éditoriaux
Lectures de René Démoris
René Démoris nous a quittés le 5 janvier dernier. Son œuvre critique fut considérable par son ampleur et sa richesse intellectuelle. Il a formé plusieurs générations de chercheuses et de chercheurs qui lui rendront hommage en faisant entendre la voix si personnelle qui caractérisait aussi bien ses textes que ses cours ou ses conférences. Ces "Lectures de René Démoris" auront lieu le 28 octobre à la Maison de la Recherche de Paris 3.
Fanfiction
"Récits écrits par les amateurs d'une fiction à partir des personnages, des intrigues ou parfois mêmes des mondes d'une fiction médiatique", selon R. Saint-Gelais dans Fictions transfuges (Seuil, 2011), les fanfictions constituent depuis le début du siècle une forme majeure de production de la fiction, qui trouve son débouché sur des sites anglosaxons collaboratifs fédérant des communautés de spectateurs ou lecteurs devenus co-auteurs. Le phénomène mérite d'être pris en compte dans toute réflexion sur les usages contemporains de la fiction, comme le montre Marion Lata dans un texte inédit : un essai de définition qui inaugure une nouvelle entrée Fanfiction dans l'Atelier de théorie littéraire. Rappelons que l'Atelier se veut également une encyclopédie collaborative, et qu'il est possible aux simples visiteurs de proposer d'enrichir telle ou telle entrée.
Paratopie
Il y a quelques mois D. Maingueneau faisait paraître Trouver sa place dans le champ littéraire. Paratopie et création (Louvain-la-Neuve: Academia), qui mettait à l'épreuve le concept de paratopie pour décrire la façon dont un écrivain parvient "à trouver sa place dans le champ littéraire, à se façonner une identité énonciative, à la fois condition et produit d'une œuvre". P. Delormas a récemment pu rendre compte de cet essai dans Acta fabula sous le titre "Grandeur & vicissitudes dans le domaine littéraire : de la paratopie illustrée par l’exemple". D. Maingueneau revient cet automne sur son approche des œuvres littéraires au prisme de la paratopie, dans un entretien inédit conduit par D. Martens qu'on peut lire dans l'Atelier de théorie littéraire, qui inaugure à cette occasion une entrée Paratopie.
Malraux Camus
En même temps qu'un volume de la Bibliothèque de la Pléiade réunissant La Condition humaine et autres écrits, dont Les Noyers de l'Altenburg et Esquisse d'une psychologie du cinéma, les éditions Gallimard publient la Correspondance échangée par A. Malraux avec A. Camus entre 1941et 1959. On pourra également découvrir en Folio un large choix de Lettres de Malraux édité par F. de Saint-Chéron, qui fait paraître par ailleurs un essai sur Malraux et les poètes (Hermann). Signalons encore un volume d'entretiens inédits réunis par M. Crépu sous le titre Malraux face aux jeunes - Mai 68, avant, après. — (Illustr. : Malraux et Camus à la générale des Possédés).
Acta fabula, dossier critique : "Écopoétiques, tour d'horizon"
La littérature aurait-elle besoin d’espaces ? C’est en tout cas ce que laisse à penser, depuis une vingtaine d’années, la richesse des approches qui, de la géocritique promue par B. Westphal à la géographie littéraire proposée par F. Moretti ou M. Collot, en passant par la géopoétique illustrée par M. Deguy puis K. White, s’efforcent de penser la manière dont l’écriture peut mettre l’espace en mots, et dont les territoires peuvent à leur tour être habités par les textes. Le 42e dossier critique d’Acta Fabula propose ainsi un tour d’horizon des écopoétiques actuelles, qui permettent de revisiter les créations littéraires et artistiques à la lumière de leur relation à l’environnement. Qu’il s’agisse de faire un état des lieux général de la géocritique, de focaliser l’attention sur des écrivains contemporains (Échenoz, Calvino, Pynchon, Ransmayr), ou encore d’analyser quelques-uns des motifs symboliques de notre rapport à l’espace (la frontière, la zone périurbaine), les articles rassemblés ici soulignent combien la littérature s’inscrit dans le sillage de ces « pratiques » qui, selon la formule de M. de Certeau, transforment les lieux en espaces vécus, récités et mythifiés. Voici donc une belle occasion d’arpenter de nouveaux chemins critiques. L'Atelier de théorie littéraire a de son côté inauguré une entrée « Écopoétique », qui vient de s'enrichir de nouveaux articles : sur les utopies végétales, par C. Jaquier, et sur l'écologie du livre, par G. Turin (Illustration : © Josef Koudelka/Magnum Photos)
Fantasmâlgories
Quel lien existe-t-il entre le fascisme et le genre ? C'est à partir de cette question que Klaus Theweleit explore la fascination masculine pour la violence et le pouvoir dans son œuvre colossale Männerphantasien (1977, Verlag Roter Stern). À l'aide de la psychanalyse et partant d'un large corpus littéraire issu des rangs des corps francs allemands de l'entre-deux-guerres, l'auteur a tenté d'analyser la structure mentale de la personnalité fasciste. Les éditions de l'Arche nous invitent à découvrir cet ouvrage dans une version abrégée sous le titre Fantasmâlgories.
Photolittérature
1839. La photographie s’invente et s’invite dans les arts pour en bouleverser les relations. Elle vient modifier les modes de représentation de l’espace, du temps, de la mémoire, et interroger, au-delà des peintres, les écrivains dans un mélange de rejet et de fascination. Du 14 octobre au 30 décembre 2016, la Fondation Jan Michalski (Suisse) accueille une exposition consacrée à la photolittérature, des années 1840 à aujourd’hui : dialogues photographes-écrivains, écrivains photographes, photographes écrivains, textes illustrés de photographies anonymes, livres sans illustrations dans lesquels la photographie est un thème et l’image, absente, un embrayeur de récit… Le parcours vise à rendre compte de l'éventail des phénomènes photolittéraires, depuis l’invention de la Modernité – que la photographie contribue à constituer – jusqu'aux nouvelles potentialités numériques. Signalons aussi à cette occasion la parution aux Presses Universitaires de Paris-Sorbone de l'essai d'A. Reverseau intiulé Le Sens de la vue. Le regarde photographique dans la poésie moderne.
Illustration : © Albert Camus, La postérité du soleil, photographies d’Henriette Grindat, itinéraire par René Char, Genève, E. Engelberts, 1965