Youssef Seddik: haro sur le péril obscurantiste !
Le lundi 23 janvier
2012 a été marqué en
Tunisie par une série d'agressions ciblant des avocats, des journalistes et des universitaires venus soutenir en marge d'un procès inquisitoire contre une chaîne de télé la liberté de création et d'expression.
Ce jour-là, une foule d'islamistes ultras (et apparemment bénéficiant de la complaisance des forces de l'ordre restées passives) s'est ameutée à
Tunis autour du tribunal qui jugeait Nessma TV et son directeur pour la diffusion de Persépolis. Aux yeux des prisonniers de la pensée unique, ce long métrage d'animation franco-iranien est impie et le directeur de Nessma TV, "apologiste de l'art impie", mérite le bûcher. Pour rappel, ce procès de la honte répondait à une poursuite judiciaire engagée par des soi-disant avocats, une centaine de ceux qui portent indûment la robe de la profession, d'obédience nahdhaouie. Il rappelle à juste titre la Hisba remise au goût du jour dans l'
Egypte du déchu
Morsi, une censure religieuse draconienne dirigée contre tout ce qui s'appelle création artistique et littéraire, toute œuvre s'écartant des passages cloutés islamistes.
A leur sortie de l'audience, plus d'un de l'élite éclairée tunisienne engagée contre l'importation de la Hisba en Tunisie se sont vus conspuer, subir insultes et crachats, agresser physiquement, menacer de mort et de lynchage par la foule fanatisée (en vérité les brigades parallèles du pouvoir à majorité nahdhaoui) qui ressuscitait ce jour-là les tristement célèbres scènes de la sainte inquisition chrétienne du
Moyen âge.
Youssef Seddik, philosophe et anthropologue que les "ennemis de l'intelligence tunisienne" (expression de
Chokri Belaid) ne digèrent pas, était présent dans cette bataille. Et bien que cet universitaire septuagénaire ait consacré sa vie à servir mieux que tous les cheikhs et oulémas réunis la pensée islamique(1), il n'a pas été épargné par la foule des zélotes qui lui reprochaient, entre autres, d'avoir traduit le Coran alors qu'il n'est pas
..barbu !
Comme l'a fait Chokri Belaid dans un admirable réquisitoire traduit et publié sur cette chaine(2), Youssef Seddik revient sur ce jour noir pour en éclairer les tenants et aboutissants.
A.
Amri
19.09.2014
1- Quelques titres de l’œuvre de
Seddik:
- Brins de chicane. La vie quotidienne à
Bagdad au Xe siècle (coécrit avec Tanûkhî), éd. Actes Sud,
Arles,
1999 (
ISBN 9782742716913)
- Dits de l'imam Ali, éd. Actes Sud, Arles,
2000 (ISBN 9782742727384)
- Le Coran : autre lecture, autre traduction, Éditions de l'
Aube, La
Tour d'Aigues,
2002 (ISBN 9782752602114)
- Dits du prophète
Muhammad, éd. Actes Sud, Arles, 2002 (ISBN 9782742736812)
- L'arrivant du soir : cet islam de lumière qui peine à devenir, Éditions de l'Aube, La Tour d'Aigues, 2004 (ISBN 9782752603821)
-
Nous n'avons jamais lu le Coran, Éditions de l'Aube, La Tour d'Aigues, 2004 (ISBN 9782752600264)
- Qui sont les barbares ? : Itinéraire d'un penseur d'islam, Éditions de l'Aube, La Tour d'Aigues,
2007 (ISBN 9782752603838)
- Le
Grand malentendu. L'
Occident face au Coran, Éditions de l'Aube, La Tour d'Aigues,
2010 (ISBN 9782815900706)
- Unissons-nous ! Des révolutions arabes aux indignés. Entretiens avec Gilles Vanderpooten, Éditions de l'Aube, La Tour d'Aigues,
2011
2-
http://youtu.be/bAlG1UWCvXs