AccueilPenser construire et faire vivre la mixité des publics

Penser construire et faire vivre la mixité des publics

Building and social mixity - Courcelles conferences

Les rencontres de Courcelles

*  *  *

Publié le mercredi 15 mars 2017 par Anastasia Giardinelli

Résumé

Ces rencontres de Courcelles se placent dans le champ de la pédagogie. Il faut entendre ici le terme pédagogie comme le fait de relier ensemble, et chez la ou les même(s) personne(s), la question de la production d’un discours, des savoirs sur la pratique et la pratique elle-même, dans une articulation singulière valeurs – pratiques – théories. Il s'agit donc de penser et de vivre la rencontre entre pratique, pensée sur la pratique, valeurs engagées dans la pratique et théories. Nous entendons par pratique aussi bien le face-à-face avec un public, l’accompagnement d’une ou de plusieurs équipes, la direction d’un équipement, la formation de volontaires ou de professionnel·le·s, l’enseignement avec des étudiant·e·s, la recherche, l’expertise de dispositifs… Nous invitons donc les participant·e·s au symposium à proposer sur le thème retenu, soit une réflexion située pratiquement et théoriquement ou, soit un travail de recherche scientifique interrogeant les pratiques et situé théoriquement.

Annonce

Argumentaire

Penser construire et faire vivre la mixité des publics

Le symposium 2017 se propose d’interroger la question de la mixité des publics ou du comment permettre aux groupes sociaux de se rencontrer.

La mixité s’entend comme étant la coprésence de catégories considérées comme différentes, habituellement séparées et distinguées selon une échelle de valeur, qui hiérarchise ces catégories (Bacou et alli., 2016). La mixité est à la fois un processus à l’issue instable et un outil en faveur de l’égalité. Rappelons cependant que la mixité, quoiqu’elle désigne être en coprésence, n’entraîne pas automatiquement l’égalité ou la disparition des inégalités.

Un rapport d’évaluation du dispositif #GenerationCampColo, publié en 2016 (Bacou et alli., 2016) et portant sur les camps et les colos, fait le constat suivant : le problème de la mixité, c’est la séparation préalable des individus.

En partant de ce premier constat, nous proposons deux approches différentes qui se retrouveront lors des ateliers et rencontres du symposium : l’une issue du travail des praticien·ne·s-chercheur·e·s et l’autre issue des travaux de chercheurs n’étant pas praticien·ne·s.

Les colonies de vacances ont un modèle pédagogique datant des années 50 (Houssaye, 1989, 1998) où la finalité était sanitaire, soigner la tuberculose, sociale, faire partir les enfants dans la pauvreté, puis éducatif, en déplaçant les enfants de la ville et en les séparant de leurs parents/de leur milieu. En fait, le but du départ en colo s’est toujours fixé en articulation avec la situation des villes : le bon air régénérateur pour la ville industrielle polluée de la fin du XIXème ; les lieux d’activité pour la ville des grands ensemble, par exemple (Bataille & Levitre, 2010).  L’enjeu des colos aujourd’hui semble être la rencontre entre les différents publics en relation avec le développement d’une mixité sociale urbaine. Mais le bâti accueillant des logements mixtes n’est pas la garantie de la rencontre entre groupes sociaux (Chamboredon et Lemaire, 1970). Plus encore, la ville apparaît aussi non mixte au-delà des classes sociales : pour les femmes (Raibaud, 2015), pour les personnes en situation de handicap (Joseph, 2004), pour les personnes porteuses de maladies ou encore pour les afro-descendants (Estèbe, 2004). Pour partie, il faut comprendre que la ville s’est construite depuis les années 1970-80 dans une logique de séparatisme des classes supérieures (Goix, 2006, pour l’école Merle 2011, Picketty 2016) et la politique de la ville n’y pas changé grand-chose. Dans le même temps, les rapport de la ville à la nature changent. La nature vient occuper l’espace urbain. L’agriculture s’y glisse (Soulard, 2014). Le rural n’est plus coupé de la ville mais au contraire vient s’y articuler au travers différentes pratiques comme les AMAP[1] ou bien des formes de retours à la nature.

[1] Association pour le maintien d’une agriculture paysanne.

Comment dans un tel contexte les colonies de vacances ont-elles évolué ? On peut dire qu’elles ont été soumises à une pression libérale depuis la fin des années 1970. Une demande de rentabilisation des bâtiments est formulée en 1979 par le ministère de la Jeunesse et des sports (Bataille & Levitre, 2010). Ceci entraîne une attention plus importante au remplissage des séjours avec une dérive vers l’activisme,

De nombreux travaux de recherches  (Houssaye 1991; Mollo-Bouvier 1994; Lebon 2005), en plus des rapports institutionnels, montrent ces évolutions des ACM vers l'activisme et le consumérisme. Plus précisément, les travaux de Rousseau  (2000, 2011) s'y penchent tout particulièrement en montrant les liens entre l’apparition des marchés publiques, des appels d'offre, de la concurrence entre organisateurs, du désengagement des collectivités de la gestion de leurs propres bâtiments...

L’activisme a eu des effets sur la séparation des publics par le fait même que chaque activité attire a elle un groupe singulier d’utilisateur·trice·s, séparant les garçons et les filles, par exemple (Bacou, Raibaud, 2011), mais aussi les quartiers populaires des autres. Mais d’autres effets sont présents reliés à cette évolution libérale. En particulier, un modèle a fini par s’installer au travers du marché de la formation de l’encadrement (Houssaye, 2009). Celui-ci a imposé une façon de séparer les enfants par âge, par activité, en groupe… instaurant finalement des frontières plus ou moins difficiles à franchir.

Enfin, les politiques publiques construites sur des appels à projet et des publics cibles fabriquent une séparation des publics plus infranchissable encore. Les financements sont conditionnés à des critères de « pureté » des publics accueillis : seul·e·s des publics particuliers et/ou issus de territoire précis sont acceptés (Ville-Vie-Vacances, Maison Départementale des Personnes Handicapées, Aide Sociale à l’Enfance, Comité d’Entreprise, etc.).

Envisager la mixité des publics, comme but, suppose, au-delà de la compréhension des modalités de séparations, de connaître les façons de faire se rencontrer des personnes préalablement séparées (Vinet, 2015). Le passage des frontières instaurées entre les publics (Thorne, 1992,1993) suppose de mobiliser de nouvelles conceptions de l’action.

Axes thématiques proposés

Les attendus des réponses à l’appel à communication

Comment chercheur·e·s et praticien·ne·s-chercheur·e·s peuvent ensemble comprendre et faire vivre la mixité des publics ? Comment peuvent-ils ensemble inventer d’autres formes pédagogiques, d’autres manières de faire des politiques publiques ? Comment ensemble peuvent-il construire une animation socio-culturelle hors de la logique de marché ? Ce sera l’enjeu pour nous de ce symposium.

Nous proposons à chacun·e (chercheur·e·s, praticien·ne·s-chercheur·e·s) de répondre à cet appel à communications dans sa spécialité, avec ses outils et ses méthodes. Le symposium sera le lieu de l’échange et du débat.

Les chercheur·e·s non-praticien·ne·s

Axe 1 : les séparations et leurs effets

Quels sont les mécanismes qui produisent la séparation entre public et leur hiérarchisation ? Quels effets observe-t-on sur les publics ? Et au-delà ? Votre contribution pourra s’appuyer sur les situations prises dans les colonies de vacances ou les camps mais aussi l’animation socioculturelle en général et le travail social.

Axe 2 : la rencontre des publics

Comment la rencontre entre publics préalablement séparés et hiérarchisés est-elle possible ? Quels sont les supports possibles ? Les conditions à prendre en compte ? Votre contribution pourra s’appuyer sur les situations prises dans les colonies de vacances ou les camps mais aussi l’animation socioculturelle en général et le travail social.

Les rencontres de Courcelles sont organisées depuis 2015. Elles sont organisées, en lien entre l’association La Maison de Courcelles, les éditions le Social en fabrique et l’Université Paris 13 (laboratoire EXPERICE – Le sujet dans la cité) sur trois jours autour d’une thématique où s’alternent ateliers, plénières, discussions et temps conviviaux avec les professionnels de la maison, de la Haute-Marne et des chercheur·e·s, praticien·ne·s-chercheur·e·s travaillant sur le thème choisi. L'année dernière, les rencontres de Courcelles portaient sur le thème de la formation. Cette année, elles portent sur la mixité des publics.

Ces rencontres de Courcelles se placent dans le champ de la pédagogie. Il faut entendre ici le terme pédagogie comme le fait de relier ensemble, et chez la ou les même(s) personne(s), la question de la production d’un discours, des savoirs sur la pratique et la pratique elle-même, dans une articulation singulière valeurs – pratiques – théories (Fabre, 2015 ; Houssaye, 2014 ; Meirieu, 1995). Il s'agit donc de penser et de vivre la rencontre entre pratique, pensée sur la pratique, valeurs engagées dans la pratique et théories. Nous entendons par pratique aussi bien le face-à-face avec un public, l’accompagnement d’une ou de plusieurs équipes, la direction d’un équipement, la formation de volontaires ou de professionnel·le·s, l’enseignement avec des étudiant·e·s, la recherche, l’expertise de dispositifs… dans la mesure où dans chacune de ces occasions, la personne est confrontée au choix quant à ses façons de faire, aux effets de ces/ses choix et aux conséquences de la rédaction d’un écrit qui témoigne de l’un et de l’autre.

Le symposium cherche la rencontre, l’échange et l’approfondissement des différentes formes de savoir (pratique, sur la pratique, valeurs et théories) afin de construire des savoirs hybrides. À l’image du croisement des savoirs d’ATD-Quart-monde[1], le symposium construit des passerelles et de la confrontation entre différentes formes de savoir.

[1] LA PENSÉE DES PLUS PAUVRES DANS UNE CONNAISSANCE QUI CONDUISE AU COMBAT  - Père Joseph Wresinki -  Palais de l'Unesco, 3 décembre 1980 - extraits : https://www.atd-quartmonde.fr/wp-content/uploads/2015/10/une-connaissance-qui-conduit-au-combat-JW.pdf

Nous invitons donc les participant·e·s au symposium à proposer sur le thème retenu, soit une réflexion située pratiquement et théoriquement ou, soit un travail de recherche scientifique interrogeant les pratiques et situé théoriquement.

Le temps d’échange sera conséquent pour permettre que la discussion puisse faire mûrir la réflexion. L’ensemble des interventions donnera lieu à des articles qui seront mis en ligne sur le site des éditions Le social en fabrique©.

Les chercheurs non praticiens

Vous êtes praticiens du champ, vous travaillez dans l’animation et vous avez rencontrés des difficultés dans la mise en place de séjour, de camp, de colo mixte, quels ont été ces difficultés ou problèmes ? Comment avez-vous essayé de trouver une issue ? Quels sont les éléments qui ressortent de cette expérience ?

Vous avec mis en place un dispositif particulier, singulier permettant de construire, de penser ou de faire vivre la mixité des publics, comment cela a-t-il été construit ? Pensé ? Mis en place ? Quels ont été les effets ? Les difficultés ? Les réussites ou échecs ? Comment construisez-vous des espaces mixtes ? Quels sont vos réussites ou échecs ? Quels sont les effets ?

Modalités de soumission

Nous attendons des propositions qui prennent appui sur des situations concrètes, qui seront décrites de façon extensive en mettant en lumière les choix pratiques effectués et leurs effets. Les auteur-e-s proposeront, un texte de 10.000 environ.

Le texte est à remettre pour

le 10 avril maximum

Les personnes seront prévenues pour le 21 avril si elles sont retenues.

à envoyer à :

  • contact@maisondecourcelles.fr
  • jean-marie.bataille@lesocialenfabrique.fr
  • jean-michel.bocquet@lesocialenfabrique.fr
  • chblanchard29@gmail.com

Comité scientifique

  • Christophe Blanchard, Maitre de conférences, Université de Paris XIII, laboratoire EXPERICE
  • Jean-Jacques SCHAELLER, , Maitre de conférences - HDR, Université de Paris XIII, laboratoire EXPERICE
  • Jean-Marie Bataille, Docteur en sciences de l’éducation, chargé de cours à l’IUT de Bobigny
  • Jean-Michel Bocquet, Doctorant en sciences de l’éducation sous la direction de J. Houssaye et L. Gutierrez, Université de Rouen, Laboratoire CIVIIC
  • Louis Létoré, Directeur de la maison de Courcelles
  • Jean Houssaye, Professeur émérite en Sciences de l’éducation à l’université de Rouen
  • Yves Raibaud, géographe, maître de conférences HDR - Université Michel de Montaigne Bordeaux-3, Laboratoire ADES
  • Magali Bacou, Sociologue, Chargée d’étude à l’IRTS de Midi-pyrennées, associée au CERTOP-CNRS
  • Cyril DHEILLY, Doctorant en sciences de l’éducation sous la direction de J. Houssaye et L. Lescouarch. Master en psychologie, société et cultures . Professeur d’EPS.

Bibliographie indicative

  • Bacou M., Bataille J.-M., Besse-Patin B., et al. (2016), Des séparations aux rencontres en camps et colos: rapport d'évaluation du dispositif #GénérationCampColo, Bagneux, Le Social en Fabrique
  • Bacou M. et Bataille J.-M., « L’aménagement des colonies de vacances (1930-1965) : Changement des lieux et des rapports sociaux de sexe ? », Les dossiers des sciences de l’éducation, 28 | 2012, 13-23.
  • Bataille, J.-M. et Levitre, A. (2010). Architecture et éducation : les colonies de vacances. Vigneux, Matrice.
  • Chamboredon, J.-C., & Lemaire, M. (1970). Proximité spatiale et distance sociale. Les grands ensembles et leur peuplement. Revue Française de Sociologie, 11(1), 3. https://doi.org/10.2307/3320131
  • Estèbe, P. (2004). L’usage des quartiers: action publique et géographie dans la politique de la ville (1982-1999). Paris: L’Harmattan.
  • Fabre, M. (2015). Penser la formation. Paris, France: Éditions Fabert, 2015.
  • Goix, R. L. (2006). Les gated communities aux États-Unis et en France : une innovation dans le développement périurbain ? Hérodote, no 122(3), 107‑137.
  • Houssaye, J. (2014). Le triangle pédagogique: les différentes facettes de la pédagogie. Issy-les-Moulineaux, France: ESF éditeur.
  • Houssaye J. (1998) Le centre de vacances et de loisirs prisonnier de la forme scolaire, Revue française de pédagogie No. 125, pp. 95-107
  • Houssaye Jean, 1991, Aujourd’hui, les Centres de vacances, Vigneux, Matrice (coll. « Points d’appui »,) 194 p.
  • Houssaye J. (1989), Le livre des colos, Vigneux, Matrice.
  • Joseph I. (2004), Météor : ou les métamorphoses du métro, Paris, Economica.
  • Lebon Francis, 2005, Une politique de l’enfance. Du patronage au centre de loisirs, Paris, L’Harmattan (coll. « Logiques sociales »,) 265 p.
  • Maruéjouls E. La mixité (filles garçons) à l'épreuve du loisir des jeunes dans trois communes. Agora débats/jeunesses, L'Harmattan/Presses de Sciences Po, 2011, pp.160. <hal-00668117>
  • Meirieu, P. (1995). La pédagogie entre le dire et le faire: le courage des commencements. Paris, France: ESF éditeur.
  • Merle P., « La carte scolaire et son assouplissement. Politique de mixité sociale ou de ghettoïsation des établissements ? », Sociologie, 1/2011 (Vol. 2), p. 37-50.
  • Merle P, « Concurrence et spécialisation des établissements scolaires. Une modélisation de la transformation du recrutement social des secteurs d'enseignement public et privé », Revue française de sociologie, 1/2011 (Vol. 52), p. 133-169.
  • Mollo-Bouvier Suzanne, 1994, « De l’école aux vacances. Prolégomènes à une analyse sociologique des vacances des enfants », Revue française de pédagogie, 1994, no 106, p. 79‑90.
  • Piketty T. Le gouvernement souhaite-t-il vraiment la mixité sociale ?, tribune dans Le Monde 31/08/2016 : http://piketty.blog.lemonde.fr/2016/08/31/le-gouvernement-souhaite-t-il-vraiment-la-mixite-sociale/
  • Raibaud Y. (2015), La ville faite par et pour les hommes, Paris, Belin.
  • Rousseau, F. (2000). De la foi du marché: l’étonnante mutation des patronages d’antan. Gérer & comprendre, Annales des Mines, (59).
  • Rousseau, F. (2011). L’esprit militant et le Management. Le journal de l’école de Paris du management, (55), 22‑28.
  • Soulard, C.-T. (2014). Pratiques, politiques publiques et territoires : construire une géographie agricole des villes (thesis). Université Michel de Montaigne - Bordeaux III. Consulté à l’adresse https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01016218/document
  • Vinet, E. (2015). Non-/mixité dans les structures socio-éducatives et de loisirs : de l’injonction aux expériences. Journée d’étude « La mixité et ses enjeux », organisée par le DIM Genre, Inégalités, Discriminations. CNRS, Paris. : https://www.dailymotion.com/video/x45igyh_mixite-5-non-mixite-dans-les-structures-socio-educatives-et-de-loisirs-par-elise-vinet_school
  • Thorne Barrie, 1993, Gender play. Girls and boys in school, New Brunswick, Rutgers University Press, 237 p.
  • Thorne Barrie, 1992, « Girls and boys together... but mostly apart : gender arrangements in elementary schools » dans Education and gender equality, London, The Filmer Press, p. 117‑129.

Lieux

  • 7 Rue Pierre Devignon, 52210 Saint-Loup-sur-Aujon
    Courcelles-sur-Aujon, France (52)

Dates

  • lundi 10 avril 2017

Mots-clés

  • mixité, genre, loisir, animation, travail social, colonie de vacances, pédagogie, savoir de l'expérience, pratique, vivre ensemble, séparation des publics, rencontre, accueil collectif de mineurs, inclusion

Contacts

  • Christophe BLANCHARD
    courriel : chblanchard29 [at] gmail [dot] com
  • Louis LETORE
    courriel : maison-de-courcelles [at] wanadoo [dot] fr
  • Jean-Michel BOCQUET
    courriel : jean-michel [dot] bocquet [at] lesocialenfabrique [dot] fr

URLS de référence

Source de l'information

  • Jean-Michel BOCQUET
    courriel : jean-michel [dot] bocquet [at] lesocialenfabrique [dot] fr

Pour citer cette annonce

« Penser construire et faire vivre la mixité des publics », Appel à contribution, Calenda, Publié le mercredi 15 mars 2017, http://calenda.org/399008