un de nos camarade du collectif de Montréal, publiera 6 chroniques dans le mensuel d'Alternative Libertaire. La chronique s'intitule L'impasse Afghane. Nous publions donc ici la troisième partie.

Le 7 octobre 2001, les États-Unis entament des représailles contre l’Afghanistan, à la suite des attaques du 11 septembre 2001. Pourtant, ces attaques ont été commises par 19 terroristes provenant du Liban, des Émirats arabes unis, d’Égypte et d’Arabie saoudite.

Le 11 septembre 2001, quatre avions sont détournés aux États-Unis et s’écrasent sur différentes cibles dont le World Trade Center, tuant 2 973 personnes et faisant des milliers de blessés. Le lendemain, le président George W. Bush qualifie ces attentats d’« acte de guerre » et réclame la constitution d’une coalition internationale contre le terrorisme, à laquelle l’Otan adhère. Le 13 septembre, le gouvernement états-unien accuse Oussama Ben Laden d’être le commanditaire des attentats et exige des talibans afghans de leur livrer le suspect, faute de quoi ils attaqueraient l’Afghanistan. Et ce bien qu’aucun des terroristes ne soit d’origine afghane. L’état d’urgence est décrété et 50 000 réservistes sont rappelés. Le Conseil de sécurité de l’Onu exige, à l’unanimité, la remise « immédiate et inconditionnelle » d’Oussama Ben Laden. Les États-Unis déploient des troupes dans le Golfe et avec l’aide d’une quarantaine de pays alliés forment alors la coalition Infinite Justice (Justice sans limites). À ce moment, un million et demi d’Afghanes et d’Afghans prennent le chemin de l’exode pour fuir la riposte américaine à venir. Les talibans refusent en exigeant des preuves permettant de justifier l’extradition de Ben Laden [1].

Georges s’en va t’en guerre

Quelques jours plus tard, le nom de la campagne est changée en Enduring Freedom ( Liberté immuable), et le gouvernement états-unien fait adopter à l’unanimité la résolution 1 373 à l’Onu, justifiant sous prétexte de légitime défense une attaque contre le territoire afghan. Ce qui est d’ailleurs absurde, puisqu’une attaque subséquente d’un territoire dont on présume qu’il est la base d’opération des agresseurs, alors que les attaques ont cessé, est une agression pure et simple, interdite par le droit international ! Parallèlement, ils invoquent l’article 5 de l’Otan stipulant que : « Les parties conviennent qu’une attaque armée contre l’une ou plusieurs d’entre elles […] sera considérée comme une attaque dirigée contre toutes les parties. […] Les parties ainsi attaquées en prenant aussitôt, individuellement et d’accord avec les autres parties, telle action qu’elle jugera nécessaire, y compris l’emploi de la force armée […] » [2].

Puis les événements se précipitent : en octobre, les talibans proposent de remettre Ben Laden au Pakistan, pour qu’il soit jugé par un tribunal international, ce à quoi la Maison-Blanche rétorque qu’« il n’y aura ni discussions, ni négociations avec les talibans » [3]. C’est qu’entre temps, l’objectif a changé. Il n’est plus de capturer les terroristes mais bien de renverser le régime taliban. L’avantage majeur, mais non dit, est bien sûr de se positionner dans la zone d’influence de la Russie et d’y justifier l’installation de bases militaires pour permettre le contrôle de cette zone en plus de satisfaire momentanément la colère de la population américaine. Les premiers bombardements américains et britanniques sur les grandes villes afghanes sont entamés et ce sera le début d’une guerre sans merci.

Du terrorisme à la terreur

Sept ans après le début du conflit, plus de 13 000 civils afghans tués directement par les combats [4], des millions de réfugiés et de nombreux crimes de guerre dont la torture et le viol commis par les forces de la coalition [5], le conflit se poursuit et la plupart des pays de l’Otan affirment vouloir augmenter leurs effectifs en Afghanistan dans leur guerre au terrorisme. Une guerre au terrorisme qui paradoxalement utilise les mêmes méthodes que celles supposément combattues, soit la terreur contre la population civile.

[1] http://www.monde-diplomatique.fr

[2] http://www.nato.int

[3] Dupuis-Déri F., L’Ethique du vampire. De la guerre d’Afghanistan et quelques horreurs du temps présent, Lux, 2007.

[4] http://www.unknownnews.net

[5] Amnesty International. Rapport annuel 2006



Québec : Naissance de l’Union communiste libertaire.


Un article paru dans le mensuel (janvier 2009) de nos camarades d'Alternative Libertaire, sur la fondation de l'Union Communiste Libertaire.
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Au Canada et en Amérique du Nord, le mouvement communiste libertaire poursuit sa recomposition et son développement, avec la création d’une nouvelle organisation au Québec.

À la suite de la création de Common Cause en 2007 (voir AL n°177), c’est l’Union communiste libertaire (UCL) qui est née le 23 novembre 2008 à Montréal. Cette nouvelle organisation correspond à l’ancienne union régionale québécoise de la Nefac, à d’importantes nuances près cependant.

Une recomposition sans rupture

Depuis sa fondation en 2000, la Nefac (Fédération des communistes libertaires du Nord-Est – principale organisation communiste libertaire nord-américaine) rassemblait des militantes et militants du nord-est des États-Unis comme du Québec. La cohabitation au sein d’une même organisation de militants de pays différents avait fini par poser plus de problèmes (frontière, langues…) qu’elle ne permettait d’en résoudre. Dans la pratique, les Québécoises et Québécois fonctionnaient d’ailleurs de manière autonome depuis quelques temps déjà. Ils ont donc décidé de créer officiellement une organisation autonome.

Mais séparation ne signifie pas rupture des liens : les militants de l’UCL envisagent de transformer l’actuelle fédération en une confédération regroupant les différentes organisations communistes libertaires, en plein essor, à l’échelle du continent.

Outre ces raisons pratiques, la fondation de l’UCL avait pour but l’élargissement de l’implantation dans la province, notamment dans les petites villes et pas seulement dans les grands centres urbains. Pari réussi, puisque six collectifs locaux ont été parties prenantes du congrès de fondation, alors que l’ancienne Nefac-Québec n’en comptait que trois.

Vers un Manifeste inédit

Le congrès a d’abord été l’occasion d’adopter de nouveaux statuts. De plus, tout en prévoyant de se munir dès que possible d’un manifeste inédit, les congressistes ont adopté une version amendée des Buts et Principes de la Nefac, incluant les principes fondamentaux de toute organisation communiste libertaire (anticapitalisme, lutte de classes, antipatriarcat, etc.).

Les militants et les militantes de l’UCL étaient déjà impliqué-e-s dans les mouvements sociaux : dans le mouvement étudiant, très actif au Québec (notamment à travers l’ASSE, organisation étudiante de lutte) ; dans le mouvement contre la guerre, le Canada étant présent en Afghanistan ; dans les luttes communautaires et les luttes antifascistes, pour ne citer que quelques exemples. Aujourd’hui, l’UCL réaffirme sa volonté d’implication dans les mouvements sociaux avec pour objectif de les radicaliser.

Enfin, les actions concrètes à venir incluent une campagne sur la crise économique, qui sera rapidement mise en place. L’UCL va également s’impliquer dans une campagne internationale communiste libertaire contre la guerre en Afghanistan, dont elle avait proposé le principe il y a quelques mois à Alternative libertaire. Elle se pose donc aussi comme une force motrice dans la construction d’une internationale communiste libertaire.

Vincent Nakash (AL Paris-Sud), de Toronto

(source)

mardi, janvier 06, 2009

L’impasse afghane (2/6) : Quand Washington était pro-islamiste.

Un de nos camarade du collectif de Montréal, publiera 6 chroniques dans le mensuel d'Alternative Libertaire. La chronique qui s'intitule L'impasse Afghane, a débuté dans le no. du mois de novembre. Nous publions donc ici la seconde partie.

Pendant presque vingt ans, les Américains et leurs alliés ont financé et entraîné les moudjahidin puis les talibans en Afghanistan. Une politique étrangère impérialiste, dans le but de protéger les intérêts énergétiques états-uniens dans le golfe Persique.

Officiellement, la CIA aurait débuté son aide aux moudjahidin en 1980, quelques mois après l’invasion soviétique. Cependant, Robert Gates, l’ancien directeur de la CIA, affirme dans ses mémoires que l’opération Cyclone d’assistance clandestine aux opposants du régime pro-soviétique de Kaboul, fut signée par le président Carter en juillet 1979, six mois avant l’invasion soviétique [1].

La fabrication d’un jihad « anticommuniste »


Ensuite, les Russes vécurent leur propre Vietnam. Les opérations d’entraînement et d’armement s’effectuèrent par l’intermédiaire des services secrets pakistanais (ISI) et ont été appuyés financièrement par plusieurs autres pays, dont l’Arabie saoudite, l’Égypte, la France, la Grande-Bretagne, Israël, l’Iran, le Japon et la Chine. Cette opération permit la formation de plus de 100 000 hommes, entre 1978 et 1992, avec un budget annuel américain qui culmina à 630 millions de dollars US en 1987. En 1983, plus de 10 000 tonnes d’armes et de munitions en provenance de Chine ont transité par le Pakistan. Le commandant Massoud, Gulbuddin Hekmatyar et Jalaluddine Haqqani, pour lequel Ben Laden était en charge du recrutement, furent les seigneurs de guerre les plus financés par la CIA [2].

Il est bien évident que les pays finançant cette guerre préféraient soutenir des moudjahidin fondamentalistes et les éléments les plus réactionnaires pour chasser les soviétiques, plutôt que des groupes pro-démocratiques puisque ceux-ci, en se battant pour leur indépendance, auraient nui aux intérêts politiques et financiers. En 1989, les Russes se retirent et le gouvernement américain peut enfin prendre le contrôle du golfe Persique.

Après dix ans de guerre, avec plus d’un million de civils tués et le quart de la population afghane dans des camps de réfugiés, une guerre civile s’enclenche jusqu’en 1992, entre les différentes factions moudjahidin. Les attaques de Hekmatyar contre Kaboul, sur plus de trois ans, firent plus de 10 000 morts et déstabilisèrent encore le pays. En 1993, des activistes islamistes entraînés dans ses camps firent exploser une bombe à New York dans le sous-sol du World Trade Center.

Hekmatyar et l’appui aux talibans

Les gouvernements américain et pakistanais décident alors de neutraliser Hekmatyar par le biais de nouvelles milices religieuses, les talibans, qui promettaient au peuple afghan de ramener l’ordre, la loi et une certaine moralité [3]. Appuyés par ces gouvernements, et par la puissante compagnie pétrolière états-unienne Unocal, porteuse d’un projet de gazoduc vers le Pakistan, les forces talibanes passèrent de 2 000 à 25 000 miliciens de 1994 à 1995 et prirent le contrôle du pays. Ces milices imposent un islamisme brutal et rendent obligatoires la prière, la barbe pour les hommes, la burka pour les femmes, interdisent la télévision, la musique et ferment les écoles pour filles. L’avantage pour les américains réside dans le fait que, contrairement au parti islamiste de Hekmatyar, les talibans ne désirent pas mener d’offensive contre l’Occident, ce qui diminue alors l’influence de l’Iran, de l’Inde et de la Russie dans la région. Les dilemmes moraux sont vite esquivés par les intérêts financiers. Un support qui ne prendra fin qu’en 1998, à la suite d’attentats commis par Ben Laden contre des ambassades américaines en Afrique, qui ont tué 224 personnes dont 12 Américains. Des pertes suffisantes pour rejeter les talibans, alors que la politique américaine des vingt années précédentes a provoqué la mort de millions d’Afghans. Les ex-combattants de la liberté ne savaient alors pas qu’ils deviendraient quelques années plus tard la raison officielle d’une nouvelle guerre.

[1] Jauvert V., « Oui, la CIA est entrée en Afghanistan avant les Russes… », Le Nouvel Observateur, nº1732, janvier 1998.

[2] Wikipedia : Opération Cyclone.

[3] Dupuis Déri F., L’Ethique du vampire. De la guerre d’Afghanistan et quelques horreurs du temps présent, Lux, 2007.

Dico anticapitaliste : Qu’est-ce que le racisme ?


Nos camarades d'Alternative Libertaire, définissent chaque mois dans leur mensuel, un concept du mouvement libertaire. Ce mois-ci c'est le concept de racisme qui est défini.

Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible par Jacques Dubart.

« Il faut avoir à l’esprit qu’il n’y a pas un racisme, mais des racismes : il y a autant de racismes qu’il y a de groupes qui ont besoin de se justifier d’exister comme ils existent, ce qui constitue la fonction invariante des racismes » écrivait Pierre Bourdieu en 1983 dans un petit texte, « Classe contre classe ».

Au Moyen Âge, le racisme des négriers arabes à l’égard des Noirs servit de justification idéologique à l’esclavagisme : « Les seuls peuples à accepter vraiment l’esclavage sans espoir de retour sont les Nègres, en raison d’un degré inférieur d’humanité, leur place étant plus proche du stade de l’animal » écrivait au XIVe siècle l’intellectuel Ibn Khaldoun.

Pourtant, selon l’historien américain Isaac Saney, « les documents historiques attestent de l’absence générale de préjugés raciaux universalisés et de notions de supériorité et d’infériorité raciale avant l’apparition du commerce transatlantique des esclaves ». La spécificité du racisme moderne a été de se parer de prétextes scientifiques. Du naturaliste suédois Linné, qui distinguait 4 races hiérarchisées, au Français Buffon qui affirmait que les races non blanches sont le produit d’une dégénérescence, la science européenne a affirmé au XVIIIe siècle la suprématie de l’homme blanc.

Ce racisme « scientifique » s’est étroitement articulé, à l’extérieur avec la politique impérialiste et, à l’intérieur, avec la gestion des populations minoritaires. Face aux revendications sociales et aux luttes émancipatrices, le colonialisme des États européens implique que les populations visées soient considérées comme inférieures. La philosophe Hanna Arendt a montré comment « la pensée raciale [est un] projet politique [qui] engendre et reproduit des structures de domination ».

Déjà discréditées pour les crimes contre l’Humanité qu’elles avaient justifiés, les théories racialistes ont été définitivement disqualifiées par l’accumulation des connaissances en génétique. La revue Science a publié en février 2008 l’étude génomique la plus complète effectuée à ce jour. La conclusion en est limpide : si sept groupes biologiques sont identifiables dans l’espèce humaine (européen, subsaharien, amérindien, etc.), le chercheur Howard Cann précise que « tous les hommes descendent d’une même population d’Afrique noire, qui s’est scindée en sept branches au fur et à mesure du départ de petits groupes dits fondateurs. Leurs descendants se sont retrouvés isolés par des barrières géographiques (montagnes, océans…), favorisant ainsi une légère divergence génétique ». Mais les gènes de deux individus appartenant à un même groupe peuvent avoir plus de différences que ceux d’individus appartenant à deux groupes distincts. La couleur de la peau, critère par excellence du racisme populaire, dépend de 3 gènes sur les 36 000 que compte notre génome et n’a aucune influence sur les capacités cognitives ou éthiques de leurs porteurs !

jeudi, décembre 04, 2008

Chronique L’impasse afgane (1/6) : Quand l’occupant était russe

Un de nos camarade du collectif de Montréal, publiera 6 chroniques dans le mensuel d'Alternative Libertaire. La chronique qui s'intitule L'impasse Afghane, a débuté dans le no. du mois de novembre. Nous publions donc ici la première partie.

Entre 1979 et 1989, l’Afghanistan a connu une terrible guerre opposant l’Armée rouge aux moudjahidin. Les arguments pour justifier l’intervention soviétiques ressemblaient singulièrement à ceux de l’Otan.

L’URSS est présente en Afghanistan dès 1919, et y joue un rôle important : en 1978, son aide financière fournit 40 % du budget afghan [1]. En avril 1978, le Parti démocratique populaire d’Afghanistan prend le pouvoir sous la direction de Taraki et se rapproche de l’URSS. Les États-Unis tentent alors de déstabiliser le pays, en finançant une trentaine de groupes de moudjahidin. Le président Taraki est assassiné par Amin, dont le coup d’État déclenche une guerre civile. Plus de 600 membres du parti communiste sont alors exécutés [2]]]. Mais ce chef d’État est à son tour assassiné en décembre 1979, par un homme de main du KGB à Kaboul.

70 ans de présence soviétique

L’Armée rouge envahit à ce moment l’Afghanistan, sous prétexte d’une attaque imminente des États-Unis, qui mettrait en péril la révolution Afghane. Elle invoque une intervention en conformité avec le Traité soviético-afghan, à la demande d’un gouvernement ami aux prises avec une insurrection subventionnée par les États-Unis (article 51 de la Charte des Nations unies). Selon la Pravda, cette intervention humanitaire devait prévenir l’instauration d’un régime terroriste, protéger le peuple afghan d’un génocide et repousser une éventuelle agression étrangère [3].

La propagande à l’Est et à l’Ouest

Mais les dirigeants de l’Occident voient la réalité d’une toute autre façon, et soutiennent la guérilla anticommuniste, qu’ils jugent tout à fait légitime. Ronald Reagan compare même Ben Laden et un groupe de rebelles afghans, qu’il reçoit, à « l’équivalent moral des pères fondateurs des États-Unis » 1. Car l’Occident sait que l’URSS a des intérêts impérialistes dans le contrôle des ressources du Moyen-Orient. Un intérêt crucial également pour les pays de l’Otan, car le nord de l’Afghanistan constitue une route alternative pour le pétrole du Kazakhstan et de l’Azerbaïdjan, deux régions qui représentent 4 à 5 % des réserves mondiales de pétrole et de gaz naturel [4].

Les peuples n’aiment pas les libérateurs bottés

En mars 2008, dans des débats au parlement canadien, un soldat soviétique, qui a servi en Afghanistan en 1987, déclare que « son unité livrait de la nourriture, du bois de chauffage, des vêtements […] aux Afghans ordinaires. Elle a construit des lignes de transport d’électricité, protégé les médecins soviétiques ». Ces soldats considéraient donc « que toute personne qui leur offrait une résistance était nécessairement mauvaise », puisqu’ils étaient là pour aider ces gens [5]. Récemment, une militaire canadienne déclarait : « Ce sont les Américains qui font la guerre. Nous, on est en Afghanistan pour la paix. On bâtit des écoles, on essaie d’aider le monde. » [6] Malheureusement, en dépit des « nobles intentions », autant des soviétiques que de l’Otan, tous se foutent éperdument de la population afghane.

Pendant plus de neuf ans, 250 000 soldats soviétiques ont constamment occupé le pays, 14 000 ont été tués et 75 000 blessés. De l’autre côté, 1 242 000 morts Afghans sont estimés, dont 80 % de civils. Aujourd’hui, comment l’occupation de l’Otan, qui repose sur les mêmes raisons fallacieuses que celle de l’URSS, peut-elle espérer réussir avec 70 000 hommes ?


[1] Dupuis Déri F., L’Ethique du vampire. De la guerre d’Afghanistan et quelques horreurs du temps présent, Lux, 2007.

[2] PCUS, Report on Events in Afghanistan on 27-28 December 1979, sur www.alternativeinsight.com.

[3] Lyahovsky, A. A., & Zabrodin, V. M., Taini Afganskoi Voini [Secrets of the Afghan War], Moscow, Planeta, 1991.

[4] Genté R., « Du Caucase à l’Asie centrale, « grand jeu » autour du pétrole et du gaz », Le Monde diplomatique, juin 2007.

[5] http://www2.parl.gc.ca

[6] « S’engager… sans vouloir combattre », La Presse, 12/10/08.

Dico anticapitaliste : Qu’est-ce que l’Impérialisme ?


Nos camarades d'Alternative Libertaire, définissent chaque mois dans leur mensuel, un concept du mouvement libertaire. Ce mois-ci c'est le concept d'impérialisme qui est défini.

Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible par Jacques Dubart.

« Là où sont les intérêts, là doit être la domination » disait Charles Dilke, un politicien britannique de la fin du XIXe siècle. De fait l’impérialisme est d’abord une histoire de domination, même si celle-ci a revêtu des formes et des intensités très variables. Il y a un impérialisme colonial, qui a été celui de l’Afrique jusqu’aux années 1960, caractérisé par la brutalité et le racisme ; il y a les « protectorats » comme la Palestine, le Liban avant 1948, l’Irak ou l’Afghanistan aujourd’hui ; il y a la soumission des pays pauvres d’Afrique, d’Amérique et d’Asie par le biais des règles du commerce international ; il y a enfin les provinces dominées culturellement et économiquement au sein d’un empire (Tchétchénie, Tibet, Dom-Tom).

Mais il y a des constantes. Quand un pays est dominé par un État impérialiste, son économie est orientée en fonction des intérêts de son tuteur, au détriment de ceux de sa population. Les marchés locaux sont plus ou moins détruits par l’importation de produits industriels à bas prix, les secteurs industriels qui subsistent sont mis sous la tutelle des compagnies financières de la puissance impérialiste, la terre peut même être confisquée aux agriculteurs locaux.

L’impérialisme est synonyme de violence : guerres de conquête, répression des soulèvements « indigènes », destruction des structures sociales qui lui font obstacle, imposition de sa culture, de sa langue voire de sa religion, mise en place d’une administration limitant ou supprimant la souveraineté du pays considéré…

L’impérialisme divise les populations qui cohabitent sur un même territoire. En dressant les « petits blancs » des colonies contre les « indigènes » pour éviter qu’ils ne fassent alliance contre leurs exploiteurs ; en divisant les « indigènes » entre eux, à coup de théories racialistes (les Hutus et les Tutsis du Rwanda en sont des victimes exemplaires). Le général français Gallieni, bourreau de l’Afrique ne disait-il pas que les « premiers efforts de tout commandant territorial » doivent tendre à « l’étude des races », des « haines » et des « rivalités » qui les opposent, que « toute action politique dans la colonie doit consister à discerner et mettre à profit les éléments locaux utilisables, à neutraliser et détruire les éléments locaux non utilisables » ?

Aujourd’hui l’Union européenne, les États-Unis, la Russie et la Chine sont les principales puissances impérialistes sur la planète. « Imaginons un instant les États-Unis et l’Europe sans le flux constant de matières premières, de main-d’œuvre immigrée, de biens manufacturés produits avec des salaires de misère, sans les flux financiers allant du Sud vers le Nord, écrivait Jean Bricmont dans Le Monde diplomatique d’août 2006. Nos économies […] sont pour le moment, droguées à l’impérialisme ; mais cette drogue ne sera peut-être pas éternellement fournie aux conditions actuelles. »

mercredi, novembre 19, 2008

Ne laissons pas criminaliser toute forme de contestation !


Les camarades d'Alternative Libertaire ont publié un communiqué en réponse aux arrestations de "présumés saboteurs".

Une fois de plus, la société capitaliste viole allègrement sa propre légalité dans l’affaire dite de la « mouvance anarcho-autonome » suite à l’arrestation de 10 personnes dans le cadre d’une enquête sur des « sabotages » de caténaires sur des lignes SNCF : présomption d’innocence bafouée allègrement ; utilisation des dispositions ultra répressives des lois antiterroristes dans une affaire qui n’en relève évidemment pas ; inculpation pour association de malfaiteurs sur la simple collecte de documents politiques, sans faits concrets qui en démontreraient l’existence ! La plupart des médias, le monde politique et judiciaire laissent faire ou approuvent, tant il est vrai que « l’Etat de droit » ne s’applique réellement qu’aux puissants dans cette société si fondamentalement injuste !

Une fois de plus, une campagne de lynchage politico-médiatique est lancée pour désigner des boucs émissaires. Cette campagne de désinformations orchestrée autour de l’évocation d’une organisation « clandestine » et « radicale » a simplement pour fonction de faire monter la peur dans le pays et l’hostilité contre tous ceux et celles qui remettent en cause le système capitaliste.

Une fois de plus, la manipulation de masse reste l’arme favorite des classes dominantes, confrontées à leur propre peur d’une crise sociale pouvant remettre en cause leurs privilèges. Personne ne sait si les personnes inculpées sont effectivement les auteur-e-s de ces « sabotages » et il faut rappeler que les conséquences des actes commis sont très insignifiantes comparées aux conséquences de la crise financière orchestrée par le capitalisme.

Mais là, les coupables sont connus et les décisions prises vont jeter par centaines de millions des travailleurs et travailleuses dans la misère. Et ces délinquants vont pouvoir jouir en toute impunité du fruit de leurs crimes.

Ne nous y trompons pas ! En ces temps porteurs de remise en cause des fondements du capitalisme, cette campagne vise à criminaliser ceux et celles qui se battent contre l’injustice et la misère imposée aux travailleurs et travailleuses.

Alternative libertaire appelle à ne pas se laisser duper par cette propagande grossière. Nous considérons que ces actes de malveillance ne sont d’aucune utilité pour les luttes sociales mais, quels que soient leurs auteur-e-s, ils ne relèvent pas de l’action terroriste. Faisons cesser cette politique sécuritaires dont le seul véritable objectif est de défendre les inégalités sociales et les privilèges capitalistes.

Construisons ensemble la mobilisation de masse, la grève générale expropriatrice capable d’imposer les changements nécessaires, c’est à dire la naissance d’une société communiste libertaire !

Alternative libertaire, le 18 novembre 2008

source:Alternative Libertaire

lundi, novembre 03, 2008

Québec : Faible loyer + autogestion ? C’est la coopérative d’habitation

Un camarade de la Nuit(NEFAC-Qc) a publié au mois d'octobre un article dans le mensuel d'Alternative Libertaire. Nous vous publions ici son texte.

Dans la Belle Province, les luttes populaires des années 1970 ont imposé une forme originale de logement social. Une partie du budget public va au financement de coopératives formées par les habitantes et les habitants eux-mêmes. Un aperçu.

Quand les camarades de l’étranger débarquent dans l’immeuble baptisé Les Pénates, à Québec, ils sont toujours un peu perplexes et émerveillés. Voilà une petite communauté d’une cinquantaine de personnes qui autogèrent un immeuble, et d’où essaime une foule de projets allant du jardin sur les toits à l’atelier de sérigraphie, en passant par un site de compostage et l’incontournable barbecue collectif. Ni squat, ni commune, les Pénates sont l’une des 1 200 « coopératives d’habitation » qui existent au Québec.

Des tristes HLM…

Le logement social s’est développé tardivement au Québec et, avec seulement 10 % du parc de logements locatifs, il n’occupe pas une place aussi importante qu’en France. La construction de HLM n’y a commencé vraiment qu’en 1968. Le contexte était à la rénovation urbaine, et les HLM servaient essentiellement à reloger la population de vieux quartiers ouvriers voués à la destruction. Mais ce qu’on offrait aux locataires, c’était des tours immenses, mal insonorisées et loin de tout : de vrais ghettos, et, en plus, il n’y en avait pas assez pour tout le monde ! Des luttes urbaines ont alors éclaté pour la réhabilitation des vieux logements et la construction de HLM à échelle humaine, au cœur des quartiers centraux. C’est dans ce contexte que sont apparues, vers 1974, les premières coopératives d’habitation.

…aux coop d’habitation

L’enjeu était de sauver ce qui pouvait l’être dans les quartiers populaires, tant les immeubles que les populations traditionnelles. Or, les gens n’ayant pas les moyens de devenir propriétaires, cela ne pouvait passer que par un développement du logement social. Prenant le contre-pied des HLM qui étaient systématiquement des constructions neuves géréEs de façon paternaliste et autoritaire par les municipalités, le mouvement populaire a imposé une forme de logement collectif, autonome et autogéré, financé par l’État : la coopérative d’habitation en occupation continue. Comme les premières coopératives d’habitation étaient le fruit de luttes urbaines, elles étaient porteuses de liens de solidarité dépassant largement la seule question du logement. La coopérative n’était alors qu’un élément parmi d’autres d’un mouvement plus large, actif dans les quartiers et dont l’objectif était de changer la vie.

Il faut toutefois reconnaître que les années 1970 sont derrière nous et que le mouvement populaire est retombé. Les coopératives ont continué de se développer, avec ou sans l’aide des mouvements sociaux. Il y a en a maintenant 1 200, regroupant quelques 50 000 personnes dans 24 000 logements. Le temps a fait son œuvre et, aujourd’hui, le mouvement coopératif a plus tendance à se penser comme une entreprise collective avec un supplément d’âme – l’autogestion – que comme un mouvement social opposé au marché de l’immobilier.

Vivre en coop

Habiter une coopérative d’habitation c’est un peu, beaucoup, confronter l’idéal libertaire à la réalité. Pour faire bref, l’autogestion, c’est exigeant ! Peu de coopératives arrivent à maintenir à long terme, c’est-à-dire sur plusieurs décennies, le niveau de mobilisation nécessaire pour fonctionner sur un mode strictement assembléiste et collectif. Dans la plupart des cas, les membres finissent par abdiquer au moins une partie de leurs prérogatives – sauf la question des hausses de loyers ! – à un conseil d’administration et ne font plus d’assemblées générales qu’une fois par an – le minimum légal. Quelques grosses coopératives paient même des employé-e-s pour veiller à la gestion et à l’entretien. Celles qui n’en ont pas les moyens, et elles sont nombreuses, sous-traitent ce qui peut l’être à leur fédération régionale (les deux tiers des coopératives sont fédérées). D’autres encore s’en remettent tranquillement aux inévitables membres qui se dévouent et deviennent quasiment irremplaçables. Dans les pires cas, heureusement rares, le népotisme peut même s’installer – ça peut être aussi ça l’autonomie – et une intervention extérieure devient nécessaire pour assainir la situation.

Pourtant, vivre en coop, ça peut être merveilleux ! Pour peu qu’on s’y mette, c’est la possibilité d’articuler un espace privé à un espace communautaire. C’est pouvoir s’appuyer sur son voisinage pour intervenir sur le quartier et développer autant de projets que l’on veut. C’est l’expérience du collectif, sans le stress permanent de l’expulsion propre aux squats. C’est, enfin, une autre idée de la vie en société.

Nicolas Phébus (Nefac-Québec)

Pour en savoir plus

FRAPRU : www.frapru.qc.ca Fédération canadienne de l’habitation coopérative : www.fhcc.coop

Confédération québécoise des coopératives d’habitation : www.cooperativehabitation.coop

Dico anticapitaliste : Qu’est-ce qu’une société sans classe ?


Nos camarades d'Alternative Libertaire, définissent chaque mois dans leur mensuel, un concept du mouvement libertaire. Ce mois-ci c'est le concept de société sans classes qui est défini.

Chaque mois, un mot ou une expression passée au crible par Jacques Dubart.

Loin d’être en soi une utopie, les sociétés sans classes ont été le cadre vécu par l’humanité, de son émergence il y a 120 000 ans, jusqu’à l’invention de l’agriculture (8 000 ans avant notre ère) et jusqu’à aujourd’hui pour quelques populations en Amazonie ou en Océanie. « L’histoire des peuples sans histoire c’est […] l’histoire de leur lutte contre l’État » expliquait l’anthropologue Pierre Clastres en 1974 dans La société contre l’État. Mais ces sociétés ne sont pas pour autant émancipées au sens où, comme il l’écrivait, le propre de la société primitive « c’est d’exercer un pouvoir absolu et complet sur tout ce qui la compose, c’est d’interdire l’autonomie de l’un quelconque des sous-ensembles qui la constituent », au nom d’un ordre sacré que l’humanité ne peut modifier.

Quand, avec l’ère industrielle, le socialisme – anarchiste comme marxiste –, a esquissé le projet d’une société sans classes, il évoquait une société dans laquelle « le libre développement de chacun est la condition du libre développement de tous », comme l’écrit le Manifeste du parti communiste. La différence avec la société sans classes des chasseurs-cueilleurs est évidente.

Le projet socialiste – bien sûr nous ne parlons pas du projet du PS – repose sur la socialisation des moyens de production et d’échange. Avec la conversion des entreprises capitalistes en coopératives ouvrières, il deviendra impossible pour quelque individu que ce soit de faire fortune en s’appropriant la richesse créée par la collectivité des travailleuses et des travailleurs. Il en résultera l’abolition de la classe capitaliste et l’impossibilité qu’une minorité impose sa domination sur la société. D’autres effets seront induits par une telle mutation : l’organisation politique de la société sera profondément modifiée, avec le remplacement de l’État par une démocratie construite à partir de la base de la société.

Ensuite, la fin de la course à l’enrichissement individuel permettra de réorienter les objectifs de production vers la satisfaction des besoins de toutes et de tous, et incitera au développement d’une société solidaire. Malgré tout, il subsistera sans doute au sein de la société des groupes sociaux différentiables. Il sera alors nécessaire d’en redéfinir les frontières en réorganisant les métiers et les services publics et en développant les savoirs et les formations, ceci afin de mettre fin à l’inégalité entre urbains et ruraux, ou travailleurs manuels et intellectuels, comme l’a suggéré Cornelius Castoriadis. Il ne s’agit pas qu’une fois la classe capitaliste disparue, se forme une classe de « techniciens » ingénieurs, intellectuels ou savants, qui piloteraient la société !

Pour finir, une société sans classe n’est pas nécessairement une société sans système de domination – le racisme et le patriarcat par exemple ne disparaîtront pas par enchantement ! Mais le système capitaliste en tire profit et les encourage. Quand il aura disparu, un grand pas aura été franchi !