Les produits achetés en France sont de moins en moins fabriqués sur le territoire national et 600000 emplois industriels ont été perdus en dix ans. Selon l'Observatoire du fabriqué en France, lancé le 31 août dans la foulée des états généraux de l'industrie, 64% des produits achetés en 2009 auraient été conçus dans l'Hexagone, soit trois points de moins qu'en 1999.
Ce taux reste élevé, mais masque des chutes plus sévères dans certaines filières comme au sein des industries de biens de consommation (de 58% à 45% en dix ans) ou de la santé (de 59% à 34%).
Un nouveau label
La stratégie du made in France se heurte à un obstacle : pour le consommateur, il est difficile d'acheter français car l'origine des produits est complexe à déterminer. Des melons charentais qui arrivent du Maroc aux couteaux Laguiole fabriqués en Chine, les pièges sont nombreux. L'usage permet d'estampiller made in France toute marchandise dont au moins 45% de la valeur ajoutée y est produite. Si bien que le simple coût de la main- d'œuvre suffit bien souvent à obtenir la précieuse mention, quelle que soit l'origine des pièces assemblées. Or, dans l'ensemble des dix filières stratégiques étudiées par le nouvel observatoire, la valeur de la production revenant à des acteurs strictement français a reculé de 75% à 69% entre 1999 et 2009. D'où l'idée, défendue par le gouvernement, d'un nouveau label à trois étoiles fournissant davantage d'informations sur la provenance des composants.
Certains restent optimistes. Henri Sterdiniack, directeur du département économie et mondialisation à l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), parie sur « des relocalisations dans les vingt à trente ans », en raison de la hausse des coûts du transport notamment. « D'ici là, il ne faut pas avoir perdu notre savoir-faire, ni notre base industrielle, prévient-il. La solution est de favoriser la montée en gamme des produits grâce au crédit impôt recherche ou aux pôles de compétitivité. »
Mais l'idée se heurte à plusieurs écueils. Dans une note datée du 30 mars 2010, Patrick Artus, directeur des études de la banque Natixis, constate qu'aucun pays occidental n'a vu la part des produits haut de gamme dans ses exportations augmenter depuis dix ans. Le seul à afficher une nette montée en gamme de ses exportations est… la Chine. « Le problème, concède Henri Sterdiniack, est que ce type de marché, plus restreint, fait travailler moins de monde. » Autrement dit : lutter contre le recul du made in France ne garantit pas la préservation de l'emploi.