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En une : "1917 : Lénine rétablit les contrats aidés" par Placid !

Un article sera mis en ligne, chaque semaine. Les autres articles seront archivés sur notre site quelques mois plus tard. D’ici-là, tu as tout le temps d’aller saluer ton kiosquier ou de t’abonner...

Édito : La répression qui vient

« Nous voulons cesser ce genre d’incompréhension. Notre but n’est jamais d’agir avec surprise, mais avec un maximum de pédagogie, pour faire baisser le niveau de violence. »

Ainsi présente-t-on, au cabinet du directeur général de la gendarmerie nationale [1], le nouveau dispositif de maintien de l’ordre destiné à juguler la colère sociale qui monte. Ces pandores stratèges semblent vivre dans un monde merveilleux de type Bisounours, où les matraques seraient des sucres d’orge et les lacrymos du Chanel N°5. Pour eux, la question des violences policières n’existe pas, en manif comme en banlieue. Quid d’Adama Traoré, de Rémi Fraisse, de la cohorte de gens éborgnés, fracassés, comme à Bure récemment ? De l’« incompréhension ». Un non-sujet.

Nan, le vrai problème est celui posé par la présence de casseurs et autres professionnels de l’émeute dans les rangs des manifestants pacifiques. Ici, le condé pédagogue de la start-up society macronienne passe, pépouze, des Bisounours à Orwell, en plus high-tech. Aux oubliettes, les sommations par haut-parleur que personne n’entend ou la fusée rouge que personne ne voit. Finis, les arrosages systématiques de lacrymos ou les charges massives au premier incident. Voici venu le temps des grands panneaux lumineux à message variable disposés le long des cortèges (« À cinquante mètres, nos confrères pètent les dents d’un ado, veuillez faire un détour, cordialement »). Dans le même temps, les gradés « live-twitteront » à haute dose les accrochages (« Avons réglé la situation sans user de la force #frenchtechnocop sympa »).

Autre objectif : transformer les défilés en « bulles étanches », soit l’application du principe de la nasse au cortège tout entier. Il faut que la manif soit totalement exogène à la vi(ll)e, détachée de tout. Et puis, expliquent les gradés avec gourmandise, c’est vers les Ricains qu’il s’agit de se tourner, eux qui ont la chance de bénéficier des toutes dernières innovations. Comme la « projection de lumière stroboscopique aveuglante », les « produits de marquage type Smart Water » ou les « canons à sons de type Shofar ». Rien de flippant, hein. Juste de quoi garantir la sécurité des manifestants.

Bref, on n’a pas fini de se marrer en manif. Et si jamais le pékin moyen tique à l’idée de se faire démolir les oreilles à grand renfort d’ultra-sons ou défoncer les mirettes à coups de flashs, qu’il sache bien que tout ça se fera avec le maximum de « pédagogie ». T’as compris, pied tendre, ou bien il faut te l’expliquer à coups de « smart matraques » ?

Dossier 1917-2017 : on ne mélange pas les bolchos et les soviets !

Entretien avec l’historien Éric Aunoble : 1917-2017 : Que lire ? « Marine Le Pen souhaite une révolution de la proximité », « Mélenchon appelle à une révolution citoyenne » ; « Révolution, le livre-programme de Macron se hisse dans le top des ventes », « La droite doit faire sa révolution populaire, explique Guillaume Peltier », etc. Si le mot « révolution » peut être ainsi mis à toutes les sauces de la politicaillerie, c’est sans doute qu’il a été complètement désamorcé.

Longtemps, la Révolution russe a servi de référent absolu au bouleversement du monde. Cela ne semble plus être le cas. Éric Aunoble est l’auteur d’un petit bouquin synthétique, La révolution russe, une histoire française : lectures et représentations depuis 1917 [2], qui parcourt la réception dans le champ éditorial et politique français de cet événement majeur. Rencontre avec un historien bolchevik autour d’un café chaud et d’un objet (presque) froid.

Anarchistes vs bolcheviks : Comment il ne faut pas faire la révolution ! Peu avant sa mort en 1920, Kropotkine écrivait : « Nous apprenons à connaître en Russie comment le communisme ne doit pas être introduit. » Le vieux théoricien anarchiste se gardait d’attaquer trop ouvertement les nouveaux maîtres de Russie pour ne pas alimenter la réaction. Les anarchistes comptèrent néanmoins parmi les premiers critiques – et les premiers persécutés – du bolchevisme.

Chayanov, en défense des paysans : À la lueur du moujik Pour Lénine comme pour Staline, le paysan était potentiellement soit un bourgeois, propriétaire terrien (koulak), soit un ouvrier prolétarisé bon à suer dans les usines à aliments que furent les kolkhozes et les sovkhozes. L’intellectuel Alexandre Chayanov (...)



Par Soulcié {JPEG}



Un graphiste vous manque, et tout est dépeuplé. Une autre le remplace, et la vie du journal reprend son cours. Oui, les choses sont bien faites. L’ami Ferdi, qui se chargeait de la maquette de CQFD depuis deux ans, a donc mis les voiles : le contrat aidé dont il bénéficiait est arrivé à échéance (comme bien d’autres, voir nos trois pages sur le sujet). Le camarade nous manquera. Toujours talentueux (mais parfois un peu bougon), il avait l’œil avisé et le coup de souris sûr, nous mitonnant des pages aux petits oignons.

Mais son départ ne nous laisse pas orphelins : le Chien rouge lui a trouvé une remplaçante. Pour prendre sa place, Cécile. Laquelle débarque avec une délicate mission, à conduire sur une ligne de crête : « Le changement dans la continuité » - on dirait le programme d’un politicien centriste… Sacré challenge. Elle a commencé à le relever dès ce numéro, elle va continuer à affiner au fil des mois. Pas question, en tout cas, que vous perdiez vos repères et que vous ayez l’impression que les aboiements du Chien rouge ne sont plus ce qu’ils étaient.

Et puisqu’on parle d’arrivée, il est temps de combler un impardonnable retard. Celui que nous avons mis à féliciter Naïke et Mathieu, camarades de la presse pas pareille ayant donné naissance mi-juillet à une petite Anouk. Joie et cotillons – tournée générale de mousseux ! On en profite pour trinquer aussi à la santé des tenanciers du génial blog Graffitivre, qui depuis un bail approvisionnent CQFD en clichés de tags incisifs et d’absurdes slogans muraux [5]. Leur rubrique photo était tellement bien que nous avons décidé d’en reprendre le principe à notre compte. Scandale ? Que non, ils l’ont bien pris. À preuve leur gentille réponse à notre lâche abandon : « Pas de problèmes pour le changement. On fourguera notre came à des journaux autrement plus sérieux comme l’Écho des Savanes ou Mickey Parade. » La presse mainstream n’a (...)




Peu avant sa mort en 1920, Kropotkine écrivait : « Nous apprenons à connaître en Russie comment le communisme ne doit pas être introduit. » Le vieux théoricien anarchiste se gardait d’attaquer trop ouvertement les nouveaux maîtres de Russie pour ne pas alimenter la réaction. Les anarchistes comptèrent néanmoins parmi les premiers critiques – et les premiers persécutés – du bolchevisme.

20 décembre 1917. Moins de deux mois après le « coup d’État d’octobre » (selon la formule de Rosa Luxemburg) est créée la Commission extraordinaire de lutte contre le sabotage et la contre‑­révolution –­ en russe Vetchéka. Voilà lancée la sinistre Tchéka, organe de répression du nouveau pouvoir indépendant de la justice. « Au nombre des facteurs qui ont assuré la victoire des bolcheviks, écrit l’historien Michel Heller, il faut compter […] une découverte géniale de Lénine : l’utilisation de la police politique et de la terreur pour qui veut garder le pouvoir. »

11‑­12 avril 1918. Des détachements armés de la Tchéka attaquent les vingt‑­six locaux anarchistes de Moscou. Dans deux lieux, de violents combats opposent tchékistes et anarchistes. Bilan : une quarantaine de morts et plus de cinq cents arrestations parmi les anarchistes, ainsi que le démantèlement des organisations libertaires de la nouvelle capitale russe. Désormais, les bolcheviks qualifient les anarchistes de « bandits ». Dans la novlangue qui s’invente, il s’agit  (...)


Il bénéficiait encore récemment d’une relative audience et d’une certaine capacité de nuisance. Mais depuis trois ans, toutes deux s’effondrent : en roues libres, le pitoyable idéologue Alain Soral parvient de moins en moins à faire illusion auprès de ses adeptes. La fin des haricots ?

Il y a peu, il se rêvait encore en haut de l’affiche, le bras levé. Et multipliait les postures fantasmées. Courageux résistant au système. Âme damnée de l’ultra-droite tirant les ficelles en coulisse. Idéologue posant un renouveau, à une sauce très personnelle, du national-socialisme. Dénonciateur obstiné des juifs, gauchistes, antifas, bien pensants. Oui, tout ça.

Comme Alain Soral a un incontestable don pour faire passer des vessies pour des lanternes et pour proclamer tout et son contraire en donnant à l’auditeur abêti l’impression de saisir la façon dont (dis)fonctionne le monde, il s’était constitué depuis 2007 une certaine audience. Et attirait à lui les antisémites revendiqués comme les jeunes gens (surtout des hommes) perdus en recherche d’une mensongère vérité. D’où une stature centrale au sein de l’auto-proclamée « dissidence », marigot fangeux où nagent de médiocres poissons aux tendances diverses – boneheads, négationnistes, national-socialistes, antisémites, suprémacistes, survivalistes, etc.

Bref, il était au faîte de sa (...)


En grève ! Depuis le 26 septembre, les salariés de l’usine MOP, où est imprimé CQFD, bloquent le site. Ultime recours pour dénoncer le pillage de l’activité organisé depuis le Luxembourg par leur propriétaire, le groupe Riccobono.

En langage courant, ça s’appelle un hold-up. Mais pas dans le monde de l’économie dérégulée. On n’y traite pas de voleurs les gens qui se comportent comme tels. On les laisse poursuivre leur fructueux bonhomme de chemin, basé sur la prédation et l’exploitation. Le constat n’a rien de neuf, bien sûr. Surtout pas pour les lecteurs du Chien rouge, habitués à l’entendre aboyer. Mais s’il fait œuvre de critique sociale, le journal – sans chef, ni proprio – y est rarement directement confronté.

Cette fois, si. Pour le coup, le Chien rouge s’est retrouvé la truffe plongée au cœur d’un conflit social, opposant ouvriers en lutte et patronat. On vous explique : les exemplaires de CQFD sont imprimés depuis trois ans à l’imprimerie Marseille Offset Print (MOP), à Vitrolles. Mais depuis plusieurs mois, ses 60 salariés (et 27 intérimaires) sont entrés en conflit avec leur proprio, le groupe Riccobono.

En début d’année, MOP était placée en redressement judiciaire. Les salariés ont depuis multiplié les propositions pour sauver leur travail. En (...)


Jean-Baptiste Malet signe une longue enquête, menée sur quatre continents, autour de la tomate industrielle. Le Chien rouge l’a rencontré lors de son passage à Marseille. Concentré de son livre, L’Empire de l’or rouge [2].

Par Baptiste Alchourroun. {JPEG}

CQFD : Quel est le point de départ de cette enquête mondiale sur la tomate d’industrie ?

En 2011, j’ai découvert que la conserverie Le Cabanon, dans le Vaucluse, avait été rachetée par l’armée chinoise en 2004 [1], via l’une de ses entreprises agroalimentaires : Chalkis. Découvrir qu’une filiale de l’armée chinoise produisait du ketchup en Provence m’a beaucoup étonné. J’ai demandé à rencontrer les dirigeants chinois du Cabanon et j’ai essuyé un refus. En me rendant tout de même sur place, j’ai jeté un coup d’œil à travers les grilles et j’ai aperçu des barils : de grands fûts bleus, de 230 kilos de triple concentré, étiquetés « Made in China ». Cette découverte m’a longtemps hanté, et l’envie m’est venue de remonter toute la filière.

Du Ghana aux États-Unis, de la Chine à l’Italie, tu as fait le tour du monde de la tomate pour dévoiler la géopolitique du concentré de tomates, mais également pour raconter son histoire...

Avec cette enquête, j’ai voulu raconter le capitalisme à travers la tomate, en allant à (...)


Dans son cinquième roman Mercy, Mary, Patty, Lola Lafon interroge la destinée de jeunes femmes refusant de suivre les rails qu’on leur a assignés, au premier rang desquelles la sulfureuse Patricia Hearst.

Patty Hearst est née deux fois. Une première fois le 20 septembre 1954, sous forme de riche héritière de l’empire médiatique Hearst. Une seconde le 2 février 1974, quand la jeune fille est enlevée par un groupe révolutionnaire, l’Armée symbionaise de libération (SLA), dont elle ne tarde pas à épouser la cause armes à la main, rompant violemment avec sa destinée toute tracée. Certains y ont vu la conséquence d’un lavage de cerveau, une sorte de syndrome de Stockholm foudroyant. D’autres estiment au contraire que sa « défection » avait des causes plus profondes, inhérentes à sa condition de jeune femme étouffée par son milieu social. Les premiers lui dénient tout libre arbitre ; les seconds estiment qu’elle a fait un choix – Lola Lafon est de ceux-là.

Sous sa plume, Patty Hearst n’a pourtant rien d’une héroïne. Le « basculement » de la riche héritière est certes au cœur de son dernier ouvrage, Mercy, Mary, Patty (Éd. Actes Sud). Mais avant tout pour sa valeur emblématique : il symbolise ces rails placés sur la voie des femmes et les (...)


Après la publication d’un communiqué revendiquant l’incendie d’un garage de la gendarmerie de Grenoble dans la nuit du 20 au 21 septembre, Indymedia Grenoble et Indymedia Nantes ont été menacés par la police française. Les équipes qui administrent ces sites ont reçu des courriels de l’Office Central de Lutte contre la Criminalité liée aux Technologies de l’Information et de la Communication (OCLCTIC) exigeant la dépublication sous vingt-quatre heures des articles concernés, sous peine de blocage et déréférencement des sites.

Les auteur·e·s du communiqué expliquaient que l’incendie du garage avait été mené « dans une vague d’attaques de solidarité avec les personnes qui passent en procès ces jours-ci » dans l’affaire de la voiture de police brûlée du quai de Valmy. Dans l’incendie de ce garage à Grenoble, plusieurs dizaines de véhicules ont été brûlés. Voici le texte de ce communiqué :

Solidarité incendiaire

Ce jeudi, à trois heures du matin, deuxième jour du procès de la voiture brûlée.

Avons pénétré dans la caserne de gendarmerie Vigny-Musset. Avons incendié six fourgons d’intervention et deux camions de logistique. Le garage et l’entrepôt ont été ravagés sur plus de 1500 mètres carrés.

Cet acte s’inscrit dans une vague d’attaques de solidarité avec les personnes qui passent en procès ces jours-ci.
Forte accolade à Kara et Krem.
Une pensée pour Damien, récemment tabassé par les flics.

Quelle que soit l’issue du procès, on continuera à s’en prendre à la police et à la justice.

Notre hostilité est un feu qui se propage.

Des nocturnes ».

Ce (...)



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