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Halim Laroui: Un personnage épris de coiffure

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Le HuffPost Tunisie est allé à la rencontre d'un personnage atypique: Halim Laroui, coiffeur de profession, algérien de naissance et tunisien de coeur. Derrière une allure rétro-chic, un costume à carreaux et une volumineuse crinière de boucles grisonnantes savamment maîtrisée, un homme attachant se confie, sans détours.

Halim quitte Alger pour Paris à 20 ans et suit une formation à l’académie Jean-Louis Deforges. En France, il travaille chez Dessange avant un passage à Dubaï pour collaborer notamment avec les chaînes de télévision Infinity TV et Rotana. C’est surtout son amour pour le pays qui le pousse à venir travailler en Tunisie, son nouveau pays d’adoption.

Loin d’imaginer devenir, un jour, coiffeur, ce n’est qu’après l’obtention de son baccalauréat à Alger qui le destinait à des études de Droit, que cet expert de la coupe se dirige vers sa véritable passion: "Je suis parti en France, j’y ai rencontré des gens et parmi eux un coiffeur qui a découvert le don de la coiffure en moi". Cette découverte s'est déclenchée au début des années 1990, se souvient-il, avec émotion, dans une période marquée par la violence dans son pays d'origine.

Il raconte avec nostalgie comment la coiffure s’est imposée à lui, telle une évidence, bien avant d'en apprendre les bases:
"À l’académie Deforges, mon formateur me traite d’autodidacte, n’ayant pas compris le mot, j’étais très vexé, froissé. J’ai demandé si je pouvais disposer. Je suis rentré et en parlant avec un ami à qui je raconte ma vexation, celui-ci se met à rire et m’explique que c’est un compliment. Cet épisode a encore plus stimulé ma passion. Engagé dans ce métier, j’aimais ce toucher qu’a le cheveu".

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Même s’il n’a jamais exercé en Algérie, Halim révèle les difficultés de débuter en marge d’un contexte algérien spécifique dans un milieu généralement féminin. Le métier de coiffeur est jusqu’à présent un choix de carrière très mal accepté par l’entourage familial "Si un jour je rente en Algérie, j’oublie la coiffure. […] On essaie de faire semblant d’accepter mais je comprends et je sens qu’au fond d’eux, ils n’acceptent pas", nous lance-t-il avec regret.

Et c'est avec ce même regret que Halim parle de ses parents, de son retour plus fréquent à ses racines après leur décès, de ses longs séjours à Alger, dans une maison familiale vide, loin du regard pesant et des malaises qu'ils génèrent. Des évocations dont se dégage une émotion révélant les brèches d'une émotivité quasi dramaturgique.

Aux allures de personnage de film, Halim porte et assume une excentricité maîtrisée. Si vous passez par son lieu de travail, vous n’aurez pas de mal à le reconnaître, avec son complet impeccable et sa chevelure particulière. Cette apparence sophistiquée est le fruit d’une attention quotidienne. "Aujourd’hui, pour sortir de chez moi, j’ai dû essayer cinq ou six paires de chaussures avant d’opter pour celle que je porte maintenant", confesse-t-il.

Lorsqu’on évoque son style, il se dévoile sans ambages. En Tunisie, il exprime son style librement, ce n’est pas toujours le cas ailleurs: "Étant en Algérie je ne me look pas comme je me look ici. Je ne sais même pas comment être en Algérie!". On comprend rapidement que ce look consciencieusement étudié révèle surtout une volonté de se démarquer et de faire ressortir sa personnalité: "Je suis anti tout ce qui est figé, tout ce qui est stéréotypé. J’ai fait l’effort, ceci dit, de m’habiller en jogging comme tout le monde, en survêt’ et en Air max mais c’était pas moi. Je n’avais pas, en moi, ce qui allait avec!". Il ajoute "être différent fait qu’on ne soit pas ordinaire, je n’aime pas tout ce qui est commun".

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Tel un personnage qui semble s’être trompé d’époque -jusque dans son travail- il se démarque par son empreinte rétro: "J’aurais aimé vivre dans les années 1920, 30, je peux aller jusqu’aux années 60 […] On était beaucoup plus élégant à cette époque, on passait beaucoup plus de temps devant son miroir. Mon idole c’est bien Gabrielle Coco Chanel!".

En terme de coiffure le mot d’ordre de Halim est sans conteste la personnalisation, il n’est pas question de coiffer à la chaîne, bien au contraire. Comme pour son propre look, chaque détail compte, rien n’est laissé au hasard.

Pour Halim, la coiffure semble, en effet, davantage une affaire de ressenti, un contact direct avec la personne: "Une fois que je touche le cheveu ça y est, l’idée me vient toute seule". Il s’agit avant tout de faire en sorte que "chacune soit différente", de faire ressortir "ce qu’il y a de beau chez une femme".

Halim Laroui semble avoir réussi cette alchimie avec le cheveu. Ce domaine où il s'est fait un nom, s'est imposé et se démarque au quotidien, lui, l'un des plus Tunisiens de tous les Algériens de Tunis.

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