Revue archéologique de Picardie N° spécial 10 - 1995
VAISON-LA-ROMAINE, LA MAISON DITE "LE PRÉTOIRE'
Claudine ALLAG *, Alix BARBET
La maison dite "le Prétoire" à Vaison-la-Romaine (Vaucluse) est en réalité une vaste demeure dont les terrasses successives s'étagent sur le flanc ouest de la colline de Puymin (fig. 1). Aile étroite adossée au mur de clôture et bordant au nord la terrasse inférieure des jardins et des communs, le bâtiment secondaire qui nous occupe est constitué actuellement, d'ouest en est, de latrines (à l'extrémité en bordure de rue), de deux pièces contigues peintes en panneaux unis rouge, jaune et noir, suivies d'un espace à simple enduit nu, et d'une autre pièce à décor à fond blanc (fig. 2). Les deux pièces contigues (pièces I et II sur le plan) ouvrent, au sud, sur une courette de service. Leur vive polychromie, gardant l'atmosphère des intérieurs antiques, est chose assez rare sur le site (1) pour que, grâce à la municipalité de Vaison-la-Romaine, au département du Vaucluse et au Service Régional de l'Archéologie, ces vestiges aient donné lieu à plusieurs missions d'étude et de restauration et bénéficié des mesures indispensables à leur mise en valeur (2)
Le décor en place
(Alix BARBET)
Le décor, tel qu'il apparaît, est extrêmement banal et schématisé, des champs blancs pour les zones les plus modestes, de simples champs colorés, qui font alterner l'ocre jaune et l'ocre rouge, pigments naturels très courants dans la région, avec du noir et des bordures vertes cernées d'un filet blanc, dans les pièces secondaires (3).
La pièce III
Elle donne accès à une série de petites pièces à cloisons légères vers l'est, qui ont disparu (note 4 et fig. 3). Seul le mur ouest a gardé un enduit blanc, découpé en compartiments de plinthe et en panneaux de zone médiane, par des filets et des bordures noires. En plinthe, haute de 55 cm au minimum et de 60 cm au maximum, alternance de compartiments larges et de compartiments étroits. Une large bande horizontale et verticale fait la transition avec les panneaux de zone médiane, à filets d'encadrement intérieur, dont les verticaux sont
dans l'exact prolongement des filets qui déterminent les petits compartiments de plinthe. Aux angles, deux volutes simplifiées, suivies de cinq points dans la diagonale, joignent l'encadrement intérieur à l'encadrement extérieur des bandes noires. La couleur d'origine semble bien avoir été jaune. Pour tenter de retrouver l'élévation perdue, on constatera qu'un simple calcul en pieds romains peut nous aider. La plinthe est comprise entre 55 cm et 60 cm, soit deux pieds romains d'une valeur non déterminée entre 28 et 30 cm. Le panneau médian central mesure 112,5 cm, celui de gauche 114 cm, soit quatre pieds (28 cm à 28,5 cm de valeur). Le module employé est donc vraisemblablement de deux pieds. En effet, on observe souvent que la largeur des panneaux, divisée par deux, fournit une unité qui est reportée trois fois en hauteur (voir ci-après § la pièce II et la note 5). On proposera donc six pieds de 28 cm au minimum, soit 168 cm qui, ajoutés aux 56 cm de plinthe et aux 6cm de bande de séparation nous donnent 230 cm de haut ; il faut y ajouter une zone supérieure disparue, d'une vingtaine de centimètres au plus. L'élévation totale ne devait pas dépasser 2,50 m (9 pieds de 28 cm donnent 2,52 m).
* C.N.R.S. - U.M.R. 126-8
CEPMR
Abbaye de Saint-Jean-des- Vignes
F - 02200 SOISSONS
(1) - II faut ajouter une paroi de la maison des Messii conservée en place sans protection jusqu'en 1990 et donc considérablement altérée par les intempéries (elle a été déposée par une équipe du CEPMR), ainsi que les plinthes de la "Maison des Animaux Sauvages", écroulées la même année sous l'action des pluies.
(2) - Ces missions, réalisées à l'initiative d'A.Barbet (directrice du CEPMR, CNRS), ont été confiées : pour la restauration, à L. Krougly, M. Monraval, R. Nunes Pedroso, H. et G. Taillefert ; pour la fouille à C. Allag et H. Vandersteene.
(3) - Pour un état récent des connaissances, cf. Pigments et colorants, de l'antiquité et du Moyen Age, Paris, Actes du Colloque international du CNRS, Orléans, 1989, Paris 1990.
(4) - cf. C. ALLAG, A. BARBET, F. GALLIOU, L. KROUGLY, Peintures romaines Musée de Vaison-la-Romaine, guide-catalogue, Aix-en-Provence, 1987, fig. 4, p. 7.
(5) - Pour le parti qu'on peut tirer des études de proportions, appliquées à des variantes plus riches à Vaison même, cf. M.-E. BELLET et alii, Nouvelles observations sur l'habitat gallo-romain à Vaison-la-Romaine (Vaucluse), annexes I et II par A. BARBET, sur les peintures de la Villasse nord et du site de Pommerol, RAN, 23, 1990.
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