Délit de solidarité : quand la révolte enfle

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La guerre aux citoyen-ne-s solidaires menée dans la fin de règne de François Hollande touche aux fondements de notre société. Peut-être comme l’Affaire Dreyfus en son temps. Qu’il s’agisse de Gwen à Paris ou d’Éric à La Roya, il s’agit bien fondamentalement de savoir dans quelle société nous voulons vivre.

 


https://www.change.org/p/mr-jf-carenco-pr%C3%A9fet-de-r%C3%A9gion-idf-pour-les-exil%C3%A9-e-s-contre-la-d%C3%A9mesure-p%C3%A9nale-p%C3%A9tition-en-soutien-%C3%A0-gwen-mallauran

« Pour les exilé-e-s, contre la démesure pénale : pétition en soutien à Gwen Mallauran

La politique de répression des luttes sociales et de la solidarité aux exilé-e-s se généralise en faisant de faits minimes autant d’affaires pénales.

Dans celle qui a suscité cette pétition, soutenue par plus de 100 personnalités, la démesure de l’autorité publique y outrage le bon sens : 29 heures de détention et d’importantes peines encourues et ce pour avoir exprimé une légitime colère…

PÉTITION :

Gwen Mallauran doit comparaitre le jeudi 2 février 2017 à 9h devant la 29ème chambre du TGI de Paris pour avoir « outragé » verbalement le préfet de région J-F Carenco, « dépositaire de l’autorité publique (…) en criant par trois fois ‘Carenco salaud’ » selon les « faits reprochés ».

Le 4 novembre dernier se déroulait, à grands renforts médiatiques, l’ultime démantèlement gigantesque d’un campement de réfugiés autour de la place Stalingrad à Paris, présenté comme une mesure favorable à leur accueil et à leur dignité. Seule face à l’hypocrisie de cette mise en scène, elle a manifesté sa colère.

À l’issue de 29 heures de détention, sa convocation devant le tribunal lui a été signifiée. Que cherche par là « l’autorité publique »?

La démesure de ces poursuites et leur sens politique dans notre contexte nous alertent. Elle était seule pour tenter de faire entendre une autre voix devant cette brutale évacuation. Nous savons trop que cette solitude résulte de nos difficultés à nous regrouper sur tous les fronts : nous ne voulons pas la laisser seule face à la répression.

Nous réclamons l’arrêt de toutes les poursuites à l’encontre de Gwen Mallauran.

 PREMIERS SIGNATAIRES : José Alcala, cinéaste, Pierre Alferi, écrivain, Guy Alloucherie, metteur en scène , Mathieu Amalric, cinéaste et comédien, Paul Avoine, dessinateur, Etienne Balibar, professeur émérite de philosophie, Université de Paris-Ouest, Gilles Bannier, cinéaste, Ludivine Bantigny, historienne, Emmanuel Barot, philosophe, université Jean Jaurès (Toulouse), Aurélien Barrau, astrophysicien, Professeur à l’université Grenoble-Alpes, Arno Bertina, écrivain, Julie Bertuccelli, cinéaste, David Bobée, metteur en scène, directeur du Centre Dramatique National de Normandie-Rouen, Pascal Bonitzer, scénariste et cinéaste, Lucie Borleteau, cinéaste et comédienne, Nicolas Bouchaud, comédien, Clara Bourreau, scénariste , Guillaume Brac, réalisateur, Nicole Brenez, professeur, Geneviève Brisac, écrivain , Rodolphe Burger, musicien , Olivier Cadiot, écrivain, Judith Cahen, cinéaste, Manuel Cervera-Marzal, sociologue, Patrick Chamoiseau, écrivain, Yves Citton, professeur de littérature, Laurent Cantet, réalisateur, Jean-Paul Civeyrac, réalisateur, Enzo Cormann, écrivain, Catherine Corsini, cinéaste, Marie Cosnay, écrivain, François Cusset, écrivain et historien, Sonia Dayan-Herzbrun, sociologue, Christine Delphy, directrice de recherche émérite, CNRS , Claire Denis, cinéaste, Rokhaya Diallo, journaliste et réalisatrice, Alice Diop, cinéaste, Cédric Durand, économiste , Annie Ernaux, écrivain, David Faroult, universitaire, Philippe Faucon, réalisateur et producteur, Pascale Ferran, cinéaste, Geneviève Fraisse, philosophe, CNRS, Isabelle Garo, enseignante de philosophie, Rémo Gary, chanteur , Dyana Gaye, cinéaste, Stéphane Gérard, cinéaste, Fabrice Gobert, cinéaste , Alain Gomis, réalisateur, Yann Gonzalez, cinéaste, Dominique Grange, chanteuse engagée, Robert Guédiguian, cinéaste, Nacira Guénif, anthropologue, Chantal Jaquet, philosophe, professeur à l’université Paris Panthéon-Sorbonne , Helena Klotz, cinéaste, Stathis Kouvélakis, philosophe, King’s College Londres , Geoffroy de Lagasnerie, sociologue et philosophe, Paul Laverty, auteur et scénariste , David Lapoujade, philosophe, Olivier Le Cour Grandmaison, universitaire, Ken Loach, cinéaste, Frédéric Lordon, chercheur CNRS, Philippe Malone, écrivain, Gilles Manceron, historien, Philippe Mangeot, professeur en littérature, Maguy Marin, chorégraphe, Tonie Marshall, cinéaste, productrice et comédienne, Corinne Masiero, comédienne et citoyenne de base, Laurent Mauvignier, écrivain, Elli Medeiros, chanteuse, Cyril Mennegun, cinéaste, Daniel Mermet, journaliste, Guillaume Meurice, humoriste, Stéphanie Murat, cinéaste et comédienne, Jean-Luc Nancy, philosophe, Mariette Navarro, dramaturge et écrivain, Olivier Neveux, professeur d’études théâtrales, Ens de Lyon, Helena Noguerra, chanteuse, Rebecca O’Brien, productrice de cinéma, Paul Otchakovsky-Laurens, éditeur , Véronique Ovaldé, écrivain, Yves Pagès, écrivain et éditeur, Ugo Palheta, sociologue, université Lille 3 , Marie Payen, comédienne, Benoit Peeters, écrivain et scénariste, Willy Pelletier, sociologue et coordinateur général de la Fondation Copernic, Antonin Peretjatko, cinéaste, Nicolas Philibert, cinéaste, Aude Picault, dessinatrice, Guillaume Pigeard de Gurbert, professeur de philosophie, Roland Pfefferkorn, sociologue , Nathalie Quintane, enseignante, écrivain, Jacques Rancière, philosophe , Sophie Reine, monteuse, Philippe Renonçay, écrivain, Michèle Riot-Sarcey, historienne, Christophe Ruggia, cinéaste , Céline Sallette, comédienne, Virginie Sauveur, réalisatrice  , Valentin Schaepelynck, enseignant-chercheur , Céline Sciamma, réalisatrice  , Jean-François Sivadier, metteur en scène et acteur, Bernard Stiegler, philosophe, Jacques Tardi, dessinateur, Etienne Tassin, professeur de philosophie, Université Paris Diderot, Enzo Traverso, historien , Lewis Trondheim, dessinateur, Frédéric Videau, cinéaste, Tanguy Viel, écrivain, Eric Vuillard, écrivain , Martin Winckler, médecin et écrivain »

 


« VALLEE DE LA ROYA
LE SAF SOLIDAIRE DU DELIT D’HUMANITE

Le gouvernement n’assume pas son devoir d’humanité.

Il poursuit et harcèle ceux qui le remplissent à sa place.

Depuis plusieurs mois, des citoyens de la Vallée de la Roya, à la frontière italienne, ainsi que de nombreuses associations de défense des Droits de l’Homme, ne cessent d’alerter les pouvoirs publics, les autorités judiciaires, les représentants de l’Etat et du département, du drame humain qui se déroule sous leurs yeux.

La reconduction de l’état d’urgence a entrainé le rétablissement de la frontière entre l’Italie et la France, poussant des centaines d’exilés à se réfugier dans la Vallée pour pouvoir passer la frontière et demander l’asile en France.

Or, sans équipement, les risques qu’ils prennent sont importants et de plus en plus de réfugiés sont retrouvés dans un état sanitaire très préoccupant.

Parmi eux se trouvent de nombreux mineurs non accompagnés, livrés à eux-mêmes. L’application de la loi française doit amener à leur mise à l’abri par les services de l’Aide Sociale à l’Enfance ou à la saisine du juge pour enfants.

Mais au contraire, leur droit à être protégé est nié. Même munis de justificatifs d’ouverture d’une procédure de protection, ils font l’objet de « refus d’entrée », formalisés ou pas, puis de refoulements en Italie, parfaitement illégaux et contraires au droit international.

Devant ce déni de droit et d’humanité, des citoyens n’ont d’autre choix que de se substituer à la carence d’un Etat aveugle et sourd.

Ils sauvent la vie et rétablissent la dignité de ces hommes et femmes fuyant leurs pays. Ils accomplissent les gestes de première urgence : aide, hébergement, soins et conseils.

Ce sont ceux-là que l’Etat décide de poursuivre, de placer en garde à vue et de perquisitionner de manière gratuite et brutale.

La vallée est en état de siège, sillonnée par les forces de police, de gendarmerie et par l’armée.

Le SAF dénonce le non-respect des droits fondamentaux des mineurs et – la traque des citoyens solidaires.

Le SAF demande l’abandon des poursuites pour délit de solidarité

Le SAF exige l’application de la convention  européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales et de la Convention Internationale des droits de l’Enfant et le respect par la France de ses engagements internationaux. »

 


« Mama Herrou écrit au procureur. La frontière, la Gestapo, l’accueil d’enfants, on connait ça chez les Herrou…

Malgré la couverture médiatique, les communiqués, les revendications, les interpellations, les procès des Citoyens Solidaires, on oublie que celui qui aide a reçu une éducation d’une manière ou d’une autre. Car les valeurs qu’il a reçu sont bien venues de quelque part et c’est pas la télé ou les discours qui forgent le cœur des gens.Avec ces procès en cascade, ce sont des personnes individuelles qui se présenteront à la barre, mais derrière il y a souvent une famille et quand une mère voit son enfant au tribunal elle est touchée en plein coeur.

La mère de Pierre-Alain s’était exprimée ici avant son procès et ensuite après le procès ici. Aujourd’hui c’est au tour de la mère de Cédric de s’adresser au procureur et il y a des moments ou il faudrait écouter les mamans.

Lettre de la mère de Cédric au procureur Jean-Michel Prêtre.

Monsieur le Procureur, je vous fais une lettre……

Je suis la mère de celui contre lequel vous vous acharnez. Ma grand-mère paternelle a elle aussi, en 1918 passé la frontière d’Italie à pied, par les montagnes elle a perdu le bébé qu’elle portait au cours de ce périple (peut être a-t-elle croisé à ce moment là les grands mères de messieurs Ciotti et Estrosi, qui sait ?), elle s’est louée telle une bête de somme pour tirer les « charetons » je me souviens d’elle avec la lanière de cuir qui lui barrait le torse… Ma mère quant à elle était allemande, ma sœur est née dans les geôles de la Gestapo, elles ont été toutes deux libérées par les Américains ; C’est ce sang là qui coule pour moitié dans les veines de mes deux fils que vous avez fait arrêté jeudi, l’autre moitié étant du pur sang de Bretagne… c’est têtu un Breton, et ça n’a pas peur des tempêtes.
S’ils ne sont pas Français « de souche » (c’est ce qui reste d’un arbre mort, non?) ils ont des racines profondes et vivantes dans ce pays qui est le leur et qu’ils aiment.
Pour que vous compreniez… nous avons été « famille d’accueil pendant 25 ans. Cédric avait 5 ans, Morgan 7, quand les premiers enfants sont arrivés. Ils ont partagé leurs jouets, leur table, leur maison, leurs parents avec 15 enfants délaissés, de toutes origines, certains battus, violés…..
Alors quand Cedric vous dit que ces enfants qu’il voit sur nos chemins et nos routes de la Roya, ce sont ses frères et ses sœurs, il ne vous ment pas. Et quand il interpelle si fort les services de l’ASE, c’est qu’il en connaît les rouages.
Nous avons quatre enfants puisque ils ont accepté d’intégrer deux de ces enfants à leur famille, ce sont leur sœur et leur frère à présent et nous en sommes très fiers !
Voilà monsieur le Procureur, et tous ceux qui le traite de passeur, de trafiquant d’êtres humains et de voleur, voilà à qui vous avez à faire.

Avec tout mon respect
Mama Herrou

« Si la non-violence est la loi de l’humanité, l’avenir appartient aux femmes  » Ghandi »

 

j_accuse

 

Quand Schengen s’en va en miettes

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Renforcer les contrôles aux frontières extérieures de l’Union européenne et utiliser les États voisins pour constituer un glacis de plus en plus profond qui tiennent les exilé-e-s à distance (accord avec la Turquie – voir ici, ici, ici et , processus de Khartoum avec l’Afrique de l’est -voir ici, ici, ici et , processus de Rabat avec l’Afrique de l’ouest), dans le but de restaurer la libre-circulation à l’intérieur de l’espace Schengen. C’est ce qu’affichent les institutions européennes.

Dans la réalité, le renforcement des contrôles aux frontières extérieures et la mise à distance des exilé-e-s par des accords avec les États de plus en plus loin de frontières extérieures se mettent bien en place, mais les contrôles aux frontières internes à l’espace Schengen se maintiennent et se pérennisent.

Le corridor humanitaire qui avait permis aux exilé-e-s d’atteindre, dans des conditions souvent difficiles, l’Allemagne et la Scandinavie au cours de l’été 2015 s’est refermé dès l’automne de la même année. Les multiples frontières des Balkans sont venues faire obstacle à la route des exilé-e-s vers le centres de l’Europe, frontières extérieures de l’Union européenne, frontières entres États non membres de l’Union européenne, frontières entre États membres de l’espace Schengen et non-membres de l’espace Schengen (Slovénie / Croatie, Hongrie / Croatie, Hongrie / Roumanie), frontières entre États non-membres de l’espace Schengen (Roumanie / Bulgarie). Fermeture souvent matérialisée par l’érection de clôtures et de barbelés, et comprenant parfois la mobilisation de l’armée.

Mais cela ne semble pas avoir suffi, puisqu’à cette série d’obstacles est venu s’ajouter le rétablissement des contrôles à toute la série des frontières internes à l’espace Schengen qui suivaient : entre l’Autriche et la Slovénie d’une part, la Hongrie d’autre part, entre l’Allemagne et l’Autriche, entre de Danemark et l’Allemagne, dans les ports du sud et de l’ouest de la Suède et sur le pont de l’Øresund, donc à ses frontières avec l’Allemagne et le Danemark, entre la Norvège et l’Allemagne, le Danemark et la Suède. Il s’agit bien sûr de mesures transitoires qui doivent disparaître avec le renforcement des contrôles aux frontières extérieures.

http://europa.eu/rapid/press-release_IP-16-1723_fr.htm

Lesquelles mesures provisoires sont prolongées six mois plus tard.

http://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-14115-2016-INIT/fr/pdf

À ces mesures qui durent toujours s’ajoutent d’autres cas de rétablissement des contrôles en raison « d’événements prévisibles ».

https://ec.europa.eu/home-affairs/what-we-do/policies/borders-and-visas/schengen/reintroduction-border-control_en

Dans le cas de Malte il s’agit de rétablir les contrôles pour empêcher les manifestations à l’occasion de réunions des instances européennes, entrave devenue classique à la libre expression démocratique.

Dans le cas de la France, on constate que grâce à un enchaînement de raisons diverses qui vont de la COP 21 au Tour de France et de l’Euro de football aux attentats, les contrôles aux frontières ont été rétablis pendant plus de 14 mois, du 13 novembre 2015 au 26 janvier 2017. Cette situation va encore être prolongée jusqu’au 15 juillet 2017, pour « menace terroriste permanente ». Autant dire que la France ne respecte plus les règles de l’espace Schengen de manière permanente.

À sa frontière nord-ouest, le Royaume-uni et l’Irlande, qui ne font pas partie de l’espace Schengen, maintiennent les contrôles à leur frontière, et le Royaume-uni utilise les États voisins, France, Belgique et Pays-bas, comme un glacis pour éloigner les exilé-e-s de ses frontières.

 

marey-saut-dun-hommeÉtienne-Jules Marey : Saut d’un homme.

Un mort ce samedi

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« 0 migrant à Calais » sonne comme un slogan publicitaire. Derrière la façade, la violence de la situation à la frontière continue. Johnsina, 20 ans, venu d’Éthiopie, est mort samedi dernier 21 janvier vers 8h du matin, écrasé sur l’autoroute par plusieurs camions. Il est le premier mort connu à la frontière britannique depuis le début de cette nouvelle année au cours de laquelle nous conterons à nouveau les morts à la frontière. Dix-sept personnes y étaient mortes en 2016. Ce n’est pas un compte, c’est à chaque fois une personne qui est morte.

http://www.lavoixdunord.fr/106743/article/2017-01-21/un-ethiopien-de-20-ans-meurt-ecrase-sur-l-a16-un-appel-temoin-lance

Un rassemblement de solidarité a eu lieu hier dimanche à Calais, comme après chaque décès.

 

Frontex, l’Union européenne et les expulsions

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Les enjeux que l’on rencontre à Calais et dans la politique migratoire française se retrouvent au niveau européen.

Alors que les autorités françaises viennent d’expulser deux personnes au Soudan, dont l’une avait été arrêtée pendant la destruction du bidonville de Calais, en un mois et demi, l’agence européenne Frontex annonce la constitution d’un « pôle expulsion » avec 690 agent-e-s chargé-e-s d’aider les États membres de l’Union européenne à organiser de manière plus efficace les expulsions de personnes étrangères.

http://frontex.europa.eu/news/frontex-creates-a-new-pool-of-return-experts-yWWYG1

La priorité de ce pôle sera d’augmenter les expulsions à partir de l’Italie et de la Grèce, les deux principaux pays d’entrée dans l’Union européenne. C’est là que cette politique rejoint les enjeux autour du règlement Dublin III, qui fait que le pays responsable d’une demande d’asile est le plus souvent le pays d’entrée dans l’Union européenne et qui prévoit le renvoi des personnes qui demandent l’asile dans un autre pays y soient renvoyée. La création dans le cadre de la politique de l’Union européenne de « hospots » en Italie et en Grèce fait que les empreintes digitales des personnes y sont prises de manière beaucoup plus systématique que par le passé. La Commission européenne prévoit que les renvois Dublin en Grèce pourront reprendre en mars prochain, après une interruption de plusieurs années due aux conditions d’accueil indignes dans ce pays et aux procédures d’asile inefficientes.

En parallèle, les autorités françaises augmentent les expulsions dans le cadre du règlement Dublin III, entre autres pour les personnes en Centre d’Accueil et d’Orientation (CAO – voir ici, ici, ici et ), et créent un dispositif d’hébergement dont l’une des missions est de préparer ces renvois, le PRAHDA. Les renvois Dublin peuvent déboucher sur des expulsions vers le pays d’origine, pour les personnes déboutées de leur demande d’asile, comme ça peut se voir avec la Norvège (autre pays d’entrée dans l’Union européenne, par le nord de la Russie). La mécanique de l’expulsion fonctionne alors parfaitement.

 

1-fotograma-de-faust-de-murnau

Froid – plus vif

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Alors que la température baisse dangereusement, des habitant-e-s de Calais ouvrent leur porte. Les dispositions légales obligeant l’État à ouvrir des lieux de mise à l’abri pour les personnes à la rue, quelque soit leur situation administrative et leur nationalité, ne sont pas respectées, au nom d’un objectif déconnecté de la réalité, « 0 migrant à Calais ». Heureusement que la solidarité est vivace.

Les appels xénophobes à s’occuper d’abord de « nos » SDF, français, se heurtent à la réalité. Mercredi 11 janvier, c’est une personne sans domicile de nationalité française qui a été retrouvée morte sous un abri-bus du quartier du Virval. Les xénophobes au grand cœur avaient dû l’oublier. La réalité, ce n’est pas les « SDF français » plutôt que les « migrants », la réalité des politiques publiques et des coupes budgétaires, c’est ni pour les « SDF français » ni pour les « migrants ».

http://www.nordlittoral.fr/14606/article/2017-01-11/un-sdf-retrouve-sans-vie

Dans un tract national sensé répondre à un communiqué concernant les violences policières, l’UNSA police reprend cette rhétorique xénophobe : « Alors que des dizaines de français, quels que soient leur origine, sexe ou religion, meurent chaque année de faim, de maladie ou de froid, dans l’indifférence la plus totale, l’UNSA Police s’interroge sur la propension qu’ont ces associations à défendre en priorité les clandestins… » Mais dans une ville dont les rues sont sillonnée jour et nuit par des patrouilles de police, on peut mourir dans la rue.

http://police.unsa.org/IMG/pdf/2017-01-12_compresse_violences_imaginaires_associations.pdf

 

Un texte d’un bénévole calaisien circule sur le net. Lisons-le :

« Hier soir, en quittant du boulot vers 18h30, avec ma collègue et bien couverts, gros manteaux, bonnets, écharpes et gants, nous nous dirigeons vers la voiture en grelottant de froid. Garée depuis le matin 7h, nous nous rendons compte qu’il a gelé en plein jour; les vitres de la voiture en témoignent. Alors, dans le froid, nous pulverisons de la bombe anti gel sur les vitres et commençons à les gratter. Aussi, une fois installés à bord du véhicule, nous nous rendons compte que malgré l’excellent entretien de la voiture de ma collègue , il a aussi gelé à l’intérieur. Alors nous grattons aussi les vitres à l’intérieur. Peu à peu, la visibilité apparaît et nous commençons peu à peu à ressentir la chaleur dans l’auto. Sur la route, j’aperçois pas mal de personnes qui préparent leur voiture à la nuit en installant des cartons sur le pare brise.
Ouf ! Nous rentrons chez nous !

Et puis, je repense au problème du mal logement ou du pas de logement du tout .
Je repense à cet homme que nous avons vu allongé mort la semaine dernière ! Je repense aux gens comme lui, aux exilés, bref je repense sans distinction aucune à toutes les personnes qui n’ont pas l’occasion de se réchauffer en se grattant la peau après avoir utilisé un spray antigel. Eux n’ont que le carton , et encore …
Je repense à des choses vues et revues : la police et des sociétés de construction , enfin, de démolition, répondant souvent aux ordres fous et dégradant des dirigeants du pays et de la ville ou n’agissant aussi souvent que de leur propre chef , détruisant des abris , des tentes, arrachant des couvertures des mains d’ Êtres humains.

À Calais, le concept  » zéro migrant » est né. Mais dans les faits, ils sont là ! Alors!
Qu’attend on pour construire la solidarité ?
Qu’ attendent les autorités de la ville pour réclamer sans délai la mise en place de mesures concernant un plan grand froid sans tâche ? Ce n’est pas en occultant une situation qu’elle s’arrange.
Réclamons des actions ! Décrochons nos téléphones , envoyons des emails , des fax, dérangeons nous et demandons l’ouverture d’un abri au moins pour l’hiver. Contactez vos mairies, préfectures … Osons leur demander ! Osons dire qu’en tant que citoyens, nous ne voulons plus cautionner ces actes, nous ne voulons plus être témoins de l’assassinat des gens des rues ! »

 

schaedeleer-hiverValerius de Schaedeleer : Hiver.

Expulsion vers le Soudan hier soir

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M. Naji a donc été expulsé hier soir vers le Soudan à partir de l’aéroport Charles De Gaulle par un vol Qatar Airways, sur décision de la préfecture de Moselle (voir ici et ).

Ce genre de décision n’est pas unique de la part de cette préfecture, qui s’inscrit donc activement dans la politique gouvernementale d’expulsion vers tout pays, quelle que soit la situation (voir ici, ici, ici, ici et ). M. Ahmed, également soudanais, a été placé en rétention le 30 novembre 2016. Il a refusé deux fois de parler au consul du Soudan, empêchant ainsi son identification, ce qui lui a permis d’éviter l’expulsion. Il a été poursuivi en justice pour avoir fait obstacle à son expulsion, et a été condamné à un mois de prison avec sursis, et cinq ans d’Interdiction du Territoire Français.

Il est donc libre, puisque la durée maximale de rétention est de 45 jours, mais avec une Obligation de Quitter le Territoire Français avec le Soudan comme pays d’expulsion, qui est toujours applicable, plus une interdiction de territoire de 5 ans.

http://www.republicain-lorrain.fr/edition-de-metz-ville/2017/01/14/metz-fuir-le-soudan-pour-aller-nulle-part

 

rixe-de-musisiciens-de-la-tour-3legerGeorges de La Tour : Rixe de musiciens.

Les vœux du PEROU

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Le PEROU est impliqué par rapport à la situation calaisienne depuis quelques années déjà (voir ici, ici, ici, ici et ), comme il l’est par rapport à d’autres situations où la ville s’invente dans les interstices urbains.

Et c’est de Calais que le PEROU a choisi de parler pour des vœux de nouvelle année en forme d’arrêté d’hospitalité.

 

« Considérant Calais, et tout autour

PEROU. Arrêté N° 2017-01 du 1er janvier 2017. Portant mesures de résistance aux politiques de destruction et de criminalisation de l’hospitalité faite aux réfugiés en France

Vu la République, la fraternité en ses fondements.

Vu les bouleversements des temps présents, la perspective de mouvements migratoires extraordinaires, la démultiplication à venir de « jungles » dans les plis et replis de nos territoires. 

Considérant que la Jungle de Calais fut habitée par plus de 20 000 exilés, non pas errants mais héros, rescapés de l’inimaginable, armés d’un espoir infini.

Considérant qu’ici-même ont effectivement vécu, et non survécu à peine, des rêveurs colossaux, des marcheurs obstinés, des pionniers inépuisables que nos dispositifs de contrôle, procédures carcérales, containers invivables se sont acharnés à casser afin que n’en résulte qu’une humanité-rebut à gérer, décompter, placer, déplacer. 

Considérant que Mohammed, Ahmid, Zimako, Youssef, et tant d’autres se sont avérés non de pauvres errants, migrants vulnérables et démunis, mais d’invétérés bâtisseurs qui, en dépit de la boue, de tout ce qui bruyamment terrorisait, de tout ce qui discrètement infantilisait, ont construit en quelques mois à peine trois églises, cinq mosquées, trois écoles, un théâtre, deux bibliothèques, un hammam, trois infirmeries, cinq salons de coiffure, quarante-huit restaurants, quarante-quatre épiceries, sept boulangeries, quatre boîtes de nuit, d’immenses preuves d’humanité réduites au statut d’anecdotes dans l’histoire officielle de la « crise des migrants ».

Considérant qu’à bonne distance du centre historique de Calais, l’on a habité, cuisiné, dansé, fait l’amour, fait de la politique, parlé plus de vingt langues, chanté l’espoir et la peine, ri et pleuré, lu et écrit, contredit ainsi avec éclat les récits accablants dont indignés comme exaspérés n’ont cessé de s’enivrer, assoiffés des images du désastre, bourrés de plaintes, écoeurés par ce tout ce qui en dissidence pouvait s’inventer, se créer, s’affirmer.

Considérant qu’entre autoroute et front de mer, chacun des habitats construit, dressé, tendu, planté, portait l’empreinte d’une main soigneuse, d’un geste attentif, d’une parole liturgique peut-être, de l’espoir d’un jour meilleur sans doute, et s’avérait donc une écriture bien trop savante pour les témoins patentés dont les yeux n’ont enregistré que fatras et cloaques, dont la bouche n’a régurgité que les mots « honte » et « indignité ».

Considérant que pendant un an, dans la ville comme dans le bidonville, des centaines de britanniques, belges, hollandais, allemands, italiens, grecs, français, ont quotidiennement construit plus que de raison, distribué vivres et vêtements, organisé concerts et pièces de théâtre, créé radios et journaux, dispensé conseils juridiques et soins médicaux et, le soir venu, occupé les dizaines de lits de l’Auberge de Jeunesse de Calais, haut-lieu d’une solidarité active peut-être unique au monde, centre de l’Europe s’il en fut. 

Considérant qu’avant ces mois officiellement sombres, les associations locales n’avaient jamais reçu autant de dons et de propositions de bénévolat, et que durant ces mois effectivement hors du commun n’a pourtant cessé d’être reproduite la fable d’une exaspération collective, d’une xénophobie généralisée, d’une violence calaisienne qui, sur-médiatisée, a sali la ville autant que les kilomètres de barbelés l’ont défigurée.

Considérant que Calais fut, de facto, une ville-monde, avant-garde d’une urbanité du 21e siècle dont le déni, à la force de politiques publiques brutales, a témoigné d’un aveuglement criminel à l’endroit de mondes à venir, d’un irresponsable mépris pour les formes contemporaines d’hospitalité que des milliers d’anonymes ont risquées.

Considérant qu’à la suite de l’écrasement de cette cité potentielle et de l’éloignement de ses bâtisseurs, Mairie, Région et Etat réunis ont programmé l’ouverture à Calais d’un parc d’attraction nommé « Heroïc Land », urbanité factice de 40 hectares dédiée aux héros de jeux vidéos, inimaginable cité fantôme de 275 millions d’euros, monument à la vulgarité des politiques publiques contemporaines.

Considérant que tout ce qui fit et que fut la Jungle ne disparaîtra pas, ni à la force d’une violence légale déployée en lisière de nos villes comme si s’organisaient là quelques bandes de criminels, ni sous l’effet d’attractions en tout genre faites pour anesthésier les esprits et détourner les regards, ni par la grâce des solutions abstraites de « l’hébergement pour tous », dont les containers, centres, et autres camps officiels à plusieurs millions d’euros exposent, sidérant, le caractère d’impasse.

Considérant que l’incurie des acteurs publics d’aujourd’hui et l’inanité de leurs solutions sont si vastes que demain la Jungle de Calais se réinventera au centuple, en France comme en Europe, et que pour l’invention de politiques publiques sérieuses enfin, demeurera comme seul trésor public le fruit de ce que calaisiens et exilés ont inlassablement cultivé des mois durant, à savoir ce qui nous rapproche.

Déclare :

– 1 : Que la destruction de la Jungle de Calais doit se voir consignée dans les pages de l’histoire de France contemporaine comme un acte de guerre conduit non seulement contre des constructions, mais aussi contre des hommes, des femmes, des enfants, des rêves, des chants, des histoires, non seulement contre un bidonville, mais contre ce qui en 2016 a fait ville à Calais.

– 2 : Qu’éviter que se répètent de telles opérations d’anéantissement nécessite de résister au déni de réalité, de contredire les fables mortifères des professionnels de la plainte comme des promoteurs de l’exaspération, de magnifier la beauté des bâtisseurs des confins, de rendre célèbres leurs gestes d’hospitalité, de s’avérer autrement attentifs au souffle séculaire qui les anime comme aux promesses d’avenir qu’ils dessinent.

– 3 : Qu’agir au devant de telles situations-monde qui demain se démultiplieront nécessite de faire s’amplifier les gestes créateurs des exilés et de leurs hôtes, d’édifier dans leur sillage des palais offrant abri de droits et de joie, d’inventer dans leur prolongement les hauts-lieux d’une fraternité reconquise, de risquer sous leur influence d’autres formes d’écritures politiques de l’hospitalité, de ce que nous avons en commun, de notre République. »

Alerte : risque d’expulsion imminente pour le Soudan – vol prévu demain

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M. Naji, exilé soudanais arrêté à Metz, qui avait refusé d’embarquer lors d’une première tentative d’expulsion vers le Soudan à l’aéroport Charles de Gaulle, et avait ensuite été enfermé au centre de rétention du Mesnil Amelot, a un nouveau vol programmé demain mercredi à 21h20 pour Doha, où il doit prendre un autre vol pour Khartoum, par la compagnie Qatar Airways.

Ce que vous pouvez faire :

Interpeller le ministre de l’intérieur pour demander de stopper l’expulsion :

sec.immigration@interieur.gouv.fr

Écrire un message ou téléphoner à la préfecture de Moselle, auteure de la décision d’expulsion, pour lui demander de l’annuler :

formulaire de contact : http://moselle.gouv.fr/Contactez-nous

préfet de Moselle : Pascal BOLLOT
Téléphone cabinet du préfet : 03 87 34 87 49
Secrétaire général: Olivier  DU CRAY
Tél : 03 87 34 88 09
Directrice de cabinet: Nathalie BASNIER

La compagnie Qatar Airways, auprès de laquelle sont réservés les vols pour les expulsion. Vous pouvez téléphoner à son agence de Paris ou vous y rendre pour expliquer courtoisement votre point de vue sur leur participation à ces expulsions.

http://www.qatarairways.com/fr/fr/contact-us.page

Qatar Airways, Agence de Paris, 19 rue de Ponthieu, 75008 Paris, France, 01 43 12 84 40

Vous pouvez aussi l’interpeller sur facebook : https://www.facebook.com/qatarairways

Pour argumenter, vous pouvez vous baser sur les constatations d’Amnesty International :

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/france-deux-personnes-bientot-renvoyes-dans-un-pays

https://www.amnesty.org/fr/countries/africa/sudan/report-sudan/

 

urgent

Mobilisation autour des CAO

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Ce sont d’abord les exilé-e-s qui se sont mobilisé-e-s autour de leur situation dans les CAO (Centres d’Accueil et d’orientation – ) et les CAOMI (CAO pour mineurs – ), avec parfois des soutiens locaux, comme dans la région Procence – Alpes – Côte d’Azur dès le tout début, en Occitanie ou à Rennes, mais souvent aussi sans recevoir de soutiens. Les mineur-e-s ont été très actifs dans ces protestations (voir ici et ).

Mais l’ampleur des placements en procédure Dublin (qui prévoit le renvoi dans le pays européen responsable de la demande d’asile d’une personne selon le règlement européen Dublin III, qui est le plus souvent le pays d’entrée dans l’Union européenne) et la multiplication des assignations à résidence (le plus souvent à l’extérieur des CAO mais parfois dans les centres) pour préparer les expulsions amène de plus en plus de mobilisations locales.

Embrayant sur ce mouvement, deux associations, l’Auberge des Migrants et Utopia 56 lancet un appel à mobilisation pour le 20 janvier.

https://www.facebook.com/events/234528087003771/

Le titre de la mobilisation, autour de la « promesse de Cazeneuve » (lorsqu’il était ministre de l’intérieur), ne fait pas l’unanimité, notamment auprès des groupes qui se sont mobilisés les premiers contre les risques d’expulsion des personnes en procédure Dublin.

Dès la création des premiers CAO en octobre 2015, cette « promesse », interprétée tantôt comme promesse de ne pas placer en procédure Dublin les personnes dont les empreintes digitales ont été enregistrées dans un autre pays, tantôt de ne pas procéder à leur expulsion, tantôt de ne pas les expulser tant qu’elles seraient en CAO (d’où les assignations à résidence en dehors des CAO pour préparer l’expulsion) a été battue en brèche tant par les déclarations des préfectures et les expulsions (voir ici et ) que par les circulaires successives qui sont venues encadrer le dispositif CAO (voir ici, ici et ). Dans les faits, les préfectures ont mis en place des pratiques très divergentes, qui tendent maintenant à converger vers la multiplication des assignations à résidence et des tentatives de renvoi, dans un contexte où le gouvernement multiplie les expulsions dans le cadre du règlement Dublin III et se dote d’un dispositif spécialisé d’hébergement pour les préparer, le PRAHDA. Cette « promesse » ne concerne par ailleurs que les personnes venant du bidonville de Calais, et non celles de Paris et de Grande-Synthe, près de Dunkerque, qui sont aussi concernées par le dispositif.

Des manifestations sont donc prévues, en lien ou non avec cet appel, dans les prochains jours, tandis que des pétitions circulent en soutien à des personnes en risque d’expulsion. Quelques exemples en une liste non exhaustive :

À Toulouse : rassemblement quotidien du 16 au 21 janvier de 12h à 14h place Wilson.

https://www.facebook.com/events/967351070032037/

https://www.facebook.com/events/137528256749243/

À Montpellier : rassemblement samedi 21 janvier devant la préfecture, place des Martyrs de la Résistance, de 15h30 à 19h.

https://www.facebook.com/events/368190016888289/

À Besançon : rassemblement vendredi 20 janvier devant la préfecture, 3 avenue de la Gare d’Eau, de 13h à 15h

Aussi une pétition : https://secure.avaaz.org/fr/petition/Le_Prefet_de_Besancon_Raphael_Bartolt_et_son_secretaire_general_JP_Setbon_Annulez_le_Dublinage_de_Mansor_Taha_et_son_ren

Quimper : une manifestation est prévue vendredi 20 janvier à l’initiative de la Ligue des Droits de l’Homme.

Aussi une pétition : https://www.change.org/p/b%C3%A9n%C3%A9voles-du-cao-de-pleyber-christ-arr%C3%AAt-du-renvoi-de-2-jeunes-migrants-dublin%C3%A9s-du-cao-de-pleyber-christ

 

chaosLe chaos ou l’origine du monde – gravure de Picart.

CAO mineurs : fin de non-recours du Home Office

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« Les mineurs n’auront pas de retour écrit des autorités britanniques notifiant le refus communiqué la semaine dernière ; celles-ci se refusent en effet à formaliser leurs décisions dans le cadre de la procédure ad hoc mise en place à l’occasion du démantèlement » : tel est le message que les autorités françaises ont communiqué aux responsables des CAOMI (Centres d’Accueil et d’Orientation pour Mineurs – voir ici, ici, ici, ici et ), créés à l’occasion de l’expulsion des habitant-e-s du bidonville de Calais.

Pas de notification de la décision signifie pas de possibilité de recours, en violation des droits des mineur-e-s concerné-e-s. En effet la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne prévoit à son article 47 un droit au recours effectif. L’admission des mineur-e-s sur le sol britannique n’était pas le simple fait du prince ou liée au bon vouloir des agents du Home Office, mais correspondait soit aux critères du règlement Européen Dublin III à son article 19 pour la réunification familiale des mineur-e-s, soit aux critères liés à l’amendement Dubs voté par le parlement britannique. Un refus devrait donc pouvoir être contesté s’il ne respecte pas ces critères.

Les personnes mineures ayant accès à un soutien juridique indépendant peuvent bien sûr contester l’absence de notification et de possibilité de recours effectif devant les tribunaux, et si elles gagnent obtenir une notification de refus qu’elles pourront ensuite contester à son tour devant le tribunaux. Sachant que la justice n’est pas nécessairement rapide, qu’une grande partie de ces personnes ont entre 16 et 18 ans, et que la minorité finalement passe vite.

L’autre solution est de déposer une demande d’asile en France et de demander à être réunie à sa famille au Royaume-uni. Au moins en cas de refus il y a une possibilité de recours. Sachant que là aussi ça demande un soutien pour la préparation du dossier, une préfecture qui connaît ce genre de démarche – ce qui est loin d’être le cas partout – et un minimum de bonne volonté du Home Office pour ne pas faire traîner au maximum les procédures.

Pour une personne mineure qui avait 17 ans et demi au moment de la destruction du bidonville, on peut se dire que le temps perdu est éliminatoire. Autant qui n’auront accès ni à la protection de l’enfance, ni à la réunification familiale.

Quand on sait que des personnes mineures avaient déposé une demande d’asile en France pour demander la réunification familiale dans le cadre du règlement Dublin III avant la destruction du bidonville avaient été envoyées en CAOMI. Que leur demande n’a donc pas été traitée dans le cadre de Dublin III mais selon la procédure discrétionnaire mise en place par les autorités britanniques. Et que certaines se sont vues refusées sans notification ni possibilité de contestation : on peut mesurer l’ironie cynique mise en œuvre par les autorités tant françaises que britanniques dans cette affaire.

On peut mesurer aussi la confiance que ces mineur-e-s peuvent avoir dans ces autorités qui les ont berné-e-s.

Et les mineur-e-s expulsé-e-s du bidonville de Calais n’en ont pas fini sur le chemin des violations de leurs droits.

 

piranesicarceri12-legerGiovanni Battista Piranesi : Les prisons, planche 12.