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Installer la vie, après la mort

Explorations en bioart et biodesign [portfolio]
Perig Pitrou
p. 188-205

Résumés

Ce portfolio propose une sélection d’images montrant comment les questions liées à la vie après la mort peuvent être abordées dans les domaines du bioart et du biodesign. Qu’il s’agisse d’utiliser des biomatériaux humains, de mettre en œuvre l’activité d’algues ou de champignons, ou encore de s’appuyer sur les possibilités ouvertes par la biologie de synthèse, ces projets mobilisent les ressources de l’art et de la science pour réfléchir aux frontières entre vivant et non-vivant et explorer les potentiels de transformation, d’hybridation et d’évolution des organismes et des environnements.

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Texte intégral

1À l’instar de processus tels que la croissance, la reproduction ou la régénération, la sénescence et la mort sont des processus vitaux qui retiennent l’attention des humains depuis longtemps. Le fait que les parties composant un organisme tendent à se désassembler lorsqu’il meurt n’empêche pas certaines sociétés de considérer que des éléments – matériels ou spirituels – demeurent vivants, de sorte qu’après la disparition d’un être, l’existence de celui-ci est parfois réputée se prolonger sous une autre apparence : des continuités souterraines permettraient ainsi aux êtres de se transformer, de se renouveler et même de renaître après avoir disparu. La répétition des cycles agricoles tout autant que la stabilité des formes des espèces animales, qui se maintiennent génération après génération, ont certainement favorisé ce type de raisonnement.

2Le développement de telles idées dépend aussi de dispositifs intellectuels et techniques que les humains élaborent pour exercer une action sur les êtres vivants, que ce soit dans des activités productives telles que l’agriculture ou l’élevage, ou lors de rites liés au cycle de vie. Dans les pratiques mortuaires en particulier, de nombreuses techniques ont été inventées pour accompagner la dissolution des corps en prélevant des éléments (os, peau, etc.), ceci afin de les conserver – dans des urnes, des tombes, des édifices – ou de les réinsérer dans de nouveaux cycles naturels : c’est notamment le cas lorsque des cendres funéraires sont versées dans un fleuve ou que des cadavres sont laissés pour être consommés par des animaux. Par cette imbrication entre processus vitaux et processus techniques, des individus – ou ce qu’il reste d’eux – peuvent prolonger leur existence en étant associés, plus ou moins temporairement, à des artefacts ou à d’autres êtres vivants : ils continuent grâce à eux à être présents malgré leur absence, voire renaissent sous de nouvelles formes.

  • 1 Voir Perig Pitrou, « Life as a process of making in the Mixe Highlands (Oaxaca, Mexico): towards a (...)

3La diversité des actions que les humains exercent sur les êtres vivants constitue donc un matériau très riche pour analyser la variation, dans l’espace et dans le temps, des conceptions de la vie telles qu’elles se manifestent chez les individus et dans les cycles naturels que ces derniers intègrent. C’est la raison pour laquelle, dans le cadre d’un projet d’anthropologie de la vie, j’ai suggéré qu’il était pertinent d’étudier les processus vitaux en décrivant les « configurations agentives » au sein desquels ils apparaissent1. Ces processus, que les humains observent dans leur corps ou dans la nature, sont toujours objectivés grâce à des techniques : il est donc crucial de les décrire en mettant en évidence l’agentivité propre aux êtres vivants tout autant que les catégories d’action mobilisées pour exercer une influence sur eux. Cette méthode analytique présente l’avantage d’aborder des ordres de faits variés : outre les enquêtes sur les pratiques anciennes (élevage, agriculture, médecine traditionnelle, etc.), l’anthropologie de la vie gagne à s’interroger sur les reconfigurations que les biotechnologies contemporaines (biologie de synthèse, médecine régénérative, procréation médicalement assistée, etc.) produisent dans la manière de penser le vivant. Un tel projet comparatiste doit donc intégrer des enquêtes menées dans des sociétés très diverses – occidentales et non-occidentales, traditionnelles et modernes –, afin d’envisager dans une perspective globale la multiplicité des conceptions élaborées par les humains.

  • 2 Voir Anthony Dunne & Fiona Raby, Speculative Everything: Design, Fiction, and Social Dreaming, Cam (...)
  • 3 Voir Eduardo Kac, Signs of Life: Bio Art and Beyond, Cambridge, MIT Press, 2007 ; Beatriz Da Costa (...)

4Dans cette perspective, il est instructif d’explorer des domaines tels que le bioart ou le biodesign, où des créateurs mobilisent tant les ressources de la poésie que celles de la science pour réfléchir à la plasticité propre aux êtres vivants. Schématiquement, le biodesign – y compris le speculative design – se caractérise par une préoccupation pour les fonctions qu’un objet peut, ou pourrait, remplir2. En revanche, même si les œuvres du bioart peuvent s’inscrire dans une réflexion sociale, philosophique ou éthique, elles sont avant tout des produits de l’imagination qui ne demandent pas nécessairement à être évalués selon des critères utilitaires3. Quoi qu’il en soit de cette distinction – parfois peu aisée à faire dans certains cas –, il est remarquable que, depuis une trentaine d’années, ces deux domaines sont en plein développement : d’ailleurs les œuvres afférentes, dans lesquelles des créateurs proposent d’utiliser la culture cellulaire, la programmation génétique ou l’iPS (Induced pluripotent stem cells), sont désormais exposées dans les plus grands musées du monde – preuve que ces expérimentations font écho aux questionnements contemporains sur les biotechnologies. Qu’il s’agisse d’utiliser des cellules ou des biomatériaux humains, de mettre en œuvre l’activité d’algues, de plantes, de champignons – pour ne prendre que quelques exemples – ou encore de s’appuyer sur les possibilités ouvertes par la biologie de synthèse, l’enjeu est de réfléchir aux frontières entre vivant et non-vivant et d’explorer les potentiels de transformation, d’hybridation et d’évolution des organismes et des environnements. Ce faisant, ce sont également les pouvoirs de décomposition et de recomposition – tant des éléments biologiques que des éléments expressifs comme la narration, la photographie, le dessin, la vidéo – que les créateurs mobilisent pour explorer la multiplicité des formes de la vie, y compris lorsqu’elle se prolonge au-delà de la mort.

5Les œuvres réunies dans ce portfolio ont ainsi pour point commun de réfléchir à des scénarios construits autour de l’idée d’un renouveau survenant après la disparition. Dans Bodies of Change, Maurizio Montalti élabore un projet qui associerait le processus technique de fabrication d’un linceul à l’activité de champignons participant au processus de décomposition d’un corps. Il s’agit ici, d’une part, de recueillir et neutraliser les éléments toxiques contenus dans l’organisme et, d’autre part, de redistribuer les nutriments récoltés dans le corps au sein d’un environnement où existent d’autres formes vivantes. Une telle installation n’est pas sans évoquer le cycle ininterrompu de disparition et de renouveau à l’œuvre dans la nature. Dans Afterlife, les designers James Auger & Jimmy Loizeau suivent une logique similaire en concevant un cercueil qui conserve les fluides corporels en état de décomposition : l’objectif est de stocker de l’énergie dans une pile susceptible d’être elle-même utilisée pour activer de nouveaux dispositifs techniques. Même si le processus de décomposition et de transformation ne s’obtient plus par la médiation d’un autre être vivant, ici encore l’intention est de montrer comment une personne continue à faire partie du monde des vivants après sa mort. Il n’est d’ailleurs pas nécessaire d’attendre la fin de l’existence pour qu’un individu fasse l’expérience du renouveau et de la renaissance : c’est ce que raconte Immersion, « l’installation-vivante » de Lia Giraud et Alexis de Raphélis, qui crée une symbiose entre une vidéo consacrée aux « Disparus » – phénomène japonais conduisant des milliers de personnes à abandonner leur vie sociale sans laisser de trace – et un dispositif maintenant en vie des algues dans un aquarium. À travers le « devenir-algue » d’un homme, c’est non seulement la plasticité de la vie humaine qui est suggérée, mais aussi le pouvoir que chacun conserve d’agir sur son existence.

6Toutefois, l’action des humains sur la vie et la mort ne saurait se limiter aux seuls problèmes soulevés par les vicissitudes de l’identité personnelle humaine : elle comporte en effet une dimension écologique grandissante, à mesure que l’entrée dans l’Anthropocène se confirme. Les inquiétudes générées par les conséquences désastreuses de l’industrialisation sur l’environnement conduisent ainsi Alexandra Daisy Ginsberg à imaginer Designing for the Sixth Extinction. Son projet, encore spéculatif, donne à voir l’aide que pourrait apporter la biologie de synthèse à la création de nouvelles formes vivantes, hybrides entre des êtres naturels et des artefacts, et programmées pour intervenir de manière bénéfique sur les écosystèmes. Dans son étrange bestiaire postnaturaliste, des organismes qui semblent sortir tout droit des schistes de Burgess se révèlent en réalité être des sortes de machines : ces « unités mobiles de bioremédiation » ou ces « disperseurs de graines » participent ainsi au bon fonctionnement des cycles naturels.

7À travers ces quelques exemples, on découvre comment l’activité de l’art et du design redouble et réarticule l’entreprise de la science et des techniques, pour faire émerger de nouveaux régimes de signification : les scénarios inventés permettent d’imaginer la diversité des cycles individuels et écologiques, où s’observent diverses modalités d’imbrication entre vie et mort ou entre êtres vivants et artefacts.

Continuous Bodies. Bodies of Change, Maurizio Montalti, 2010.

Site web : www.corpuscoli.com/projects/bodies-of-change/

  • 4 Liens tous valides en juillet 2016. Les présentations des projets sont issues des descriptions dre (...)

Présentation vidéo4 : vimeo.com/15707338

8La mort et la désintégration physiques sont des processus naturels sans lesquels aucune vie nouvelle ne pourrait exister. Pourtant, la tradition existentialiste se concentre sur la manière dont les humains donnent un sens à leur vie à l’ombre de la mort. Afin de remettre en question cette vision, Bodies of Change s’engage dans une exploration du monde des champignons et de leur importance fondamentale dans l’environnement, tant pour la décomposition et la transformation des substrats organiques que pour le recyclage des éléments qu’ils produisent → Fig. 1.

→ Fig. 1. Shroud side, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.

→ Fig. 1. Shroud side, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.

Le suaire vu de profil.

© OFFICINA CORPUSCOLI, MAURIZIO MONTALTI.

9Ce projet de design, composé d’un suaire de feutre fait à la main et inoculé avec du mycélium fongique de l’espèce Schizophyllum commune, apparaît comme un défi direct à l’attitude générale de déni que la plupart des pratiques funéraires traditionnelles ont tendance à renforcer – en plus de nuire à l’environnement et de gaspiller de l’énergie → Fig. 2.

→ Fig. 2. Schizophyllum commune, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.

→ Fig. 2. Schizophyllum commune, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.

© OFFICINA CORPUSCOLI, MAURIZIO MONTALTI.

10L’action du suaire contribue à favoriser le processus de décomposition du corps, tout en recueillant et en neutralisant les éléments toxiques stockés dans l’organisme → Fig. 3. Par la même occasion, sont distribués aux formes de vie environnantes les différents nutriments récoltés à partir du corps. À travers ce processus, Bodies of Change vise à explorer et à démystifier les sentiments de déni et d’anxiété liés à l’acceptation de la perte de l’être aimé, en déplaçant le processus de décomposition des restes humains vers le niveau plus naturel d’une reconnexion écologique, et cyclique, avec notre environnement en évolution.

→ Fig. 3. Shroud fungal growth, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.

→ Fig. 3. Shroud fungal growth, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.

Croissance du champignon sur le suaire.

© OFFICINA CORPUSCOLI, MAURIZIO MONTALTI.

Afterlife, James Auger & Jimmy Loizeau, 2009.

Site web : www.auger-loizeau.com/index.php?id=9

Présentation vidéo : vimeo.com/7140669

11Grâce à l’élaboration et la diffusion d’objets spéculatifs et critiques, J. Auger & J. Loizeau cherchent à initier une réflexion élargie sur ce qu’exister signifie aujourd’hui, et dans un avenir proche, au sein d’un environnement riche en technologie. Avec cette idée à l’esprit, Afterlife offre, par le biais d’un dispositif technologique, un service pour fournir une expression tangible de la vie après la mort → Fig. 4.

→ Fig. 4. Afterlife coffin, dispositif Afterlife, 2009.

→ Fig. 4. Afterlife coffin, dispositif Afterlife, 2009.

© AUGER-LOIZEAU.

12En des circonstances normales, après la mort biologique, les éléments du corps humain sont assimilés dans un système naturel. Afterlife intervient au cœur de ce processus pour exploiter leur potentiel chimique et le convertir en énergie électrique utilisable via une pile à combustible microbienne, dont l’énergie est ensuite redirigée vers une pile sèche. Un tel dispositif utilise une réaction électrochimique pour produire de l’électricité à partir de la matière organique : ici, la technologie agit pour fournir une preuve concluante de la vie après la mort, la vie étant contenue dans la pile → Fig. 5.

→ Fig. 5. Afterlife battery, dispositif Afterlife, 2009.

→ Fig. 5. Afterlife battery, dispositif Afterlife, 2009.

© AUGER-LOIZEAU.

13La phase II de ce projet a eu lieu en 2009. Il a été demandé à quinze personnes ce qu’elles feraient avec une Afterlife battery chargée par eux-mêmes ou par leur partenaire / famille → Fig. 6. L’une d’elles raconte :

« Ma famille et mes amis sont debout sur la plage de Saint-Pierre, Locmariaquer, en Bretagne.
Le soleil vient de se lever pour faire apparaître un ciel bleu sans nuage et il n’y a pas un souffle de vent.
Mon fils Pépin remplit le ballon rouge avec de l’hélium et l’attache avec la fixation de la caméra. Il branche mon
Afterlife battery de 9 V et il vérifie le signal sans fil. Ma fille Lily relie le récepteur à l’enregistreur et veille à ce que la caméra envoie une image claire.
Elle appuie sur la touche d’enregistrement.
Pépin lâche le ballon.
Mon dernier voyage... le ballon s’élève, filmant l’image mobile de mes proches qui me disent au revoir. À la fin, le signal s’interrompt et l’écran devient neigeux. »
James Auger

→ Fig. 6. Pile connectée au ballon et à la caméra.

→ Fig. 6. Pile connectée au ballon et à la caméra.

© AUGER-LOIZEAU / PHOTO © B. COULON.

Immersion, installation audiovisuelle vivante, Lia Giraud & Alexis de Raphélis, en collaboration avec Benoît Verjat, 2014.

Site web : liagiraud.com/experiences/immersion/

Présentation vidéo : vimeo.com/107136715

14Tel un laboratoire dans lequel le spectateur peut entrer, Immersion est un dispositif autonome qui évolue grâce à des échanges de flux, de captations et de régulations, pour permettre la formation d’une image vivante. Cette image vivante, constituée de microalgues, interagit en temps réel avec la projection d’un film retraçant l’existence d’Hidetoshi, un homme dont le destin le mènera à « devenir algue » → Fig. 7.

→ Fig. 7. Installation Immersion, 2014.

→ Fig. 7. Installation Immersion, 2014.

Un écran et un aquarium connectés.

© LIA GIRAUD ET ALEXIS DE RAPHÉLIS.

15La quarantaine passée, endetté et victime de sa routine, Hidetoshi découvre un soir une mystérieuse publicité dans sa boîte aux lettres : « On vous aide à disparaître. On s’occupe de tout. 100 % de réussite ». Mais « disparaître », c’est aussi obéir au rituel du volcan avant de redémarrer une nouvelle vie. Au sommet, une véritable révélation le mènera peu à peu vers son devenir le plus profond, son « devenir-algue » → Fig. 8.

→ Fig. 8. Devenir algue, installation Immersion, 2014.

→ Fig. 8. Devenir algue, installation Immersion, 2014.

© LIA GIRAUD ET ALEXIS DE RAPHÉLIS.

16L’image vivante et la projection se rencontrent dans un même espace-temps. Une interface permet leur symbiose : elle capture en temps réel la formation de l’image vivante, réveille les organes du Temporium ou ajuste la durée des plans du film en réponse au mouvement des microalgues. Un aller-retour permanent s’opère, faisant de chaque séance une expérience unique où se font écho la forme du nageur en train de disparaître et celle de l’algue → Fig. 9.

→ Fig. 9. Aquarium, installation Immersion, 2014.

→ Fig. 9. Aquarium, installation Immersion, 2014.

Algues en mouvement.

© LIA GIRAUD ET ALEXIS DE RAPHÉLIS.

Crédits : // Temporium // Réalisation : Lia Giraud / Ingénierie : Oulfa Chellai, Aubrey Clausse, Arnaud Gloaguen, Claude Perdigou, Edgar Servera / Conseils scientifiques : Claude Yéprémian, Arnaud Catherine / Aide au design : Adrien Bonnerot // Interfaçage // Benoît Verjat et Denys Lamotte // Film // Réalisation : Alexis de Raphélis / Acteurs : Kohshou Nanami, Carmen Sinatra, Takeharu Tanaka, Daisuke Sekiguchi, Angelo Patti (voix du barman), Andrea Pennisi / Chef opérateur : Ludivine Large-Bessette / Renfort tournage : Corradino Spata, Andrea Pennisi, Alexis Bacci-Leveillé / Costumes : Marthe Dumas / Montage image : Juliette Alexandre / Ingénieur du son : Rémi Galibert / Recorder : Raphaël Hénard / Montage & mixage son : Raphaël Hénard / Étalonnage : Raphaël Vandenbussche // Production : Paris Sciences et Lettres, EnsadLab, le Fresnoy, Fondation Vevey ville d’images, Muséum national d’histoire naturelle, Supéléc.

Designing for the Sixth Extinction, Alexandra Daisy Ginsberg, 2013.

Site web : www.daisyginsberg.com/work/designing-for-the-sixth-extinction

17Designing for the Sixth Extinction explore l’impact potentiel de la biologie de synthèse sur la biodiversité et la conservation. Dans ce projet d’avenir, de nouvelles espèces « de compagnie », conçues par les scientifiques travaillant en biologie de synthèse, apportent leur aide à des espèces et à des écosystèmes naturels menacés. Modelées sur des champignons, des bactéries, des invertébrés et des mammifères, ces espèces inventées sont des machines écologiques qui remplissent le vide laissé par les organismes disparus ou offrent une nouvelle protection contre les maladies, la pollution ou les espèces envahissantes les plus nocives → Fig. 10.

→ Fig. 10. Installation Designing for the Sixth Extinction au Stedelijk Museum, Amsterdam, 2015.

→ Fig. 10. Installation Designing for the Sixth Extinction au Stedelijk Museum, Amsterdam, 2015.

© ALEXANDRA DAISY GINSBERG / PHOTO © GERT JAN VAN ROOIJ.

18Parce qu’elle est construite avec un code ADN élargi produisant des protéines non-biodégradables, la biodiversité synthétique est résistante face à des prédateurs sauvages qui n’ont pas encore évolué pour les manger et les digérer. Leur intervention dans des écosystèmes fermés est le résultat de décennies de négociations et de compromis politiques autour des problèmes de biosécurité que soulève la libération d’êtres artificiels → Fig. 11.

→ Fig. 11. Rewilding with Synthetic Biology, installation Designing for the Sixth Extinction, 2013-2015.

→ Fig. 11. Rewilding with Synthetic Biology, installation Designing for the Sixth Extinction, 2013-2015.

« Ré-ensauvager » avec la biologie de synthèse.

© ALEXANDRA DAISY GINSBERG.

19Le dispositif est une unité de biorestauration des sols qui neutralise les niveaux d’acide élevés du sol causés par la pollution. Le châssis est conçu pour remuer la terre lors de ses déplacements. Les ouvertures sur sa surface inférieure dispersent un fluide hygroscopique alcalin. Les capteurs de pH distribués sur la surface supérieure sont reliés à un déploiement de nœuds qui passent du jaune au rouge dans les zones où le pH est acide. Conçu avec deux bases supplémentaires dans son ADN, cet être artificiel n’est pas digestible par la biodiversité naturelle afin d’empêcher le transfert horizontal de gènes et de promouvoir la biosécurité → Fig. 12.

→ Fig. 12. Mobile Bioremediating Unit, installation Designing for the Sixth Extinction, 2013-2015.

→ Fig. 12. Mobile Bioremediating Unit, installation Designing for the Sixth Extinction, 2013-2015.

Organisme synthétique de biorestauration des sols.

© ALEXANDRA DAISY GINSBERG.

20Le statut taxonomique de ces organismes n’ayant d’autres but que celui d’en sauver d’autres demeure incertain. Sont-ils même « vivants » ? Si la nature est totalement industrialisée pour le bénéfice de la société – ce qui pour certains est l’aboutissement logique de la biologie de synthèse –, la nature existera-t-elle encore pour nous comme une entité à sauver ?

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Notes

1 Voir Perig Pitrou, « Life as a process of making in the Mixe Highlands (Oaxaca, Mexico): towards a ‘general pragmatics’ of life », Journal of the Royal Anthropological Institute no 21/1, p. 86-105 ; Perig Pitrou, Ludovic Coupaye & Fabien Provost (éd.), Des êtres vivants et des artefacts. L’imbrication des processus vitaux et des processus techniques, Paris, Les actes de colloque du musée du quai Branly, 2016 (disponible en ligne, actesbranly.revues.org/647, lien valide en juillet 2016).

2 Voir Anthony Dunne & Fiona Raby, Speculative Everything: Design, Fiction, and Social Dreaming, Cambridge, MIT Press, 2013 ; Alexandra Daisy Ginsberg, Synthetic Aesthetics: Investigating Synthetic Biology’s Designs on Nature, Cambridge, MIT Press, 2014.

3 Voir Eduardo Kac, Signs of Life: Bio Art and Beyond, Cambridge, MIT Press, 2007 ; Beatriz Da Costa & Kavita Philip, Tactical biopolitics: Art, Activism, and Technoscience, Leonardo, Cambridge, MIT Press, 2008 ; Annick Bureaud, Roger Malina & Louise Whiteley (éd.), Meta-Life: Biotechnologies, Synthetic Biology, A-Life and the Arts, Cambridge, Leonardo / ISAST / MIT Press, 2014.

4 Liens tous valides en juillet 2016. Les présentations des projets sont issues des descriptions dressées par les artistes sur leur site Internet (pour Continuous Bodies. Bodies of change, Afterlife et Designing for the Sixth Extinction, nous traduisons).

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Table des illustrations

Titre → Fig. 1. Shroud side, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.
Légende Le suaire vu de profil.
Crédits © OFFICINA CORPUSCOLI, MAURIZIO MONTALTI.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 3,6M
Titre → Fig. 2. Schizophyllum commune, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.
Crédits © OFFICINA CORPUSCOLI, MAURIZIO MONTALTI.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 3,8M
Titre → Fig. 3. Shroud fungal growth, série Continuous Bodies. Bodies of change, 2010.
Légende Croissance du champignon sur le suaire.
Crédits © OFFICINA CORPUSCOLI, MAURIZIO MONTALTI.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 3,5M
Titre → Fig. 4. Afterlife coffin, dispositif Afterlife, 2009.
Crédits © AUGER-LOIZEAU.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 278k
Titre → Fig. 5. Afterlife battery, dispositif Afterlife, 2009.
Crédits © AUGER-LOIZEAU.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 1,0M
Titre → Fig. 6. Pile connectée au ballon et à la caméra.
Crédits © AUGER-LOIZEAU / PHOTO © B. COULON.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 258k
Titre → Fig. 7. Installation Immersion, 2014.
Légende Un écran et un aquarium connectés.
Crédits © LIA GIRAUD ET ALEXIS DE RAPHÉLIS.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 1,3M
Titre → Fig. 8. Devenir algue, installation Immersion, 2014.
Crédits © LIA GIRAUD ET ALEXIS DE RAPHÉLIS.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 252k
Titre → Fig. 9. Aquarium, installation Immersion, 2014.
Légende Algues en mouvement.
Crédits © LIA GIRAUD ET ALEXIS DE RAPHÉLIS.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 577k
Titre → Fig. 10. Installation Designing for the Sixth Extinction au Stedelijk Museum, Amsterdam, 2015.
Crédits © ALEXANDRA DAISY GINSBERG / PHOTO © GERT JAN VAN ROOIJ.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 801k
Titre → Fig. 11. Rewilding with Synthetic Biology, installation Designing for the Sixth Extinction, 2013-2015.
Légende « Ré-ensauvager » avec la biologie de synthèse.
Crédits © ALEXANDRA DAISY GINSBERG.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-11.jpg
Fichier image/jpeg, 4,6M
Titre → Fig. 12. Mobile Bioremediating Unit, installation Designing for the Sixth Extinction, 2013-2015.
Légende Organisme synthétique de biorestauration des sols.
Crédits © ALEXANDRA DAISY GINSBERG.
URL http://terrain.revues.org/docannexe/image/16077/img-12.jpg
Fichier image/jpeg, 4,5M
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Pour citer cet article

Référence papier

Perig Pitrou, « Installer la vie, après la mort », Terrain, 66 | 2016, 188-205.

Référence électronique

Perig Pitrou, « Installer la vie, après la mort », Terrain [En ligne], 66 | octobre 2016, mis en ligne le 15 décembre 2016, consulté le 24 avril 2017. URL : http://terrain.revues.org/16077 ; DOI : 10.4000/terrain.16077

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Auteur

Perig Pitrou

CNRS, Laboratoire d’anthropologie sociale

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