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vendredi, mars 11, 2011

[Alternative Libertaire] Analyse suite au Xème congrès.

[Repris du blogue de nos camarades de Voix de faits]
À chacun de leurs congrès, nos camarades d'Alternative libertaire revisitent la ligne politique et stratégique de leur organisation et essaient d'approfondir au moins une question. Leur Xe congrès, qui s'est tenu en plein mouvement des retraites, n'a pas faire exception. Les textes d'orientations adoptés, qui font habituellement l'objet d'une publication sous forme de livre, ont été mis en ligne il y a peu.

Bien que franco-français, on y trouve une réflexion libertaire contemporaine intéressante (quoi, que, y'a au moins un thème sur lequel nous divergeons... on vous laisse deviner lequel!).


mercredi, juin 02, 2010

L’anticapitalisme : perspective essentielle aux luttes sociales ?

Un texte de réflexion écrit par un camarade de l'UCL-Québec dans le cadre d'une journée d'étude  sur l'anticapitalisme et publié initialement sur Presse Toi à Gauche.

Le 15 mai dernier, je faisais la conférence de clôture d'une journée d'étude sur l'anticapitalisme organisée conjointement par le Centre Justice et Foi et le site web Presse-toi à gauche. Voici l'essentiel de ma présentation. Si vous avez des commentaires, vous pouvez les faire ici, c'est impossible sur PTÀG.

En regard du titre de la conférence qu’on m’a demandé de prononcer, je serais tenté de répondre « non ». Non, l’anticapitalisme n’est pas une perspective essentielle aux luttes sociales actuelles. La preuve ? Il y a plein de luttes sociales qui se mènent sans perspective anticapitaliste. C’est même le cas de la majorité des luttes au Québec. Ce qui ne veut pas dire, évidemment, qu’une perspective anticapitaliste n’a aucun intérêt, au contraire. Il faut juste remettre les choses en perspective : nous ne sommes pas essentiels.

Quel intérêt ?

Il faut comprendre et expliquer le monde et les phénomènes sociaux si on veut s’inscrire dans la réalité et influer sur elle. On peut comprendre le monde de plusieurs façons, en utilisant plusieurs grilles d’analyse différentes (nationaliste, libérale, réformiste, etc.). Toutefois, si on veut aller au fond des choses, il faut être radical et aller à la racine des problèmes. Et, dans le cas des problèmes sociaux, la racine c’est souvent le système capitaliste, d’où l’intérêt d’une perspective anticapitaliste.

Une perspective anticapitaliste est essentielle parce que dans le système économique actuel, la véritable justice sociale et l’égalité sont impossibles. On peut corriger des injustices, redresser des situations inégalitaires mais, fondamentalement, on ne peut espérer avoir la justice et l’égalité pleine et entière dans le système capitaliste. Tout simplement parce que le fonctionnement même du capitalisme produit de l’inégalité et de l’injustice. C’est dans sa nature. Pas d’exploitation de la force de travail, pas de capitalisme. Pas d’inégalité entre les salariéEs et les patrons, pas de capitalisme. Et ainsi de suite.

Il y a aussi la question de la transformation sociale. Comment obtient-on des avancées, comment fait-on des gains ? Notre société ne fait pas de cadeau aux perdants. C’est une société extrêmement dure. Si on redresse une situation d’injustice, si on donne plus à un groupe, forcément c’est qu’on enlève à un autre. Si on augmente la proportion de la richesse produite qui revient au travail, c’est forcément au détriment du capital (et vice-versa). Il faut comprendre qu’il y a des intérêts contradictoires qui sont en jeu. Il faut comprendre que la transformation sociale implique un rapport de force. Il ne s’agit pas de dialogue social mais de lutte sociale. Ce n’est pas la même chose. Dans ce contexte aussi, une perspective anticapitaliste est utile.

dimanche, mai 09, 2010

Il n’y a plus qu’une seule chose à régler: nos comptes avec le capital et son État

Un texte publié par des camarades communistes libertaires grecs, "l’agence de notation de crédit des prolos et des pauvres". Plusieurs traductions différentes sont disponibles sur le web,  nous publions donc celle-ci.

Un compte-rendu des luttes récentes en Grèce
Dans les périodes de crise, telles que la période actuelle de suraccumulation, les capitalistes manient la politique de « dette publique » de sorte à inventer de nouvelles façons d’intensifier l’exploitation. Au contraire des embellies capitalistes, lorsque la dette privée s’accroit, les récessions sont caractérisées par l’accroissement de la « dette publique ». L’investissement privé en obligations d’État garantit des profits qui proviennent des contributions directes et indirectes des travailleurs, dans le but de percevoir des dividendes et menant, finalement au renforcement du secteur bancaire. Ainsi, la « dette publique », contrairement à ce qui est généralement annoncé, vient en aide au capital privé et, de la sorte, doit être comptabilisée au titre de ses profits.

De plus, sur les 2 dernières années, la « dette publique » a triplé dans 20 des 27 pays de l’UE, du fait des dépenses massives pour renflouer le secteur financier. Cet argent ne fut pas distribué par le biais de prêts au capital privé (non bancaire) pour des investissements productifs. En outre, les emprunts publics furent et continuent à être faits suivants des conditions qui outrepassent largement le taux de profit moyen, rendant les investissements en obligations d’État bien plus rentables que les investissements pour la création d’unités de production et, a fortiori donc, d’autant plus intéressants que ce genre d’investissement est exempt des risques de luttes sur les sites de production.

La récession économique généralisée des années précédentes, qui est la manifestation la plus récente de la crise de reproduction permanente du capital, ces 35 dernières années – une crise que viennent juste interrompre des rétablissements temporaires –, a touché de façon inéluctable l’accumulation sur l’aire nationale. Toutefois, hormis les conséquences de la réduction de l’activité économique globale sur les exportations de capital grec, en particulier dans le fret maritime et le tourisme, la récession est aussi devenue l’occasion de mettre à jour la crise permanente dans la mise au pas et l’exploitabilité du prolétariat.

Après la période qui court du milieu des années 90 au milieu des années 2000, lorsque le capital était parvenu à accroitre le taux d’exploitation et à augmenter sa rentabilité, la rentabilité du capital en Grèce a ralenti sans interruption ces dernières années, du fait de la faible hausse de productivité en regard des salaires. En conséquence, elle a commencé à chuter davantage depuis 2006, jusqu’à s’écrouler, au premier semestre 2009, de 51,5 % par rapport au premier semestre 2008, du fait de la récession globale. La chute du chiffre d’affaires et de la rentabilité dans les entreprises privées a conduit à son tour à une importante réduction des investissements du fait de l’incapacité croissante des entreprises à obtenir des crédits de la part des banques. De plus, les banques étaient directement touchées, puisque leurs profits déclinaient dramatiquement à cause de l’augmentation significative des pertes provenant des retards de paiement ou des prêts impayés ; elles avaient, en sus, un problème de liquidités plus général à cause de la crise financière globale.

mercredi, janvier 27, 2010

Cause Commune Express: Tournée "Usines sans patrons"

Argentine : De la crise à l'insurrection

En mai 2000, le gouvernement de la Rua annonce une série de mesures afin de rendre l'État argentin conforme aux volontés néolibérales du FMI: baisse de 12 à 15% des salaires des fonctionnaires, réduction majeure des dépenses, privatisation, etc. Le tout plait effectivement aux bonzes du FMI puisqu'ils allouent 40 milliards de dollars en prêts à l'État argentin. Mais la crise semble indomptable puisque déjà l'année suivante le pays en est à son onzième plan d'austérité approuvé par le FMI et les seuls résultats palpables de ces mesures semblent être le nombre grimpant de manifestations, d'émeutes, de grèves et de coupures de routes (les piqueteros). Pendant cette période, on évalue à 2000 le nombre d'individus par jour passant de la "classe moyenne" à la "classe pauvre" et à 25% le taux de chômage; sans compter que le spectre de la banqueroute n'est jamais bien loin, à un point tel que le 1er décembre 2001 les liquidités des banques sont épuisées et que le gouvernement doit limiter par la loi les retraits des particuliers.

En décembre 2001, les émeutes comptent plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de pillards (pauvres, chômeurs ou membres déchus de la classe moyenne) qui s'en prennent aux supermarchés, aux entrepôts, aux boutiques, etc.) Les troubles sont si préoccupants que l'état de siège est décrété par les forces de l'ordre: tout regroupement public de plus de deux personnes est interdit et que la censure est rigoureusement appliquée aux médias. La répression, qui a déjà fait quelques morts, se fait sentir au maximum, mais les émeutes continuent de plus belle et sont désormais doublées de cette pratique qui avait fait grandement pression sur la dictature militaire dans les années 1970, les "concerts de casseroles" (cazerolazos) qui regroupent, chaque jour et partout à travers le pays, plusieurs milliers d'individus.

Dans la soirée du 19 décembre, une manifestation spontanée regroupant plus d'un million de personnes a lieu à Buenos Aires. Devant le palais présidentiel, la foule en colère réclame la démission des hommes politiques. Le tout se termine dans la nuit par une émeute majeure qui balaiera les institutions bancaires et les multinationales et lynchera plusieurs policiers. Lors de ces troubles, plusieurs milliers de messagers à moto (motoqueros) participent aux affrontements; ces derniers, par leur connaissance de la ville et leur mobilité, amorcent ainsi un mode d'action qui allait être reconduit à de nombreuses reprises.

Des évènements semblables ont lieu dans au moins une douzaine de villes du pays. À Cordoba, la mairie est occupée. On y tient une assemblée avant d'y mettre le feu et de dresser des barricades. Le lendemain matin, la révolte se poursuit, un manifestant raconte: " Les gens allaient, venaient, les cortèges se recyclaient, les avenues se vidaient puis se remplissaient à nouveau d'hommes, de femmes, de familles avec leurs chiens... C'était quelque chose d'impressionnant parce que totalement spontané... ". Cette journée sera ponctuée par une foule d'évènements majeurs semblables à la veille… combats de rues, pillages, assaut d'une foule en colère contre la maison du président, etc. À l'évidence, la révolte devient insurrection.

Mais ces manifestations de souveraineté populaire attirent évidemment son contraire : la répression, qui est à la hauteur de la réputation qu'elle s'est forgée pendant la dictature. De ces quelques semaines d'affrontement, on compte 35 tués, des centaines de blessés et des milliers d'arrestations (officiellement 3273). Plusieurs témoins racontent que des tueurs en civils se faufilaient dans la foule afin d'abattre des militants-e-s d'une balle dans la nuque. Les autorités ne savent décidément pas comment réagir: le président de la Rua démissionne et doit être évacué par hélicoptère. Le nouveau président, Adolfo Rodriguez Saa promet un moratoire sur le paiement de la dette extérieure et la création d'un million d'emplois.

Mais les manifestations se poursuivent… et l'année 2001 se termine par la démission du président Saa, bientôt remplacé par Duhalde. Les concerts de casseroles, les coupures de routes, les émeutes et les manifestations reprennent dès janvier. Dans la ville de Mosconi, les émeutiers prennent la garnison du commissariat en otage et brulent l'édifice. À Junin, 600 manifestants brulent la maison d'un député. Le 28 janvier, plus de 15 000 piqueteros soutenus par les assemblées de quartier convergent au centre de Buenos Aires. Le nombre de piqueteros - et de piqueteras, puisque les femmes sont très nombreuses lors de ces actions: elles forment jusqu'à 70% des effectifs - est d'ailleurs depuis le début de la crise leurs regroupements sont en pleine expansion: de 1383 qu'ils étaient en 2001, ils passent à 2336 en 2002.

Les émeutiers délaissent désormais les supermarchés pour mieux s'en prendre aux banques, sans compter que les assemblées de quartiers, progressivement, se fédèrent entre elles afin de coordonner l'insurrection. Ces assemblées, qui se comptent par centaines, transfigurent la critique en acte et en parole. Réunissant parfois plusieurs milliers de personnes, elles permettent au peuple de reprendre tout ce qui le concerne en main, sans avoir recours à la médiation de l'État ou d'une quelconque institution bourgeoise. Fonctionnant de façon horizontale et non hiérarchique, elles prennent une telle ampleur que les dirigeants politiques croient devoir rappeler qu'aux termes de la constitution:

Le peuple ne délibère pas et ne gouverne que par l'intermédiaire de ses représentants... Il faut arrêter la fantaisie des gens dans la rue qui disposent de ce qui doit ou ne doit pas se faire... Il... faut adresser des pétitions aux autorités... de façon ordonnée et sensée au lieu de les livrer en pâture aux agitateurs habituels...

Cette insurrection a pris tout le monde par surprise, aucun syndicat, aucun parti n'en est à l'origine. C'est de la population elle-même, spontanément, qu'est venue la résistance, et c'est cette même population qui a donné à cette résistance une forme si originale et efficace. La révolte populaire fut accompagnée par un vaste mouvement d’autogestion des entreprises en faillite. Autour du slogan « Occuper, résister, produire », entre 8000 et 10 000 postes de travail dans plusieurs secteurs industriels (métallurgie, textile, imprimerie, hôtellerie, alimentation, etc.) ont ainsi été sauvés par les travailleurs et travailleuses dans des entreprises récupérées et remises en marche par leurs propres ouvriers et ouvrières, alors même que la crise financière de décembre 2001 avait poussé les patrons à les abandonner à leur propre sort. Sans contredit, il s’agit de l’un des faits marquants de la réponse des classes populaires qui mérite d’être souligné.


Si le contexte québécois de 2010 diffère largement de celui argentin de 2001, quelques rapprochements sont tout de même possibles. D'abord, la crise qui a touché durement l'Amérique du Nord a fait passer le taux de chômage de 7,2% (le plus bas niveau en 32 ans) à un niveau qui atteindra possiblement 10% en 2010. Pour la région de Montréal seulement, le taux de chômage a déjà atteint les 10,5%. Certains économistes craignent même une seconde crise financière dans un avenir très rapproché. Par ailleurs, l'État et le patronat, sous prétexte de relance économique, se lancent dans une grande offensive néolibérale - en sabrant dans les services sociaux, les conditions salariales et en remettant à l'ordre du jour différents plans de privatisation. Pour couronner le tout, tant les syndicats que les mouvements sociaux sont moribonds et sont en mode survie plutôt qu'en mode combattif, laissant ainsi l'État manœuvrer à sa guise. Dans un tel contexte, que peut-on tirer de l'expérience argentine afin de s'organiser ici et maintenant?

Contre le capitalisme

La première nécessité semble être l'élaboration d'un projet social et politique extra-parlementaire qui aurait pour fondation une authentique démocratie. Peu importe les mesures que les politiciens prendront, ce ne sera qu'en faveur du marché et ce sera nous (les travailleurs, les travailleuses, les étudiants et les précaires) qui en paieront le prix.

L'expérience de récupération d'usine dans un contexte de crise économique serait, dans un premier temps, une nécessité qui permettrait aux travailleurs et aux travailleuses de conserver leurs emplois. On n'a qu'à penser à l'exemple récent de la grève d'Alcan à Jonquière en 2004. Les travailleurs, réalisant les limites de la grève légale, ont relancé la production sous contrôle ouvrier, poussant ainsi le patronat à la négociation - entre autres puisqu'il ne pouvait plus revendre l'électricité non utilisée pour amortir les pertes causées par la grève. Bien que l'expérience argentine soit critiquable à plusieurs niveaux, elle permet à la population de renouer avec une véritable démocratie que la rationalité et le productivisme capitaliste nous ont fait oublier depuis fort longtemps. La réussite d'un tel projet, l'autogestion généralisée, ne peut à long terme réussir sans une lutte globale pour une transformation libertaire et socialiste de la société. Dans un tel contexte, l'auto-organisation des chômeurs et des précaires est indissociable de la lutte des travailleurs et des travailleuses pour l'autogestion de leurs milieux de travail et la solidarité entre les différentes luttes parcellaires est plus que jamais nécessaire.

Contre l'État

L'autre aspect crucial est le principe des Assemblées de quartier et la mise en place de mécanismes de démocratie populaire. Dans un contexte de crise sociale et politique, dans lequel les gens n'ont plus confiance aux politiciens et aux partis, la démocratie par la base est plus que jamais nécessaire. Que ce soit pour des enjeux de quartiers, le logement, la précarité, l'éducation populaire ou la santé (on peut penser au modèle des cliniques populaires des années 1960-1970), seule notre force collective, par la mise en place de mouvements de quartiers, peut amener un réel changement.

L'attente de réformes ou de promesses électorales, la manipulation par les politiciens et les bureaucrates et toutes les formes de concession minent à long terme nos luttes populaires. C'est pourquoi dans le contexte de notre campagne sur la crise nous jugeons important de partager des expériences de luttes collectives afin d'entamer ou de poursuivre une réflexion collective sur les façons de s'organiser ici et maintenant.

pour connaitre chaque arrêt de la tournée, cliquez ici.

samedi, décembre 19, 2009

La violence acceptable

Pour notre plaisir à tous, Mario Roy termine l'année par un texte à la hauteur de sa fonction professionnelle – soit celle de gardien idéologique du sommeil collectif (« La violence acceptable », La Presse, 18 décembre 2009*). Alors qu’à Copenhague les gouvernements s'entendent afin de ne rien faire pour sauver la planète (que voulez-vous, la terre n'a pas la chance de bénéficier des plans de sauvetage des banquiers), Mario Roy, dans un excès de sensiblerie typiquement petite-bourgeoise, dénonce l'action – vous l'entendez venir d'un pas lourd et tonitruant – du Black Bloc. Sans doute parce qu'il est un peu lui-même une marchandise – ou enfin, un produit authentique de la société capitaliste marchande –, Mario Roy dénonce – sans intelligence ni éloquence, mais quand même – la violence des manifestants à l'endroit de ce fétiche moderne.
[…] toute manifestation de rue, surtout à l'occasion des forums internationaux, est invariablement marquée d'une violence parfois très dure qui n'a d'autre contenu politique discernable que la violence elle-même.
Le fait que la terre surchauffe, que les forces de l'ordre aient procédé à des centaines d'arrestations et que les États aient délibérément décidé de poursuivre la destruction systématique de la planète ne cause manifestement aucun problème de conscience au terne scribouilleur en laisse. La violence inacceptable, c'est la violence aveugle à l'endroit des dirigeants de la terre. Ces derniers méritent le respect, aboie sans gène apparente Mario Roy en se grattant le derrière de l'oreille, et ce n'est pas parce qu'ils dominent le monde que ça nous donne le droit de présenter des vidéos mettant en scène leur assassinat (franchement!), de leur lancer des souliers (c'est moralement incorrect!) ou des statuettes (de la sauvagerie!).
Ces personnages sont alors délestés de leur dignité et de leurs attributs d'êtres humains. Ils sont privés de ce que le commun des mortels, lui, peut revendiquer: la protection de sa personne et de son image contre les agressions et les abus.
Le temps où les régimes pouvaient légitimement être critiqués dans leur fondement est bel et bien terminé. La seule violence légitime est celle qui part de la couronne et descend la chaine de commandement pour venir s'abattre sur la tête des sujets. Le prince peut anéantir des peuples entiers, voire la terre elle-même. Éclairée par la froide raison bourgeoise, la violence des puissants n'est plus, et depuis longtemps, « aveugle ». Leur raison est maintenant la Raison. Et l'acceptation de cette violence « raisonnable » a si intégralement colonisé tous les espaces de notre imaginaire collectif qu'elle n'a désormais plus besoin de justification. La logique étant désormais rangée du côté de la puissance et de l'assassinat systématique, les porte-paroles de l'ordre n'ont qu'à pourfendre ceux et celles qui ne sont pas « éclairés » par le phare lumineux de la raison d'État, celle qui permet aux puissants de le rester et aux journalistes de se faire une niche à leur côté.

jeudi, juillet 02, 2009

Pénurie de logements et hausse de loyers


L'IRIS (Institut de recherche et d'informations socio-économiques) a publié, juste à temps pour la "fête" du déménagement, son document annuel sur l'état de la situation du logement au Québec.
La pénurie de logement semblait se stabiliser en 2008 avec un redressement léger du taux d’inoccupation. Or, les données de 2009 indiquent plutôt que la crise du logement se transforme en état permanent (voir Graphique 1). Alors que de nombreux commentateurs prédisaient la fin de la pénurie, le taux d’inoccupation a connu une baisse à l’échelle du Québec et demeure éloigné du seuil d’équilibre. Du côté des loyers, la crise d’abordabilité s’amplifie avec des hausses soutenues. De plus, l’actuelle crise économique risque d’aggraver la situation précaire de l’accès au logement.
Voici, donc, par Guillaume Hébert et Marc Daoud, « Pénurie de logements et hausse de loyers » (document PDF).

dimanche, mai 10, 2009

Lettre ouverte de l'AEELI aux anarchistes de Montréal

Nous avons décidé de publier une lettre ouverte à tout individu ou groupe qui s’intéresse au petit milieu de la diffusion des idées anarchistes parce que nous, membres de l'AEELI*, qui sommes impliqués dans un OBNL (Organisme à But Non Lucratif) dédié à cette cause, croyons qu’il est fondamental que non seulement nos idées, mais aussi nos actes, soient connus et débattus. Nous espérons alors qu’ils ne soient pas mal interprétés et que ces interprétations n’aboutissent pas à une désolidarisation de la part de certain-e-s. Nous ne pouvons ici traiter de manière exhaustive de l’histoire de notre association. Cependant, il nous faut vous dire que nous avons traversé des années difficiles, mais fécondes, et nous espérons que les années futures seront plus stables pour nous éloigner de notre précarité.




L’année 2008 a confronté l’AEELI à des tensions qui auraient pu avoir de graves conséquences. Des locataires qui partent sans payer plusieurs mois de loyers et qui refusent toute reconnaissance de dettes antérieurs ou de dommages à leur local en laissant l'Association financièrement précaire, et des militantEs avec la responsabilité de réparer les pots cassés. Voilà, sans vouloir ici entrer dans les détails, ce qui a provoqué des conflits et qui a soulevé d’importantes questions éthiques. C’est parce que nous avons constaté un manque de solidarité envers l’Association, voir même une opposition contre les gestes posés par celles et ceux qui luttent pour sa survie, que nous avons décidé de faire un peu le bilan historique de la nouvelle administration mise en place au printemps 2004. Ceci nous a permis de mettre en perspective les récents événements, d’exposer plus en détail notre situation financière et de défendre nos gestes pour susciter une réflexion ou un débat plus large.





Un peu d’histoire




La fondation de l’AEELI en 1982 et l’achat du bâtiment se sont réalisés dans l'objectif d’assurer la pérennité du projet libraire en lui offrant un local et une source de financement par la location de locaux commerciaux. La mission première de l’AEELI est d’assurer l’existence d’une librairie anarchiste; elle n’a pas pour objectif de simplement garder en état un bâtiment pour louer des locaux à des projets libertaires. Avec la fermeture de la librairie Alternative et les importants changements administratifs en 2004, l’AEELI s’est dotée d'une mission où nous soutenons des projets libertaires autre que la librairie: 





« l'AEELI a depuis ces débuts voulu que tous les locaux soient utilisés par des projets libertaires, pour ainsi réaliser un centre de diffusion anarchiste ayant comme premier projet une librairie. Pour y arriver, les projets libertaires abrités dans les locaux de l'AEELI sont appelés à contribuer selon leurs moyens aux dépenses communes de l'Association. »
-extrait de la Mission adoptée le 2 août 2004


Cependant, cette nouvelle mission n’a jamais mis en veilleuse la mission première de l’AEELI, mais a plutôt servie de complément à cette mission qui pourra se réaliser si nous arrivons non seulement à maintenir l’Association, mais surtout à la faire prospérer.





C’est aussi avec la nouvelle administration que la librairie (L'Insoumise) est devenue directement liée à l’assemblée de l’AEELI de la même manière qu’un comité de travail lié à une assemblée fonctionnant sur les principes de l'autogestion. Ce faisant, la nouvelle librairie, par son comité libraire permanent, s’est dotée d’un fonctionnement transparent et redevable qui a permis une importante implication de diverses tendances libertaires. C’est grâce à cette implication de qualité que la librairie a pu, entre autre, générer un revenu lui permettant, pour la première fois de l’histoire de l’AEELI, de contribuer mensuellement et de façon significative aux revenus de l’AEELI. Il est important ici de spécifier que la librairie n’est pas un locataire de l’AEELI, mais un projet de celle-ci, qui contribue selon ses moyens. La librairie est mise à contribution par l’AEELI et l’AEELI peut aussi contribuer à financer la librairie.





La nouvelle administration croit bon de privilégier la location des locaux aux projets libertaires ou qui sont considérés sympathiques à la cause anarchiste. Au lieu de privilégier des locataires commerciaux capables de payer le prix du marché, l'AEELI refondue en 2004 a cherché à offrir ses locaux en subventionnant une réduction significative des loyers relativement au prix du marché. Cette nouvelle condition économique de l’AEELI n'a cependant pas amélioré le sort de ses finances précaires. De sorte que l’AEELI n’a pas été en mesure depuis les quatre dernières années de se bâtir une réserve substantielle et de procéder à d’importantes rénovations. C’est aussi pour cette raison que les locataires n’ont pu compter sur l’AEELI pour financer leurs rénovations mineures qui ont pu être réalisées dans les locaux. Il est donc inadmissible de prétendre que le manque d’investissement de l’AEELI est de sa responsabilité, car c’est aux locataires « amis » que revient cette responsabilité étant donné leur loyer fortement subventionné. Quant aux rénovations majeures ou aux améliorations locatives, tel que l’aménagement de la cour arrière du bâtiment, l’AEELI considère aussi qu’il est du devoir de ses locataires membres de contribuer bénévolement à la gestion et à l'entretien du projet.





Un peu d’économie




La situation financière et légale de l’AEELI vaut la peine qu’on s’y attarde, car c’est à partir d’elle que nous pouvons juger du bien fondé des actions que pose son administration. L’AEELI est un OBNL qui ne fait pas de profit par obligation légale, qui ne paie pas ses administrateurs-trices, qui pratique une administration transparente et redevable et qui n’a donc rien à voir avec un propriétaire privé habituel. Les loyers payés par les locataires et la contribution de la librairie ne servent qu’à payer les comptes nécessaires à sa survie (taxes, électricité de tous les locaux, assurances). Depuis les dernières rénovations majeures en 1984, il y a eu très peu d'investissements pour maintenir ou accroître la valeur de l'édifice. L’AEELI doit donc mettre de l’argent de côté pour pouvoir se créer une réserve si nous voulons, entre autre, obtenir une hypothèque pour procéder à des rénovations majeures ou urgentes. Aucune banque ou caisse n’accepte de prêter à une association qui dilapide ses avoirs ou qui n'a aucune mise de fonds et qui n'a pas de revenus suffisants et prévisibles pour payer les mensualités hypothécaires. Avec des loyers aussi bas, l’AEELI ne peut se permettre d’avoir des locataires qui ne paient pas. Ajoutons à ce devoir de réserve (semblable au paiement d'hypothèque qu'avait l'AEELI de 1985 à 2005) que l’AEELI doit aussi avoir un budget pour procéder à des réparations ponctuelles. Enfin, l’AEELI n’est pas une association secrète et quiconque voudrait rencontrer le conseil d’administration pour obtenir les chiffres exacts est bienvenue.






En regard de cette situation, les locataires libertaires ou sympathisants qui abdiquent leurs responsabilités par manque d’organisation, manque de sérieux ou manque de sympathie se trouve fautif tant au niveau légal, car ils ont signé un bail, mais aussi au niveau de leur éthique, car ils nuisent à la pérennité du projet libraire et libertaire. Les locataires ont le devoir, lorsqu’ils décident de devenir locataires, d’avoir les reins suffisamment solides pour ne pas causer de problème, de mettre de l’argent de côté en cas de pépin et d’avoir des membres qui se portent garants des engagements que les groupes locataires prennent. L’AEELI ne peut pas non plus assumer des problèmes imprévus que peuvent avoir les locataires, mais elle est prête à prendre les arrangements nécessaires pour étaler le paiement d’une dette quand une telle situation se présente. Ce n’est que lorsqu’il y a rupture de confiance ou bris des engagements que l’AEELI n’a d’autres choix que de prendre de mesures légales pour exiger qu'un ancien locataire rembourse sa dette. L’AEELI peut difficilement se permettre de créer un précédent où un ancien locataire puisse fuir ses responsabilités. L’AEELI ne se rendra pas encore plus précaire en cultivant une réputation de laisser-faire. Nous prônons la solidarité, mais aussi la valeur de la responsabilité.



Un peu de droit


Certaines personnes pensent que nous ne devrions pas légalement obliger les anciens locataires de payer pour leurs dettes et leurs dégâts. Ces mêmes personnes sont aussi souvent d'accord pour dire que l'Association est responsable de fournir des locaux en bon état aux nouveaux locataires. De se voir obliger de payer pour les dommages, mais de se faire refuser que les responsables des dommages assument les coûts, est une recette certaine pour la faillite. Les nouveaux locataires préféraient-ils renoncer à tenir l'Association responsable des dommages et de négocier eux-mêmes avec les anciens locataires à l'origine de ces dommages?





Malgré que ce soit toujours une décision difficile, car notre association n’est pas monolithique, le débat s’est fait pendant longtemps et n’a pas fait l’unanimité. Si l'AEELI considère comme admissible le recours à des mises en demeure et la cour de petites créances, c'est que depuis la fondation de l'Association nous opérons dans un minimum de logique légaliste. Si l'AEELI ne paye pas ses comptes de taxes ou d'électricité, la Ville, le comité des taxes scolaires et Hydro-Québec ne se priveront pas de nous poursuivre, et en fin de ligne, si nous persistons, l'édifice serait saisi pour payer ces créances. Si l'AEELI se priverait par principe du recours à la loi pour obtenir des paiements, il serait alors mieux que l'AEELI se départisse de sa propriété avant que cette situation soit forcée sur l'Association. C'est seulement dans un monde où nos obligations légales ou monétaires auront disparu que nous pourrons offrir ces mêmes conditions. De refuser un tel réalisme libertaire reviens à se désolidariser d'avance et de conserver pour soi les valeurs dominantes d'irresponsabilité et de profiteurs-victimes (petits ou grands).




Enfin, des locataires soucieux d'avoir un bail détaillé, équitable et qui protège leurs droits en bout de ligne sont mal placés de se plaindre si l'AEELI consent à utiliser la cour. Sans la possibilité d'arbitrage par la cour, un bail n’est rien qu'un bout de papier qui met par écrit des pratiques et ententes mutuelles et volontaires. Dans ce cas, dès qu'une partie voudrait unilatéralement changer les termes de l'entente, rien ne l'empêcherait de le faire. L'engagement et la responsabilité, ainsi que les droits et la protection deviendraient des mots creux. L'AEELI ne s'attend pas à ce que ses locataires renoncent à leurs droits légaux dès qu'ils entrent en relation avec elle, ce qui serait une exigence impossible et immorale. Les locataires ou leurs ami-e-s ne devraient donc pas s'attendre à ce que l'AEELI renonce à ses droits légaux qui consistent à exiger le respect de nos ententes.





Un peu de politique




Bien au delà de nos obligations légales, les membres de l'AEELI ont tenté à plusieurs reprises de dialoguer et de résoudre nos différents avec les ex-locataires. Cela a résolue en partie nos différends, mais un des ex-locataires ne voulait franchement rien entendre. Après échec de toutes tentatives de négociation, les membres, en assemblée, ont décidé de procéder par une mise en demeure qui aurait pu aboutir devant la cour des petites créances. Nous n'acceptons pas de se faire dire que la responsabilité demeure toujours la nôtre d'essayer et d’essayer à nouveau de dialoguer. Lorsqu’on nous met au défi d'aller en cour pour mieux se désolidariser de nous, c’est une preuve de cette mauvaise foi qui explique cette absence de volonté de négocier. Par conséquent, les irresponsables qui entretiennent cette culture anti-solidaire, tout en voulant conserver leurs droits dans le cadre étatique, démontrent une attitude typique dans le cadre des relations capitalistes.





Le fait que nous ayons pris le risque de louer nos locaux à des groupes politiques, qui ne sont pas des entités lucratives comme des entreprises typiquement capitalistes auxquelles nous pourrions demander des références financières et d’important dépôt en argent pour garanti, ne rend pas ces groupes moins responsables. Au contraire, nous devrions nous attendre à une plus grande solidarité de leur part. Pourtant, certain-e-s favorables à la location de nos locaux à ces groupes, nous font porter la faute d’utiliser les procédures judiciaires en prétextant que nous aurions dû prévoir leur instabilité et ne pas leur louer nos locaux. Dans ce cas, si nous appliquons la même précaution à tout les groupes politiques, nous devrions les exclure d’emblée.

Notre association a la responsabilité de déterminer quel groupes d'éventuels locataires manifestent le sérieux nécessaire, mais cette clairvoyance a ses limites: tant que les projets locataires demeurent actifs et leurs membres motivé-e-s, ils ont évidemment intérêt a rester responsables face à leurs engagements. Qu'il soit plutôt un club social, un groupe politique ou un petit commerce, ce ne sont pas des indices fiables de qui sera plus responsable que l'autre, a priori. L'AEELI ne peut pas prédire le succès ou prévoir l'effritement d'un projet logé dans l'édifice, mais nous comptons nous prémunir contre de tels événements. Les locataires auront l’obligation de payer d'avance quelques mois de loyers en guise de sûreté et des individus dans le groupe devront se porter personnellement garants du bail.



Dans la mesure où les tensions de 2008 ont dégénéré en agressions et menaces, cela a aussi montré les limites de la négociation, et l'abandon d'une praxis libertaire des ex-locataires. Nos membres qui travaillent bénévolement font un travail ingrat. Il est complètement inacceptable que leur travail les expose à la violence. Il est également inacceptable de recourir à des méthodes extra légales de violence dans un cadre associatif ce qui est non seulement autoritaire, mais qui est aussi à haut risque d'attirer les foudres de la police.



Bien que composée de libertaires, l’AEELI n’en est pas moins une association légale qui est propriétaire d’un immeuble et nous n’évoluons toujours pas dans un système communal des biens. Dans ce contexte, il serait impossible de jouir des locaux de ce bâtiment sans se soumettre à bon nombre de règles du système légal. Cependant, certain-e-s anarchistes prétendent que ce système étatique nous permettrait de jouir d’une marge de manœuvre nécessaire pour se soustraire à certaines de ses règles tout en mettant en place un système parallèle de règlements de nos différents. Il faudra bien un jour que ces anarchistes aillent au-delà de la prétention de principe et en fasse la démonstration.
 




Nous reconnaissons que l'Association, ses membres et ses locataires devront toujours mettre plus d'efforts pour élaborer et approfondir d'avantage un cadre positif et alternatif aux habitudes typiques de recours aux droits et obligations dans une optique de gestion « d'intérêts opposés » qui caractérise les relations capitalistes. Cette élaboration d'une praxis proprement libertaire et communiste n'est pas uniquement de notre responsabilité, elle est un défi commun.


Adoptée par les membres en Assemblée générale le 22 avril 2009

*Association des espèces d'espaces libres et imaginaires





vendredi, avril 24, 2009

Nous cotisons, vous placez... ILS EMPOCHENT!


[ce texte est paru en première page de notre dernière parution du Cause Commune bientôt disponible sur le web ou à la Librairie l'Insoumise]

Depuis quelques semaines, la Caisse de dépôt et placement du Québec [CDPQ] a fait couler beaucoup d’encre. L’annonce des résultats de rendement de la Caisse a fait l’effet d’un puissant séisme, tant chez les financiers que pour la classe politique. Les travailleurs et les travailleuses, qui étaient déjà inquiets et inquiètes face aux conséquences de la crise économique, ont maintenant peur des répercussions sur les fonds de retraites administrés par la Caisse.

Les grands médias et les partis d’opposition se sont surtout attardés aux résultats récemment dévoilés. Mais la Caisse, c’est plus que ça ! Cette institution est en fait l’un des principaux vecteurs du développement du capitalisme québécois, en particulier sous sa forme financière. La Caisse de dépôt, c’est l’utilisation de l’argent des travailleurs et des travailleuses à des fins de rentabilité et d’accumulation de capital sans aucune autre considération.

Des résultats catastrophiques


Les résultats récents de la Caisse ont été fouillés à fond par les médias de masse, les économistes et nos politicien-ne-s. La Caisse a investi, comme beaucoup d’autres gestionnaires de fonds publics[1], dans les fameux PCAA (papiers commerciaux adossés à des actifs) ce qui s’est avéré un véritable désastre. En effet, lorsque les ménages américains surendettés ont commencé à ne plus être en mesure de rembourser leurs hypothèques, les banques ont subi une crise de liquidité et n’ont plus été en mesure de rembourser leur PCAA. Dans toute cette opération, la Caisse a enregistré une perte de 25% de ses actifs, soit 40 milliards de dollars. Ces milliards de dollars, ce sont en fait ceux de travailleurs et de travailleuses dont les fonds de retraite sont déposants à la caisse. Il y a 25 fonds de retraite déposants, dont le Régime des rentes et le Fonds des employé-e-s du gouvernement du Québec.

Des placements qui profitent de l’exploitation et de la pollution ?


La Caisse se comporte comme une entreprise privée de gestion de portefeuille : sa seule et unique considération, c’est le rendement de son capital. Il s’agit d’argent public, mais le comportement, lui, est celui de tous capitaux financiers. En ce sens, la Caisse est un vecteur essentiel du développement capitaliste du Québec, mais aussi du développement de l’impérialisme québécois et canadien. Un examen rapide des compagnies ayant des participations quelconques de la Caisse, permet de constater à quel point cette institution contribue à enrichir des entreprises antisyndicales, polluantes et impérialistes.

Premièrement, les mises à pied réalisées, depuis deux ans, par les compagnies où la CDPQ est présente s’élèvent à plus de 30 000 travailleurs et travailleuses partout dans le monde. À elle seule, la compagnie pharmaceutique américaine Pfizer a licencié près de 15 000 employé-e-s en deux ans. À cela il faut rajouter 5000 pour Microsoft, 2000 pour BHP Billiton, 2000 pour Nokia, 1500 pour Bombardier, etc. Il faut aussi mentionner que la CDPQ a des parts chez Québecor Media, les mêmes qui mettent en lockout les travailleurs et les travailleuses du Journal de Montréal.

Deuxièmement, il faut montrer la participation à des compagnies pétrolières comme Exxon Mobil, que l’on accuse notamment d’être derrière l’invasion de l’Irak. Exxon Mobil est aussi responsable de nombreuses études réfutant les changements climatiques. La CDPQ a des parts également chez Total, compagnie pétrolière française accusée de soutenir la junte militaire du Myanmar et aussi responsable de la catastrophe maritime suite au naufrage du Erika au large de la Bretagne. On retrouve aussi des placements chez des compagnies pétrolières russes, comme Lukoil et Gazprom, qui ne sont pas étrangères à la guerre en Géorgie à l’été 2008 ; de même que des entreprises chinoises, britanniques.

Au secteur énergétique, on doit aussi ajouter le secteur minier. La Caisse est présente dans plus d’une dizaine d’entreprises aux pratiques douteuses et agressives notamment en Afrique, comme par exemple les compagnies canadiennes (CNR et Barrick) ou coréenne (POSCO), etc. La société aurifère Barrick, mieux connue comme la Barrick Gold, est d’ailleurs responsable d’un baillon légal (SLAPP) contre la maison d’édition Écosociété qui a publié un livre sur les pratiques antisociales et anti-environnementales de la compagnie (chut !!! en espérant ne pas se faire poursuivre !).

La Caisse possède de nombreuses actions de grandes banques étrangères, dont la Citigroup, la Bank of America, JPMorgan and Chase. Ce sont, en partie, ces trois grandes banques américaines qui sont responsables du fiasco des « subprimes» et des PCAA. De plus, la Citigroup est soupçonnée de contribuer à l’évasion fiscale en facilitant l’accès à des comptes offshores dans des paradis fiscaux des Caraïbes ou d’Europe.

À ce bilan, il faut ajouter des participations dans des compagnies comme Microsoft, accusées de pratiques monopolistes, comme la prise de contrôle de la bannière ISO pour bloquer l’émergence du logiciel libre ; Google, qui est responsable d’un stockage d’information en quantité inimaginable ; Nestlé, souvent pointée du doigt pour ses pratiques antisyndicales et pour ses négligences coupables dans le dossier de la nourriture pour bébé ; etc.
Il ne s’agit ici que d’un bref coup d’œil sur la composition du portefeuille de la Caisse de dépôt et placement du Québec et pourtant, il est déjà possible d’affirmer que cette institution profite de pratiques douteuses, agressives, expansionnistes, polluantes, déstabilisatrices et antisyndicales du capital privé. À l’heure du soi-disant «développement durable», servi à toutes les sauces par les politiciens et les politiciennes de tout acabit, il y a tout lieu de se questionner.

Le 1er mai, allons exiger ce qu’ils nous ont volé!


En plus de jouer au poker avec l’argent des travailleurs et des travailleuses, le gouvernement et ses sbires de la finance profitent de l’exploitation éhontée et de la destruction de la nature. Nous ne sommes pas complices et c’est pour cela que nous irons nombreux et nombreuses, le 1er mai à Montréal, dénoncer cette institution, fleuron du capital québécois.

samedi, février 21, 2009

Une analyse de la crise économique.

Une excellente analyse de la crise économique sur un nouveau blogue: Le blog de PapaMarx. Un texte assez long, mais qui fait un survol assez complet de l'historique de l'évolution du capitalisme des accords de Bretton Woods jusqu'à la crise économique mondiale actuelle.

Le fruit de la misère ne tombe jamais loin de l’arbre de l’exploitation.
La crise économique commencée en 2008 a maintenant pris des proportions mondiales, et laisse désemparés les capitalistes et les États qui n’avaient pas su ou voulu en mesurer l’importance. Partout le chômage explose alors que des mobilisations sociales de plus en plus radicales et violentes se manifestent. De l’Europe de l’est à la Grèce, de l’Islande aux Antilles françaises, des États-Unis à la Chine, les troubles sociaux fusent en réaction à la crise qui prive les travailleurs de revenus, de logement, de nourriture.

Les classes dominantes tentent tant bien que mal de prendre la mesure d’une crise de plus en plus profonde et qui ne semble pas vouloir se résorber, alors que les plus populistes d’entre eux, Nicolas Sarkozy en tête, mettent la faute de la crise sur les excès du capitalisme, sur la finance immorale, sur un manque de réglementations. Bercés par l’espoir d’un rapide retour à la normale qui serait la conséquence de nouvelles règlementations et d’une moralisation du capitalisme, les politiciens et opportunistes de tout acabit peinent à voir ce que de plus en plus d’observateurs constatent: la crise actuelle marque la fin d’une époque.

Cette crise est le résultat d’une évolution normale et naturelle du capitalisme. Le fruit de la misère ne tombe jamais loin de l’arbre de l’exploitation. Du néolibéralisme caractéristique des trente dernières années à la financiarisation de l’économie, des hypothèques à risques américaines à la crise du papier commercial, de la crise alimentaire mondiale à la crise actuelle, il y a un enchaînement causal indéniable, propre au système capitaliste.

Comprendre la situation actuelle est le préalable à une action efficace. Ce texte veut en conséquence contribuer à une essentielle renaissance de la critique de l’économie politique.

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mardi, septembre 16, 2008

Des nouveautés à la Librairie l'Insoumise

Comme vous savez, les membres de la NEFAC-Mtl assurent la permanance les vendredi soir à la Librairie l'Insoumise de 16h a 20h. Quel ne fut pas ma surprise de voir autant de nouveauté vendredi dernier! Vraiment, il y a trop de choix et on ne sait plus sur quoi mettre la main pour assouvir nos désirs de lectures fraîches...

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China Blues, Charles Reeves & His Hsuan-Wou, Verticales-Phase deux

Ensemble, Charles Reeve et Hsi Hsuan-Wou ont écrit un récit de voyage sur le capitalisme à la chinoise, Bureaucratie, bagnes et business (L’insomniaque, 1997). China blues est la suite de ce voyage, dix ans après. En tout, une trentaine de dialogues, accompagnés de nombreux documents originaux, brossent un tableau saisissant de la Chine, atelier du monde, pays de la « croissance » à deux chiffres, de la surexploitation des paysans déracinés, immigrés de l’intérieur,et de la répression brutale du moindre mouvement de protestation.



Terreur et possession – Enquête sur la police de la population à l’ère technologique, éd. l'Échappée

Ce livre s'applique à faire en cinq généalogies qui remontent et démontent l'enchaînement de nos désastres: inventions de la Théorie du complot, du sécuritaire, du contrôle, de la possession technologique, via dispositifs et implants corporels, afin de nous priver de notre libre arbitre au sens le plus physique et matériel, et d'aboutir à «La Société de contrainte» ou techno-totalitarisme.



Le réseau d’évasion du groupe Ponzan, Antonio Teller Sola, éd. Le coquelicot

Antonio Téllez, après un travail de recherche approfondi, retrace ici l'histoire de Francisco Ponzal Vidal. Il s'agit d'un personnage historique dont la vie a incarné l'activité des anarchistes contre le nazisme pendant la seconde guerre mondiale. Il déploya deux tâches majeures, le service du renseignement et le sauvetage de résistants et de personnes persécutées et pourchassées. Ponzan dans les années de la guerre civile espagnole (1936-1939) faisait partie du service de renseignement des Colonnes de la CNT sur le front d'Aragon. Plus précisément, il était dans le Service d'Intelligence Spécial Périphérique (SIEP). Il avait pour mission de franchir les lignes ennemies afin d'espionner et d'exfiltrer les compagnons bloqués dans la zone nationaliste. Une fois en exil, Ponzan et une partie de ses compagnons mirent leur expérience au service de la cause anti-fasciste. Ils travaillèrent avec d'autres groupes libertaires, et parfois avec les services secrets alliés. Ils organisèrent le réseau d'évasion à travers les Pyrénées le plus important de la seconde guerre mondiale. Le groupe connu sous le nom de " réseau d'évasion du groupe Ponzan " n'a pas toujours suscité la compréhension du mouvement libertaire qui n'a pas toujours compris ses caractéristiques et son fonctionnement.



Barcelone, l’espoir clandestin, Sanz Oller, éd. Le chien rouge.

Fin des années 60. La dictature de Franco s’éternise. Durant une garde à vue, Julio, un jeune métallo, se remémore les événements et les personnes qui ont marqué sa participation aux commissions ouvrières. Depuis dix ans, dans toute l’Espagne, ces commissions s’organisent de manière autonome. Mais les partis politiques multiplient leurs efforts pour s’emparer de ce mode de lutte inédit, qui a souvent réussi à faire plier le patronat. Ce récit autobiographique revient sur une histoire méconnue, au tournant d’une époque où tous les aspects de la société ont été remis en question.


À la fête de la révolution (artistes et libertaires avec d’Annunzio à Fiume), Claudia Salaris, Rocher
FIUME, côte dalmate, le 19 septembre 1920. Une troupe de quelques milliers de soldats italiens, rescapés du carnage de la Première Guerre mondiale, avec à leur tête un poète, entre en ville et prend le pouvoir. Pour les uns, les insurgés étaient des fascistes et des revanchards ; pour les autres, des fêtards, des anarchistes plus ou moins libidineux, des bandits et des pirates. Rien dont on puisse faire un étendard partisan, en somme. Rien qui cadre avec les grands bouleversements de l’époque. On est, ici, très loin des occupations d’usines de Turin et des soviets de Russie ou de Bavière. On est dans la Fête révolutionnaire, pure, une fête étrange où se mêlent, dans une ville en rupture, des fascistes, des syndicalistes révolutionnaires, des artistes et des intellectuels contestataires. Cette déconcertante épopée est le sujet du livre de Claudia Salaris. [P.S. À contretemps]


Catastrophisme, administration du désastre et soumission durable, Riesel & Semprun, EDN

La dégradation irréversible de la vie terrestre due au développement industriel a été signalée et décrite depuis plus de cinquante ans. Ceux qui détaillaient ce processus et ses effets pensaient qu’une prise de conscience y mettrait un terme. Quels que fussent leurs désaccords sur les moyens à mettre en oeuvre, tous étaient convaincus que la connaissance de l’étendue du désastre entraînerait une remise en cause quelconque du conformisme social. Mais nous ne pouvons que constater que la connaissance de cette détérioration s’intégrait sans heurts à la soumission des individus à l’ordre social et « participait surtout de l’adaptation à de nouvelles formes de survie en milieu extrême. (Fabien Bon)


Calendrier de la résistance, Marcos, rue des Cascades

« Viens avec moi, regarde avec le cœur ce que te montrent mes yeux, marche sur mes traces et rêve dans mes bras. Tout là-haut, les étoiles forment un colimaçon, une spirale avec la Lune comme point de départ et d’arrivée. Regarde et écoute. Voici une terre digne et rebelle. Les hommes et les femmes qui la peuplent sont comme beaucoup d’autres hommes et d’autres femmes du reste du monde. (…) Nous pourrons écouter le bouillonnement d’activités de ces zapatistes qui s’obstinent à subvertir le temps lui-même et qui brandissent à nouveau, comme s’il s’agissait d’un drapeau, un autre calendrier… celui de la résistance. »



Les EN-DEHORS, Anarchistes individualistes et illégalistes à la « Belle époque », Anne Steiner, éd.L’échappée.

Ils ont vingt ans en 1910 et se définissent comme des « en-dehors ». Hors du troupeau, ils refusent de se soumettre à l'ordre social dominant, mais rejettent aussi tout embrigadement dans les organisations syndicales ou politiques. Pour eux, l'émancipation individuelle doit précéder l'émancipation collective. Leur refus des normes bourgeoises, comme des préjugés propres aux classes populaires, les amène à inventer d'autres rapports entre hommes et femmes et entre adultes et enfants, à prôner l'amour libre et la limitation volontaire des naissances. Leur rejet du salariat les conduit à expérimenter la vie en milieu libre, à réfléchir à d'autres modes de consommation et d'échanges, mais aussi à emprunter la voie de l'illégalisme -jusqu'au célèbre périple de la bande à Bonnot.



Rêve de droite, défaire l’imaginaire sarkoziste, Mona Chollet, La découverte.

« J’ai fait un rêve », slogan repris à Martin Luther King, fut l’un des moteurs de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Tout a été dit sur cette victoire sauf peut-être l’essentiel : et si elle correspondait au triomphe d’une nouvelle forme d’imaginaire politique ? Mona Chollet décortique les principaux éléments de l’univers sarkozyste : la « machine de guerre fictionnelle » que représente la success story, le mythe du self-made man, l’identification illusoire aux riches et aux puissants, le mépris des « perdants », l’individualisme borné, le triomphe de l’anecdote et du people...

En plus de....

Changer le monde – Histoire du communiste libertaire 1945-1997, Georges Fontenis, Éditions Coquelicot.

La commune d’Oaxaca
, Georges Lapierre, rue des Cascades

Les transformations de l’homme, Lewis Mumford, EDN



La librairie propose toujours de très nombreux ouvrages soldés sur la question sociale, les amérindiens, le féminisme radical, l’écologie.
Merci a titusdenfer pour les description!
Librairie Anarchiste l'Insoumise, 2033 boul. St-Laurent Montreal

mercredi, septembre 03, 2008

Zabalaza #9 maintenant en ligne!

Le journal anarchiste sud-africain Zabalaza dans sa 9e édition est disponible en ligne depuis peu. Un excellent journal publié par une fédération du même nom. Au menu des analyses locales, mais aussi du reste du continent, ainsi que de la théorie et de l'histoire. Un numéro des plus intéressant, surtout après les émeutes qui eurent lieu ce printemps.

Bonne lecture!

pour lire le journal...cliquez ici



Au Sommaire:

Southern Africa:
* Workers, Bosses and the 2008 Pogroms
* “Ba Sebetsi Ba Afrika”: Manifesto of the Industrial Workers of Africa, 1917
* Ninety Years of Working Class Internationalism in South Africa
* Unyawo Alunampumulo: Abahlali baseMjondolo Statement on the Xenophobic Attacks in Johannesburg
* Xenophobia, Nationalism and Greedy Bosses: An Interview with Alan Lipman
* Interview with Two Libertarian Socialist Activists from Zimbabwe


Africa:
* Kenya’s Troubles are Far from Over
* Will EU troops stop the Central African cycle of violence?
* Brutal Repression in Sidi Ifni (Morroco)

International:
* Obama and Latin America: a Friendly Imperialism?


Theory:
* Anarchism & Immigration
* The Poison of Nationalism
* Nostalgic Tribalism or Revolutionary Transformation?: A Critique of Anarchism & Revolution in Black Africa

mardi, juillet 29, 2008

Une analyse de la crise économique par la CNT-AIT


Bon puisque c'est l'été pour tout le monde, et que les informations pertientes se font monnaie rare en ce début de semaine, je vous suggère la lecture de cette analyse de la crise économique actuelle, par un membre de la CNT-AIT(Confédération Nationale du Travail-section française de l’Association Internationale des Travailleurs).

TOUTE LUTTE N’EST PAS EMANCIPATRICE !

mardi 29 juillet 2008

Le problème n’est pas l’action propre d’une corporation mais l’idéologie qui la motive. Cela vaut pour toutes les franges de la société (jeunes, immigrés, banlieusards, salariés, etc.). Cette présente et énième crise cyclique du capitalisme se conjugue entre l’offre et la demande de l’économie de marché, le pouvoir d’achat (le revenu et le prix de la marchandise), l’économie concurrentielle (plusieurs producteurs concurrents), la concentration capitaliste (oligopole) et le mieux produisant (division internationale du travail). Tout cela est plus ou moins régulé par la main invisible du marché. Si on ajoute des effets conjoncturels comme le prix du salaire et des matières premières ou ouvrées, les bilans comptables de certains patrons risquent d’aboutir au dépôt de bilan. Coincés dans le cadre de marchés territoriaux (la France et l’Europe...), ceux-ci ne peuvent ni délocaliser ni exporter.

Afin de maintenir ou d’augmenter leurs marges d’exploitation qui déterminent le bénéfice et par là même le revenu, ils raisonnent comme tous les capitalistes. Ils font pression sur les politiques pour que l’Etat et autres décideurs concernés (régions et Europe...) leurs garantissent des moyens particuliers : aides, défiscalisations, diminutions des coûts salariaux et de certaines marchandises, protectionnismes (sanitaire, douane, cadre juridique...) ou en favorisant l’accès à des marchés. Parallèlement, ils dégradent la condition générale du salariat : défiscalisation des heures supplémentaires et rejet des 35 heures, modification du cadre des retraites... Telle est la logique structurelle du capitalisme : exploiter les prolétaires afin de dégager la plus-value, être concurrentiel ou disparaître. Quelles que soient leurs opinions et visées sur le salariat, les petits patrons n’échappent pas à la règle. Si l’économie capitaliste peut offrir des variantes, les patrons ne sont pas nécessairement les propriétaires en tout ou partie des entités économiques. La grande majorité des petits et moyens patrons restent cependant dans la position classique du capitaliste ; ils sont propriétaires de leur outil de travail et dépendent de la bonne santé de leurs entreprises pour leurs revenus. Dans le passé, la paupérisation et la prolétarisation de petits capitalistes ont déjà existé. Nombreux furent les paysans, les commerçants et les artisans qui ont fini salariés de leurs ex-confrères, concurrents ou clients. Dans l’ensemble, leur adhésion à l’idéologie bourgeoise les rendait compatibles à constituer l’encadrement, la maîtrise et la petite chefferie des entités qui les salariaient. Leur anti-syndicalisme ouvrier était affiché et bien perçu par la bourgeoisie. Quelques uns d’entre eux et de leurs descendants s’assimileront dans le mouvement ouvrier. Mais on ne peut ignorer que majoritairement ils contestèrent le grand capital (oligopole, monopole...) et l’ultralibéralisme en se déclarant réactionnaires, conservateurs et/ou national-populistes. En outre, ils soutinrent ouvertement les régimes fascistes et assimilés, constituant même des fractions d’extrême-droite. Après-guerre jusqu’aux années 80 en France, la dénonciation du grand capital et des grandes surfaces commerciales... s’incarna dans le poujadisme (mouvement proche de l’extrême-droite).

Comme il a déjà été dit, le libéralisme et le protectionnisme ne sont que des stratégies à géométries variables de l’exploitation de l’homme par l’homme. Par corporatisme, les patrons chercheront, pour défendre leurs entreprises, à enrôler leurs salariés mais toujours dans la défense de l’intérêt patronal, ceux-ci n’allant pas jusqu’à donner leurs entreprises à ces derniers ; mieux, une fois leurs objectifs atteints, ils redoubleront d’efforts pour continuer à exploiter davantage. Si des salariés pactisent ou sont naïfs, instrumentalisés par leurs patrons, nous devons dire clairement que l’intérêt commun, fût-il de l’entreprise ou national est un leurre. Celui-ci cimente la négation de la lutte des classes et nie les intérêts irrémédiables entre les exploités et les exploiteurs. Il appartient aux petits capitalistes de faire leurs choix. Ou bien ils défendent les variantes du capitalisme, ou bien ils rejoignent la lutte contre celles-ci. Pour l’instant, ils soutiennent leur idéologie et leurs intérêts de capitalistes et donc le système de domination qui l’a engendré. Que de petits patrons ne rechignent au labeur et soient en situation périlleuse, cela ne peut les empêcher de comprendre qu’un monde meilleur ne peut être que par une société juste et égalitaire. A eux de faire une rupture idéologique, tel n’est pas le cas pour l’instant. Ce qui ne permet pas notre soutien. Si, hélas, peu nombreux, parce que trop subversifs ou remuants, certains durent créer leur entreprise pour survivre, ils ne défendirent jamais le capitalisme et participèrent aux luttes de leurs frères anticapitalistes.

Le prix du pétrole un vrai problème, la défiscalisation (en réalité baisse fiscale) une fausse réponse.

En effet, en théorie, la fiscalité assure les recettes de l’Etat qui par la fonction redistributive de l’impôt permet la protection sociale, soit par gratuité ou par aide financière (revenu indirect ou socialisé). Or, la baisse fiscale produit un déficit public que les gestionnaires réduisent en diminuant le revenu indirect ou socialisé. Telle fut et est encore la logique des gouvernements. Ce qui fait que réduire l’impôt sans poser la question de la protection des plus désargentés consiste à limiter sa paupérisation en augmentant celle des autres. Tel est le leitmotiv de Sarkozy et, malgré les apparences, la lutte des petits patrons va dans ce sens. Rappelons que Le Pen fait de l’antifiscalisme son clientélisme "petit patron".

De plus, toute augmentation des prix de vente de la production se répercute sur le consommateur. D’après la loi d’Engel, la part alimentaire dans le budget des ménages croît lorsque les revenus baissent, les salariés, y compris ceux qui soutiennent leurs patrons, s’en mordront les doigts en tant que consommateurs.

Apparaissent d’autres contradictions :

- La baisse du coût du carburant augmente la consommation de pétrole et par effet celle de la pollution.

- Le productivisme fordiste pousse à prélever davantage dans les ressources environnementales, entraînant leur raréfaction et, là encore, de la pollution.

- La hausse des prix des marchandises accentue les inégalités de revenu.

En conclusion, toute action conjoncturelle (baisse de TVA...) ou sur les variables d’ajustement (salariales...) ne résout rien sur le fond : c’est la structure même du capitalisme qui est à remettre en cause.

Le capitalisme et ses sbires nous emmènent droit dans le mur : reprenons le contrôle de nos vie. CONTRE L’ETAT ET LE CAPITAL, GREVE GENERALE, POUR PAS FINIR A POIL.

Jean Picard - juin 2008.

Paru dans Anarchosyndicalisme n°107

source

lundi, juillet 14, 2008

Émeutes, grèves et lutte de classe en Chine...



Récemment différentes sources nous ont rapporté de nombreuses émeutes en Chine démontrant un niveau de violence sociale face à l'état chinois de plus en plus soutenu. L'augmentation des nouvelles et des vidéos en provenance de la Chine exhibent bien la rage de la population face à leur gouvernement totalitaire.

Selon le ministre de la Sécurité publique, Zhou Yongkang, 87000 émeutes avaient eu lieu en 2004, soit deux fois plus qu'en 2002. Li Shuguang, professeur à l'université chinoise des sciences politiques et juridiques, fait état de 30 millions de doléances et plaintes présentées par la population aux autorités centrales (source) .

Certains groupes répondront qu'il n'y pas eu assez de révolutions culturelles, ou que la bureaucratie a stoppée la révolution. Mais, il suffit de regarder l'évolution de la Chine depuis la révolution de Mao, pour constater que cette révolution était vouée dès le départ à la dégénérescence bureaucratique, au totalitarisme et à la répression sanglante. Bon, ces groupes ont oublié la Chine depuis un certain temps, mais il y'a pas si longtemps c'était le sentier lumineux au Pérou, dont on entend plus parler et la c'est le Népal! À quand les premières exécutions et les premiers massacres de travailleurs par le parti?

On a qu'à regarder le nombre de travailleurs qui meurent par année pour se rendre compte du mépris du parti face au peuple chinois. Par exemple, des statistiques démontrent que les mines chinoises son tles plus dangereuses du monde, soit officiellement 6000 morts par an, et possiblement plus de 20 000 selon des sources indépendantes. Soit 45 fois plus que celles d’Afrique du Sud, et cent fois plus que celles des États-Unis. Presque chaque jour, des protestations, des grèves ouvrières ou des agitations paysannes d’ampleur plus ou moins grande, se produisent en Chine. Ween Tiejun, un spécialiste des questions sociales, les évalue à 60 000 par an.(source).

Voici donc quelques exemples qui démontrent bien à l'approche des Jeux Olympiques, que la lutte-des-classes en Chine est omniprésente...et la liste pourrait être beaucoup plus longue!!!

28 juin: Des émeutes ont éclaté samedi dans le sud-ouest de la Chine : des villageois ont incendié des bâtiments gouvernementaux pour protester contre la conduite d'une enquête sur la mort d'une adolescente. La police affirme que la jeune fille s'est suicidée alors que sa famille soutient qu'elle a été violée et assassinée par le fils d'un notable local. L'organisation de défense des droits de l'homme a fait état d'un mort et de 150 blessés(...)Quelque 30 000 personnes avaient manifesté. La police a identifié 355 personnes présente sur place, et a décidé d'en placer une centaine en "détention criminelle"(source)(source)

26 juin: La mort d'un lycéen chinois poignardé par un camarade a provoqué de violentes émeutes impliquant des milliers de personnes, a-t-on indiqué lundi de source officielle et auprès d'un groupe de défense des droits de l'homme. Les incidents se sont produits jeudi dernier dans une ville de la vaste municipalité de Chongqing (sud-ouest), après l'arrestation supposée des parents du jeune décédé(...)Quelque 10.000 personnes en colère ont marché vers le siège du gouvernement de Youyang après avoir appris l'interpellation par la police des parents qui reprochaient à la direction de l'établissement d'avoir tardé à transporter leur fils à l'hôpital. Les affrontements avec les forces de l'ordre ont duré plusieurs heures, les plus violents des manifestants s'en prenant aux véhicules de police et à des magasins. (source)

3 avril: Des émeutes ont éclaté jeudi soir dans une région de la province du Sichuan, à fort peuplement tibétain, où un représentant des autorités a été grièvement blessé, rapporte vendredi 4 avril l'agence Chine nouvelle(...)un site officiel tibétain a rapporté que plus de 800 personnes impliquées dans les violences de Lhassa avaient été arrêtées et que 280 s'étaient rendues.(source).

juin 2007: Des centaines d’étudiants ont affronté les forces de l’ordre, dans la nuit de mercredi à jeudi, à Zhengzhou (centre), à la suite de brutalités commises par des policiers à l’encontre d’une étudiante, apprend-on auprès de la police et d’un organisme de défense des droits de l’homme.(source)

juin 2007: Le point de départ de l'incident est l'intervention de la police pour protéger un garde municipal de la ville de Tianjin qui avait battu une étudiante vendant des objets dans la rue pour gagner de l'argent de poche. Très vite, la voiture de police s'est retrouvée encerclée par des centaines d'étudiants criant "sortez-le, sortez-le", en parlant du garde municipal emmené par les policiers pour sa sécurité. En fin de compte, la voiture de police a été enflammée et les incidents ont duré une bonne partie de la nuit.(source)

mars 2007: 20000 personnes affrontent 1000 policiers dans la province de Hunan après qu'une hausse du prix du transport en commun fut annoncée.(source)

septembre 2006: Dans la ville de Ruian, des milliers de personnes ont manifesté violemment, les 7 et 8 septembre, après le « suicide » d’une enseignante. Elles estiment que la police a été achetée pour couvrir un meurtre. Les manifestations auraient rassemblé, jeudi 7 et vendredi 8 septembre, plus de 10 000 personnes et conduit à de violentes altercations avec la police militaire devant le siège du gouvernement municipal.(source)

septembre 2006: Les petits jouets en plastique offerts aux enfants par McDonald’s dans ses menus « Happy Meal » amusent les enfants qui les reçoivent, mais pas les ouvriers chinois qui les produisent.Un millier d’ouvriers ont déclenché samedi un soulèvement dans l’usine Hengli. Les protestations ont commencé dans les dortoirs des employés, avant de dégénérer en une véritable émeute, qui a duré toute la nuit. L’intervention d’une centaine de membres des forces de l’ordre, dont des policiers anti-émeute, a été nécessaire pour ramener l’ordre. De nombreuses personnes ont été blessées et une dizaine arrêtées.(source)
Selon le ministre de la Sécurité publique, Zhou Yongkang, 87000 émeutes avaient eu lieu en 2004, soit deux fois plus qu'en 2002. Li Shuguang, professeur à l'université chinoise des sciences politiques et juridiques, fait état de 30 millions de doléances et plaintes présentées par la population aux autorités centrales (source).

dimanche, juin 08, 2008

Une crise financière qui touche de plein fouet le prolétariat en Amérique du Nord.


Depuis l'été 2007, la classe possédante nord-américaine (et du coup, l'économie mondiale) est au prise avec un capitalisme en chute libre. Le bourbier Irakien et Afghan et la hausse démentiel des budgets militaires octroyés par les États occidentaux, la flambée du prix du pétrole, le saccage environnementale qui s'accentue, la crise des sub-prime aux États-Unis(1) qui a ébranlé l'économie mondiale, et plus récemment la crise alimentaire de plus en alarmante, sont tous à un certain niveau des symptômes et/ou des facteurs de cette crise économique. Une crise qui frappe de plein fouet le prolétariat mondiale (que nous définirons simplement ici par l'ensemble des groupes sociaux sans pouvoir réel de décision sur la production, et qui ne peuvent vendre que leur seul force de travail, intellectuelle ou manuelle, sous la forme de salariat).

Chômage et licenciements

Un rapport du gouvernement américain, démontre que pour le seul mois de mai 2008, le taux de chômage a augmenté de 0,5%, passant de 5% en avril à 5,5% en mai. Une hausse qui s'est soldé par la suppression de 49 000 emplois, soit soit 21 000 de plus que pour le moi d'avril, un sommet depuis 22 ans. Depuis le début de l'année, ces licenciements sont représentatifs d'une économie chancelante, puisque les secteurs les plus touchés sont le secteur de la construction(-34 000 emplois) ainsi que l'industrie (-26 000 emplois), dans la distribution (-27 000 emplois) et dans les services aux entreprises (-39 000 emplois). Ce qui signifie un total de 8,5 millions de personnes sans emplois en mai, comparativement à 6,9 millions pour la même période en 2007 sur une population de 154,5 millions de personnes constituant la force de travail aux États-Unis(2) (3) (4). Par ailleurs, certains économistes estiment que le taux de chômage pourrait continuer d'augmenter jusqu'à 6% pour l'année 2008.

Hausse du pétrôle

Comme si ce n'était pas encore assez, le prix du pétrole, dans la dernière semaine, a augmenté de plus de 10 $US atteignant ainsi un record absolu de 139,12 $US le baril (5). Ce qui a pour effet en bout de ligne, d'augmenter l'indice générale des prix de consommation de 0,5%. L'indice des prix à la consommation (IPC) , représente globalement entre deux périodes données, la variation du niveau général des prix. Suppression d'emplois, augmentation du coût de la vie, et comme toujours c'est encore les prolétaires qui écoperont des malheurs de la bête capitaliste.

Et de notre côté?

Le dernier rapport de Statistiques Canada, indique que le taux de chômage est demeuré stable au Canada, soit 6,1%, et 7,5% au Québec, comparativement au mois d'avril 2008. (6) (7). Par contre, c’est la première fois, en 10 ans au Canada, que le nombre des faillites personnelles dépasse 8 000 par mois, comparativement à une moyenne mensuelle de 7000. Les faillites personnelles sont en hausse de 8% au Québec et de 13,2% en Ontario. (8) Pour plusieurs, une récession est à l'horizon (9). Mais, il ne faut pas croire que tout est rose de notre côté, on a qu'à penser à la précarisation des emplois, aux attaques sur nos acquis sociaux, ainsi qu'aux attaques sur le droit à la grève, pour ne nommer que ceux-ci. Et avec la crise alimentaire à l'horizon, gageons que nous souffrirons tous et toutes d'une diminution de nos conditions de vie et de travail sous peu.


Le capitalisme s'essoufle de plus en plus, et peine à accroître sa courbe de profit. Le crédit qui a joué pour beaucoup dans les dernières décennies, dans l'accroissement du capital et des forces productives, nous démontre maintenant qu'il est un arme à double tranchant pour la classe capitaliste. La crise des sub-primes aux États-Unis, l'augmentation des faillites personnelles au Canada, la bulle technologique qui a éclatée au début de ce siècle, l'augmentation du coût de la vie, nous démontre bien une absurdité du système capitaliste, c'est à dire que la classe possédante ne risque plus son capital, mais préfère jouer en bourse les économies du prolétariat-souvent sous forme de crédit- pour accroître leur profit personnel. Et comme on peut le constater actuellement tout cela se fait au détriment, bien entendu, de satisfaire les besoins humains les plus fondamentaux, tel qu'en témoigne les émeutes de la faim. (10) La lutte des classes est plus évidente que jamais et seul un éveil d'une conscience de classe mondiale pourra permettre de renverser la vapeur en faveur du prolétariat.

samedi, mai 10, 2008

De nouvelles internationales syndicales: Mondialisation des luttes ou mondialisation de la bureaucratie syndicale?

Gerd Arntz:"Factory occupation". Lino-cut, from De Arbeidersraad, July 1936.

Une internationale pan-américaine

En mars dernier, une nouvelle Confédération syndicale des travailleurs des Amériques (CSA) a été créée au Panama. Cette nouvelle internationale, forte de plus de 50 millions de membres, se donne le mandat de conjuguer l’action des confédérations syndicales tant du Nord que du Sud, afin de s'organiser contre les effets dévastateurs de la mondialisation des marchés. Du côté nord-américain ce sera la CSN, qui représentera les syndicats au sein du comité exécutif, remplaçant ainsi les traditionnels syndicats tels que l'AFL américaine ou le CTC canadien.

Même si le taux de syndicalisation ici au Québec est élevé, soit 40% comparativement au taux de 10% au niveau continental, Jacques Létourneau, adjoint aux relations internationales à la CSN, affirme que le rapport de force n'est tout de même pas présent ici.

"Auparavant, un mouvement syndical fort dans un pays influait sur les conditions des travailleuses-travailleurs, mais ce n'est plus le cas.(...)À preuve, il n'y a qu'à voir ce qui se passe dans le secteur manufacturier... où tout nous échappe presque complètement! Il y a donc des réalités qui dépassent les frontières nationales." (source)

De plus, l'économie néolibérale, profite des énormes disparités dans les conditions de travail entre le nord et le sud, afin d'accroître sa compétitivité. D'où la nécessité d'essayer de construire un réel rapport de force au niveau continental. Tandis qu'ici les grandes centrales syndicales peinent à ralentir le massacre des conditions de travail tant par l'État que par le patronat, du côté sud-américain la réalité est encore plus alarmante pour les centrales. Le syndicalisme national ne suffit donc plus à la tâche, il doit s'inscrire dans un mouvement internationaliste afin de combattre une économie qui se mondialise depuis longtemps.

En effet, malgré une croissance régionale qui dépasse les 5 % annuellement, malgré une légère réduction du chômage et une progression considérable de l’emploi formel, les inégalités restent criantes. En 2006, selon le Bureau international du travail (BIT), plus de la moitié de la population active en Amérique latine, 126 des 239 millions de travailleurs étaient au chômage ou vivaient de l’économie informelle. Et d’ici 2015, le BIT juge qu’ils seront près de 160 millions à vivre sous le seuil de la pauvreté. Les syndicats sud-américains n'ont d'autres choix que d'être plus combatifs et d'utiliser une approche syndicale "plus militante", similaire à celles des centrales telles que la CSN et cie des années 60 et 70. Le travail informel et de l'organisation des chômeurs, sont d'ailleurs certaines de leurs préoccupations, dépassant ainsi les cadres traditionnels des relations de travail et de leurs propres membres. (source)

Par exemple, en Argentine, la Centrale des travailleurs argentins (CTA) milite en faveur des coopératives de travail et regroupe les travailleurs du secteur de l’économie informelle. Au Brésil, la Centrale unique de travailleurs (CUT) lutte de son côté pour la reconnaissance syndicale.(source).

Une internationale encore plus grande

Par ailleurs, lors du sommet de 2005 à Porto Alegre, les deux principales associations de travailleurs, soit la Confédération internationale des syndicats libres (CISL) et la Confédération mondiale du travail (CMT), se sont unies pour fonder la Confédération syndicale internationale (CSI). Avec ses 168 millions de travailleurs provenant de 306 organisations (154 pays), elle est devenue l'internationale syndicale la plus grande de toute l'histoire du mouvement ouvrier. Chose étrange, cette internationale regroupe 2 des grandes tendances du mouvement syndical international: la tendance sociale-démocrate(CISL) et une tendance chrétienne-démocrate (CMT) (source et là). C'est d'ailleurs une autre internationale dont la CSN fera partie.

Même si les bonnes intentions y sont, la CSI préconise tout de même la concertation et non les grandes luttes anticapitalistes passées des mouvements syndicaux.

"Je considère que nous devons nous asseoir avec les employeurs et les organismes internationaux pour voir avec eux ce qu'on peut faire ensemble pour améliorer les conditions des travailleurs, indique le secrétaire général de la CSI. Par contre, face à des employeurs qui ne veulent pas négocier, c'est peut-être bien la confrontation qui s'impose (...)Nous considérons que la "globalisation" que nous vivons actuellement est profondément injuste, qu'elle ne respecte pas les droits des travailleurs, ni non plus leurs intérêts, dit-il. Toutefois, on ne peut l'arrêter pour faire marche arrière. Non. Il faut par contre la rendre plus juste et faire en sorte qu'elle réponde aux intérêts des travailleurs(...)" a déclaré Guy Ryder, issu des Trades Unions britanniques, le nouveau secrétaire général de la nouvelle association. (source)

Ce que la CSI réclame, c’est une gouvernance effective et démocratique de l’économie mondiale. Bref, une politique de concertation/conciliation face aux décisions de gestion du patronat international. Ce n'est ni plus ni moins que le "capitalisme à visage humain" si cher aux sociaux-démocrates.

Par ailleurs, la CSI entretient des liens étroits avec des organismes tels que le FMI, la Banque Mondiale et l'OMC. Guy Ryder a déclaré d'ailleurs à ce sujet :

"Bien sûr qu'il s'agit d'organisations qui ont plutôt mauvaise réputation, mais elles peuvent néanmoins jouer des rôles positifs."(source)

Largement ouverts à la « société civile » les statuts de la CSI prévoient même l’existence de « membre associé ». Étrangement, ces membres associés, pourront être invités dans les congrès et s'exprimer sans limitation de durée. Par contre, les représentants syndicaux des organisations syndicales constitutives de la CSI, seront limités à des interventions de 5 minutes et à tout moment le président de séance pourra couper le micro s’il juge les propos hors sujets (source). Sans toutefois juger leur constitution, on peut quand même se questionner quels membres de la société civile auront préséance sur les syndiqués et à quel point les intérêts de classe seront substitués à la bonne entente avec le patronat international?

Quelles perspectives?

La création récente de ces 2 internationales syndicales, qui au premier regard, semble avoir des approches totalement différentes, soit la CSI qui ne cache pas sa politique de conciliation avec les grandes institutions capitalistes, la société civile et le patronat et de l'autre, la CSA, qui semble désirer un renouveau du syndicalisme plus "combatif", soulève de nombreuses interrogations sur les perspectives internationalistes syndicales.

Sommes-nous sur le point de créer des organisations qui seraient l'embryon de grandes luttes internationales face au capitalisme qui attaque chaque jour de plus en plus les droits des travailleurs-euses? Ce qui permettrait minimalement de reprendre les grandes idées du syndicalisme du début du 20ième siècle, soient une solidarité internationale de classe dans le but ultime, dans un avenir lointain, de renverser le système capitaliste au moyen de mesures industrielles, telle que la grève générale. Ce qui paverait la voie à une plus grande solidarité des travailleurs-euses et permettrait ainsi d'accroître simultanément et internationalement, du moins dans un avenir rapproché, les conditions de travail. Et qui de plus, permettrait un rapport de force gigantesque face aux grandes transnationales qui se délocalisent à chaque fois que les travailleurs-euses gagnent des luttes, en les combattant peu importe où ils se relocalisent.

Ou nous sommes à l'aube de l'accentuation de l'encadrement des luttes des travailleurs-euses par des bureaucraties internationales, qui en se rapprochant encore plus des institutions capitalistes, ne feront que d'enterrer à jamais le potentiel du syndicalisme international?

Il faut donc espérer que les grandes centrales du nord, prendront exemple sur la plus grande "combativité" des syndicats du sud et non l'inverse. Parce qu'ici, les politiques de concertation/conciliation et le réformisme sans saveur, mises en place par les bureaucrates, démontrent de plus en plus l'inefficacité des syndicats dans la pratique et ne cessent d'accroître la grogne des travailleur-euses face à des organisations qui à l'origine devait défendre leurs intérêts de classe. Mais ce n'est un secret pour personne, le mouvement syndicale actuel plutôt que de chercher à mettre un terme à l’exploitation capitaliste, n’envisage que les moyens de la rendre plus acceptable.

Sans toutefois espérer que ces organisations, dans leur forme actuelle, deviennent des mouvements "révolutionnaires", on peut toutefois espérer qu'ils (re)deviennent des organisations plus combatives et efficaces dans la pratique. Bref, que l'internationalisme de ces luttes soit désormais le cheval de bataille de ces gigantesques organisations. Ces organisations, par le biais de l'échange, de la solidarité et par la conscientisation des travailleurs-euses à leurs intérêts de classe, pourront peut être éventuellement découler en de nouvelles structures qui seront un jour, enfin nous l'espérons, de véritables organisations de luttes révolutionnaires. Mais ce travail ne se fera pas seul!C'est à nous tous et toutes libertaires et révolutionnaires de tenter de prôner à travers ces organisations nos modes d'organisations, tels que la démocratie directe et l'autogestion, afin qu'un vrai changement radical puisse enfin s'opérer.

Travailleurs-euses de tous les pays, unissez-vous!!


mercredi, mai 07, 2008

L'impuissance de la bourgoisie face à la crise des subprimes.


La grave crise immobilière qui touche nos voisins du sud depuis un certain temps et qui tend vers une crise financière internationale, est la plus grande chute du système capitaliste depuis la fin des années 60 et même, certains diront, depuis celle de 1929. Un ralentissement économique, la chute vertigineuse de la bourse, des dépenses militaires de plus en plus difficile à éponger par l'État qui se lance tête baissé dans des conflits de plus en plus sanglants et incontrôlables, l'inflation qui devient difficilement contrôlable par la grande bourgeoisie, des pertes d'emplois de plus en plus grande, et une hausse exponentielle du prix du pétrole brut et des produits de première nécessité, sont tous des signes avant coureurs que l'économie États-Unienne est en crise majeure.

L'économie États-Unienne, sous son couvert de libéralisme "dur", est en fait hautement encadré par l'intervention de l'État. Mais cette fois-ci, l'État et sa bourgeoisie qui tentent par tous les moyens de relancer l'économie avant de s'enfoncer trop loin dans la crise, peine par ses vieilles tactiques (entre autre la diminution répétée des taux d'intérêt afin d'accroître l'accessibilité au crédit) à limiter les dommages de la classe dominante. La bourgeoisie, sous de fausses larmes de crocodiles, tente de faire croire qu'elle se préoccupe du sort de la classe ouvrière, mais ce n'est qu'une illusion . Elle essaie seulement de survivre de mieux qu'elle peut à cette crise financière et elle mise gros sur la solution du crédit facile à la classe ouvrière, afin de relancer la consommation et ainsi renflouer leurs pertes boursières. La perte de 63 000 emplois aux États-Unis, pour le seul mois de février 2008, en dit d'ailleurs long sur l'état de leur économie.

Un bon texte d'analyse sur le site du CCI (courant communiste internationale qui est une faction de la gauche communiste) à ce sujet vient de paraître.


Les États-Unis, locomotive de l'économie mondiale ... vers l'abîme


Dure époque pour l'économie mondiale depuis la crise non surmontée des emprunts à risque dans l'immobilier qui s'est déclarée l'année dernière aux États-Unis. En effet, jamais la situation n'est apparue aussi périlleuse depuis le retour de la crise ouverte du capitalisme à la fin des années 1960, alors que la bourgeoisie avait pourtant essayé de contenir ses manifestations par tous les moyens :

- la crise de l'immobilier aux États-Unis s'est en effet transformée en crise financière internationale, ponctuée par des alertes retentissantes d'insolvabilité d'établissements bancaires américains et européens1. Ceux des établissements menacés qui n'ont pas fait faillite le doivent à des plans de sauvetage impliquant l'intervention de l'État et il existe les pires craintes que de nombreux établissements financiers, qui étaient jusque là réputés à l'abri de tout risque de ce type, se trouvent à leur tour en situation de faillite potentielle, nourrissant ainsi les conditions d'un Krach financier majeur.

- les perspectives sont clairement au ralentissement de l'activité économique, voire à la récession pour certains pays comme les États-Unis. La bourgeoisie a surmonté les différentes récessions qu'elle a dû affronter depuis les années 1970 au moyen d'un endettement supplémentaire, à chaque fois plus important que les précédents, pour des résultats toujours plus modestes. Pourra-t-elle une nouvelle fois juguler la future récession alors qu'il n'existe pour cela pas d'autre moyen qu'une augmentation considérable de la dette mondiale avec le risque que cela comporte d'un effondrement du système international de crédit ?

- la baisse des cours de la Bourse, ponctuée par des chutes brutales, ébranle la confiance dans la base même de la spéculation boursière dont les succès avaient pourtant permis, en grande partie, de masquer les difficultés de l'économie réelle. Ces succès avaient notamment contribué fortement à la hausse des taux de profit des entreprises depuis le milieu des années 1980, et se trouvaient également à l'origine du mythe solidement ancré, mais aujourd'hui mis à mal, selon lequel les valeurs boursières ne pourraient en définitive que monter, quels que soient les aléas.

- les dépenses militaires, comme on le voit clairement dans le cas des Etats-Unis, constituent un fardeau de plus en plus insupportable pour l'économie. Cependant, celles-ci ne peuvent être réduites à volonté. En effet, elles sont la conséquence du poids croissant que prend le militarisme dans la vie de la société alors que, confrontée à des difficultés de plus en plus insurmontables sur le plan économique, chaque nation est poussée dans la fuite en avant vers la guerre.

- le retour de l'inflation constitue, à double titre, une hantise pour la bourgeoisie. D'une part, elle contribue à freiner les échanges commerciaux du fait qu'elle entraîne des fluctuations, de plus en plus difficilement prévisibles, du coût des marchandises produites. D'autre part, bien plus que la riposte aux attaques comme les licenciements, la lutte revendicative de la classe ouvrière pour l'augmentation des salaires en permanence rognés par la hausse des prix est propice à la généralisation des combats par delà les secteurs. Or, les leviers dont dispose la bourgeoisie pour contenir l'inflation, politiques de rigueur et de réduction des dépenses de l'État, s'ils étaient actionnés de façon conséquente, ne pourraient qu'aggraver le cours actuel vers la récession.

Ainsi la situation actuelle n'est pas seulement la répétition en pire de toutes les manifestations de la crise depuis la fin des années 1960, elle concentre ces dernières de façon beaucoup plus simultanée et explosive conférant à la catastrophe économique une qualité nouvelle propice à la remise en question de ce système. Autre signe des temps, distinctif des décennies précédentes : alors que, jusque là, il avait incombé à l'économie de la première puissance économique mondiale de jouer le rôle de locomotive pour éviter des récessions ou en sortir, le principal effet d'entraînement que les États-Unis apparaissent aujourd'hui en mesure d'imprimer au monde, c'est celui vers la récession et l'abîme.

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