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Dossier: Analyse des réseaux sociaux en archéologie

Les acteurs-réseaux en archéologie : état de la question et perspectives futures

Astrid Van Oyen
p. 14-20

Résumé

La théorie de l’acteur-réseau (ANT pour Actor-Network Theory), originaire dans les études des sciences et technologies, entre de plus en plus fréquemment dans deux discours archéologiques différents: l’un, interprétant le rôle social de la culture matérielle; l’autre, traitant des réseaux comme technique analytique. Malheureusement, ce dédoublement du potentiel des acteur-réseaux n’a pas résulté dans une communication plus intense entre les archéologies « interprétative » et « analytique ». Ceci parait symptomatique de l’état de l’archéologie aussi bien que du rôle que ANT pourrait jouer. Mais pour réaliser ce rôle, une réflexion poussée sur la convergence entre les buts et les méthodes de l’archéologie et de ANT s’impose. Après une brève introduction aux concepts clefs de ANT, cet article cherche à caractériser les applications diverses faites de ANT en archéologie jusqu’à présent (et, en moindre détail, celles développées en anthropologie), leurs atouts, et leurs problèmes. Cet état des choses indiquera des avenues de recherche futures et nous aidera à formuler des directives pour faire une archéologie des acteur-réseaux, concernant par exemple la résolution des données. Finalement, on retournera à la question comment ANT pourrait négocier des approches interprétatives et analytiques en archéologie, avec référence explicite à ce que c’est un « réseau ».

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Texte intégral

Je remercie Guillaume Robin, Carl Knappett, Nathalie Vaillant et un lecteur anonyme pour leur aide indispensable avec la langue, qui a beaucoup amélioré l’argumentation.

Le caractère particulier des réseaux de l’Actor-Network Theory (Ant)

1Le terme de « réseau » entre de plus en plus fréquemment dans le discours archéologique, et l’intérêt pour la théorie dite de l’acteur-réseau (Ant) s’accroît. L’Ant partage avec les autres approches présentées dans cette collection la notion de relationnalité : afin de saisir la complexité des processus sociaux, il est fondamental non seulement d’étudier les entités et les acteurs engagés dans ces processus mais aussi la nature, la densité et la structure de leurs relations. Ce principe relationnel s’est développé sous la forme de théories interprétatives en Ant et en tant que méthodes analytiques formelles en analyse des réseaux sociaux (Sna pour Social Network Analysis) (Van Oyen à paraître b). Cette bifurcation entre analyse et interprétation paraît symptomatique de l’état actuel de l’archéologie (Olsen et al. 2012 : 204). On reviendra sur ce point en guise de conclusion.

2Afin de clarifier ce qu’est un réseau en Ant, il faut retourner à ses origines dans les études des sciences et des technologies. Fondamentalement, l’Ant est né en réaction à la prolifération de concepts explicatifs élémentaires ne référant à aucun processus empirique (ou à trop de processus pour avoir une valeur explicative), dont « la science » aussi bien que « le social » sont des exemples (Latour 1993, 2005). Au lieu d’employer ces concepts sans référence empirique, les auteurs de l’Ant étudièrent la manière dont « science » et « social » étaient pratiqués au quotidien. Ainsi sont-ils parvenus à décrire des associations d’acteurs de types différents – pour les pratiques de « la science », par exemple, incluant des graphiques, du financement, des tubes à essais, des statisticiens, des conversations triviales – configurés en réseaux (Latour & Woolgar 1979 ; Latour 1999, 2005). Chacun de ces acteurs est lui-même composé d’un tel réseau : les graphiques sont constitués de normes de représentation, de mesures, d’ensembles de logiciels ; les tubes à essais sont dérivés de la technologie du verre, et de la standardisation des récipients. Ainsi s’explique le trait d’union entre « acteur » et « réseau ». Pour résumer, les relations jouent un rôle ontologique pour l’Ant en tant que principe constitutif du monde, des acteurs et de leurs actions. De plus, ces relations sont toujours hybrides ou hétérogènes, puisqu’elles enveloppent des acteurs humains aussi bien que non humains, seulement séparés dans la classification erronée du Modernisme (Latour 1993).

3Cette possibilité d’un rôle actif pour des objets a sollicité l’intérêt de toute une série de sciences sociales sous le nom d’ontological turn : l’anthropologie (González-Ruibal et al. 2011 ; Henare et al. 2007 ; Holbraad 2009 ; Mol 2002 ; Viveiros de Castro 1998), la géographie (Murdoch 1998 ; Whatmore 2002), la philosophie (Stengers 2005), les sciences politiques (Bennett 2010), y compris l’archéologie (Hicks 2010). Selon l’Ant, les objets ne font pas que représenter des significations sociales, mais constituent ces significations : les tubes à essais, par exemple, ne signifient pas grand-chose en tant que tels, mais ils guident le cours des actions dans le laboratoire et créent ainsi la possibilité des faits scientifiques. Cet article vise à clarifier comment une conception du rôle constitutif des relations entre hommes et choses, telle que celle de l’Ant, a été adoptée en archéologie, quels furent ces effets, et quelles perspectives de recherches futures elle peut offrir.

L’Ant en archéologie (1) : l’archéologie symétrique

4L’archéologie dite « symétrique » a été développée par un groupe de chercheurs liés au Metamedia Lab à l’Université de Stanford [http://humanitieslab.stanford.edu/​Symmetry/​Home], et s’inspire directement de la symétrie ontologique entre les acteurs humains et non humains (Olsen 2007 ; Olsen et al. 2012 ; Shanks 2007 ; Webmoor 2007 ; Witmore 2007 ; Webmoor & Witmore 2008). Bien qu’elle suive de près le modèle de l’Ant, l’archéologie symétrique combine des approches philosophiques qui ne sont pas toujours clairement complémentaires (Coole & Frost 2010 sur les New Materialisms ; Harman 2002 sur Heidegger ; Harman 2009 et Latour et al. 2011 sur les différences avec l’Ant ; Stengers 2005 sur l’écologie des pratiques). En outre, la plupart des publications de l’archéologie symétrique sont écrites dans un style proche du manifeste (Witmore 2007), avec l’intention explicite de se libérer des défauts des approches précédentes (Dolwick 2009 ; Boast 1997 contre la notion de « style » ; Webmoor & Witmore 2008 contre l’archéologie sociale de Meskell & Preucel 2004 ; Olsen 2007 contre le materiality de Miller 2005) et proposant un lexique disciplinaire nouveau. Bien que ce style soit avant tout un outil rhétorique (tout comme dans les ouvrages de l’Ant), son emploi crée un paradoxe quand on affirme que l’archéologie symétrique « is not a new kind of archaeology. It is not a new theory. It is not another borrowed methodology » (Shanks 2007 : 590). Alors, qu’est-ce que c’est qu’une archéologie symétrique ?

5Le sujet des études dites symétriques pourrait être résumé comme une ethnographie des pratiques de l’archéologie et de la création de connaissances archéologiques – lors de fouilles, de prospections, ou dans des musées, etc. – tout comme l’Ant l’avait fait pour les pratiques des sciences, par exemple dans des laboratoires. Dans ce projet, l’archéologie symétrique s’apparente une série d’études similaires qui ne portent pourtant pas cette étiquette (Edgeworth 2012 ; Yarrow 2003, 2006, 2008).

6Trois thèmes en particulier sont abordés dans ce registre. Premièrement, la médiation des pratiques disciplinaires est reconnue. En tant qu’imbroglios hétérogènes d’acteurs humains et non humains, elles ne reflètent pas mais transforment les données. Ce principe a été mobilisé par exemple dans le cadre d’études des outils et des étapes nécessaires dans des projets de cartographie de sites archéologiques (Olsen et al. 2012 : 94-100 ; Webmoor & Witmore 2008 : 61-65), des rôles différents accordés à la vision et aux sons dans des médias archéologiques (Witmore 2006), des imbrications entre l’adoption de photographie en archéologie et l’insistance sur la préparation et le nettoyage méticuleux des vestiges de fouille (Olsen et al. 2012 : 47-53). Ces projets combinent ethnographie contemporaine et recherche d’archives tout en revisitant l’histoire de l’archéologie.

7Deuxièmement, le rôle des objets (things) dépasse celui de simple représentation et communication (Olsen 2010 ; Olsen et al. 2012, chapitre 2 ; cf. section suivante). Ceci est traduit dans une notion de soin (care) (Mol 2008) pour les objets, proposée comme une revalorisation de l’archéologie même en tant que discipline dont les objets sont évidemment le fonds de commerce (Olsen et al. 2012, chapitres 1 et 9). On notera le paradoxe entre le principe des acteurs-réseaux toujours hétérogènes et cet appel au soin des objets en eux-mêmes.

8Troisièmement, le temps linéaire analytique est souvent divorcé du temps réel qui est toujours la somme de plusieurs temporalités, de sorte que le présent est toujours (in)formé par des actions de passés divers (Shanks 2007 : 591-592 ; Witmore 2006 : 279). Par exemple, l’approche de la citadelle de Mycènes, traditionnellement classifiée comme monument de l’âge du Bronze, est une expérience recomposée sous l’effet d’actions et de passés de « datations » distribuées : des villages toujours occupés et des restaurations modernes coexistent avec les vestiges de l’âge du Bronze, tandis que des temples hellénistiques détruits lors de fouilles du début du xxe siècle ne font plus partie de cette expérience d’ascension (Olsen et al. 2012 : 146-156). Ici, l’archéologie symétrique est proche d’approches phénoménologiques, tout en remplaçant l’accent des dernières sur le sujet humain par des assemblages d’hommes et d’objets. La notion renouvelée du temps a aussi été liée à la gestion de l’héritage et du patrimoine, en montrant la manière dont des objets élémentaires « anciens » et « silencieux » continuent à façonner les possibilités dans le présent (Olsen et al. 2012 : 200-207 ; Webmoor 2007 : 573-575).

9Quelle est donc la contribution des principes de l’Ant tels qu’employés dans ce programme d’archéologie symétrique ? Les trois thèmes élaborés ci-dessus ont montré comment les faits archéologiques – ou notre connaissance du passé – sont fabriqués à partir d’objets actifs, des pratiques sélectives et des temporalités contingentes. Ceci est en grande partie une répétition des résultats des analyses originales de l’Ant sur la réalité des faits scientifiques (Knorr-Cetina 1999 ; Latour 1999). L’atout de ce type d’étude est de revaloriser ces pratiques et le savoir-faire qui sont normalement effacés dans les narrations finales. Néanmoins, l’archéologie symétrique, tout en rendant plus visible le processus de construction de la connaissance archéologique, ne nous offre pas pour autant les moyens de construire de nouvelles connaissances sur le passé. La réflexivité a été débattue (Andrews et al. 2000, Hodder 1997) et critiquée par Hassan 1997. L’étude de cas de Mycènes, par exemple, ne nous apprend pas comment cette citadelle fonctionnait à l’âge du Bronze. Suivant l’approche symétrique, il semble même qu’il n’y ait pas grande chose à changer dans les pratiques archéologiques – malgré leur copieuse critique des théories précédentes –, sinon d’être plus attentifs encore aux objets. Les seules directives formulées (rarement de manière explicite) portent sur l’usage des médias digitaux (Olsen et al. 2012 : 122-134 ; Witmore 2006), sur la gestion du patrimoine culturel (Webmoor 2007) et sur la façon d’aborder l’historiographie archéologique.

L’Ant en archéologie (2) : la culture matérielle

10Un second groupe d’études pouvant être étiqueté material culture studies, moins coordonné, s’est intéressé avant tout à la façon dont l’Ant conçoit les relations entre hommes et objets. En général, le second point de l’archéologie symétrique est élaboré : les objets ne sont pas simplement des ressources passives qui peuvent être mobilisées pour représenter ou communiquer des significations sociales primaires. Le potentiel à agir (agency) est plutôt distribué dans des réseaux hétérogènes associant des humains et des objets, à condition que ces réseaux aient un effet traçable sur le cours de l’action (Law 2010 : 173-174). En appliquant ce modèle relationnel aux objets archéologiques et à leurs relations dans le passé, les publications ci-dessous cherchent véritablement à contribuer à notre connaissance du passé.

Théorie

11D’abord, quelques études ont identifié l’Ant comme une ressource utile pour conceptualiser la culture matérielle en archéologie et ont, de manière générale, envisagé les possibilités qu’elle offre. Olsen (2010) et Knappett (2005) ont compilé des anthologies de théories nouvelles traitant des objets et de leurs interactions avec les hommes, et toutes deux accordent une place à l’Ant, combinée à d’autres approches phénoménologiques (Olsen 2010), cognitives et sémiotiques (Knappett 2005). Il en va de même pour l’éditorial de l’ouvrage collectif Material Agency (Knappett & Malafouris 2008). Robb (2010), à son tour, a intégré la relationnalité de l’Ant dans un compte-rendu du concept d’agency. À partir d’une série d’objets archéologiques, il tente de reconstruire les projets d’action d’agents dans le passé et les relations créées dans la mise en œuvre de ces projets. Par exemple, le projet de construire une maison entraîne des relations à travers la recherche de l’argile et la maintenance du torchis, mais aussi par l’effet de cohésion familiale causé par les murs d’enceinte (Robb 2010 : 509). Notons que, contrairement à Olsen qui se fait le héraut d’une approche métaphysique revendiquant une équité radicale entre l’agir humain et matériel, Knappett et Robb développent une approche plus mesurée mettant en exergue les relations complexes entre ces deux éléments sans pour autant les assimiler de manière stricte. Enfin, toute une série d’études en material culture studies font sporadiquement référence à l’Ant, sans pour autant l’adopter comme ressource primaire (Jones 2007 ; Boivin 2008 : 176-178).

12Les études susmentionnées présentent essentiellement des résumés théoriques et ne se servent que d’exemples hypothétiques, souvent contemporains et non archéologiques, qui n’occupent pas plus de quelques phrases : par exemple, l’assemblage des acteurs (skis, cartographie, publicité, etc.) qui ont permis la première expédition « en solo » au pôle Sud (Olsen 2010 : 143), l’agency distribuée entre homme et arme (Knappett & Malafouris 2008 : xi, d’après Latour 1999 : 176-178), les relations d’une tasse de café (Knappett 2005 : 110), ou des esquisses de quelques objets néolithiques (Robb 2010 : 509-512).

Pratiques technologiques

  • 1 Pour l’anthropologie des techniques, voir Lemonnier 1993 ; Dobres & Hoffman 1994 ; Dietler & Herbic (...)

13Une direction plus spécifique développe l’approche relationnelle de la culture matérielle à travers l’étude des pratiques productrices et technologiques (Knappett 2005 : 156-162 ; Whitridge 2004), un héritage direct des sujets d’études fondatrices de l’Ant. Ces études partagent l’importance des pratiques avec l’archéologie symétrique, mais déplacent le centre d’attention du présent au passé. En soulignant le savoir-faire tactile, l’expérience somatique et la médiation avec les matériaux, la tradition de l’anthropologie et de l’archéologie des techniques se prête à une combinaison avec l’agency distribuée issue de l’Ant (Van Oyen 2012a : 50-51)1. Cette intersection a été explorée avant tout en considérant les pratiques dans la production céramique, du point de vue de l’esprit humain et son extension dans le monde (Malafouris 2008) ou de l’expérience phénoméno-logique (Watts 2008).

14L’analyse des techniques dans le passé facilite donc l’implémentation des principes de l’Ant – enrichis par un corpus théorique concernant l’expérience et le savoir-faire – dans des études de véritables assemblages archéologiques. Néanmoins, les études de cas ne traitent que du sujet de la production artisanale et la notion de « relation » reste plutôt vague et abstraite.

Caractériser les relations

15Une telle caractérisation des relations a été poursuivie dans les différentes publications par Knappett (2002, 2005, 2008, 2009). Bien que la relationnalité soit le principe fondamental de l’Ant, la nature de ces relations reste largement indéterminée (Knappett 2005 : 77). En plus, même si les applications de l’Ant en science studies reconnaissent les objets au niveau théorique, elles n’offrent que peu de directives méthodologiques pour suivre des relations à partir des bases de données qui ne portent que sur des objets, comme cela est par définition le cas en archéologie. Ainsi, Knappett a introduit quelques principes pour reconstituer des relations à partir des objets archéologiques, basés sur une combinaison du concept d’affordances (les actions rendues possibles par les propriétés matérielles dans une certaine situation) et de la sémiotique (des relations définies respectivement par ressemblance, proximité physique, causalité ou conventions). En plus, cet intérêt pour les relations mène directement à l’étude des réseaux, et Knappett est l’un des instigateurs principaux d’un mouvement s’employant à combiner l’approche interprétative de l’Ant (et plus généralement des material culture studies) d’un côté aux outils analytiques des analyses (mathématiques) des réseaux de l’autre (Knappett 2011 ; Knappett et al. 2008, 2011 ; Van Oyen 2012b).

16Dans un ouvrage récent, Hodder a repris cette critique de Knappett envers l’Ant : « there remains a tendency for ANT to give insufficient attention to the ways in which humans and things in their physical connectedness to each other (…) entrap each other » (Hodder 2012 : 93). Afin de résoudre cette lacune, Hodder introduit les notions jumelles de dependence et dependency, dénotant respectivement le besoin mutuel et la contingence dans les relations entre hommes et choses (comparer aux exemples de Robb 2010 : 509-512). Mais cette spécification reste largement théorique, et Hodder ne croit pas à une classification des « entanglements » au-delà d’une caractérisation de ces derniers comme plus ou moins denses (Hodder 2012 : 107-108). En outre, Hodder dénonce la pleine symétrie entre hommes et objets (Hodder 2012 : 93), mais il n’est pas clair s’il est conscient de la nature analytique de cette proposition en Ant, où la symétrie réfère au principe analytique de ne pas a priori définir les entités envisagées. Tout comme Knappett, Hodder cherche à lier son programme théorique à des méthodes existantes, chacune avec sa propre généalogie : les systèmes d’informations géographiques (Sig) de l’archéologie spatiale, les battleship curves de l’archéologie évolutionnaire, les life histories des études de la culture matérielle (Hodder 2012 : chapitre 7 et 185-195). Néanmoins, la façon dont les relations ont été tracées dans les exemples dérivés du site de Çatalhöyük reste opaque et le lecteur doit se contenter de l’affirmation selon laquelle « les connections sont basées sur l’interprétation de l’évidence matérielle du site » (traduit d’après Hodder 2012 : 182).

17Malgré les démarches méthodologiques, la manière de suivre des relations à partir de données archéologiques demeure obscure. Encore plus problématique est le fait que la plupart des études de cas présentées sont relativement schématiques. L’exemple des coupelles à boire minoennes est certes élaboré selon les axes méthodologiques décrits ci-dessus (Knappett 2005 : 139-163 ; aussi Knappett 2002 et 2009), mais l’approche est basée sur une notion généralisée de ces coupelles, et non pas sur un spécimen ou un assemblage spécifique. La discussion ne traite donc pas vraiment des problèmes analytiques relatifs à la nature des données archéologiques. En plus, la caractérisation de relations de natures différentes n’a pas (encore) abouti à une description de constellations relationnelles (ou structures des réseaux) de types différents, de sorte que la notion de « réseau » reste une dénomination générale – malgré l’ambition d’explorer les « spatial and organisational structures of these human-nonhuman networks and their effects upon network ‘behaviour’ or dynamics » (Knappett 2008 : 139).

Caractériser les constellations relationnelles

18Cet intérêt particulier caractérise une approche qui a pour but d’apprécier la complexité des unités et des catégories de base en archéologie. Cette approche trace les relations générées dans les pratiques de production ou d’usage d’un certain type d’objet, et se focalise sur la constellation formée par l’ensemble de ces relations. Selon le principe de l’acteur-réseau où les relations (le réseau) et l’objet (l’acteur) sont les deux faces d’une même médaille, cette constellation relationelle est proposée comme une définition située de ces objets. Par exemple, Mol (2002) a analysé la manière dont le corps humain est défini de façon différente dans différentes parties d’un hôpital, dépendant des pratiques socio-matérielles : en consultation, sous le microscope, en intervention chirurgicale. Inspiré par des études plus récentes en Ant (Law 2004, 2010 : 173-174 ; Law & Mol 2008 ; Mol 2002), un statut « ontologique » est donc accordé aux pratiques, puisqu’elles définissent ou constituent la réalité des choses.

19À partir des distributions de céramiques dans un site anglo-saxon, des traces d’usure et des contextes de déposition, Jervis (2011), se basant sur l’Ant, a tenté de tracer la coémergence de catégories de personnes et d’objets. Une évolution diachronique pouvait être établie, par exemple voyant des catégories de producteurs et de consommateurs locaux laissant place à des négociants et des consommateurs plus « cosmopolites ». Mais, tout en considérant l’émergence de catégories, l’étude de Jervis ne les caractérise qu’en se référant aux pratiques qui leur sont associées. Par exemple, la catégorie de « consommateur urbain » est associée aux pratiques de consommation spécifiques en centre urbain qui s’opposent aux pratiques « rurales », mais il ne développe pas ce qu’on pourrait appeler la « topologie » de cette catégorie. Par contre, et ceci est une notion importante, des pratiques s’alignant selon des normes bien spécifiques définissent un objet différemment que des pratiques plus fluides. Ces définitions auront à leur tour des conséquences sur la façon dont ces objets pourront entrer dans des relations ou jouer un rôle « actif » (Van Oyen 2013a).

20Ce dernier principe est appliqué aux pratiques de production : par exemple, à partir des différentes signatures chimiques des pâtes de sigillées – un type de céramique fine romaine – on peut déduire des changements chronologiques dans l’approvisionnement en argile. Si ces changements coïncident avec ceux d’autres pratiques de production des mêmes céramiques, on peut décrire des constellations relationnelles ou topologies régulières, et accéder à une définition émergente mais située de ces céramiques (Van Oyen 2012a, 2013a). Mais le modèle vaut aussi bien en considérant les mêmes objets dans d’autres pratiques : par exemple, comment la sigillée était définie en tant que produit commercialisable en masse dans des listes écrites avant cuisson (Van Oyen à paraître a), ou en tant que volume occupé au bord d’un vaisseau de marchandise (Van Oyen 2013b). De plus, il convient de souligner que la définition d’un certain type d’objet dans une situation x aura des conséquences pour ses possibilités d’action dans la situation x + 1.

21Tout comme les études technologiques, ces exemples adoptent une notion vague et, peut-être, simplifiée des relations. Cependant, ils contribuent également à qualifier les constellations relationnelles ou « réseaux » émergents des relations et ouvrent la possibilité des analyses comparatives. Le défaut principal de ce modèle est qu’il dépend de la possibilité de recomposer des pratiques et leur variabilité de façon détaillée, ce qui n’a été réussi jusqu’à présent que dans le cas des pratiques technologiques, ou d’assemblages particulièrement riches comme des naufrages.

L’Ant en archéologie (3) : les grandes narrations

22Finalement, si l’Ant s’est développée principalement à travers des études de cas spécifiques (Law 2008 : 629-630) – tout comme ses applications en archéologie traitées jusqu’ici – quelques œuvres plus récentes tentent à nouveau d’aborder les grandes questions (Latour 2012). Plutôt que se limiter à des théories générales – par exemple concernant la nature des relations entre hommes et objets – illustrées par des esquisses arbitraires, il semble que les avocats de l’Ant en archéologie cherchent eux aussi à contribuer à des débats disciplinaires et thématiques.

23Un précurseur en la matière fut Shanks et sa tentative d’une lecture relationnelle des aryballoi, ou flacons de parfum décorés archaïques corinthiens, intimement liées aux événements sociaux et politiques de cette époque (Shanks 1999 ; Olsen et al. 2012 : 171-180), analyse qui reste tout de même fragmentaire et basée sur de nombreuses conjectures comme le rôle des citoyens, les stratégies militaires hoplites, etc. Dans son analyse de la céramique à boire minoenne, Knappett avait aussi pour objectif de contribuer à la question la plus importante concernant cette période : l’émergence des hiérarchies sociales et de ce qui est connu comme la société palatiale en Crète (Knappett 2005 : 140). Mais la suite de l’ouvrage ne revient pas de façon satisfaisante sur ce projet ambitieux (ce qui est dû, au moins en partie, au manque de considération d’un ou de plusieurs assemblages archéologiques, comme argumenté plus haut).

24Le livre Entangled de Hodder est encore plus ambitieux, tant dans ses promesses méthodologiques qu’explicatives. En effet, la notion d’entanglement évoquée ci-dessus est avancée à la fois comme théorie ontologique des relations entre hommes et objets, comme concept méthodologique capable d’intégrer des méthodes d’origine nettement différente (voir plus haut), et comme nouvelle explication du problème des origines de l’agriculture dans le Néolithique au Proche-Orient (Hodder 2012 : 195-200). Dans ce dernier exemple, entanglement que l’on pourrait traduire par l’interdépendance entre les hommes et les choses, permet d’éviter les explications basées sur une cause singulière, souvent externe, comme un changement de climat ou un accroissement de population, explications qui envisagent la culture matérielle comme seulement représentationnelle ou fonctionnelle et non pas comme active. À la place, l’approche de Hodder trace les relations établies par exemple par l’usage de meules : de la récupération plus facile de nutriments à une intensification de l’usage des plantes ; des méthodes de préparation de nourriture au pain comme norme de diète; de la procuration des pierres lourdes à la réduction de mobilité.

25En tant que telle, cette ambition d’aborder les grands débats archéologiques n’est pas du tout un défaut, bien au contraire. Ce qui pose un problème, c’est la fusion de l’ontologie, de la méthodologie et de l’explication historique dans un seul concept. Hodder suggère une explication des processus caractérisant le Néolithique sur la base d’une dépendance accrue entre hommes et objets. Mais, si ce même principe sert de matrice fondamentale pour l’histoire humaine, qu’est-ce qui rend spécifiques les processus néolithiques ? Cette impasse est due au manque de caractérisation des constellations relationnelles, ou types d’entanglement, au-delà de la densité (croissante) des relations. La question qui nous concerne n’est pas « whether intermediate, or dark or collapsed societies really were less entangled than those that preceded them » (Hodder 2012 : 178), mais selon quelles modalités étaient « assemblées » les différentes formes sociales : leur terminologie (Latour 2005) ou leur « topologie » (Van Oyen 2013a et à paraître b).

26Bien que la question de savoir comment envisager les grandes questions disciplinaires sans avoir recours aux explications représentationnelles de l’archéologie « sociale » (selon lesquelles les traces matérielles sont subordonnées à des causes sociales) est abordée ici, la réponse reste ouverte. On pourrait suggérer une piste de réflexion à partir d’un travail en cours sur la céramique sigillée romaine (Van Oyen 2013b). Traditionnellement interprétée comme représentant le pouvoir impérial romain, la sigillée y est plutôt considérée comme constituant de manière active les conditions rendant ce pouvoir impérial possible. Comment ? Selon le principe, expliqué ci-dessus, d’accéder à la définition d’un objet à travers les pratiques dans lesquelles il est intégré, on a pu décrire la stabilisation contingente de la sigillée en tant que catégorie bien définie (Van Oyen à paraître b). Cette constellation ou topologie a créé à son tour des possibilités de comparaison et de compétition, entraîné une centralisation de production en compliquant la reproduction, et engendré un univers matériel homogénéisé en facilitant l’insertion de la sigillée dans des pratiques de consommation préexistantes. La sigillée en tant que catégorie constitue donc la possibilité d’un empire romain, tout comme les faits scientifiques stabilisés constituent la « science » (Latour 1987 ; Law & Singleton 2005 : 335). C’est ce type de combinaison entre les constellations relationnelles contingentes et leur effet projeté qui est la clé d’une exploitation optimale du concept de material agency dans les grandes questions archéologiques.

Perspectives et défis futurs

Potentiel pour l’archéologie

27Malgré un vif intérêt contemporain pour les approches relationnelles en sciences sociales en général (Deleuze & Guattari 1980 ; Ingold 2000 ; Strathern 1991) et en particulier en archéologie (Fowler 2004), l’Ant apporte un potentiel réel pour revisiter l’archéologie et ses débats les plus fondamentaux, en corrigeant une généalogie disciplinaire de dichotomies et polarités (González-Ruibal 2013 et Thomas 2004 pour l’archéologie ; Latour 1993 pour l’Ant). De plus, l’Ant reconnaît la possibilité d’acteurs non humains et existe essentiellement à travers l’étude de cas empiriques (Law 2008 : 629-630), eux aussi indispensables en archéologie. Les différentes sections de cet article ont spécifié les contributions de l’Ant à l’archéologie dans trois domaines : l’étude des pratiques disciplinaires, la culture matérielle et les débats thématiques comme l’origine de l’agriculture.

Application aux données archéologiques

28Cependant, la question de ce qui caractérise l’application de l’Ant en archéologie est généralement négligée, soit parce qu’elle n’est simplement pas posée, soit parce qu’on lui donne une réponse évasive comme care for objects (Olsen et al. 2012, chapitre 9). Il faut donc une réponse qui prenne en compte la spécificité des données archéologiques, pas tellement leur nature de proxies – qui substituent des phénomènes au-delà d’eux-mêmes (approche représentationnelle) –, ou leur caractère partiel – ce qui est vrai pour toutes les données –, mais en considérant la manière de les mobiliser.

29En effet, plus urgente que la question des méthodes est celle des conditions nécessaires pour une application de l’Ant en archéologie. Un premier problème concerne la résolution des données. Par exemple, est-il plus facile de reconstituer les pratiques spécifiques dans lesquelles un objet a été défini en considérant sa production ou sa consommation ? Alors qu’un tesson unique pourrait évoquer toute une histoire de production, ce même tesson n’exprime souvent que sa présence dans un puits de déchets sur un site de consommation. En général, le contexte archéologique – ce concept clef en archéologie – n’a pas encore été mobilisé par les approches relationnelles, qui tracent plutôt des relations sur la base d’objets décontextualisés et de leur style ou de choix technologiques (Mol 2013). L’échelle analytique est une autre question à aborder. À l’échelle « micro », avec l’Ant, il est impossible de distinguer les pratiques ou projets d’action. Mais à l’échelle « macro », une approche Ant risque de perpétuer les étiquettes vides contre lesquelles elle s’est érigée, à cause de la tentation d’avoir recours à des entités trop vagues ou sans correspondant empirique comme « l’armée » ou « le pouvoir impérial ».

30Pourtant, la question des méthodes pour une archéologie relationnelle est essentielle et doit prendre en compte non seulement la nature des données archéologiques, mais aussi le résultat désiré. Ainsi, on a vu qu’il est important de tracer et de caractériser les relations, mais aussi de pouvoir décrire et comparer leurs constellations ou topologies. De plus, il faut être capable d’en considérer l’évolution ou les trajectoires ; la manière dont elles se sont formées, stabilisées et dissolues. Mais avant tout, le potentiel de l’Ant ne se réalisera que lorsqu’il sera mis en relation avec des débats clefs en archéologie. Il nous faut donc des études de cas empiriques complexes prêtes à faire face à la spécificité des données archéologiques plutôt que des manifestes ou des anthologies théoriques.

On aime tous les réseaux, mais pas les mêmes ?

31La contribution de l’Ant à l’archéologie pourrait être résumée par la terminologie tripartite de relationnalité, dynamisme et performativité, et ces trois termes marquent un point de comparaison commode avec les autres « réseaux » abordés dans ce volume. Premièrement, l’Ant ne parle pas seulement de relations, mais renvoie à un point plus fondamental concernant la constitution « relationnelle » du monde et de l’action. Deuxièmement, les réseaux de l’Ant sont dynamiques et émergents (Hodder 2012), de sorte que leur stabilisation est le résultat d’efforts et non pas le point de départ (Van Oyen à paraître b). Troisièmement, l’Ant s’attarde sur la performativité des pratiques – passées aussi bien que présentes – ce qui entraîne un schéma épistémologique différent de celui adopté implicitement par les analyses des réseaux.

32L’effet cumulatif de ces trois points explique la défiance nourrie par les approches relationnelles en archéologie à l’égard des analyses des réseaux. En particulier, l’annotation formelle des relations est considérée comme une démarche non neutre qui clôt les possibilités interprétatives (voir Butts 2009 pour un avertissement dans ce sens de la perspective de l’analyse formelle des réseaux). L’aversion d’une telle annotation trahit donc l’influence du credo post-processualiste d’interprétation herméneutique (Shanks & Tilley 1992 ; Shanks & Hodder 1995) et de réflexivité (Andrews et al. 2000 ; Hodder 1997), et l’impasse méthodologique dans laquelle la plupart des approches relationnelles se trouvent en archéologie hérite de la confusion qui règne toujours autour de l’application de ces principes.

33Ici aussi l’Ant pourrait apporter son secours en soulignant que chaque interprétation valable est basée sur un réseau analytique bien construit en analogie avec la construction des faits scientifiques, comme le fait Wylie (2002 : 162-163) qui emploie la métaphore de « câbles » ; mais aussi, réciproquement, que chaque analyse est de nature interprétative (Latour 1999). Une fois que les approches relationnelles réalisent que leurs interprétations sont déjà piégées par des outils analytiques implicites, elles peuvent véritablement se lancer à la quête de méthodes formelles adéquates, comme l’ont déjà fait Knappett (2005) et Hodder (2012). L’analyse des réseaux se posera alors comme une candidate importante mais pas exclusive (Knappett 2011), si les trois conditions présentées ci-dessus – relationnalité, dynamisme et performativité – sont prises en compte de ce côté. En effet, si chaque analyse ouvre et clôt des possibilités interprétatives (Van Oyen 2012b), la question devient : comment modeler celles-ci afin de mobiliser toutes les possibilités offertes par l’Ant ? Il s’avère donc que l’exploration des limites est une condition nécessaire à des avancées dans les études relationnelles en archéologie. Du côté de l’analyse formelle des réseaux, on devrait se demander ce qui ne peut pas être représenté comme des entités connectées (Butts 2009 ; Van Oyen à paraître b) ; selon l’Ant, on devrait explorer les limites du modèle de l’agency distribué, qui pourrait nous priver en partie des outils pour explorer la causalité et les questions du « qui » et du « pourquoi » (plutôt que du « comment »).

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Notes

1 Pour l’anthropologie des techniques, voir Lemonnier 1993 ; Dobres & Hoffman 1994 ; Dietler & Herbich 1998 ; van der Leeuw 1993. Noter la similarité avec les behavioural chains de Skibo & Schiffer 2008.

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Pour citer cet article

Référence papier

Astrid Van Oyen, « Les acteurs-réseaux en archéologie : état de la question et perspectives futures »Les nouvelles de l'archéologie, 135 | 2014, 14-20.

Référence électronique

Astrid Van Oyen, « Les acteurs-réseaux en archéologie : état de la question et perspectives futures »Les nouvelles de l'archéologie [En ligne], 135 | 2014, mis en ligne le 01 janvier 2016, consulté le 27 septembre 2024. URL : http://journals.openedition.org/nda/2310 ; DOI : https://doi.org/10.4000/nda.2310

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Auteur

Astrid Van Oyen

University of Cambridge,
av360@cam.ac.uk

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Droits d’auteur

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