Terrain welcomes contributions in English

call-for-papers

In Autumn 2015, Terrain, for so long a central figure of the French anthropological and academic landscape, bowed out with a final issue dedicated to the theme of nostalgia. Today, it is reborn with new partners and a new editorial team.

Terrain retains its tried and tested formula: a handsome paper edition, illustrated special issues, clear and accessible writing, an emphasis on ethnography, and a cross-disciplinary perspective. But Terrain is also moving forwards. Our new website will be up and running by Autumn 2016, proposing a range of themed online sections, with an ongoing bilingual submission and publication process:

# Sidelines

What are the ethnographic underpinnings of works of (literary or cinematic) fiction? Authors are invited to reflect on the novels, films, plays, etc. that draw on themes or are set in places with which they are intimately familiar.

Section editors: Christine Langlois and Anne-Christine Taylor Article length: 30,000 characters

# Fieldsites

Articles based on case-studies or situational analyses, accompanied by images or sound-files, which address relevant theoretical questions by mean of the ethnographic material. Submissions are welcome from across the human and social sciences (history, sociology, philosophy, geography, anthropology, psychology, linguistic anthropology).

Section editors: Sandrine Revet and Anne-Christine Trémon Article length: 30-50,000 characters

# Queries

Does music play a part in the civilising process? Do rumours kill? Do hunter-gatherers live in the Stone Age? Can we all become shamans? This section engages with received wisdom, nagging doubts, counter- intuitive notions, and popular prejudices reformulated as straightforward questions. Articles will offer a state of the art, outline the relevant issues and propose a scholarly walkthrough of their traps and pitfalls. They are intended for use in teaching contexts and may be accompanied by diagrams, audiovisual material or interactive animations.

Section editors: Emma Gobin and Victor A. Stoichita Article length: 20,000 characters

# Portraits

This section proposes profiles of people who have contributed to the diversity of the human and social sciences, be they unjustly neglected anthropologists, historians, or linguists; privileged interlocutors, missionaries or diarists; lost figures from the age of exploration or unheralded documentary filmmakers or photographers. We welcome submissions in a range of formats: interviews, personal narratives, video, photography, literary analysis, etc.

Section editors: Gil Bartholeyns, Matthew Carey and Jessica De Largy Healy Article length: 25-50,000 characters

# Symposia and Debates

This section offers a forum for bringing together a range of views on a topic, article or book with a view to developing or stimulating critical debate.
It welcomes opinions from anthropology as well as other related disciplines.

Section editor: Arnaud Esquerre

Submission and evaluation

Articles are to be submitted to terrain.redaction@cnrs.fr. They will be subject to peer review, with two internal and two external reviewers. The anonymity of both authors and reviewers will be guarded. Authors will receive a reply within two months, with the goal of publication within six months. The character count includes the bibliography, which should be kept to the strict minimum. We particularly welcome submissions that integrate audiovisual and other non-textual material into the argument and description Authors are expected to have secured permission for use of any copyrighted material. Feel free to contact the editors with any queries.

Please download and circulate this call as widely as possible : call-for-papers_terrain

 

Renaître : le nouveau Terrain est arrivé !

Il semble désormais que naître ne suffise plus, qu’il faille renaître de manière répétée, comme si à la vieille quête de l’immortalité avait succédé celle d’un sentiment perpétuel de nouveau départ. Cette obsession se traduit par un marché du rebirth, des différentes chapelles de la ritualité New Age, de la thérapie ou du développement personnel à l’extraordinaire succès des églises évangéliques proposant, aux quatre coins du globe, de devenir born again. Ce nouveau numéro de Terrain s’interroge sur le désir contemporain de renaître à la lumière de ses avatars passés et présents, de l’initiation à la réincarnation, en passant par le spiritisme ou la résurrection.

Disponible en librairie à partir du 18 octobre ou sur le site du comptoir des presses d’université :

http://www.lcdpu.fr/livre/?GCOI=27000100937630

 

Terrain revient !

Boomerang

Appel à contributions
À l’automne 2015, à l’occasion d’un dernier numéro consacré à la nostalgie, la revue Terrain disait adieu à ses lecteurs.
Aujourd’hui, portée par une équipe renouvelée et grâce au concours de nouveaux partenaires, elle renaît.
Terrain reste fidèle à ce qui a fait son succès : une belle revue papier, des dossiers thématiques illustrés, une langue claire et accessible, le primat accordé à l’ethnographie et enfin l’ouverture aux autres disciplines.
Mais Terrain évolue, avec un site internet repensé à découvrir à l’automne 2016. Les nouvelles rubriques attendent vos propositions d’articles pour des publications au fil de l’eau :

Terrains
Études inédites de cas ou de situation, enrichies par l’image ou le son, amenant le lecteur à découvrir par l’empirie l’importance des questions théoriques convoquées. Toutes disciplines des sciences humaines confondues (histoire, sociologie, philosophie, géographie, anthropologie, psychologie, anthropologie linguistique).
Responsables : Sandrine Revet et Anne-Christine Trémon
30 000 à 50 000 signes

Questions
La musique adoucit‑elle les mœurs ? La rumeur tue-t-elle ? Les chasseurs-cueilleurs vivent‑ils à l’âge de pierre ? Peut‑on tous devenir chamanes ? Idée reçues, fausses évidences, doutes fréquents ou notions contre-intuitives sont adressés, sous la forme d’une question simple, à un spécialiste qui en déjoue les pièges, dresse l’état de l’art et présente ses enjeux actuels.
À l’attention spéciale des étudiants et des enseignants, ces articles seront accompagnés de schémas, de documents audiovisuels ou d’animations interactives.
Responsables : Emma Gobin et Victor A. Stoichita
20 000 signes

Portraits
Ethnologue, historien ou linguiste célèbre mais peu lu, expérimentateur, interlocuteur de terrain privilégié, missionnaire graphomane, aventurier perdu, documentariste… Cette rubrique accueille les portraits de celles et ceux qui font ou ont fait les sciences humaines, sous des formats divers : entretien, récit personnel, vidéo, photographie, analyse de documents et d’œuvres.
Responsables : Gil Bartholeyns, Matthew Carey et Jessica de Largy Healy
25 000 à 50 000 signes

Écarts
Sur quelles ressources ethnographiques les œuvres de fiction (cinéma ou littérature) sont-elles construites ? Des spécialistes sont invités à commenter romans, polars, films, pièces de théâtre… portant sur des terrains ou des thèmes qui leur sont familiers.
Responsables : Christine Langlois et Anne-Christine Taylor
30 000 signes

Soumission & évaluation
Les propositions d’articles devront être envoyées à revue.terrain@gmail.com. Elles seront évaluées par des pairs : deux évaluateurs internes et deux évaluateurs externes. L’anonymat des auteurs et des évaluateurs sera préservé. Les auteurs recevront une réponse dans les deux mois, pour une publication dans les six mois après acceptation. Le nombre de signes indiqué ne comprend pas la bibliographie, qui devra se limiter aux références strictement nécessaires. Une attention spéciale sera portée aux contributions qui s’appuient sur les médias non textuels pour renouveler l’exercice de la description ou de l’argumentation.

Conseil de rédaction
Gil Bartholeyns (université Lille III), David Berliner (université Libre de Bruxelles), Matei Candea (université de Cambridge), Matthew Carey (université de Copenhague), Jérôme Courduriès (université de Toulouse 2/LISST-Cas), Pierre Déléage (CNRS/LAS), Pierre-Olivier Dittmar (EHESS/CRH), Emma Gobin (Paris VIII/LAVUE), Emmanuel Grimaud (CNRS/LESC), Christine Langlois (Ex rédactrice en chef de la revue Terrain), Jessica de Largy Healy (CREDO/musée du quai Branly), Olivier Morin (Max Plank Institute, Minds and Traditions research group), Ismaël Moya (CNRS/LESC), Sandrine Revet (Sciences-Po/CERI), Victor A. Stoichita (CNRS/CREM), Anne-Christine Taylor (CNRS/EREA), Anne-Christine Trémon (université de Lausanne).

Vanessa Manceron et Emmanuel de Vienne
Rédacteurs en chef
© Illustration Adrià Fruitós
Merci de faire circuler cet appel à contributions le plus largement possible.

Glissements de Terrain

« Qu’on me pardonne le calembour : si l’on jette un coup d’oeil en arrière, les trente-deux années de Terrain se présentent comme une série de glissements heureux. Glissement originel du patrimoine vers l’ethnologie ; glissement de la France vers l’Europe, lorsqu’en 89 la revue fait sa révolution – début d’un long dérapage contrôlé qui l’emmènera sur tous les territoires de l’anthropologie. Glissements disciplinaires aussi, vers l’histoire surtout, également vers la psychologie ou l’éthologie. Autant de déplacements menés à contre-courant des spécialisations qu’aurait dictées la sagesse académique ou la discipline éditoriale. Ces trois décennies qu’on a pu voir comme des années de crise plus ou moins aiguë pour l’anthropologie, dans l’ombre des paradigmes déboulonnés,Terrain les a traversées sans se départir du désir de théoriser ses objets, de relier les terrains et les réflexions. » 

« Terrain qui disparaît, ce fut d’abord une rumeur à laquelle nul ne croyait vraiment. Une solution allait être trouvée. Puis on crut à un canular. (…) Face aux preuves, il faut donc se résigner à l’incroyable catastrophe (n° 54). Après un dernier éclat de rire (n° 61), l’évocation réconfortante de l’utilité des morts (n° 62), Terrain s’éteint en exigeant de ses derniers lecteurs un peu de nostalgie (n° 65). L’injonction n’était pas nécessaire. Fauchée à trente-deux ans en pleine gloire, la revue est un peu à l’édition anthropologique ce que Marilyn Monroe est au cinéma. Et l’on se console un peu de cette comparaison. » * in Terrain n°65.

Pour en savoir plus :
00_couv65seule-small260• Des articles
 :
« Glissements de Terrain », le conseil de rédaction et Dessins de Jean-Marc DumontTerrain n° 65, Nostalgie.
« Pourquoi la nostalgie ? » Olivia Angé et DavidBerlinerTerrain n°65, Nostalgie
« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se regrette. 
Photographies rétro et colorisation » GilBartholeyns, Terrain n°65, Nostalgie.
« Le goût d’autrefois. Pain au levain et attachements nostalgiques dans la société contemporaine » OliviaAngé, Terrain n°65, Nostalgie
« Un nom éternel qui jamais ne sera effacé. 
Nostalgie et langue chez les juifs d’Égypte en France » MichèleBaussant, Terrain n°65, Nostalgie
« Nostalgie cherche preneur. 
Les peintures d’Amatiwana Trumai »
 Sophie Moiroux et Emmanuel de Vienne, Terrain n°65, Nostalgie.
«
 
Nostalgies impérialiséesMémoires plurielles et contestations politiques en Angola du Nord » Ruy Llera Blanes et Abel Paxe, Terrain n°65, Nostalgie
«
 
La consolation des objets. Esthétique de la nostalgie dans l’oeuvre d’Orhan Pamuk », Patrizia Ciambelli et Claudine Vassas, Terrain n°65, Nostalgie.

Journée internationale de la musique

 » Au milieu des années 1960 naît un genre musical qui finira par être baptisé reggae. Il apparaît comme une création jamaïquaine moderne et urbaine, une invention de la jeunesse pauvre de la basse ville de Kingston. Il dit d’emblée, par sa seule émergence en tant que musique fondée sur une cellule rythmique inédite, l’existence sociale et la force de création d’un des groupes les plus dépréciés : les jeunes qui vivent dans ce qu’ils dénomment eux-mêmes le ghetto. Ils endurent de manière plus intense que leurs aînés le mépris du noir que l’esclavage et le colonialisme ont légué à la Jamaïque. Le reggae signifie le rejet de ce mépris, le refus de l’accepter plus longtemps : il montre que ces jeunes démunis peuvent créer et que leur création est suffisamment puissante pour être reconnue au-delà des mers ; dès lors, leurs musiciens porte-drapeau seront acceptés et reconnus en Jamaïque même. La musique charrie une émotion neuve où se fondent révolte et fierté : ce qui est noir ne peut plus être voué au mépris. »* Denis-Constant Martin in Terrain n°37. Dans des régions aussi différentes que la Jamaïque, le Cap-Vert, les Caraïbes, le Brésil ou le Zimbabwe, l’émergence d’un genre musical a permis de fédérer les communautés, de valoriser leur identité et de changer les rapports politiques et sociaux.

Pour en savoir plus :

• Un article :
*« « Chanter l’amour ». Musique, fierté et pouvoir » Denis-Constant Martin, Terrain n° 37, Musique et émotion (texte intégral).

Sites et Blogs :
Ethnographier les phénomènes sonores, le portail d’ethnomusicologie, blog reggae.

Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se regrette

« Non seulement le passé demande à être recherché, mais il demande encore à être complété. » Jankélévitch, 1974
« Consultons par milliers les photographies que le mot « nostalgia » ou « nostalgie » fait émerger de la masse vertigineuse d’images partagées sur des sites internet planétaires tels que Flickr. On y voit de tout, rien de particulier ne ressort, sauf peut-être une tendance au flou, aux tons pastels et au sujet solitaire (un arbre perdu au milieu du paysage, une silhouette qui marche sur une plage en hiver). Recommençons la même opération en ajoutant le nom d’une des nombreuses applications pour smartphone, Hipstamatic et Instagram en tête, qui proposent toutes sortes de filtres rétro imitant la photographie argentique amateur des années 1960-1980. Des milliers de clichés apparaissent à nouveau. Mais cette fois, deux registres d’images s’imposent : des images d’objets et des images de lieux ; plus précisément des objets du passé et des moments-paysages (à côté du portrait qui est une constante). Ce résultat montre assez bien ce que je voudrais explorer ici : ce type de photographie sert à fixer l’émotion nostalgique ressentie devant les choses, et les usagers donnent à cette forme esthétique le rôle de la provoquer visuellement. Ce qui est pris en photo et la texture ou le format sont rendus indissociables. Il n’y a plus d’un côté le sujet, qui se donne en toute transparence, et de l’autre un médium qui excelle à se faire oublier. Le réel ne peut pas être extrait de sa formulation visuelle. Ce qui a pour conséquence que l’image devient l’apparence d’une intériorité et l’acte photographique un moyen d’expression. » * Gil Bartholeyns in Terrain n°65,

Pour en savoir plus :
00_couv65seule-small260• Des articles
 :
« Pourquoi la nostalgie ? » Olivia Angé et DavidBerlinerTerrain n°65, Nostalgie
« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se regrette. 
Photographies rétro et colorisation » Gil Bartholeyns, Terrain n°65, Nostalgie.
• Sites et blogs
 :
tracephotographs, medium colorisation, reddit colorisation,

Nostalgie : le nouveau Terrain est arrivé !

« « Réaction contre l’irréversible »  (Jankélévitch), la nostalgie semble être indissociable de notre époque. En Occident, un engouement nostalgique glorifiant les pratiques et les objets d’antan est omniprésent dans des domaines aussi divers que le nationalisme, les politiques patrimoniales, le consumérisme, l’industrie du tourisme, la culture populaire et les mouvements religieux ou écologiques. Plus concrètement, cette rétromania se manifeste dans le succès croissant des marchés aux puces et des antiquités, des aliments biologiques, du vintage, des techniques d’accouchement dites « naturelles », des écomusées, et se retrouve au coeur même des nouvelles technologies, tel Instagram, qui confère instantanément à vos photos un cachet « passé » » Olivia Angé et David Berliner in Terrain n°65.

Pour en savoir plus :
00_couv65seule-small260• Des articles
 :
« Pourquoi la nostalgie ? » Olivia Angé et David BerlinerTerrain n°65, Nostalgie
« Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se regrette. 
Photographies rétro et colorisation » Gil Bartholeyns, Terrain n°65, Nostalgie.
« Le goût d’autrefois. Pain au levain et attachements nostalgiques dans la société contemporaine » Olivia Angé, Terrain n°65, Nostalgie
« Un nom éternel qui jamais ne sera effacé. 
Nostalgie et langue chez les juifs d’Égypte en France » Michèle Baussant, Terrain n°65, Nostalgie
« Nostalgie cherche preneur. 
Les peintures d’Amatiwana Trumai »
 Sophie Moiroux et Emmanuel de Vienne, Terrain n°65, Nostalgie.
«
 
Nostalgies impérialiséesMémoires plurielles et contestations politiques en Angola du Nord » Ruy Llera Blanes et Abel Paxe, Terrain n°65, Nostalgie
«
 
La consolation des objets. Esthétique de la nostalgie dans l’oeuvre d’Orhan Pamuk », Patrizia Ciambelli et Claudine Vassas, Terrain n°65, Nostalgie.

 

L’immigration aux frontières du patrimoine

En dépit du flou qui l’entoure, utiliser le terme de mémoire s’agissant de l’immigration semble aujourd’hui aller de soi. Qu’en est-il du patrimoine de l’immigration ? Le patrimoine apparaît-il quand la mémoire sort de l’espace privé pour entrer dans le domaine public ? Est-il une forme cristallisée et institutionnalisée de la mémoire ? Est-il soluble dans la mémoire ? Au-delà d’une indispensable clarification des termes, s’interroger sur l’articulation mémoire, patrimoine et immigration nécessite d’en comprendre les enjeux dans le débat public. La patrimonialisation ne peut être regardée indépendamment ni des attentes et des luttes pour la reconnaissance des immigrés, ni de son usage par les pouvoirs publics comme instrument de pacification.
Quels sont les acteurs et quelles sont les formes -observées et souhaitables- de la mémoire et du patrimoine de l’immigration en France, aujourd’hui ?

Pour en savoir plus :

couv immigration_patrimoineUn livre :
L’immigration aux frontières du patrimoine sous la direction de Noël Barbe & Marina Chauliac.

Sites et Blogs :
L’association les Oranges qui oeuvre à la reconnaissance de l’apport de l’immigration en France, Memorias : lieux de mémoire et d’histoirede l’immigration et de l’exil espagnol, l’association pour la sauvegarde du patrimoine culturel des juifs d’Egypte, la FACEEF : Fédération d’Associations et Centres d’Emigrés Espagnols en France,

• A faire :
Les Journées européennes du patrimoine, les 19 et 20 septembre 2015.

Vouloir devenir invisible

«  Dans un appartement de la banlieue de Melbourne, Bich, une jeune femme vietnamo-australienne d’une vingtaine d’années, se réveilla en entendant à la radio les nouvelles du drame. « Merde !, grommela-t-elle en replongeant la tête sous les draps, que c’est embarrassant ! ». En racontant ce moment, plusieurs mois après les faits, elle était encore choquée et légèrement déconcertée par sa réaction initiale – sans hésiter cependant à en faire part. Elle se souvient des sentiments qu’elle éprouva tandis qu’elle était sous le feu des actualités radiophoniques et de leurs commentaires consternants. Elle ne ressentit de tristesse ni pour les jeunes assassinés ni pour leur famille, elle ne ressentit que de la honte et de l’humiliation. « Je le ressentis physiquement », dit-elle, en évoquant sa fureur provoquée par le comportement de ces « imbéciles de garçons viets ». Elle se souvient de n’avoir eu qu’une seule pensée clairement formulée : « Quels imbéciles de cons stupides ! ». Tout en se préparant pour aller au travail, Bich devenait de plus en plus préoccupée et agitée en imaginant les gens qu’elle allait rencontrer et qui l’identifieraient comme étant une Vietnamienne. Il n’y avait pas moyen, se lamentait-elle, d’échapper à cette identité. Et ce jour-là, tout particulièrement, elle enrageait de n’être visible pour le monde extérieur qu’en tant que Vietnamienne. (…)
La promesse d’appartenance multiculturelle est-elle donc vide ? Peut-être cet attachement à  « faire partie » est-il fait d’ »optimisme cruel ». Les possibilités d’appartenance dans un espace multiculturel, hiérarchique et racial, basé sur une hiérarchie raciale dont le citoyen idéal demeure blanc – ni jaune ni noir –, sont compromises dès le départ. Les immigrants en Australie, ordonnés en fonction d’une hiérarchie légitimée par la race, deviennent socialement visibles à cause de leurs « différences », générant le désir chez certains de devenir invisibles. Quand ils parlent de leur désir d’invisibilité, ils plaident pour être vus différemment plutôt qu’être perçus comme différents. Pour ceux dont la différence est visible, pour qu’ils puissent être vus autrement, le regard du multiculturalisme doit être modifié. Quand la honte colle et fige sur place les corps, cet état exige soit de remplacer la personne, soit de transformer le monde qui produit ce corps empli de honte. »* Maree Pardy in Terrain n°63.

Pour en savoir plus :

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Attendre de faire partie. Des Vietnamiens-Australiens célèbrent la fête nationale : un avant-goût du sentiment d’appartenir pleinement à la société multiculturelle australienne.

• Un article :
*
« Honteux d’attendre. Vouloir devenir invisible (Australie) », Maree Pardy, Terrain n°63, Attendre.

• Sites et Blogs :
Regard critique sur le multiculturalisme australien, Multiculturalisme, l’Australie divisée.

Etre migrant irrégulier en France

« C’est la mort d’un ami, victime de la répression policière de son association étudiante, qui décide Mamadou Conté à quitter la Guinée. Après une étape au Maroc, il entre en France avec un passeport d’emprunt et découvre très vite la réalité de cette vie d’étranger en situation irrégulière puisqu’il est arrêté et placé en rétention quatre mois après son arrivée. Comme la grande majorité des personnes interpellées, il est libéré après cinq jours d’enfermement.

Je repars de moins que zéro : moins un. Je ne suis même pas encore arrivé à zéro. Parce que pour arriver à zéro, il faut au moins une situation, à partir de là chercher un boulot et chercher un logement. Mais là d’abord tu commences par chercher le point zéro […]. Toi t’es même pas au point de départ. Il faut arriver en situation régulière, où tu n’as pas peur d’être persécuté et tout ça, d’être raflé à longueur de journée alors que tu te promènes. Tu vois, c’est le quotidien que nous vivons. (Mamadou Conté, 27 mars 2011.)

Ne pouvant reprendre ses études interrompues en quatrième année, il assiste à quelques cours à l’université et enchaîne les petits boulots pour tenter de subvenir à ses besoins en attendant une régularisation qu’il espère prochaine. Passé le soulagement d’avoir réussi à entrer en France, la plupart de mes interlocuteurs, comme Mamadou Conté, parlent des premiers temps comme d’un « départ à zéro » où tout reste à faire. Trouver un logement, chercher un emploi et surtout apprendre à se débrouiller dans cette nouvelle vie…» Stefan Le Courant in Terrain n°63,

Pour en savoir plus :

Le Courant 5HDDes articles :
« Le temps dilaté, l’espace rétréci. Le quotidien des demandeurs d’asile », Carolina Kobelinsky, Terrain n°63, Attendre.
« Être le dernier jeune. Les temporalités contrariées des migrants irréguliers », Stefan Le Courant, Terrain n°63, Attendre.

• Sites et blogs : 
La demande d’asile en FranceFrance, terre d’asile, Les cada en FranceLe juge de la Cour nationale du droit d’asile et l’intime conviction, Un article « Immigration, asile » dans Libération.

Il ou Elle

« C’était après la naissance du petit [son fils]. Je suis allé voir un chirurgien pour qu’il m’enlève ce que j’avais en haut, parce que je ne les supportais plus. Et c’est là que pour la première fois j’ai entendu le mot transsexuel. Je ne savais pas ce que ça voulait dire. Il m’a demandé si j’étais transsexuel. Je lui ai dit : écoutez, je connais des amis homosexuels mais transsexuels, non, je ne sais pas ce que ça veut dire. Moi, ce que je savais, c’est qu’il y avait des hommes qui devenaient des femmes et qui se prostituaient. Voilà l’image que j’avais, c’est tout ! »* Camel, 43 ans, FTM**, transition achevée.

Dans les sociétés démocratiques contemporaines, les identités de genre sont devenues complexes. La mode porte l’androgynie aux nues, une député transgenre vient d’être élue en Pologne… « Nous sommes tous transsexuels », dit Jean Baudrillard (1987). Cela signifie-t-il qu’un homme ou une femme peut, du jour au lendemain, s’engager dans un parcours en vue d’effectuer une transition ? Sentir que l’on n’est pas ce à quoi son corps renvoie exige d’en avoir la certitude inébranlable. Comment les transsexuels en viennent-ils donc à se reconnaître du genre opposé et dans quelles circonstances ?

** FTM : abréviation de la terminologie anglo-saxonne signifiant female to male et qui désigne une femme biologique devenue un homme

Pour en savoir plus :

•Des articles :
*« D’un genre à l’autre. Identité refusée, identité abandonnée », Sébastien Sengenès, Terrain, n°42, Homme/Femme (texte intégral).
« Accords et désaccords », Claudine Vassas, Terrain, n°42, Homme/Femme (texte intégral).
« Constituer des hommes et des femmes : la procédure de transsexualisation », Laurence Hérault, Terrain, n°42, Homme/Femme (texte intégral).

•Sites et Blogs :
L’association nationale transgenre, le réseau Transgender Europe, des artistes s’intéressant à la transexualité : Cindy Sherman, Valérie Belin et Flore-Ael Surun, définition du transexualisme, droit des personnes transgenres

L’Inde aux deux visages

« D’abord nous assassinerons quelques Anglais et nous sèmerons la terreur… Nous nous engagerons dans une guérilla, et nous vaincrons les Anglais », ce à quoi Gandhi répond : « En d’autres termes, vous voulez profaner la terre sainte de l’Inde. Ne tremblez-vous pas à l’idée de libérer l’Inde en commettant des assassinats ? Ce que nous devons faire, c’est nous sacrifier. Qui voulez-vous libérer au moyen d’assassinats ? Les millions d’Indiens ne le souhaitent pas. Ce sont ceux qui sont intoxiqués par une misérable civilisation moderne qui pensent ainsi […] La véritable autonomie est la maîtrise ou le contrôle de soi-même. » Gandhi in Collected Works of Mahatma Ganghi.

« Ces dernières années, Gandhi a-t-il pris part à la vie sociale des masses populaires ? S’est-il assis la nuit au coin du feu avec un paysan pour tenter de savoir ce qu’il pense ? A-t-il passé juste un soir en compagnie d’un ouvrier d’usine ? Nous, nous l’avons fait, et pour cette raison nous déclarons savoir ce que pense le peuple. Nous assurons Gandhi que l’Indien moyen, tout comme l’être humain moyen, comprend très peu de choses aux finesses subtiles bien que logiques de l’ahimsa et du « il faut aimer ses ennemis ». Ainsi va le monde. Vous avez un ami, vous l’aimez, parfois tellement que vous vous faites tuer pour lui. Vous avez un ennemi, vous l’évitez, vous le combattez, et si possible vous le tuez. Le gospel des révolutionnaires est simple et franc ». Bhagat Singh in Manifeste socialiste républicain de l’Hindoustan.

A l’instar de leurs actions, l’imagerie de ces deux hommes révèle et véhicule une conception très différente de l’Inde : Gandhi le non-violent drapé dans un khadi et Baghat Singh, le révolutionnaire, homme en costume trois pièces.

Pour en savoir plus

•Des articles :
« L’Inde aux deux visages : Dalip Singh et le Mahatma Gandhi », Simeran Gell, Terrain n° 31, Un corps pur (texte intégral).

Attractions touristiques

« Dans la ville d’Hiroshima, il y a un vaste espace découvert appelé le parc de la Paix. On n’est pas étonné d’apprendre qu’il est situé à l’endroit où la première bombe atomique est tombée, en 1945. Non seulement il en marque l’emplacement mais il fut créé par la bombe elle-même. Seul un hall d’exposition endommagé est resté debout près de l’épicentre. Construit dans les années 1930, sa structure en béton armé l’a sauvé d’une totale destruction. Cet amas enchevêtré d’acier et de béton est le symbole fort d’un événement effroyable. Un nouvel édifice le jouxte ; musée et centre de conférences, il contient d’autres vestiges, des photographies et des témoignages contemporains. Ce site est visité chaque année par un grand nombre de touristes-pèlerins en provenance du monde entier et accueille les rassemblements pour la paix à l’initiative d’un large éventail de tendances politiques. Tout important symbole qu’il puisse être, ce hall d’exposition est un faux. Quand il a menacé de s’effondrer totalement – les éléments naturels ayant relayé le travail de la bombe –, la municipalité l’a fait reconstruire dans cet état de semi-ruine.[…] Quoi qu’il en soit, on ne peut pas se méprendre sur l’horreur qu’inspire le site d’Hiroshima. Quelques-uns des gardiens sont (ou furent) eux-mêmes des survivants de la bombe. Bien que le site ait pour centre un faux, il suscite des émotions profondes et authentiques. Il est ce que j’appelle ici un  » faux authentique « . » David Brown in Terrain n° 33.
Quelle est vraiment l’attraction pour les touristes et pour ceux qui la mettent en scène : les objets, généralement des « faux authentiques » ? Ou la relation entre les visiteurs et les guides, relation dont l’objet n’est que le médiateur ? Par quoi les touristes sont-ils attirés ? Par la recherche de « l’authentique » ? La découverte d’autres cultures et d’autres individus ? L’accès à un artisanat et à des traditions « locales » ? Mais que signifie cette pratique de masse pour les « locaux » ? La nécessité de conserver la tradition et le patrimoine au détriment de l’accès à la modernité ? La transformation des traditions en « show touristiques » pour se conformer à l’attente du touriste ?

Pour en savoir plus :

Le Dôme de Genbaku, Hiroshima.

Le Dôme de Genbaku, Hiroshima.

• Des articles :
« Des faux authentiques. Tourisme versus pèlerinage », David Brown, Terrain n° 33, Authentique ? (texte intégral).
« Perdre l’esprit du lieu. Les politiques de l’Unesco à Luang Prabang (rdp Lao) », David Berliner, Terrain n° 55, Transmettre.
« Paradis à vendre : tourisme et imitation en Polynésie-Française (1958-1971) »
, Daniel J. Sherman, Terrain n° 44,  Imitation et Anthropologie (texte intégral).

• Sites et Blogs :
L’organisation mondiale du tourisme

Apprentissages

 » Si l’on priait un esprit caustique de caractériser la conception longtemps dominante, dans les sciences humaines et sociales, du développement individuel, il s’amuserait peut-être à dire qu’elle est le produit d’une complicité objective, sinon d’une alliance conclue en bonne et due forme, entre l’anthropologie culturaliste et la psychologie behavioriste. La première affirme que les comportements humains sont entièrement gouvernés par la culture ; la seconde avançait que l’homme est infiniment malléable et grand ouvert à l’endoctrinement. C’est pourquoi, au sein de cette conception dominante, on oppose radicalement hérédité et environnement, nature et éducation, inné et acquis, biologie et culture ; c’est pourquoi également on manifeste une certaine détestation envers l’idée même de nature humaine, spontanément associée à celle de déterminisme biologique. En devenant doublement sapiens, l’homme aurait rompu ses amarres d’avec la nature ou, plus exactement, sa nature serait celle d’un être intégralement culturel, donc particularisable à merci. »* Gérard Lenclud in Terrain n°40.
L’enfant n’est-il qu’une page blanche ? La construction de la personnalité est-elle seulement socio-culturelle ? Peut-on envisager l’esprit humain initial autrement que comme un réceptacle vide, malléable et non organisé ? Quelle est la place de l’enfant lui-même dans l’apprentissage ? Tout ce qui est su est-il nécessairement enseigné ?

Pour en savoir plus :

• Des articles :
« Apprentissage culturel et nature humaine », Gérard Lenclud, Terrain n°40, Enfant et apprentissage (texte intégral). “
Pourquoi les enfants ont-ils des traditions?”
. Olivier Morin, Terrain n°55, Transmettre.
“Culture enfantine et règles de vie”. Jeux et enjeux de la cour récréation. Julie Delalande, Terrain n°40, Enfant et apprentissage (texte intégral). 
« L’acquisition du langage. Ce que l’enfant nous apprend sur l’homme »,
 Harriet Jisa, Terrain n° 40, Enfant et apprentissage (texte intégral). 
« Pourquoi les anthropologues n’aiment-ils pas les enfants ? »
, Lawrence A. Hirschfeld, Terrain n° 40, Enfant et apprentissage (texte intégral).
« Etre enfant à Rome. Le dur apprentissage de la vie civique »
Emmanuelle Valette-Cagnac, Terrain n° 40,Enfant et apprentissage (texte intégral). 
« Les dieux, les ancêtres et les enfants »
, Paul L. Harris, Terrain n° 40, Enfant et apprentissage (texte intégral). 
« Imitation et développement humain : les premiers temps de la vie »
, Andrew N. Meltzoff et M. Keith Moore, Terrain n° 44, Imitation et Anthropologie (texte intégral).

• Sites et blog : 
Les troubles de l’apprentissage chez l’enfant, journée mondiale de l’éducation le 7 août 2015.


Rêver

« Rêver, au sens d’avoir pendant le sommeil l’esprit occupé à des images, à des actions identifiables ou confuses, est un mot neuf. Il n’a commencé à s’imposer qu’à partir des années 1650. Descartes note « faire des rêves en dormant » (1649) et Pascal écrit dans une acception tout à fait moderne : « Il me semble que je rêve » (1656). Alors que dans la tragédie classique, jusqu’à Racine et même au-delà, les héros continuent à songer, dans la prose des philosophes et des moralistes on commence à rêver. Le mot rêve prendra en charge, au XVIIIe siècle, tous les aspects et tous les moments de l’expérience : le surgissement de la vision, les indices que laisse entrevoir le corps endormi, le souvenir que l’esprit en conserve et, bien sûr, le récit que l’on peut en donner par la suite. Le phénomène est bien caractérisé, il n’est même pas propre à l’homme : « Non seulement les rossignols dorment, écrit Buffon, mais ils rêvent et d’un rêve de rossignol car on les entend gazouiller à demi-voix et chanter tout bas. » Cette spectaculaire substitution lexicale a été, au cours du Moyen Age, précédée par une autre. Songer a évincé pantaiser qui, à la Renaissance, n’a plus que le sens de « suffoquer » et dont il ne reste aujourd’hui que l’adjectif pantois. Maissonger comme pantaiser n’offriront pas très longue résistance, même dans les dialectes d’oc. La carte 1695 de l’Atlas linguistique de la France fait, à la fin duxixe siècle, le point sur une invasion lente mais irrésistible (Gilliéron et Edmont 1902). Partout dans le Sud, revar, à l’occitane, est en passe de délogerpantaisar et somiar, où, du moins, le français rêve, de plus en plus préféré à tout autre terme, provoque d’importants remaniements, lexicaux et sémantiques, dans ce domaine. Ainsi en pays de Sault, dans un dialecte languedocien des Pyrénées, l’ancien pantaisar signifie aujourd’hui « haleter », « perdre le souffle » ; somiar, c’est à la fois dormir et rêver, mais le seul substantif en usage est rêve, à la française. « Ai somiat un rêve » est l’équivalent exact de « j’ai fait un rêve ». Comment comprendre ces mouvements du vocabulaire, que donnent-ils à penser aujourd’hui ?  » Daniel Fabre in Terrain n°26.

Pour en savoir plus :

Le rêve. Puvis de Chavanne (Orsay, cliché RMN).

Des articles :
« Rêver. Le mot, la chose, l’histoire », Daniel Fabre, Terrain n° 26 , Rêver.
« Destins anthropologiques du rêve »
, Giordana Charuty. Terrain, n°26, Rêver (texte intégral).
« Les rêves de Teresa », Deborah Puccio. Terrain, n°26, Rêver (texte intégral).
« Rêver pour soi et pour les autres», Caroline Humphrey et A. Hürelbaatar. Terrain, n°26, Rêver (texte intégral).
« Les couturières de la nuit », Marie-Claire Latry. Terrain, n°26, Rêver (texte intégral).
« Rêver », Daniel Fabre. Terrain, n°26, Rêver (texte intégral).
« Entrer en montagne pour y rêver », Brigitte Baptandier. Terrain, n°26, Rêver (texte intégral).
« Le rêve entre au-delà et ici-bas », Marie-Elisabeth Handman. Terrain, n°26, Rêver (texte intégral) .

Sites et Blogs :
L’interprétation des rêves d’après Freud, selon Jung, le rêve comme éveil de la conscience, sur le sommeil les rêves et l’éveil, l’étude du rêve d’après des textes littéraires.