« Exprimer le passé en termes historiques ne signifie pas le reconnaître ‘‘tel qu’il a été réellement’’. Cela revient à s’emparer d’un souvenir tel qu’il apparaît en un éclair à l’instant d’un danger. La préoccupation du matérialisme historique est de retenir une image du passé telle qu’elle s’installe à l’improviste, pour le sujet historique, à l’instant du danger. Le danger menace aussi bien la persistance de sa tradition que ceux qui en prennent réception. Dans un cas comme dans l’autre, le risque est de passer pour l’instrument de la classe dominante. A chaque époque, il faut tenter de refaire la conquête de la tradition, contre le conformisme qui est en train de la neutraliser.
Le Messie ne vient pas seulement en tant que rédempteur ; il vient en tant que celui qui surmonte
l’Antéchrist. Seul l’historiographe a le don d’allumer dans le passé l’étincelle d’espoir qui en est pénétrée : même les morts ne seront pas en sécurité face à l’ennemi si celui-ci l’emporte. or cet ennemi n’a pas arrêté de l’emporter.»
Walter BENJAMIN | 1940
C'est un concours international concernant la mise en valeur du Genius Loci révolutionnaire du site du Mur des Fédérés. Les mêmes questions que nous posons aux candidats avaient été largement débattues par les survivants Communards revenus du bagne ou d’exil après l’amnistie de juillet 1880, qui demandaient alors aux autorités la permission de construire un monument. Eugène Pottier suggérait en 1883, plutôt qu’un classique monument, dont le destin est par nature de régresser en habitude visuelle, de placer aux côtés du Mur, un amas de pavés formant une barricade, et :
« Que sur chaque pavé, peuple, ton ciseau grave
Une date de meurtre ou le nom d’un martyr !
De l’histoire, qu’il soit l’appel à la revanche
Le monument des fédérés ! »