Éditorial de la Synergie des médias au
Burundi
Le président de la
République fait à nouveau cavalier seul en prenant une position controversée.
Pierre NKURUNZIZA promulgue une loi qui le met sur le ban de la communauté internationale.
Le cri des professionnels des médias est tombé dans l'oreille d'un sourd, ou plutôt un homme normal qui fait la sourde oreille et qui n'a pas non plus écouté la société civile, les chancelleries occidentales, sans oublier tous ces milliers de burundais qui se sont exprimés à travers la pétition qui lui a été envoyée.
Est-ce normal que toutes les inquiétudes soient balayées d'un simple revers de la main?
Et pour le contredire encore une fois, la
Belgique, ancienne puissance coloniale dans le concert des nations, vient de décrier cette loi inique. Même
Ban Ki Moon, secrétaire général de l'
ONU vient de lui emboîter le pas.
Tout porte à croire qu'il existe une main invisible derrière cette prise de décision contre-nature et anticonstitutionnelle.
Seul le parti
CNDD-FDD, caisse de résonance de son chef, se fait le griot aveugle de cette loi.
Pourquoi le président NKURUNZIZA au lieu d'être le prince qui gouverne le Burundi ainsi que tous ses habitants accepte volontiers d'être l'otage et l'esclave d'une petite noblesse de la cour ?
La promulgation de la dite loi ne doit pas nous mettre la poudre aux yeux à la veille des élections.
Selon des sources dignes de foi, le chef de l'État voudrait se représenter pour la troisième fois aux élections de
2015.
Pierre NKURUNZIZA rejoindra ainsi Yassingbé
Eyadema du
Togo,
Abdelaziz Bouteflika en
Algérie et Blaise COMPAORÉ du
Burkina Faso, tous des dictateurs qui se cachent mal sous le costume de démocrates et qui n'ont pas hésité à tripatouiller leur
Constitution afin de s'éterniser au pouvoir.
D'autres lois passeront au laminoir, on pourrait citer quelques unes, comme la loi sur la
Commission Vérité Réconciliation, la loi sur les manifestations publiques, le projet de révision de la Constitution, la loi électorale pour qu'il brigue un troisième mandat, les malversations, les crimes et violations des droits de l'homme.
Voilà des thèmes qui motivent la décision du numéro un burundais à vouloir faire taire la presse. Le président vient ainsi de rater le coche pour un pays qui se dit démocratique et une presse félicitée publiquement par le même chef de l'État.
Cette fuite en avant du chef de l'État n'est pas une première en
Afrique où les régimes autoritaires changent les lois en leur faveur, faisant du droit non pas un ensemble de règles pour le bien commun mais un instrument d'un pouvoir personnalisé. La présente loi sur la presse constitue la preuve vivante de l'inconstitutionnalité sur fond de dérive et de l'ivresse du pouvoir.
Et le parti au pouvoir, le CNDD-FDD navigue tous à vue entraînant tout un peuple dans une spirale dont on ne sait pas encore quand on en sortira. Cette loi sur la presse est une violation flagrante de l'article dix-neuf de la déclaration universelle des droits de l'homme garant des libertés d'opinion et d'expression sans condition aucune.
La seule voix de recours reste la cour constitutionnelle, là aussi, seul un esprit naïf pourrait croire qu'elle oserait défier son maître, le chef de l'État étant le président du conseil national de la magistrature et de surcroît magistrat suprême.
Pour conclure, nous oserions faire une analyse du contenu de la déclaration du président de la république interrogée sur la promulgation de la dite loi.
Dans sa réponse, il se targue d'avoir consulté la communauté internationale, pourtant nous avons montré les réserves et les protestations du ministre belge des affaires étrangères ainsi que celles de Ban Ki Moon à cet effet.
Que le président se targue d'avoir consulté la communauté internationale, c'est simplement archi-faux. Et nous pouvons parler de la politique de l'autruche en la demeure. Surtout qu'en cas de sanction internationale, c'est la population qui va en payer le plus lourd tribu prix et non le chef de l'État.
Pour cela, forte de l'appui de la communauté internationale et des amis du Burundi, l'opinion publique est invitée à résister contre cette loi liberticide, scélérate et inique qui ne touche pas seulement la presse mais aux fondements mêmes de la démocratie en général.
Par Olivier Bizimana -6 juin
2013 Radio Publique Africaine
- published: 21 Sep 2013
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