Année passée en revue : 2010

Les événements de l’année 2010 ont clairement montré que le marasme économique issu du krach financier de 2008 n’était pas simplement un ralentissement cyclique. Il représente bien l’effondrement du système capitaliste mondial et un tournant dans les relations de classe à une échelle mondiale.


En réaction à la crise de la dette souveraine, notamment les faillites publiques en Grèce et en Irlande, les classes dirigeantes européennes ont adopté une politique d’austérité sauvage. Elles ont lancé une contre-révolution sociale visant à détruire le système d’État providence datant de la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Aux États-Unis, le gouvernement Obama a initié des attaques à grande échelle dans le domaine de la santé sous prétexte d’effectuer des « réformes » en présidant la pire récession depuis les années 1930.

Une série de catastrophes nationales et sociales – à commencer par le tremblement de terre en janvier en Haïti qui a fait 200 000 morts – ont mis en lumière les conséquences de l’inégalité sociale et l’échec historique du système capitaliste.

Les relations internationales devinrent de plus en plus instables et l’impérialisme américain la force motrice des agressions militaires, non seulement en Irak en en Afghanistan, mais finalement contre l’Iran et la Chine. Ceci fut accompagné d’attaques contre les droits démocratiques au plan international alors que la classe dirigeante de chaque pays cherchait à préparer des mesures répressives afin de faire face à l’opposition de masse et aux soulèvements sociaux.

En prévision de développements majeurs dans la lutte des classes, le Comité International de la Quatrième Internationale a organisé des congrès fondateurs de ses sections en Australie, en Grande-Bretagne et en Allemagne alors qu’un congrès du SEP (Socialist Equality Party) aux États-Unis adoptait un programme pour le parti. L’année a aussi connu un développement majeur avec la campagne menée par le CIQI (Comité International de la Quatrième Internationale) en défense des idées et de l’héritage de Léon Trotsky.

Des manifestants affrontent des policiers durant des émeutes à l’occasion du rassemblement du 1ᵉʳ mai à Athènes | Crédit photo : PIAZZA del POPOLO

La contre-révolution sociale et la résurgence de la classe ouvrière

Dans le rapport présenté début 2010 durant une réunion nationale des membres, le président national du SEP (US), David North, et le secrétaire national, Joseph Kishore, ont passé en revue les expériences acquises lors de la première décennie du 21ᵉ siècle. L’euphorie qui était allée de pair avec le début du nouveau millénaire avait viré, sous l’impact de l’aggravation de la crise, à une morosité que le magazine Time a résumé sous le titre, « La décennie sortie de l’enfer ».

Ce rapport prévenait qu’il existait deux réponses de classe diamétralement opposées à l’effondrement financier mondial :

« L’effondrement de 2007-2008 a mis en mouvement une massive restructuration des relations géopolitiques, économiques et sociales mondiales. Il n’y a que deux issues à la crise qui a surgi de ce processus de bouleversement. La solution capitaliste requiert une baisse drastique des niveaux de vie de la classe ouvrière américaine et internationale, une répression intérieure, la destruction des droits démocratiques de la classe ouvrière et le déclenchement d’une violence militaire d’une ampleur jamais vue depuis la Deuxième Guerre mondiale. L’unique alternative à ce cas de figure capitaliste est la solution socialiste : c’est-à-dire la prise de pouvoir politique de la classe ouvrière américaine et internationale, l’établissement du contrôle démocratique populaire sur les ressources industrielles, financières et naturelles ainsi que le développement d’une économie scientifiquement planifiée au niveau mondial pour satisfaire les besoins de la société en général au lieu de la recherche destructrice du profit et de l’accumulation personnelle de richesses ».

La Grèce avait valeur de test pour la « solution » capitaliste en Europe et internationalement en marquant une nouvelle étape de la lutte des classes. L’Union européenne, le Fonds monétaire international et la Banque centrale européenne agissent de concert au nom de l’aristocratie financière et le gouvernement allemand de la chancelière Angela Merkel donne le rythme. D’un bout à l’autre du pays, les travailleurs ont été poussés dans une lutte commune contre un capital organisé mondialement.

L’année a débuté après l’abaissement de la note de la dette grecque et des coupes dans les dépenses publiques appliquées par le gouvernement PASOK de George Papandreou qui avait promis de « saigner aux quatre veines » la classe ouvrière. Les ministres des Finances de l’Union européenne ont néanmoins rejeté ces mesures comme étant insuffisantes en soumettant la Grèce au diktat de l’UE.

Les mesures d’austérité grecques furent accueillies par une grève générale de plus de deux millions de travailleurs. En avril, Standard & Poor’s relégua la dette souveraine grecque dans la catégorie spéculative (junk status) en provoquant des hausses considérables des taux d’intérêt au point d’occasionner la faillite de l’État. Face aux protestations de masse, le gouvernement grec du premier ministre Papandreou imposa en échange d’un renflouement de 110 milliards d’euros une nouvelle série de coupes dans l’emploi et les retraites.

Dans une déclaration, le WSWS a souligné les implications révolutionnaires de la crise :

« Le risque grandissant d’une faillite de l’État offre deux alternatives claires : soit la classe dirigeante garde sa richesse en appauvrissant les travailleurs soit les travailleurs exproprient la classe dirigeante. Le défi auquel sont confrontés les travailleurs est de comprendre la totalité des implications politiques et historiques des luttes auxquelles ils doivent actuellement faire face ».

La crise européenne a alimenté d’intenses divisions au sein de la classe dirigeante. Mi-mai, le président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, avertissait que le continent était confronté à la « situation la plus difficile depuis la Seconde Guerre mondiale – peut-être même depuis la Première Guerre mondiale ». Il fut fait état de réunions agitées au sujet de la Grèce impliquant les chefs d’État de la France et de l’Allemagne durant lesquelles l’avenir de l’euro était remis en question. Dans « Le retour du spectre de la catastrophe » le WSWS écrivait :

« Suite à la dissolution de l’Union soviétique en 1991, conséquence de la trahison du socialisme par les régimes staliniens réactionnaires, les propagandistes du capitalisme mondial avaient proclamé le triomphe historique du marché. Les luttes révolutionnaires du 20ᵉ siècle contre le capitalisme avaient, selon eux, été des efforts futiles et malavisés, des aberrations du processus “normal” de l’histoire, et condamnées à l’échec. La conception matérialiste marxiste de l’histoire et son analyse des contradictions du mode de production capitaliste avait été réfutée ».

« À présent les réfutations du marxisme sont réfutées par le développement objectif de la crise du capitalisme mondial. Cette crise est à présent tellement avancée que les représentants les plus importants du système invoquent le spectre des catastrophes qui, au siècle dernier, ont coûté la vie à des dizaines de millions de personnes ».

Pour perpétrer ses attaques contre les travailleurs grecs, la classe dirigeante comptait fortement sur les syndicats et leurs proches collaborateurs au sein de l’organisation petite-bourgeoisie jadis de gauche, SYRIZA (une coalition de groupements de pseudo-gauche comprenant d’anciens staliniens, des renégats pablistes du trotskysme, les groupements de « capitalistes d’État » ainsi que des écologistes) et le Parti communiste grec (KKE). Le rôle joué par ces organisations a été celui de maintenir l’opposition liée à l’establishment politique. Alex Lantier et John Vassilopoulos ont écrit au sujet du rassemblement du 14 mai à Athènes :

« Quant à la SYRIZA, elle désoriente et démoralise l’opposition de la classe ouvrière. En effet, l’une des factions influentes de la SYRIZA, l’Aile novatrice, prône la formation d’une coalition politique ouverte avec le PASOK ».

« Dans ce contexte, le trait prédominant du rassemblement de la SYRIZA a été l’absence de tout appel à renverser le gouvernement Papandreou malgré sa politique antisociale profondément impopulaire. Au lieu de cela, les principaux intervenants – le dirigeant de la délégation parlementaire de la SYRIZA, Alexis Tsipras et l’ancien membre du parlement, Manolis Glezos – ont demandé une politique monétaire plus souple et mis en avant le chauvinisme grec ».

En juillet et en août, 33 000 chauffeurs routiers grecs ont défié le gouvernement PASOK en organisant une grève sur le tas contre les mesures du FMI et en paralysant l’économie grecque. Alors que la survie du gouvernement était en jeu, les syndicats et SYRIZA lui sont venus en aide en dénonçant la grève comme étant « un chantage illégitime ». Ceci permit d’ouvrir la voie au gouvernement pour mobiliser l’armée et écraser la grève.

Contrairement aux appels réactionnaires lancés par les organisations de pseudo-gauche au nationalisme grec, le WSWS a mené sans relâche, sur la base d’une perspective internationaliste des États socialistes unis d’Europe, une campagne pour la défense de la classe ouvrière grecque.

Des coupes sociales comme en Grèce furent imposées à l’ensemble de la zone euro par les gouvernements européens et le FMI dans le but de réduire le déficit d’un montant énorme de 400 milliards d’euros. Ces attaques relevant d’une politique de la terre brûlée menée contre l’État providence comprenaient des coupes sociales de 80 milliards d’euros en Espagne, de 2 milliards d’euros au Portugal et de 24 milliards d’euros en Italie. La crise de la dette a aussi menacé les pays appauvris d’Europe de l’Est, où la Lettonie, la Roumanie et la Hongrie devaient déjà des milliards au FMI.

L’Irlande a reçu en novembre un renflouement de 110 milliards d’euros prévoyant une injection directe de 35 milliards d’euros dans les banques irlandaises. Comme dans le cas de tous ces accords, les fonds spéculatifs et les obligataires étaient protégés tandis que l’octroi des fonds était tributaire d’un assaut contre la classe ouvrière.

En France, le gouvernement Sarkozy a exigé des coupes s’élevant à 100 milliards d’euros. Plus d’un million de travailleurs du secteur public et de fonctionnaires ont débrayé en mars et plus de 600 000 travailleurs et jeunes ont participé à 177 manifestations dans tout le pays. Malgré la montée de l’opposition populaire à l’encontre des coupes sociales, les syndicats ont organisé huit « journées d’action » nationales. Cela a été le cas toutefois sans la moindre intention de défier et encore moins de renverser le gouvernement. Bien au contraire, les syndicats ont pleinement collaboré dans le dos de la classe ouvrière pour appliquer les coupes.

À l’automne, les mouvements de grève des travailleurs des raffineries de pétrole avaient menacé de paralyser l’économie, mais le gouvernement Sarkozy a fait appel à la police pour mettre de force un terme à la grève. Les syndicats ne défendirent pas les travailleurs, au contraire, ils soutinrent les briseurs de grève. Le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) joua un rôle crucial dans cette trahison en insistant que les syndicats seuls avaient le droit de mener les luttes des travailleurs.

En Grande-Bretagne la première grève générale depuis l’éclatement de la crise économique en 2008 eu lieu en mai. Après 13 ans au pouvoir, le Parti travailliste vit le pourcentage de ses suffrages chuter à un niveau record pour l’après-guerre. En vue de remplacer les travaillistes (Labour), les Conservateurs formèrent une coalition avec les libéraux-démocrates dirigée par David Cameron et se sont engagé à perpétrer des attaques féroces contre la classe ouvrière.

Une déclaration publiée par le SEP de Grande-Bretagne a expliqué que la coalition Tory-Lib-Dem de Cameron appliquerait les mêmes mesures que celles exigées par l’UE et le FMI en Grèce, en Irlande, en Espagne et dans les autres pays de la zone euro marqués par la crise et qui provoqueraient inévitablement des luttes de masse de la classe ouvrière.

L’année s’acheva sur une note sinistre lorsqu’en décembre le gouvernement espagnol – suivant l’exemple grec et français – déploya l’armée contre les travailleurs en grève. Les contrôleurs aériens espagnols avaient organisé une massive grève par arrêts-maladie pour protester contre la décision de privatisation partielle de l’autorité de gestion de l’aéroport. En réaction, le gouvernement décréta l’état d’urgence pendant quinze jours, le premier depuis la chute de la dictature fasciste en 1975. Sous la menace des armes, les 2200 contrôleurs aériens furent contraints de reprendre le travail et soumis à la discipline militaire. Un certain nombre de contrôleurs aériens écrivirent au WSWS, dont l’un d’entre eux a averti que « C’est comme si on vivait à présent sous quelque chose de l’ordre de la Russie stalinienne, de la Stasi ou des SS de Hitler ».


La « réforme » de la couverture santé par Obama et la crise sociale en Amérique

Pendant que l’Europe s’enfonçait de plus en plus dans la récession, des millions de travailleurs restaient sans emploi aux États-Unis en étant menacés de saisie immobilière et d’expulsion, appauvris et affamés, malgré les affirmations du gouvernement Obama qu’une « reprise » économique avait démarré.

La croissance explosive de la pauvreté et de l’inégalité sociale aux États-Unis après le krach financier de 2008 a été la conséquence d’une politique délibérément poursuivie par le gouvernement Obama qui a à la fois cherché à protéger les fortunes acquises par l’aristocratie financière de façon criminelle et à exploiter la baisse brutale des niveaux de vie des travailleurs américains pour obtenir un avantage concurrentiel en faveur des entreprises américaines.

Dans la mesure où il y eut une reprise – des taux de profit des grandes banques et des grands groupes ainsi que des portefeuilles d’actions des gros investisseurs – elle était fondée sur la politique de licenciement de masse, de réductions drastiques des salaires et des prestations sociales qui avait débuté en 2009 avec la restructuration de l’industrie automobile engagée par Obama.

À travers tout le pays, les États ont subi la plus forte baisse de revenu jamais enregistrée en raison principalement du chômage de masse créé par la récession. Le gouvernement Obama a refusé d’accorder une aide fédérale pour réduire le déficit budgétaire collectif des États. Ce déficit massif a conduit à des attaques au niveau fédéral contre les services publics, notamment les écoles et les programmes sociaux.

Obama s’est donné la peine d’applaudir les licenciements de masse des enseignants du secondaire à Rhode Island. Avec les coupes touchant durement l’enseignement supérieur, les frais d’inscription aux universités américaines ont monté en flèche, et la facture de l’enseignement supérieur devenait un douloureux fardeau pour de nombreux jeunes. À la mi-2010, la dette étudiante dépassait pour la première fois celle des cartes de crédit. En novembre, le WSWS publiait le rapport d’enquête détaillé, (The American Student Loan Racket).

Le gouvernement Obama a fait passer au congrès contrôlé par les démocrates deux importants textes législatifs. Le gouvernement a cyniquement qualifié de « réforme » progressiste sa réorganisation du système des soins de santé, mais son véritable objectif est d’initier une attaque considérable contre les soins de santé. Les médias traditionnels, en particulier le New York Times l’avaient soutenu comme une mesure pour réduire le « gaspillage » des dépenses afférentes aux malades et aux personnes âgées.

Cette loi réactionnaire, élaborée en consultation avec l’industrie des assurances, visait à préserver les profits des compagnies d’assurance et les entreprises pharmaceutiques tout en réduisant les coûts de santé pour le gouvernement et le patronat en général. Dans l’article « Le projet de loi sur la santé d’Obama jette les bases pour des attaques contre Medicare et la sécurité sociale écrit peu de temps après l’adoption de la loi en mars, Barry Grey avait relevé la réaction exubérante des médias.

« Derrière les célébrations au sujet du remaniement des soins de santé se trouve une perspective bien définie. Les auteurs de ces commentaires considèrent la loi comme une étape essentielle pour faire face aux problèmes auxquels le capitalisme américain et mondial est confronté. Ils acclament ce qu’ils considèrent être une percée dans la maîtrise des déficits massifs des États-Unis qui sont en train de déstabiliser le système financier mondial.

« Pendant des décennies, l’on avait tenu pour politiquement impossible de s’en prendre aux programmes sociaux de base aux États-Unis, tels la Sécurité sociale et Medicare qui représentent une part substantielle et croissante du budget fédéral. À présent, du fait du plan de santé d’Obama, on a préparé le terrain pour une réduction draconienne de ces programmes. C’est la raison de la réjouissance dans les médias et les cercles financiers ».

La seconde mesure, la loi « Dodd-Frank » a été présentée comme un effort de freiner le genre de spéculation qui s’était produit lors du krack financier de 2008. Sa véritable fonction était de consolider le rôle dominant des principales banques en montrant l’asservissement du Parti démocrate à Wall Street.

Avec les syndicats, les groupes libéraux et pseudo-gauches bloquant toute expression authentique de l’opposition de la classe ouvrière contre le programme droitier d’Obama, les sections du patronat et de l’ultra-droite ont, avec le soutien des médias, ont fait gonfler le mouvement du Tea Party.

Bien qu’il n’y eut que peu de soutien populaire pour la politique de « libre-marché » extrême du Tea Party, les élections de 2010 au Congrès en novembre ont donné une victoire par défaut à l’ultra-droite. L’effondrement du soutien aux démocrates parmi les jeunes et les travailleurs s’est traduit par un énorme déclin de la participation électorale et a permis aux républicains de reprendre le contrôle de la Chambre des Représentants. Le WSWS avait commenté, « Après être arrivé au pouvoir en se présentant comme la tribune de « l’espoir » et du « changement auquel on peut croire », Obama, de par sa politique pro-patronale et belliciste, a réussi à s’aliéner et à politiquement démoraliser de vastes sections de la population qui avaient voté pour lui ».

Les résultats électoraux ont préparé la voie pour que le gouvernement Obama adopte publiquement un programme de réduction budgétaire au nom de la recherche d’un « consensus bipartite ». La commission Simpson-Bowles de réduction du déficit nommée par Obama a publié ses recommandations quelques jours à peine après les élections de novembre. Le groupe bipartite a demandé des coupes massives dans les programmes sociaux de base tels Medicare et la Sécurité sociale, des licenciements de masse des fonctionnaires fédéraux et des réductions d’impôts pour les entreprises et les ultra-riches.


L’expansion du militarisme et de la guerre

L’année a commencé par le déploiement de troupes américaines supplémentaires en Afghanistan et une nette augmentation des frappes de drones américains au Pakistan dans le cadre de la « montée en puissance » (surge) de la guerre « Af-Pak » (Afghanistan-Pakistan). En février, les Marines ont lancé une offensive dans la province du Helmand dans le Sud de l’Afghanistan qui fut le coup d’ouverture à une brutale campagne pour briser la résistance à l’occupation américaine.

Le congrès, contrôlé par les démocrates, a massivement soutenu l’escalade de la guerre et Obama a effectué son premier voyage en Afghanistan en tant que président pour dicter sa conduite au régime fantoche d’Hamid Karzai et poser devant les caméras avec les troupes américaines.

Un aspect central de l’offensive américaine a été l’intensification d’une campagne d’assassinats, notamment dans les provinces du Sud de l’Afghanistan, qui a été calquée sur les méthodes employées précédemment par le commandant américain, le général Stanley McChrystal, lorsqu’il était chef des forces d’opérations spéciales américaines en Irak. Au début de l’été, cependant, il était clair que la stratégie du « surge » s’enlisait après n’avoir pas réussi à obtenir une écrasante victoire militaire contre les Talibans.

Après un différend impliquant la critique publique adressée par McChrystal à l’encontre d’Obama, le général fut limogé et remplacé par le général David Petraeus qui prépara le terrain pour une campagne encore plus brutale. Sous la direction de Petraeus, la violence militaire s’intensifia tant en Afghanistan qu’au-delà de la frontière au Pakistan, où les Taliban et d’autres insurgés disposaient de base d’approvisionnement et d’un vaste soutien populaire.

Fin septembre, les autorités pakistanaises fermèrent provisoirement une voie d’approvisionnement centrale vers l’Afghanistan après un raid mené par les États-Unis et l’OTAN contre une patrouille frontalière pakistanaise. Après avoir publié une excuse pour la forme, les États-Unis redoublèrent d’efforts avec la guerre par drones – il y aurait eu 115 frappes durant l’année, le double du montant total de 2009 – tout en poussant Islamabad à lancer une offensive militaire au Nord-Waziristan.

Entre-temps, l’impérialisme américain reste profondément engagé en Irak et des dizaines de milliers de soldats continuaient d’occuper le pays. Les élections parlementaires de mars ont souligné les divisions sectaires qui règnent au sein des forces bourgeoises qui collaborent avec l’occupation américaine. Tous les jours, les bains de sang étaient encore largement répandus mais le gouvernement Obama a maintenu son calendrier de retirer d’ici septembre les troupes de combat américaines principalement pour réduire la pression sur les forces américaines causée par l’escalade en Afghanistan.

Toutefois, en dépit de la rhétorique adoptée par Obama, l’Irak resta sous occupation américaine, dévastée par sept ans de guerre puis de guerre civile. Les États-Unis ont déployé autant de soldats dans les zones de guerre sous Obama que sous George W. Bush.

De plus, de par l’intensification de la pression économique, politique et militaire exercée sur l’Iran et coordonnée par Israël et les principales puissances impérialistes européennes, le gouvernement Obama a préparé le terrain pour de nouvelles guerres dans la région. Cela allait de l’assassinat de scientifiques nucléaires iraniens à des demandes de sanctions économiques plus strictes à des menaces de guerre à peine voilées.

En août, après qu’Obama a fait venir à la Maison Blanche des journalistes triés sur le volet pour affirmer encore plus fermement que l’action militaire contre l’Iran était une des options envisagée, le WSWS avait commenté :

« Pour pouvoir conclure un accord durable avec Washington, l’Iran devrait publiquement renoncer à soutenir les partis ou mouvements de résistance dans les régions opprimées par les États-Unis ou Israël, accorder l’accès ou le contrôle de ses champs pétroliers à des sociétés américaines et soumettre son programme nucléaire à des contrôles intensifs. Ceci correspondrait à une déclaration publique du gouvernement iranien qu’il est le laquais de l’impérialisme américain ».

Alors que Washington a dépeint l’Iran comme un État hors la loi, ce sont les États-Unis qui défient ouvertement la loi internationale. En avril, Obama a ordonné l’assassinat du citoyen américain Anwar al-Awlaki, en faisant valoir la mince allégation qu’il était lié à la tentative manquée de faire exploser le jour de Noël 2009 un avion de ligne américain à destination de Detroit. Le WSWS avait écrit :

« Pour la première fois de l’histoire un président américain a officiellement ordonné l’assassinat d’un citoyen américain. Le président Barack Obama a approuvé l’"assassinat ciblé » d’Anwar al-Awlaki, un religieux musulman américain qui se serait réfugié au Yémen. Aucune “preuve” substantielle n’a été établie contre Awlaki, 38 ans, qui est accusé de terrorisme et il ne bénéficiera d’aucun recours légal contre la peine de mort ».

L’action mise en œuvre fut suivie de pas moins de 12 tentatives de meurtres qui culminèrent en 2011 dans l’exécution sommaire d’Awlaki au moyen de missiles Hellfire tiré depuis des drones.

Le chef d’état-major interarmées américain, Michael Mullen passe en revue les soldats en Afghanistan

Les révélations de WikiLeaks et la persécution de Manning et Assange

En avril 2010, l’organisation de lanceurs d’alertes WikiLeaks a posté une vidéo intitulée « Meurtre collatéral » documentant le caractère criminel de l’occupation américaine de l’Irak. La séquence montre le massacre survenu en 2007, depuis un hélicoptère Apache américain, d’au moins 12 civils, pour la plupart non armés, ainsi que deux journalistes de l’agence de presse Reuters et d’un passant qui avait tenté de porter secours aux blessés.

Le soldat Bradley Manning a divulgué la vidéo ainsi que d’autres documents comme un acte de conscience faisant preuve d’un grand courage personnel. Manning fut arrêté en mai 2010. Il sera détenu pendant plus de 1000 jours avant de passer en cour martiale, temps durant lequel il fera l’objet de maltraitance et de mesures d’isolement.

WikiLeaks a publié des centaines de milliers de dépêches classées secrètes émanant d’ambassades américaines, affichant devant le monde entier une vaste gamme d’activités criminelle commises par les États-Unis dont 9000 rapports de terrain concernant l’Afghanistan et documentant le meurtre de plus de 20 000 civils afghans, 400 000 documents relatifs à l’Irak dévoilant au moins 15 000 décès de civils irakiens précédemment non divulgués et des preuves de crimes de guerre spécifiques dont le meurtre de sang froid de civils irakiens, le meurtre de 834 civils irakiens aux points de contrôle militaires américains et l’usage systématique de la torture.

Ces dépêches ont démasqué un réseau international de complots politiques américains sur chaque continent comprenant : des plans de guerre contre la Chine, des plans de guerre de l’OTAN contre la Russie, la collusion du gouvernement Sri lankais avec les escadrons de la mort, la complicité américaine dans les crimes de guerre au Sri Lanka, le rôle des États-Unis dans le coup d’État en Thaïlande en 2005, les bombardements américains de civils au Yémen, l’espionnage américain de responsables de l’ONU en violation des traités internationaux, l’obstruction faite par le gouvernement américain à la poursuite d’agents de la CIA coupables de torture et le mépris des États-Unis à l’égard du droit international. Comme l’a écrit Joseph Kishore dans un commentaire, « WikiLeaks et la diplomatie secrète » : « La politique américaine dépend de manière décisive du secret et des mensonges, précisément parce qu’elle se trouve dans un conflit insoluble avec les intérêts de la population des États-Unis et du monde ».

Dans le but d’écraser l’organisation et d’emprisonner voire d’exécuter ses dirigeants, le gouvernement Obama a mis en branle une opération de « coups tordus », en incitant le gouvernement suédois à déposer une plainte pour agression sexuelle contre le fondateur de WikiLeaks Julian Assange. La campagne orchestrée par les États-Unis a entraîné un mandat d’arrêt international et des tentatives d’extradition contre Assange, qui est né en Australie, depuis la Grande-Bretagne vers la Suède et finalement vers les États-Unis où il pourrait être mis en examen en vertu de l’Espionnage Oct.

Dès le début, le WSWS a mené une campagne énergique pour la défense de WikiLeaks, d’Assange et de Manning. Le WSWS a publié une centaine d’articles en 2010 relatifs à l’importance de WikiLeaks et aux implications politiques de ses divulgations. Une déclaration datant de juin, « Ne touchez pas à WikiLeaks ! » a été suivie par des réunions dans le monde entier, dont au Sri Lanka, en Allemagne, au Royaume-Uni, en Australie et aux États-Unis.

Le WSWS a soumis à une critique détaillée le rôle détestable joué par les libéraux et la pseudo-gauche dans l’opération menée contre Assange. Dans un commentaire concernant le rôle joué par le New York Times Barry Grey a écrit :

« Le journal de référence de l’establishment libéral américain n’est pas indigné par la preuve supplémentaire de meurtres et de tortures à grande échelle impliquant les responsables au plus haut niveau hiérarchique des gouvernements Bush et Obama mais porte au contraire sa colère contre les individus courageux qui ont osé briser le mur du silence des médias qui sont à la botte du gouvernement en permettant à la population d’avoir accès à une certaine partie de l’horrible vérité concernant la guerre des États-Unis en Irak ».

L’éditorialiste du Times, Bill Keller, a collaboré quotidiennement avec le Département d’État américain pour passer en revue et censurer toutes les divulgations, dissimuler tout ce qui pourrait nuire aux objectifs de guerre des États-Unis.

Dans une réponse à une chronique rédigée par Floyd Abrams dénonçant WikiLeaks, David North a comparé le rôle joué par Abrams dans la défense juridique de la publication par le New York Times des Papiers du Pentagone en 1971 à son attaque contre WikiLeaks et Assange 40 ans plus tard.

« Il y a eu au sein de l’élite dirigeante et de ses représentants intellectuels un quasi effondrement de tout appui substantiel politiquement motivé en faveur des droits démocratiques. À cet égard, le positionnement d’institutions telles le Times et d’anciens défenseurs du Premier amendement tels Abrams derrière la persécution de Julian Assange et de WikiLeaks donne une idée nette de l’état pathologique de la démocratie américaine à la fin de la première décennie du 21ᵉ siècle ».

La campagne diffamatoire contre Assange a été soutenue par les défenseurs du féminisme et de la politique identitaire au sein de la pseudo-gauche qui n’ont affiché aucune préoccupation quant aux attaques menées contre les droits démocratiques et qui se trouvent au cœur du coup monté. Le WSWS a expliqué que les accusations d’agression sexuelle contre Assange font « partie des efforts entrepris pour détourner l’attention publique du contenu des divulgations de WikiLeaks ».

La vidéo de WikiLeaks ‚Meurtre collatéral’ montre un hélicoptère américain massacrant des civils en Irak, dont le journaliste Namir Noor-Eldeen de l’agence de presse Reuters.

Les tentions entre les États-Unis et la chine et le coup politique contre Rudd en Australie

Les tentions politiques, économiques et sécuritaires entre les États-Unis et la Chine se sont accrues tout au long de l’année 2010. En janvier, les États-Unis ont imposé des tarifs douaniers sur les marchandises chinoises et en février ils ont annoncé la vente d’armes à Taïwan pour un montant de 6,4 milliards de dollars. Des exigences ont été formulées au Sénat et au Congrès américains pour que les États-Unis accusent la Chine de manipulation monétaire.

Augmentant la pression exercée sur la Chine, Obama s’est rendu en Inde, en Indonésie, en Corée du Sud et au Japon tandis que la secrétaire d’État, Hillary Clinton, a fait une tournée au Vietnam, au Cambodge, en Malaisie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Nouvelle-Zélande et en Australie. En Indonésie, les États-Unis ont rétablis les liens militaires avec les forces spéciales tristement célèbres Kopassus, qui ont une longue histoire de détention arbitraire, de torture et de meurtre. Le conflit entre le Japon et la Chine au sujet des îles Senkaku/Diaoyu est également arrivé sur le devant de la scène en 2010.

Les tensions entre les États-Unis et la Chine sont à l’origine de la crise qui a éclaté au sein du gouvernement australien, l’un des principaux alliés américains dans la région, et qui a culminé le 24 juin dans l’éviction du premier ministre Kevin Rudd, Un vaste réseau américain d’« agents protégés » au sein du Parti travailliste australien (Labor Party), ainsi que la faction des dirigeants de droite, ont manipulé dans le dos de la population pour déloger Rudd et installer au pouvoir Julia Gillard, la préférée du gouvernement Obama, sans qu’il y ait même un vote à la majorité.

Le coup politique antidémocratique qui s’est produit au sein de la direction a été décrit par les médias comme étant le résultat d’une opposition des plus grandes sociétés minières contre un impôt proposé par Rudd sur les « super profits ». Des sections du secteur minier qui est extrêmement rentable du fait de ses exportations vers la Chine, ont menacé de s’implanter à l’étranger et de licencier des milliers de travailleurs si cette modeste taxe était appliquée.

Comme le WSWS l’a cependant expliqué, alors que la déstabilisation sur le plan intérieur en faisait partie, le déclencheur décisif du coup de main politique a été l’intervention de Washington. Obama a été de plus en plus insatisfait avec l’engagement hésitant de Rudd envers la guerre en Afghanistan. Et un aspect encore plus déterminant a été l’opposition de Washington à la promotion d’une soi-disant « Communauté Asie-Pacifique » de Rudd, un mécanisme diplomatique qui chercherait à arbitrer ou atténuer les tensions entre les États-Unis et la Chine. À peine quelques semaines plus tôt, le premier ministre japonais Yukio Hatoyama, qui préconise une politique identique à celle de Rudd, avait démissionné suite à une campagne concertée contre lui de la part de Washington.

Les « câbles » des ambassades américaines divulgués par WikiLeaks en décembre confirment que le coup (confirmed that the coup) était « fabriqué aux États-Unis ». Ils ont révélé l’évaluation cinglante de Rudd et de sa tentative de réaliser un certain partage de pouvoir avec Beijing, ce qui aurait contrecarré l’hégémonie des États-Unis dans la région.

Dès le premier jour de son entrée en fonction, Gillard a clairement fait comprendre que son gouvernement défendrait sans équivoque les efforts provocateurs entrepris par Washington pour saper l’influence de la Chine dans toute la région Asie-Pacifique. Une fois au pouvoir, elle a supprimé l’impôt minier en indiquant une accentuation de la politique droitière du Labor. Elle a aussi annoncé de nouvelles mesures contre les réfugiés en promettant une participation indéfinie à la guerre en Afghanistan et un engagement aveugle envers l’alliance américaine.

Peu de temps après, le Naval War College américain publiait une étude précisant les « nombreux avantages » de l’Australie en tant que base à partir de laquelle l’armée américaine pourrait contrôler les couloirs maritimes vitaux entre l’océan Indien et l’océan Pacifique en cas de conflit avec la Chine. Les bases aériennes et les ports australiens seraient modernisés pour servir à l’armée américaine et les îles Cocos, dans l’océan Indien, seraient rendues disponibles comme base aérienne aux drones de surveillance américains et éventuellement à des avions de combat.


Le tremblement de terre en Haïti et d’autres événements internationaux

Le 12 janvier, un séisme de magnitude 7.0 (magnitude 7.0 earthquake) a ravagé le pays appauvri de Haïti. Le bilan des victimes a atteint le nombre énorme de 200 000 personnes dont un grand nombre ensevelis sous des bâtiments construits avec des matériaux bon marché. Les trois quarts des immeubles de la capitale Port-au-Prince ont été réduits à l’état de ruines. Un million et demi de personnes se sont retrouvées sans abri, sans nourriture ou eau. L’on estime qu’un quart de million de survivants ont été soignés sans antibiotique ou anesthésie tandis que des milliers sont morts d’une manière qui aurait pu être empêchée, de déshydratation, gangrène ou septicémie.

La responsabilité de l’énorme proportion de la catastrophe incombe à la classe dirigeante américaine. Dans un article « La tragédie d’Haïti : un crime de l’impérialisme américain », (Haiti’s tragedy : A crime of US imperialism), le WSWS a écrit que « le manque d’infrastructures, la mauvaise qualité des constructions à Port-au-Prince et l’impuissance du gouvernement haïtien à réagir sont des facteurs déterminants de cette tragédie ». L’article continue :

« Ces conditions sociales sont la conséquence d’une longue relation entre Haïti et les États-Unis qui, depuis l’occupation de cette nation insulaire par les marines américains, qui a commencé en 1915 par une occupation de 20 ans, ont traité le pays comme un protectorat colonial de fait.

La mobilisation militaire menée par les États-Unis a protégé les riches oligarques d’Haïti (Haiti’s wealthy oligarchy) et les intérêts bien établis des États-Unis alors même que l’aide aux victimes du tremblement de terre a été accordée avec une lenteur désolante. Haïti a été placé sous un régime de tutelle et l’aide aux victimes du séisme est canalisée par une commission coprésidée par l’ancien président américain Bill Clinton. La sécurité a été traitée en premier par les marines américains et des troupes canadiennes (Canadian troops), puis par une force de maintien de la paix de l’ONU dont le principal contingent est venu du Brésil.

Une épidémie de choléra y a éclaté en octobre, tuant 8000 personnes de plus et en infectant 640 000 de plus. L’origine en fut finalement attribuée à des troupes népalaises stationnées en Haïti et faisant partie des forces de l’ONU.

Ailleurs aux Amériques, des méthodes d’État policier ont été utilisées contre des manifestants anti G20 (G20 demonstrators) à Toronto (Canada) alors que la police a matraqué les manifestants comme les passants, tiré des balles en caoutchouc en chargeant la foule pacifique rassemblée pour protester contre la réunion des dirigeants des 20 plus importantes économies capitalistes.

En janvier, la cour suprême du Canada admettait que l’État canadien avait violé les droits constitutionnels de Omar Khadr, enfant-soldat et prisonnier à Guantánamo, en étant complice de sa torture. Mais dans une décision aux implications qui font froid dans le dos pour les droits fondamentaux, la Cour n’a décidé d’aucune compensation (failed to impose any remedy), en disant que cela empiéterait sur les prérogatives du gouvernement de mener une politique étrangère. En mai, les partis parlementaires canadiens sont convenus d’un mécanisme (agreed to a mechanism) permettant au gouvernement canadien de supprimer une montagne de preuves selon lesquelles les forces armées canadiennes ont, en violation du droit international, remis des Afghans aux forces de sécurité de ce pays pour qu’ils soient torturés.

À Cuba, où Fidel Castro avait transmis en 2006 le pouvoir à son frère Raul, ministre de la Défense de longue date, le régime a annoncé des projets de suppression d’emplois (eliminate the jobs) de l’ordre de 1,3 million de postes de fonctionnaires, la plus vaste transformation économique et sociale depuis la révolution cubaine en 1959.

Au Brésil, le plus grand pays d’Amérique latine, le Parti des Travailleurs qui est appuyé par les syndicats a conservé le pouvoir lors des élections présidentielles en vue de choisir un successeur à Luis Inacio da Silva (Lula), et la directrice de cabinet de Lula, Dilma Rousseff remportant les élections. Le marché boursier a célébré la victoire vu que Lula avait loyalement fait avancer les intérêts du capitalisme brésilien.

Au cours de l’année, la Chine est passée devant le Japon (China surpassed Japan) pour devenir la deuxième plus grande économie mondiale, un événement d’une considérable importance symbolique et historique. Cependant, l’émergence de la Chine comme atelier de misère du capitalisme mondial n’a en aucune manière résolu la crise du capitalisme, ni en Chine, ni mondialement. Des tensions sociales ont conduit à une série de luttes de masse et de protestations dans les centres industriels du Sud de la Chine. En juin, les travailleurs de Honda ont débrayé dans de nombreuses usines (Honda workers struck) et 13 travailleurs de Foxconn se sont suicidés (13 Foxconn workers committed suicide) en réaction aux dures conditions d’exploitation.

La Thaïlande a été mise pendant huit mois sous état d’urgence (state of emergency) suite à la répression du gouvernement en avril contre des milliers de manifestants à « Chemises rouges » à Bangkok. Des manifestants soutenant le Front uni pour la démocratie et contre la dictature (UDD), liée à l’ancien Premier ministre déchu Thaskin Shinawatra, ont campé des semaines durant dans une zone fortifiée. Le premier ministre Abhisit Vejjajiva a profité d’une manifestation devant le bâtiment du parlement national pour déclarer l’état d’urgence et mobiliser l’armée. Plus de 90 personnes furent tuées et plus de 1800 autres blessées.

Aux Philippines, Benigno Aquino III, le fils de l’ancienne présidente Corazon Aquino, a été élu président, en maintenant le contrôle entre les mains d’une mince oligarchie de riches propriétaires terriens. En l’espace de quelques mois, le nouveau gouvernement a réduit drastiquement les subventions à l’alimentation (slashed food subsidies) tout en octroyant des cadeaux fiscaux aux riches.

En Asie du Sud, de fortes inondations au Pakistan (heavy flooding in Pakistan) ont provoqué une catastrophe similaire à la tragédie haïtienne avec des milliers de morts, 21 millions de personnes déplacées, des récoltes ruinées et le bétail noyé. Selon l’ONU, les inondations ont touché plus de personnes que n’importe quelle catastrophe humanitaire depuis la Deuxième Guerre mondiale. Comme l’expliquait le WSWS (explained), les inondations étaient une catastrophe aux causes sociales plus que naturelle – un produit de l’oppression impérialiste et du régime corrompu de la bourgeoisie pakistanaise.

Le Pakistan manque d’un système d’alerte précoce contre les inondations, le système de contrôle des inondations de la vallée de l’Indus est délabré et les riches et les politiquement influents (the rich and politically connected) s’étaient arrangés pour que les eaux montantes soient détournées de leurs terres et de leurs récoltes, souvent en direction des régions plus peuplées, et l’État manquait de moyens et de la volonté d’organiser un secours rapide et efficace.

En septembre, le président Sri lankais Mahinda Rajapakse a fait passe de force un amendement à la constitution lui donnant libre cours pour nommer de hauts responsables clé et lui permettant de briguer indéfiniment la présidence. La loi relative à « l’état d’urgence » n’a pas été soumise à un référendum populaire, mais a été ratifiée par la cour suprême au cours d’une procédure spéciale.

Au Moyen-Orient, deux crimes commis par les forces israéliennes ont retenu l’attention internationale. En mars, Israël avait organisé l’assassinat (organized the assassination) du membre du Hama Mahmoud al-Mabhouh, un acte qui a souligné dans quelle mesure les préceptes de base du droit international ont été abandonnés sous la « guerre contre le terrorisme ».

Le 31 mai, la « Flotte de la liberté pour Gaza » composée de six bateaux navigant dans les eaux internationales et transportant du matériel humanitaire vers Gaza a été attaquée par des commandos israéliens (was attacked by Israeli commandos), tuant neuf personnes. L’attaque a suscité une condamnation internationale dans le contexte de protestations mondiales (global protests) et d’appels pour demander qu’Israël lève son blocus de Gaza qui dure depuis trois ans.

En Afrique, le sommet de l’Union africaine a soutenu l’initiative américaine en faveur de plus de troupe (for more troops) pour combattre la milice islamique al-Shabaab en Somalie. Aux termes de l’accord, le nombre de soldats de la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISON) passerait à 9500. Le recours aux drones de surveillance américains pour perpétrer des assassinats est devenu la marque de fabrique des opérations menées par le gouvernement Obama dans la région.

En France, le gouvernement du président Nicolas Sarkozy a procédé à des déportations de masse (France : Déportations en masse de Roms) de Roms en déclenchant des protestations de plus de 100 000 personnes dans toutes les villes du pays. À Paris, les partisans du CIQI ont distribué des copies de la déclaration du WSWS « Retour à Vichy » en soulignant que la persécution des Roms par Sarkozy – soutenue par le Parti socialiste – rappelait les méthodes de la dictature de Vichy établie sous l’occupation nazie durant la Deuxième Guerre mondiale.

Dans le cadre de sa champagne raciste pour promouvoir l’« identité nationale » française, Sarkozy a aussi appuyé l’interdiction publique de porter la burqa (France : Sarkozy propose l’interdiction générale du port de la burqa). Le WSWS a dénoncé cette violation de la liberté religieuse (L’Assemblée nationale française a voté l’interdiction de la burqa : une attaque contre les droits démocratiques) comme faisant partie d’une décision plus vaste d’adoption de mesures relevant d’un État policier. L’ensemble de la « gauche » officielle, y compris le Parti socialiste, le Parti communiste, Lutte Ouvrière (LO) et le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) s’étaient rangées derrière cette mesure raciste et antidémocratique.

Des préjugés anti-immigration, antimusulmans et anti-roms furent attisés ailleurs en Europe. L’ancien ministre allemand des Finances et membre du directoire de la Banque centrale allemande (Bundesbank), Thilo Sarrazin, a publié un livre intitulé L’Allemagne s'autodétruit (Germany Abolishes Itself), qui est une diatribe contre les immigrés musulmans associée à des préjugés reposant sur le darwinisme social et des théories racistes rappelant l’eugénisme du Troisième Reich. En septembre, le WSWS effectuait une analyse approfondie en deux parties (two-part analysis).

En Hongrie (Hungary), un parti d’extrême droite, le Fidez, remportait une majorité des deux tiers aux élections nationales en menant une campagne de politique antisémite et anti-Roms dans une alliance tacite avec le parti néofasciste Jobbik. Cette victoire a marqué l’effondrement des staliniens et des sociaux-démocrates discrédités qui avaient imposé les draconiennes mesures économiques du FMI à une population appauvrie. En décembre, le nouveau gouvernement s’octroyait des pouvoirs considérables pour abolir de fait la liberté de la presse (effectively abolish freedom of the press).


La fuite de pétrole de BP et les catastrophes minières internationales

Le 20 avril, la pire catastrophe environnementale de l’histoire des États-Unis commençait avec l’explosion du puits de pétrole Deepwater Horizon exploité par l’entreprise britannique BP (BP’s Deepwater Horizon oil well) à 50 miles au large des côtes du Golfe du Mexique. Onze employés ont été tués et 17 gravement blessés lors du naufrage de la plate-forme. La fuite de pétrole causée par l’explosion au fond de l’océan a déversé à jet continu pendant 87 jours, jusqu’au 15 juillet, quelque 780 millions de litres de pétrole. Les dommages écologiques à long terme sont incommensurables, des centaines de milliers d’habitants du Golfe du Mexique ont perdu leurs emplois et leurs revenus et de graves problèmes de santé persistent parmi ceux qui ont été exposés aux toxines libérées par le pétrole et les dispersants chimiques utilisés.

La fuite de pétrole est la conséquence directe de la négligence et des réductions de coûts par BP dans la nouvelle ruée international pour le pétrole. La course aux formes d’énergie bon marché est un élément crucial de la stratégie de la guerre commercial d’Obama et de la « ré-internalisation » de la production. La longue chaîne d’événements qui a mené à l’explosion avait impliqué les agences de « surveillance » (“oversight” agencies) du gouvernement américain.

Dans les jours qui suivirent l’explosion, les médias suivirent l’exemple du gouvernement en cherchant à minimiser les éventuelles séquelles de la catastrophe, En conséquence, la mort des travailleurs du pétrole fut en grande partie ignore. Le WSWS fut parmi les seuls organes de presse à couvrir les funérailles en envoyant un journaliste à Natchez, Mississipi, pour les funérailles de Karl Kleppinger (funeral of Karl Kleppinger), l’un des travailleurs tués sur la plate-forme et réaliser un entretien avec sa famille.

Les reporters du WSWS se sont rendus dans le Golfe du Mexique et ont publié une série de vidéos sur la fuite, dont des entretiens avec des travailleurs (workers) de la Nouvelle-Orléans et des professionnels de santé (health professionals). Nous avons dévoilé ce que le gouvernement Obama a caché sur les dégâts causés à l’environnement (the damage to the environment), les effets sur la santé des habitants de la Côte et la toxicité (toxicity) (et même de la composition chimique) de près de 7,5 millions de litres de détergent versé dans le Golfe.

Entre-temps, les garde-côtes (Coast Guard) a fait fontion de force de sécurité pour BP en empêchant les journalistes de s’approcher des plages ou même de survoler la fuite de pétrole. Des chercheurs en écologie (Environmental scientists) qui ont prédit une destruction massive de l’environnement (massive destruction) du Golfe ont dû faire face à un mur de mensonges de la part des médias et de l’establishment politique.

Dans une perspective intitulée « Marée noire dans le golfe du Mexique : pourquoi BP commande-t-il les opérations », le WSWS a mis en exergue la décision criminelle du gouvernement Obama de laisser BP en charge des opérations et du nettoyage.

En juin, Obama et BP ont approuvé la désignation de Kenneth Feinberg comme responsable du paiement des indemnités dans le but de protéger les intérêts financiers de BP.

Dans une déclaration « Derrière BP », le WSWS a répondu aux tentatives de décrire la société et ses gestionnaires comme des aberrations alors même que tout était fait pour sauvegarder la rentabilité de BP :

« L’ampleur du cauchemar écologique et économique contraste énormément, et de manière révélatrice, avec les misérables actions du gouvernement fédéral. Le principal objectif de l’administration Obama a été d’éluder les causes sous-jacentes de la catastrophe et d’empêcher l’indignation populaire de se mêler aux sentiments anti-patrons qui se développent à travers le pays…

« BP n’est pas une aberration. Jusqu’au prochain désastre, la société n’est que le visage public le plus visible de la criminalité des entreprises, devenue omniprésente. En particulier, BP partage avec toutes les grandes compagnies pétrolières la poursuite acharnée du profit, et ce, aux dépens des mesures de sécurité les plus élémentaires. »

Deux semaines seulement avant la catastrophe de BP, une explosion était survenue le 5 avril à la mine Upper Big Branch (UBB) mine à Montcoal (Virginie-Occidentale) appartenant à Massey Ferguson, elle tua 29 mineurs de charbon. Ce fut la pire catastrophe minière aux États-Unis en 40 ans. Une étincelle avait enflammé du méthane en provoquant une massive explosion de poussière qui a parcouru des kilomètres de tunnels en détruisant tout et tout le monde sur son passage.

Le WSWS s’était rendu à Moncoal pour assurer une couverture sur place (on-the-spot coverage) et des interviews avec des mineurs et leurs familles. Les conditions existant dans les mines sont liées à la trahison et à la désagrégation du syndicat des mineurs United Mine Workers (UMW), qui fut à une certaine époque le fer de lance de l’organisation de la CIO et le syndicat le plus militant des États-Unis. Le PDG de Massey, Don Blankenship, un millionnaire républicain de droite, s’était fait un nom dans l’industrie du charbon en dirigeant l’opération de casse du syndicat à l’encontre de mineurs qui avaient fait grève dans l’entreprise réputée alors en 1984-85 sous le nom de AT Massey, et qui fut un tournant décisif dans la destruction des droits des mineurs.

Le gouvernement Obama partage la responsabilité de la catastrophe. Lors des 18 mois précédant l’explosion, les enquêteurs fédéraux en santé et sécurité avaient relevé plus de 600 infractions à la sécurité (more than 600 safety violations), sans pourtant n’avoir jamais essayé de fermer la mine ou d’exiger des inspections plus fréquentes.

Les responsables de Massey avaient tenu deux registres distincts (two sets of books) et présenté aux autorités de sécurité de faux rapports de sécurité. Massey prévenait les mineurs de fond de l’arrivée des inspecteurs à la mine en menaçant les mineurs s’ils parlaient de problèmes de sécurité aux responsables. Blankenship, tout comme au moins 15 autres hauts responsables de la direction refusèrent de témoigner sous serment devant les enquêteurs du gouvernement. Au contraire, Blankenship fut autorisé à partir à la retraite avec 12 millions de dollars d’indemnités de départ. Pas un seul haut représentant de l’entreprise (Not a single top company official) ne sera accusé d’un quelconque crime.

Les conditions existant à Massey étaient, et sont toujours, typiques de celles de l’industrie minière aux États-Unis et sur le plan international. Il y a eu de grandes catastrophes récurrentes en Chine, dont tout une semaine d’explosions et d’inondations souterraines en avril (a week of explosions and underground flooding), une explosion en juin dans une mine dans la province du Hunan et une autre en octobre dans une mine dans la province du Henan qui tua 22 personnes. En mai eut lieu une explosion dans la mine de Raspadskaya mine dans la province de Kemerovo dans le Sud-Ouest de la Sibérie, la plus grande mine de charbon souterraine de Russie, tuant 90 travailleurs. Un mois plus tard, 73 mineurs étaient tués dans une explosion souterraine dans la mine de San Fernando en Colombie (San Fernando mine in Colombia).

En Nouvelle-Zélande, 29 travailleurs mouraient le 19 novembre dans une explosion dans la mine de charbon de Pike River. La société qui était lourdement endettée envers ses actionnaires, avait sciemment fait des économies en matière de sécurité afin d’extraire du charbon le plus rapidement possible et soutenir la concurrence de ses rivaux internationalement. Le WSWS avait expliqué (WSWS explained) que la responsabilité de la catastrophe n’incombait pas seulement à Pike River Coal, mais aussi aux gouvernements successifs formés tant par le Parti national que le Parti travailliste qui avaient démantelé l’Inspection du travail et des mines et qui n’avaient pas fermé Pike River en dépit des violations flagrantes des normes de sécurité – dont l’absence d’une sortie de secours et de ventilation adéquate.

Au Chili, le plus grand producteur de cuivre du monde, une explosion massive et un effondrement survenus dans la mine de San José dans le désert d’Atacama, ont pris au piège 33 mineurs de fond pendant 69 jours, néanmoins ils ont tous survécu. L’opération de sauvetage fut un triomphe de la coopération internationale et de la technologie (triumph of international collaboration, technology) et de l’endurance des hommes qui ont dû leur survie à l’égalité dans la prise de décision et au partage équitable des rations alimentaires pendant qu’ils étaient enfermés au fond.

Des équipes de pompiers s’attaquent aux flammes sur la plate-forme pétrolière off-shore Deepwater Horizon
Des enfants jouent au milieu de boulettes de goudron sur la place du Golfe Shore en Alabama
Une veillée aux bougies pour les travailleurs tués lors de la catastrophe minière en Virginie occidentale

Congrès du SEP en Australie, en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux États-Unis

En 2010, les Socialist Equality Party d’Australie, d’Allemagne et de Grande-Bretagne ont tenu leurs congrès fondateurs. C’était l’aboutissement de plus d’une décennie de préparation théorique, politique et organisationnelle. À partir d’août 2008 avec le congrès fondateur du SEP aux États-Unis, chaque congrès a fait partie intégrante d’une initiative internationale du Comité International de la Quatrième Internationale en réaction à l’effondrement du capitalisme mondial et des nouvelles tâches politiques auxquelles est confrontée la classe ouvrière internationale.

Le congrès fondateur (Congress) du SEP (Australie) s’est tenu du 21 au 25 janvier. Après un intense débat basé sur le discours d’ouverture (report) tenu par le secrétaire national, Nick Beams, le congrès adoptait à l’unanimité la déclaration de principe du SEP et sa résolution exposant la perspective de sa fondation, « Les fondements historiques et internationaux du Socialist Equality Party (Australie) » (The Historical and International Foundations of the Socialist Equality Party (Australia)). Le congrès a aussi adopté le document historique du SEP (USA) qui décrit les expériences stratégiques clé faites par la classe ouvrière internationale au cours du 20ᵉ siècle.

Le document de perspective du SEP explique que la lutte pour le socialisme au sein de la classe ouvrière australienne requiert « une lutte implacable contre la doctrine nationaliste de l’exceptionnalisme australien qui a historiquement formé l’obstacle idéologique majeur au développement de la conscience socialiste ». Il a indiqué les origines historiques et le développement de cette doctrine et son rapport avec le Parti travailliste australien.

En étudiant les analyses faites, au tournant du vingtième siècle, par Marx, Lénine, Trotsky et d’autres représentants du marxisme classique, des caractéristiques spécifiques de la nation australienne émergente, le document explique que le Parti travailliste australien avait développé et renforcé l’unité de l’État capitaliste ce qui, « dans d’autres pays [avait été] réalisé par les libéraux ».

Comme l’avait souligné Lénine : « […] le Parti travailliste est entièrement un parti bourgeois bien que constitué de travailleurs, il est dirigé par des réactionnaires et de réactionnaires de la pire sorte qui agissent tout à fait dans l’esprit de la bourgeoisie. C’est une organisation de la bourgeoisie qui existe pour tromper systématiquement les travailleurs […] ».

Le document du SEP souligne que le Parti travailliste a été fondé pour promouvoir le nationalisme et l’exceptionnalisme au sein de la classe ouvrière « en opposition directe au marxisme et au programme scientifiquement fondé de l’internationalisme socialiste. » Il s’est révélé être le « principal instrument de subordination de la classe ouvrière à l’État capitaliste ».

La résolution a aussi examiné les expériences stratégiques clé par lesquelles était passée la classe ouvrière australienne en en clarifiant à chaque stade leur contexte international. Ces expériences comprennent la Première Guerre mondiale et les soulèvements révolutionnaires inspirés par la Révolution russe de 1917 qui s’ensuivirent ; la fondation et la dégénérescence stalinienne ultérieure du Parti communiste d’Australie ; l’émergence du mouvement trotskyste en Australie dans les années 1930 et sa lutte courageuse contre la guerre impérialiste durant la Deuxième Guerre mondiale ; sa liquidation au début des années 1950 sous la pression de la stabilisation d’après-guerre du capitalisme ; la fondation en 1972 de la Socialist Labour League (prédécesseur du SEP) en tant que section australienne du CIQI et les luttes cruciales qu’elle a menées pour l’internationalisme en opposition au stalinisme, au travaillisme et à toutes formes d’opportunisme national ; ainsi que la scission au sein du CIQI en 1985-86 et ses conséquences internationales.

Le document a mis en évidence que l’effondrement de l’ordre économique mondial avait « ébranlé les fondations matérielles de l’exceptionnalisme australien en faisant en sorte que la classe ouvrière australienne sera entraînée dans le tourbillon des bouleversements économiques, sociaux et politiques mondiaux qui sont actuellement déchaînés ».

Le Congrès fondateur du Partei für Soziale Gleichheit (PSG), la section allemande du Comité International, s’est tenu du 22 au 24 mais à Berlin. Le congrès a adopté une résolution « Les fondations historiques du Partei für Soziale Gleichheit », (The Historical Foundations of the Partei für Soziale Gleichheit), et a approuvé le document historique adopté en 2008 par le congrès du SEP américain.

La résolution a retracé l’histoire du mouvement ouvrier révolutionnaire en Allemagne, le pays disposant de la plus longue tradition de luttes pour la conscience socialiste au sein de la classe ouvrière. Cette tradition remonte au travail de Marx et de Engels même, et s’est poursuivie avec la création du Parti social-démocrate comme premier parti ouvrier de masse s’appuyant sur des principes marxistes.

Le document a analysé la trahison effectuée par le SPD en soutenant l’impérialisme allemand dans la Première Guerre mondiale ; la lutte menée par Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht en faveur de l’internationalisme socialiste ; la fondation du Parti communiste allemand ; l’émergence de l’Opposition de Gauche allemande en réaction aux trahisons du stalinisme et du danger croissant du nazisme ; ainsi que l’impact destructeur du révisionnisme pabliste durant la période qui a suivi la Deuxième Guerre mondiale.

Une période particulièrement critique a commencé avec le rétablissement du mouvement trotskyste en Allemagne après 1969 lorsqu’une section d’étudiants et de jeunes travailleurs ont été gagnés à la perspective du Comité International qui formera plus tard le Bund Sozialistischer Arbeiter (Ligue des travailleurs socialistes) comme section du CIQI. Comme l’affirme le document :

« L’importance du BSA dans les années 1970 a été qu’il a renoué en Allemagne avec la continuité historique qui avait été rompue par les pablistes. Indépendamment des difficultés, des faiblesses et des erreurs auxquelles il a été confronté, il a adhéré sans réserve à la perspective de la révolution socialiste mondiale ».

Lors de la scission de 1985-86, le BSA fit partie de la majorité du CIQI issue de la scission d’avec le WRP pour ensuite former le PSG.

Le congrès fondateur du Socialist Equality Party (Grande-Bretagne), qui s’est tenu du 22 au 25 octobre à Manchester, a adopté une « Déclaration de principes » et « Les fondations historiques et internationales du Socialist Equality Party (Grande-Bretagne) » qui expliquèrent les expériences politiques les plus importantes de la classe ouvrière britannique, notamment l’histoire du mouvement trotskyste après la Deuxième Guerre mondiale.

Le congrès a étudié le rôle joué par Gerry Healy lors de la création de la Socialist Labour League, la lutte contre le stalinisme et la fondation du CIQI dans la lutte contre le pablisme. Il a également examiné la fondation du Workers Revolutionary Party et sa dégénérescence ultérieure ainsi que la scission du CIQI en 1985-86.

Comme l’affirme le document, l’International communist Party, le groupe pro-CIQI au sein du WRP qui fut le prédécesseur du SEP (Grande-Bretagne),

« […] s’est révélé être l’unique tendance viable à émerger de la scission. Il entreprit de faire l’éducation des travailleurs et des jeunes les plus avancés en ce qui concerne les leçons essentielles et de renouveler l’offensive politique contre le Parti travailliste et la bureaucratie syndicale et qui avait été abandonnée par le WRP. Son travail était caractérisé par une très étroite coopération avec ses condisciples internationaux qui, jusque-là n’avait pas connu de précédent dans l’histoire du mouvement trotskyste ».

Le Socialist Equality Party (US) a tenu son premier congrès national. Anticipant une prochaine recrudescence de la lutte de classe, le SEP s’est préparé politiquement en adoptant un programme de parti et deux autres résolutions, « Au soixante-dixième anniversaire de l’assassinat de Léon Trotsky » et « Vingt-cinq ans depuis la scission avec le Workers Revolutionary Party ».

Le programme du SEP, « L’effondrement du capitalisme et la lutte pour le socialisme aux États-Unis » (The Breakdown of Capitalism and the Fight for Socialism in the United States) est un programme socialiste révolutionnaire pour la classe ouvrière. Il met en avant une série de droits sociaux fondamentaux – le droit à un emploi, à un revenu décent ; des loisirs ; un logement décent et abordable, l’accès aux services de l’eau, de l’électricité et du gaz ainsi que de transports publics ; des soins de santé de haute qualité ; une retraite sûre ; l’éducation, un environnement sain et sécurisé ; et à la culture. Il explique que ces droits, tout comme la lutte contre la guerre et l’opposition à des formes dictatoriales de gouvernement, ne peuvent être acquis que par la mobilisation politique indépendante de la classe ouvrière, la prise de pouvoir politique et l’organisation socialiste de la vie économique.

En expliquant la signification du congrès, le secrétaire national du SEP, Joseph Kishore a indiqué (Le premier Congrès national du Parti de l’égalité socialiste), « Le PES entre dans cette nouvelle période avec la plus grande des forces qui soit : un programme et une perspective clairs qui sont basés sur une longue expérience historique. C’est de l’union de cette histoire et des principes du marxisme avec le soulèvement toujours plus important de millions de travailleurs de par le monde entier que la force viendra pour renverser le système capitaliste, une forme organisationnelle irrationnelle et dépassée, et que seront jetées les fondations pour le socialisme et le développement progressiste de l’humanité ».


La défense de Léon Trotsky et de la vérité historique

La campagne menée par le CIQI pour la défense de la vérité historique et de l’héritage de Léon Trotsky s’est trouvée au cœur de son travail politique et conceptuel. En août, Mehring Books publiait In Defense of Leon Trotsky (Défense de Léon Trotsky) rédigé par David North. L’ouvrage expose les falsifications néo-staliniennes de Geoffrey Swain, Ian Thatcher et Robert Service. La publication phare révèle les tentatives entreprises pour discréditer Léon Trotsky et empêcher un regain d’intérêt pour le grand révolutionnaire, à une époque où des millions de gens sont de plus en plus déçus du capitalisme.

Dans l’introduction du livre, North Remarque que l’on « trouverait difficilement une figure dont la vie a fait le sujet d’une telle campagne de calomnies et de falsifications que Trotsky […] Les passions que son nom évoque témoignent de la signification pérenne de ses idées. Les arguments autour de Trotsky ne se limitent jamais au passé. Ils concernent tout autant ce qui se passe dans le monde actuel, et ce qui pourrait se passer à l’avenir ».

North a développé les thèmes du livre dans une série de conférences qui ont attiré un public important partout dans le monde, dont à Sydney, Oxford et Los Angeles.

Lors d’une réunion le 17 octobre à Berlin sur le sujet « Soixante-dix ans depuis l’assassinat de Trotsky » (Seventy years since the assassination of Trotsky), North concluait par une évaluation de la place de Trotsky dans l’histoire et de son importance aujourd’hui :

« Quelle place Trotsky occupe-t-il dans l’histoire ? En tant qu’écrivain, orateur, stratège de l’insurrection révolutionnaire, dirigeant militaire et penseur politique, Trotsky représente le summum de la politique et de la culture socialistes du 20ᵉ siècle. Trotsky avait élaboré la stratégie de la Révolution russe avant 1917. Durant les années de la révolution et de la guerre civile, il a incarné la volonté de vaincre du prolétariat. Et plus tard, face à la défaite politique et à l’isolement, comme exilé pourchassé, Trotsky devait atteindre une grandeur politique et moral encore plus importante – en tant qu’adversaire implacable de la contre-révolution stalinienne et stratège de la future révolution socialiste mondiale… »

« Aucune tendance politique se nommant socialiste ne peut définir son programme, ne peut définir sa relation avec le marxisme de nos jours, sans se référer aux conceptions politiques et aux luttes politique développées par Trotsky. La Quatrième Internationale qu’il a fondée en 1938 a perduré et s’est développée comme l’expression politique du marxisme authentique. Soixante-dix ans après sa mort, Trotsky, la plus grande figure politique du siècle dernier, demeure le plus important enseignant du socialisme du nouveau siècle ».

Deux dirigeants du CIQI furent invités à prendre la parole en novembre au congrès de l’Association des Études slaves, Est-Européennes et Eurasienne. Les conférences de David North, intitulée « L’évaluation de Léon Trotsky soixante-dix ans après son assassinat », (Assessing Leon Trotsky seventy years after his assassination), et de Nick Beams, « L’analyse de Léon Trotsky du rôle mondial émergeant du capitalisme américain » (Leon Trotsky’s Analysis of the Emerging Global Role of US Capitalism) furent particulièrement bien accueillies.

Dans le cadre de cette initiative idéologique, le CIQI coopéra avec Alexander Rabinowitch, l’un des meilleurs experts mondiaux de l’histoire de la Révolution russe. La maison d’édition allemande Mehring Verlag a publié le dernier livre de Rabinowitch, « Les bolcheviks au pouvoir – La première année du régime soviétique à Petrograd » (The Bolsheviks in Power--The First Year of Soviet Rule in Petrograd).

L’Internationale étudiante pour l’égalité sociale et Mehring Verlag ont invité Rabinowitch à tenir en octobre une conférence (speak) à l’université Humboldt à Berlin. La réunion eut lieu en dépit d’une opposition concertée émanant de pro-staliniens au sein de l’université. Et malgré tout, une salle comble salua la venue de l’historien américain.

David North a également publié un compte-rendu détaillé (detailed review) d’un nouveau recueil de documents sur la théorie de la Révolution permanente qui fournit une précieuse source pour l’éducation politique du mouvement socialiste révolutionnaire. Le livre, Witnesses to Permanent Revolution : The Documentary Record, (Témoins de la Révolution permanente : un dossier documentaire) confirme le rôle crucial joué par Léon Trotsky dans l’élaboration des fondements théoriques de la Révolution russe.


Le Comité contre les coupures d’eau et d’électricité et autres campagnes politiques lancées par le CIQI

Le 5 janvier, trois personnes mouraient (three people died) dans un incendie sur l’avenue Dexter, dans le quartier Ouest de Detroit. La famille y vivait sans gaz ni électricité depuis plus de trois ans après que DTE Energy a coupé les services de gaz et d’électricité. Durant l’hiver, des incendies dû aux coupures de courant ont occasionné une dizaine de victimes, Le 2 mars, DTW avait coupé le gaz et l’électricité dans la maison de Sylvia Young (home of Sylvia Young) malgré des températures inférieures à zéro et la présence de sept jeunes enfants dans la maison. Alors que Young était sortie pour acheter un radiateur électrique, la maison avait pris feu, tuant trois de ses enfants (killing three of her children).

Le SEP a lancé une campagne en faveur d’une enquête civile (Citizens Inquiry) qui eut lieu le 20 mars en présence d’une dizaine de travailleurs, dont de nombreuses personnes à avoir subies des coupures de courant. L’enquête a conclu (found) que la cause du décès des résidents de Detroit était la coupure de gaz et d’électricité, le manque d’assistance (lack of assistance) portée à ceux qui connaissaient un retard de paiement de facture et l’accroissement de la pauvreté absolue (extreme poverty).

L’enquête a établi une série de conclusions (series of findings) qui constituent un réquisitoire accablant contre les entreprises énergétiques orientées vers le profit (utility companies), la ville et le gouvernement local gérés par les démocrates (city and state governments) et la désindustrialisation de Detroit (deindustrialization of Detroit). En tirant les leçons politiques, le SEP a souligné le rôle joué par les syndicats, notamment le syndicat United Auto Workers (UAW, Travailleurs unis de l’automobile) et le gouvernement Obama.

Le soutien croissant pour les travaux de l’Enquête a poussé le SEP à constituer en mai le Comité contre les coupures des services essentiels (CAUS) (Committee Against Utility Shutoffs (CAUS)). Le projet de CAUS est une étape essentielle dans la lutte pour la mobilisation de vastes sections de la classe ouvrière contre le Parti démocrate et les syndicats. Le CAUS s’est tourné vers les travailleurs du DTE (DTE workers) pour se solidariser avec leurs luttes contre la sous-traitance des emplois, le licenciement abusif (lockout of tree-trimmers) et des conditions de travail mortelles (lockout of tree-trimmers) chez les élagueurs.

En août, le CAUS a voté en faveur de la candidature de D’Artagnan Collier, un travailleur municipal et un dirigeant du SEP, aux élections à la Chambre des représentants du Michigan. L’année suivante, le CAUS devait organiser une puissante manifestation (powerful demonstration) pour commémorer la vie des victimes de l’incendie sur Secter Avenue en organisant des réunions contre les réductions budgétaires oppose budget cuts à Detroit et un rassemblement pour la défense des bibliothèques publiques (defense of public libraries) et la Catherine Ferguson girls’ academy.

Après la restructuration de l’industrie automobile par le gouvernement Obama avec le plein appui de l’UAW, les travailleurs de l’automobile ont commencé à se rebeller. Fin janvier, des protestations furieuses éclatèrent parmi les travailleurs automobiles de l’usine New United Motor Manufacturing Inc. (NUMMI) à Fremont, en Californie, contre les responsables de l’UAW (against United Auto Workers officials) qui appuyaient la fermeture de l’usine et la perte de 4500 emplois.

En mai, les travailleurs de l’usine d’emboutissage General Motors d’Indianapolis, dans l’Indiana, ont voté à 95 pour cent contre les exigences de renégocier leur convention collective et de réduire leurs salaires de moitié. L’UAW et les responsables de GM s’efforcèrent de faire passer les réductions dans le but de vendre l’usine au prédateur financier, JD Norman. Lorsque les travailleurs l’apprirent, ils chassèrent les responsables de l’UAW (chased United Auto Workers officials) de la réunion. Les travailleurs votèrent une fois de plus contre (voted down) l’accord proposé en septembre et GM se vengea en fermant l’usine.

Avec l’aide du Socialist Equality Party, un groupe de travailleurs mis en place le comité GM Stamping Rank-and-file Committee pour lutter contre la menace de fermeture, des réductions de salaire et les complots du syndicat. Un soutien vint immédiat de travailleurs du monde entier (around the world), dont une lettre (a letter) de travailleurs au Sri Lanka et du centre GM’s Flint Metal. De faux dissidents et des partisans de la pseudo-gauche (pseudo-left supporters) de l’UAW firent tout leur possible pour bloquer cette rébellion et isoler la lutte. Le comité de base des travailleurs a rejeté cette perspective et lancé à la place un appel urgent (urgent appeal) à la classe ouvrière pour mener une lutte plus large contre les concessions, les suppressions d’emplois et les salaires de misère.

Au lendemain de la guerre civile qui a duré 26 ans au Sri Lanka, le secrétaire général du Socialist Equality Party (Sri Lanka), Wije Dias, s’était présenté aux élections présidentielles qui se sont déroulées fin janvier comme candidat contre le président Mahinda Rajapakse et le général Sarath Fonseka, les principaux criminels de guerre du pays représentant les deux principaux partis bourgeois.

La guerre menée par l’élite cinghalaise contre le LTTE séparatiste (Tigres de Libération de l’Eelam tamoul) a coûté la vie à 70 000 personnes dans la petite nation insulaire et près d’un quart de million d’autres se trouvent incarcérés à la fin de la guerre dans des camps de détention gérés par l’armée. Dans sa déclaration électorale, (Le manifeste du SEP pour l’élection présidentielle 2010 au Sri Lanka : Un programme socialiste pour la lutte pour l’égalité sociale et les droits démocratiques) le SEP a expliqué le rôle joué par la politique communautariste et la position centrale occupée par le Sri Lanka entre les mains des grandes puissances rivales. Le SEP a demandé la formation d’un gouvernement ouvrier et paysan sous la forme d’une République socialiste du Sri Lanka et l’Eelam, dans le cadre d’une fédération socialiste d’Asie du Sud et du monde entier.

Le SEP au Sri Lanka a aussi participé aux élections parlementaires du 8 avril (Pour une politique socialiste et un gouvernement ouvrier et paysan) en présentant 58 candidats (58 candidates) dans quatre circonscriptions de l’île : à Jaffna dans le Nord, à Nuwara Eliya dans les régions des plantations, dans la capitale Colombo et à Galle dans le Sud. Au cours de la campagne, le SEP et les membres de l’ÉJIES ainsi que des partisans visitèrent les quartiers ouvriers et les universités, en diffusant des milliers de copies du manifeste électoral du SEP et en tenant des réunions à Hatton, Galle, Ambalangoda, le village de pêcheurs d’Uori (fishing village of Uori) sur l’île de Karainagar et à Colombo.

C’est avec une immense tristesse que le WSWS a relaté la mort prématurée le 2 septembre 2010, de la membre du SEP et épouse de Wije Dias, Piyaseeli Wijegunasingha, trotskyste Sri lankaise, à l’âge de 67 ans. Piyaseeli fut trotskyste durant toute sa vie adulte et une autorité reconnue en tant que critique littéraire marxiste. Ses œuvres comprennent A Marxist Study of Modern Sinhala Literary Criticism, (Une étude marxiste de la critique littéraire cinghalaise moderne) et A Reply to Sucharitha Gamlath : Marxist Principles on Criticism of the Arts (Une réponse à Sucharitha Gamlath : les principes marxistes sur la critique des Arts.) Piyaseeli a fait une contribution indélébile à la lute pour la culture socialiste (struggle for a socialist culture) au sein de la classe ouvrière.

En avril, le SEP (R-U) a présenté deux candidats, David O’Sullivan et Robert Skelton, aux élections législatives britanniques. Le manifeste électoral du Socialist Equality Party pour les élections a souligné les exigences du FMI de réduire de jusqu’à 20 pour cent les dépenses sociales et a appelé à la mobilisation d’un mouvement politique indépendant de la classe ouvrière contre l’austérité, le militarisme et la guerre.

En août, le SEP en Australie a mené une campagne électorale offensive (election campaign), en présentant le secrétaire national Nick Beams et Gabriela Zabala comme candidats au sénat en Nouvelle-Galles du Sud et dans l’État du Victoria, ainsi que dix candidats (ten candidates) à la Chambre des Représentants. Le SEP a mis l’accent sur le fait que les élections visaient à dissimuler (elections were aimed at concealing) les objectifs de la subite mise au pouvoir de Julia Gillard et du coup politique dirigé par les États-Unis pour évincer son prédécesseur ainsi que la préparation d’une plus grande austérité, du militarisme et d’attaques contre les droits démocratiques.

Aux États-Unis, le SEP a tenu une conférence d’urgence en avril, un événement très suivi qui a attiré des jeunes et des travailleurs des quatre coins des États-Unis et du Canada, ainsi que des représentants des autres sections du CIQI. La conférence a adopté six résolutions exposant les grandes lignes de la lutte pour la défense des emplois et des niveaux de vie, contre la coupure des services essentiels, pour l’unité internationale de la classe ouvrière, contre la guerre et le militarisme, pour la défense du droit des jeunes à un avenir décent, ainsi que d’un appel à la rupture politique de la classe ouvrière avec le Parti démocrate et pour la construction d’un mouvement politique de masse pour le socialisme.


Art et culture

La situation précaire dans laquelle se trouvent les arts et la culture en général en raison des conditions de la crise mondiale du capitalisme s’est manifestée de la façon la plus vivante dans l’attaque perpétrée contre l’une des premières formations musicales de l’Amérique, le Detroit Symphony Orchestra dont les musiciens ont entamé une grève prolongée en octobre. Le WSWS a relié les attaques de la direction à l’encontre de l’orchestre – qui est ardemment soutenu par les médias – à l’ensemble des efforts entrepris pour refuser à la grande masse de la population l’accès à la culture. Le SEP a mis en œuvre une défense résolue des musiciens grévistes qui ont reçu un très large appui de toute la ville de Detroit et du pays entier.

En 2010, le directeur artistique du WSWS, David Walsh, a donné une série d’importantes conférences – à New York City, Detroit et à Manchester – sur la crise de la culture américaine et le rapport entre le socialisme et les arts, notamment le cinéma. Il a relevé le contraste qui existait entre d’une part les romanciers russes du 19ᵉ siècle qui ont contribué de par leurs efforts conjugués à discréditer la société officielle, résultant finalement dans sa chute et d’autre part l’approche en général peu critique des cinéastes et écrivains américains. Walsh a expliqué que le « problème se situait en dehors d’eux, dans des traumatismes et des difficultés historiques qui n’ont pas encore été surmontés et dans de nouvelles réalités qui n’ont pas encore été appréhendées ».

Une exposition d’art du début de l’époque soviétique au Musée Guggenheim à New York qui avait initialement fait l’objet d’un compte rendu en 1993 a également donné l’occasion d’étudier en détail les relations historiques existant entre les bolcheviques et l’art d’avant-garde.

Comme le WSWS l’avait expliqué dans son évaluation annuelle du cinéma, l’année 2010 n’offrait qu’un choix « honteusement maigre » de films – qu’il s’agisse de films réalisés à Hollywood, « indépendants » ou étrangers. Les films les plus souvent en compétition aux Academy Awards de cette année furent des œuvres particulièrement pitoyables, avec à leur tête l’Oscar du meilleur film, le film pro-guerre The Hurt Locker (Démineurs) réalisé par Kathryn Bigelow. Et pourtant, un petit nombre de films ont soit réussi à capter quelque chose de la vie réelle, soit à exprimer une certaine opposition au statu quo, à savoir Winter’s Bone, et The Ghost Writer de Roman Polanski.

Il y eut aussi au cours de l’année quelques intéressantes productions télévisuelles dont Rubicon et Mad Men et elles ne furent pas les seules. « The Wire, Hung, Treme, In Treatment, Big Love et The Tudors laissent penser à quelque chose comme une renaissance de la télévision américaine, du moins si l’on fait la comparaison avec la programmation télévisée des années 1980 et 1990 », a remarqué le critique James Brookfield.

Le WSWS a publié une série d’articles en hommage à la vie et à l’œuvre de personnalités artistiques importantes : Mark Twain ; le romancier britannique du 19ᵉ siècle George Eliot ; la peintre mexicaine Frida Kahlo ; l’artiste Maria Abramovic ; le réalisateur Arthur Penn ; et l’acteur Corin Redgrave, qui fut membre de longue date du Workers Revolutionary Party, précédemment la section britannique du Comité International. De plus, des entretiens furent menés avec des artistes ayant produit durant cette année certains des travaux plus stimulants, dont le réalisateur britannique Ken Loach avec le scénariste Paul Laverty et Debra Granik.

Un certain nombre d’autres articles furent publiés sur les rapports entre la science et la société contemporaine, dont une notice nécrologique du mathématicien Benoît Mandelbrot et une chronique du livre « What does particle physics tell us about the nature of matter ? » (Que nous apprend la physique des particules sur la nature de la matière ?) Un autre développement significatif pour les connaissances humaines fut le redémarrage du Grand collisionneur de hadrons (LHC) du CERN, l’effort conjugué de quelque 60 000 scientifiques, qui enregistra le plus haut niveau d’énergie jamais atteint dans un tel appareil construit tout spécialement dans le seul but de comprendre la nature et la structure de la physique subatomique.

Une série de comptes rendus d’ouvrages a également permis d’explorer un éventail de sujets, dont la Révolution française, le siècle des Lumières, le rôle politique de Leonard Bernstein, la « réforme » de l’enseignement aux États-Unis et le concept biologique de race.