Édile (Rome antique)
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Les édiles étaient des magistrats de la Rome antique. Leur fonction primitive était liée à l'administration urbaine de Rome. L'édilité est intégrée au cursus honorum.
Sommaire
Historique de la magistrature[modifier | modifier le code]
Sous la République[modifier | modifier le code]
Les édiles plébéiens (aediles plebeii)[modifier | modifier le code]
Création de la fonction[modifier | modifier le code]
Les premiers édiles sont les édiles plébéiens, créés en -494 en même temps que les tribuns de la plèbe. Leur nom provient du mot latin plebis, peut-être parce qu'il sont élus dans le peuple. Ils sont deux, élus chaque année par les comices centuriates, et sont plus des assistants des tribuns de la plèbe — à ce titre ils entendent par exemple les causes de moindre importance que les tribuns leur confient.
Évolution de la fonction[modifier | modifier le code]
En -446 ils sont faits gardiens des senatus-consulta et des plébiscites (auparavant les consuls avaient tendance à supprimer ou changer les senatus-consulta selon leurs volontés).
Ils partagent leurs fonctions avec les censeurs créés en -443, il est donc difficile de savoir exactement comment les tâches étaient réparties.
Les deux édiles s'occupent des bâtiments sacrés et privés : entretien des temples, surveillance des édifices privés en ruines ou se dégradant. Ils supervisent l'approvisionnement en eau de la ville, probablement en l'absence des censeurs, et pour cela entretiennent les sources par le biais d'entrepreneurs (redemptores), ainsi que les égouts (comme la fameuse cloaca maxima) ; ils doivent aussi veiller à l'entretien de la voirie urbaine[1] et à leur pavement (tâches auxquelles ils emploient le produit des amendes pour infraction aux règles de l'ager publicus). Ils sont également responsables de la distribution et la vente à bas prix de blé à la plèbe — et non de l'achat, qui est de la compétence des consuls et des questeurs, ou parfois d'un magistrat extraordinaire, le praefectus annonae. Les édiles contrôlent l'utilisation des terrains publics (ager publicus) et peuvent mettre à l'amende les occupants illégaux des pâturages de la république. Ils sont aussi chargés de la surveillance des marchés, de l'inspection des marchandises mises en vente (dont les esclaves), ainsi que des poids et mesures.
Les édiles plébéiens ont aussi une fonction religieuse : ils contrôlent le respect de la tenue des cérémonies religieuses et l'introduction du culte de nouvelles divinités à Rome.
Ils ont enfin la charge du maintien de l'ordre public et de la bienséance, de l'inspection des bains publics, des maisons closes, et des lieux de plaisir.
Dans leurs différentes activités, ils sont assistés de fonctionnaires : praecones (crieurs publics), scribae (greffiers, secrétaires), viatores (appariteurs, messagers officiels).
Les édiles curules (aediles curulis)[modifier | modifier le code]
En -365, selon Tite-Live le Sénat crée deux nouveaux édiles, les édiles curules, qui sont eux recrutés parmi les patriciens. Ils furent mis en place parce que les deux édiles plébéiens refusaient d'étendre les ludi magni à quatre jours au lieu de trois. L'édilité curule fut néanmoins ouverte rapidement aux plébéiens.
Les deux édiles curules sont supérieurs aux deux édiles plébéiens[2] : ils disposent de la chaise curule (les édiles plébéiens doivent se contenter du subsellium), de la toge prétexte, ils ont le ius edicendi, c'est-à-dire le pouvoir de publier des édits dans leurs domaines d'action. Au Sénat ils ont la préséance sur leurs collègues plébéiens.
À noter enfin qu'ils sont sacro-saints tout comme les édiles plébéiens et les tribuns de la plèbe.
Cicéron élu édile résume ainsi les devoirs et les honneurs attachés à cet charge : « célébrer avec le plus grand appareil les jeux consacrés à Cérès, à Bacchus et à Proserpine ; rendre la déesse Flora favorable à l'empire et à l'ordre du peuple, par la pompe des jeux institués en son honneur ; faire représenter avec la majesté la plus auguste et la plus religieuse, au nom de Jupiter, de Junon et de Minerve, ces jeux solennels, les plus anciens de Rome et les premiers qu'on ait appelés romains ; veiller à l'entretien des temples, étendre mes soins sur Rome entière : telles sont mes fonctions ; je le sais, citoyens, et je sais aussi que, pour prix de tant de travaux, on m'accorde le droit d'opiner avant les simples sénateurs, la toge bordée de pourpre, la chaise curule, le droit d'image pour perpétuer mon existence dans la postérité »[3]
Les édiles céréaliers (aediles cereales)[modifier | modifier le code]
En -45 Jules César propose et obtient l'élection de deux nouveaux édiles patriciens, nommés édiles céréaliers (ou aediles cereales en latin). Ces deux derniers magistrats sont chargés spécifiquement de l'approvisionnement en blé de Rome, bien que leur importance après la création de la préfecture de l'annone soit très réduite.
Il y a désormais six édiles, et il en sera ainsi jusqu'à la disparition de la magistrature.
Sous l'Empire[modifier | modifier le code]
Avec la création progressive des différents services municipaux de Rome les édiles perdent leurs fonctions. Très vite être édile signifie donner des jeux, et rien d'autre.
L'édilité disparaît sous Gordien III.
Prérogatives et devoirs des édiles[modifier | modifier le code]
À partir de la création des édiles curules, l'élection des quatre édiles passe aux comices tributes, un peu moins monopolisés par les patriciens. Les élections des plébéiens et des curules se fait séparément, les premiers élus étant les curules, sur le Champ de Mars et sous la présidence d'un consul. En -180 la Lex Villia Annalis fixe l'âge minimum pour être édile : trente-sept ans (avant il fallait avoir vingt-huit ans pour toute magistrature) et durant le Ier siècle av. J.-C. il devient obligatoire d'avoir été questeur avant de devenir édile.
Les édiles avaient droit au jus imaginum le droit de léguer à leurs descendants leur masque mortuaire, qui, accroché dans l’atrium de la domus, constitue un puissant identifiant pour les familles aristocratiques, fières d'exhiber les images de leurs ancêtres magistrats.
Dans les villes soumises à l’autorité de Rome et adoptant ses institutions, comme les colonies et les municipes, l’édilité était la deuxième étape du cursus honorum, après la questure et avant le duumvirat. Les édiles "provinciaux" avaient la charge de l’entretien des bâtiments publics.
Partage des tâches[modifier | modifier le code]
Très rapidement, les fonctions auparavant dévolues aux seuls édiles plébéiens sont exercées indifféremment par les quatre édiles. Ainsi, cinq jours après leur élection, les édiles tirent au sort chacune des quatre régions de Rome. Ils deviennent alors localement responsables de l'entretien des rues, et probablement d'autres tâches.
En matière religieuse la distinction entre plébéiens et curules (c'est-à-dire patriciens en définitive) demeure. Si certaines fêtes comme les fêtes de Flora ou celles de Cérès (les Cerealia) sont supervisées par n'importe quel édile, les jeux plébéiens (Ludi Plebeii) sont du ressort des seuls édiles plébéiens, tâche pour laquelle ils reçoivent des fonds, tandis que les jeux romains (romani ou ludi magni en l’honneur de Jupiter) — ou d'autres comme les ludi scaenici ou les ludi megalenses (en l’honneur eux de Cybèle) — sont menés par les édiles curules ; nous avons toutefois la trace d'une exception : un senatus-consulte autorisa un édile plébéien à superviser les ludi megalesii en une occasion.
La charge de l’organisation des jeux devint au Ier siècle av. J.-C. une responsabilité couteuse puisque l'édile devait les financer en grande partie sur ses propres ressources, mais aussi un moyen de se distinguer par la magnificence des spectacles et de bénéficier de cette notoriété pour l’élection suivante au prétorat.
Édiles célèbres[modifier | modifier le code]
Parmi les édiles les plus célèbres, nous pouvons citer Jules César (en -65), Cicéron (en -69) et Agrippa (en -33, que Pline l'Ancien évoque sous le terme de memorabilis aedilitas).
Notes et références[modifier | modifier le code]
- "Les édiles curules, les édiles plébéiens, ceux actuellement en fonction, et tous ceux qui après le vote de la présente loi seront faits et créés ou entreront en charge, devront, dans les cinq jours de leur élection à cette magistrature ou de leur entrée en charge, décider entre eux à l'amiable ou par le sort le quartier de la ville dans lequel chacun d'eux prendra soin de faire réparer et paver les rues publiques de la ville de Rome et à moins de 1.000 pas de la ville de Rome et aura pouvoir à cet effet. Dans tout quar tier échu à un édile en exécution de la présente loi, que cet édile ait donc pouvoir dans les lieux en faisant partie pour faire réparer et entretenir les rues, selon que la présente loi y oblige". Tables de loi d'Héraclée, découvertes en 1752.[1] Sur ce point précis, voir également : Claude Nicolet, La Table d'Héraclée et les origines du cadastre romain, Publications de l'École française de Rome, L'Urbs : espace urbain et histoire (Ier siècle av. J.-C. - IIIe siècle ap. J.-C.). Actes du colloque international de Rome (8-12 mai 1985), 1987, p. 1-25.[2]
- "(..) car il y a deux ordres d'édiles : le premier est celui des édiles curules, ainsi nommés des sièges à pieds courbés sur lesquels ils s'asseyent pour donner audience; le second, bien inférieur en dignité, est celui des édiles plébéiens. Après qu'on a élu les grands édiles, on procède tout de suite à l'élection des autres". Plutarque, Vies parallèles des hommes illustres, Vie de Marius, 5.[3]
- Cicéron, De suppliciis, XIV
Bibliographie[modifier | modifier le code]
- Élisabeth Deniaux, Rome, de la Cité-État à l'Empire, Institutions et vie politique, Hachette, (ISBN 2-01-017028-8)