La guerre aux euphorisant légaux (legal high) en Grande Bretagne ou l’impossible marché régulé

Le coalition au pouvoir en Grande Bretagne, menée par David Cameron, envisage une interdiction globale de toutes les substances psychoactives pour lutter contre « les drogues légales ».

Le Royaume-Uni est le pays européen qui à le plus grand nombre de consommateurs de « legal high », ces substances chimiques légales dont les effets imitent ceux des drogues illégales (cannabis, ecstasy, cocaine…) et qui sont mises sur le marché pour en contourner la prohibition. Une étude internationale réalisée sur Internet montre qu’au Royaume-Uni, près de 20% des jeunes de 17 ans ont déjà touché à ces drogues. A côté de cela, l'Etat comptabilise plus de 450 boutiques et sites internet dont la première activité est de vendre ces legal high. Cela représente plus de 82 millions de livres de chiffre d'affaire. Ces legal high peuvent également se trouver dans les salons de tatouage, les sex-shops et les marchands de journaux... Ils sont devenus un marché important.

Jusqu'à présent, pour lutter contre cette consommation exponentielle, le Royaume-Uni a interdit une à une les molécules, grâce à un processus d'urgence qui permettait de l’interdire immédiatement et pour une durée d'un an, en attendant que l'on puisse faire des recherches sur ses dangers éventuels afin de prendre la décision définitive. Çe fut le cas des NBOMe, de la MXE, du benzo-fury (6-APB), de l'ethylphenidate...

Cette stratégie a échoué, elle n’a pas stoppé l'avancée des legal high. Après chaque interdiction, l'industrie des legal high sortait une nouvelle molécule souvent très proche, mais à nouveau tout à fait légale. C'est ainsi que le 6-APB a été remplacé par le 5-APB, puis par le 5-EAPB...

Face à ces chiffres, la coalition dirigée par David Cameron prône maintenant l’interdiction totale de "toute substance destinée à la consommation humaine" capable de produire un effet psychoactif.

Juridiquement, le projet de loi défini comme  une infraction la production, la fourniture, l'offre de livraison, la possession avec intention de fournir, l'importation ou l'exportation de substances psychoactives. Mais pas la possession pour usage personnel. La législation prévoit des exemptions pour les substances psychoactives comme l'alcool, le tabac et la caféine, et le Misuse of Drugs Act continuera de réglementer les drogues qui sont déjà illégales (plus de 350...).

Les universitaires ont critiqué ces propositions. Ils ont affirmé que cela pourrait sérieusement entraver la recherche scientifique. David Nutt, l'ancien  conseiller drogues du chef du gouvernement a déclaré au Guardian que cette interdiction "mettra fin à la recherche sur le cerveau dans ce pays. Ca sera désastreux. L'interdiction de certains legal high a déja été très destructeur pour la recherche sur la maladie de Parkinson et les médicaments anti-tabac. Si je veux travailler sur un nouveau traitement pour la maladie de Parkinson basé sur des produits chimiques similaires au Benzo Fury (ancienne drogue légale), alors ça me prendra un an pour obtenir une licence".

Les tenants d'une autre politique des drogues critiquent également cette mesure, mais pour d'autres raisons, centrées sur le lien entre prohibition et marché noir.
Charlotte Bowyer, responsable de la politique numérique à l'Institut Adam Smith, a déclaré: "Une interdiction générale sur les substances psychoactives peut éliminer les headshop des  centres ville, mais va pousser le commerce clandestin et encourager une flopée de nouvelles drogues alternatives encore plus dangereuses."

Malgré ces oppositions, le projet de loi devrait recevoir un large soutien lors de sa deuxième lecture à la Chambre des Lords. Ce soutien et le fait que cette guerre aux legal highs est un retournement à 180° pour le premier ministre David Cameron, qui déclarait en 2005 que « les politiciens essaient de faire appel au plus petit dénominateur commun avec des postures de politiques dures, en demandant répression après répression. Cela fait des décennies que la politique anti drogues échoue», illustrent les difficultés à faire émerger des politiques de régulation plus équilibrées, intégrant la nécessité d’un marché contrôlé.

Mais au-delà, et alors qu’arrive la traditionnelle journée internationale « Support, don't punish », cette décision montre combien les législations européennes sont dépassées et les gouvernements désemparés face à la montée des legal high. Ils s’enferment dans des réponses cyniques : pour prouver à leur opinion publique qu'ils font quelque chose, les gouvernements choisissent de frapper ce qui est le plus visible, c'est à dire ici les headshop.

Ce constat est renforcée par les chiffres d'impact ridicule que donne le Home Office : l'interdiction générale pourrait conduire à réduire de 12 le nombre de décès dûs au legal high chaque année en Grande-Bretagne quand on sait que l'héroïne à elle seule y est responsable de 1200 mort par an, sans parler de l'alcool et du tabac.

Même si cette législation ne refait pas l'erreur de pénaliser la possession pour usage simple reportant la pénalisation sur les vendeurs, elle échoue à poser la question d’une régulation assumée.

La France elle n’arrive pas à sortir d’approches encore plus écartelées et dépassées : après avoir interdit la famille des cathinones, elle vient d'interdire les 7 familles de cannabinoides de synthèse (des centaines de molécules qui pour la plupart ne sont pas sorties en France) et d’en pénaliser leur usage dans le même mouvement où elle continuait d’affaiblir la loi Evin, dont la seule logique était pourtant de réguler le marketing et la publicité incitant à consommer des alcools.

Il n’existe pas de politiques des drogues parfaites, il faut l’assumer. Mais certaines restent pires que le mal qu’elles veulent combattre : ne pas reconnaître que les substances pyschoactives sont aussi des marchandises qui n’échappent pas à la loi de l’offre et de la demande, ne pas vouloir les inscrire dans un marché que l’Etat se donnerait les moyens de contrôler, passer d’interdits absolus à l’absolue faiblesse face aux lobbys de l’argent, conduit à des échecs douloureux.

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Salle de shoot dans la loi de santé : six ans de débat

Le projet de loi sur la santé porté par la ministre Marisol Touraine est soumis ce mardi au vote solennel en première lecture à l'Assemblée Nationale. L'occasion de revenir sur la genèse des articles 8 et 9 sur la réduction des risques et les salles de consommation à moindre risque (appelé vulgairement salle de shoot).

Ces articles consacrent un travail initié à Montpellier il y a 20 ans, et relancé il y a six ans, quand les membres du collectif du Réseau Français de réduction des risques, Elisabeth Avril, Jean Louis Bara, Bernard Bertrand, Pierre Chappard, Jean Pierre Couteron, Patrick Favrel et Fabrice Olivet, issus d’associations d'usagers de drogues et de professionnels, (Asud, Fédération Addiction, Safe, Sos Hépatites Paris, Gaia, salledeconsommation.fr, Act Up – Paris) installent le 19 mai 2009 une vraie-fausse salle de consommation à Paris pour faire comprendre aux responsables politiques et au grand public l’importance et l'utilité de cet outil.

Cette action, qui donne l'occasion à nos collègues de Quai9 à Genève d'expliquer le fonctionnement de leur salle de consommation, va donner des résultats au delà de toute attente, notamment dans les médias qui sont nombreux à se déplacer. Emmené par Jean-Marie Le Guen, adjoint à la santé du maire de Paris, le conseil de Paris vote une subvention fin 2009 pour l'association Elus Santé Publique et Territoires, pour permettre à des élus de toutes tendances et de différentes villes (Paris, Marseille, Bordeaux, Lille, Le Havre, Saint-Denis, et Annemasse) d'expertiser le sujet. Dans le mouvement, d’autres acteurs rejoignent le collectif, comme Christian Andréo, d’AIDES, et Maryse Belluci-Dricot, pour PSA-SOS DI.

Roselyne Bachelot, ministre de la santé de l'époque, s’empare du débat au mois de juillet à Vienne à la conférence mondiale sur le sida de 2010, armée de l'expertise collective de l'Inserm sur la réduction des risques qui vient d'être rendue. Mais elle a contre elle le président de la Mildt Etienne Apaire, puis le premier ministre qui déclare les salles « ni utiles, ni souhaitables » en août. Loin de clore le débat, cette allocution le fait flamber, si bien que chaque responsable politique s'exprime sur le sujet. Il révèle une droite plus éclatée qu'il n'y parait. André Rossinot, le maire de Nancy, Michel Heinrich le député-maire d'Epinal, Jean-Claude Gaudin, le maire de Marseille, Nadine Morano, secretaire d'Etat aux familles prennent la défense de la ministre de la santé. L'Assemblée Nationale et le Sénat s’emparent également du débat en proposant un commission bi-camérale sur le sujet de la toxicomanie.

Au moment le plus chaud du débat, le 19 août 2010, et alors que deux membres du Réseau, Pierre Chappard et Jean-Pierre Couteron, accompagnés de Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel de Médecine, ont rendez vous avec le Premier Ministre, un sondage Ipsos-Lettre de l’opinion montre que 53 % des Français sont favorables à l’ouverture de salles de consommation à moindre risque.

En septembre 2010, le rapport d'Elus Santé Publique et Territoire, dont les membres ont travaillé pendant 6 mois en auditionnant des experts et en allant visiter les salles de Genève et de Bilbao, demande que « les conditions légales soient réunis pour expérimenter les salles de consommation en France ».

La commission bi-camérale, composée majoritairement d'opposants, n'apporte rien au débat lorsqu'elle rend ses conclusions l'année suivante, alors que la Mairie de Paris organise en grande pompe deux conférences sur les salles de consommation où sont présentés des expériences étrangères (Barcelone, Genève, Vancouver, Amsterdam)

Les élections présidentielles approchent, ouvrant le temps des promesses : François Hollande déclare à Seronet, le site d'information d'Aides, que si il est élu, « il laissera Paris et Marseille expérimenter les salles de consommation à moindre risque ». Aussitôt élu, la ministre de la santé confirme l'engagement de François Hollande et déclare au Réseau Français de Réduction des Risque lors de Solidays que « ces salles sont utiles et intéressantes ».

A la sortie de l'été 2012, c'est le calme plat, aucune nouvelle du ministère de la santé sur les modalités de mise en œuvre de ces salles. Jean-Marie Le Guen met une nouvelle fois les pieds dans le plat en demandant l'expérimentation des salles de consommation. C'est l'occasion d'un nouveau débat politique. Pierre Cohen, le maire de Toulouse, Catherine LeMorton, la présidente de la commission des affaires sociales de l'assemblée nationale, Manuel Valls, Claude Bartolone, Hervé Morin et Alain Juppé soutiennent l'expérimentation. La ministre des Affaires sociales et de la Santé, Marisol Touraine, annonce que les conditions seraient réunies « assez rapidement » pour des expérimentations de salles d’injection de drogue et missionne la MILDT pour lui faire des propositions sur le sujet.

Début 2013, les acteurs se mettent doucement en place pour pouvoir expérimenter les salles de consommation. Le maire du 10eme arrondissement de Paris, Remi Feraud, organise des réunions de concertation avec les habitants de la gare de Nord. Les associations Gaia Paris et Médecins du Monde, les porteurs de la future salle parisienne, travaillent avec la police, la justice, la mairie de Paris pour définir les conditions acceptables pour chacun. La Fédération Addiction et le Réseau Français de Réduction des Risques organisent des séminaires de réflexion pour associer tous les professionnels à ce nouveau souffle porté par les salles.

L'association Gaia commence à recruter les futurs professionnels de la salle quand le Conseil d'Etat annonce le 10 octobre 2013 que ces «lieux de consommation de drogue à moindre risque» ne sont pas conformes à la loi de 1970 sur les stupéfiants (qui interdit et pénalise l’usage de stupéfiant), et que le décret prévu par le gouvernement ne suffit pas à sécuriser le dispositif. Il conseille d’inscrire les salles de consommation dans une loi pour leur donner une base légale. A un mois et demi de l’ouverture prévue, tout est remis en cause.

Grand moment de découragement et de colère pour les acteurs de la réduction des risques, grand moment de flou aussi : le projet est-il encore d'actualité ? Il faudra presque un an d'attente, jusqu’après les élections municipales, pour que Marisol Touraine annonce en septembre 2014 que la sécurisation juridique des salles de consommation serait intégrée dans le projet de loi sur la santé publique.

Finalement, deux articles sur la réduction des risques sont proposés dans cette loi : l'article 8 donne une nouvelle définition de la réduction des risques, et l'article 9 une base légale aux salles de consommation. L'article 8 défini la réduction des risques (RDR) de manière plus vaste et globale que dans la loi de 2004, très centrée sur les infections virales. Cette nouvelle définition élargit la RDR à toute les substances psychoactives (y compris licites) alors que la loi de 2004 s'arrêtait aux stupéfiants. L'article 8 sécurise également tous les acteurs de la réduction des risques (professionnels et bénévoles), et il déclare que « La politique de réduction des risques s’applique aux personnes détenues selon des modalités adaptées au milieu carcéral », permettant à la réduction des risques de rentrer en prison.

Le 8 et 9 avril, les articles que le rapporteur Olivier Veran a largement préparé, sont adoptés à l'Assemblée Nationale suite à un débat mené par Marisol Touraine et Catherine Lemorton et qu', et où les députés opposés aux salles de consommation se sont caricaturés. Nous avons entendu des propos d'un autre temps sur les usagers de drogues et les addictions : « La toxicomanie n’est pas une maladie : c’est un mode de fonctionnement, un rapport à la réalité, un jeu terrible avec la mort, une volonté d’autodestruction qui naît de la rencontre entre un produit, une personnalité – tout le monde ne devient pas toxicomane lorsqu’il rentre en contact avec un produit – et une culture » (Nicolas Dhuiq) « La toxicomanie est une affaire trop grave pour être abandonnée à des addictologues victimes du syndrome de Stockholm, devenus les otages indûment empathiques de leurs patients » (Elie Aboud) « L'approche globale de la dépendance, alcool, tabac, drogue est aussi facteur de banalisation. » (Dino Cinieri)

La loi de santé publique doit maintenant passer devant le Sénat, même si elle n'est pas encore inscrite à son ordre du jour. Cela fera 6 ans de plaidoyer ! Combien de temps devront-on encore attendre les villes de Paris, Strasbourg ou Bordeaux pour mettre en place des salles de consommation ? Combien de temps devront encore attendre les usagers et les riverains pour que leur soit proposé une solution qui va améliorer leur vie ?

Pour les vidéos des débats de l'Assemblée Nationale :
- http://videos.assemblee-nationale.fr/video.6641.1ere-seance--questions-au-gouvernement--modernisation-du-systeme-de-sante-suite-article-8-a-art-7-avril-2015
- http://videos.assemblee-nationale.fr/video.6646.2eme-seance--modernisation-su-systeme-de-sante-suite-article-9-adt-18-a-article-12-inscrits-7-avril-2015

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Les supermarchés de drogues en ligne : les dealers de rue sont-ils en voie de disparition ?

Le procès de l'administrateur de Silk Road, début février, puis hier, la disparition du plus gros marché internet de vente de drogues Evolution, mettent en lumière une évolution du trafic de drogues illicites : l'achat et la vente en ligne via des plate-formes anonymes cryptées (anonymous marketplace). Une tendance de fond qui risque de révolutionner le marché des drogues, mais aussi la façon de faire la réduction des risques.

Les marchés anonymes des drogues en ligne, qu'est ce que c'est ?

Tout en offrant l'anonymat, ces plateformes fournissent l'infrastructure pour que vendeurs et acheteurs effectuent des transactions en ligne, de façon similaire à d'autres marchés internet comme eBay, avec leurs mécanismes de règlement des conflits, des notes pour les vendeurs et les acheteurs, l'hébergement de forums de discussion. Elles se rémunèrent à la commission, généralement autour de 4%. Elles se nomment Silk Road, Evolution, ou Agora.

Ces marchés gardent leur emplacement secret et préservent l’anonymat des acheteurs et vendeurs par la combinaison de trois technologies : Tor, PGP et Bitcoin. Tor permet d'anonymiser la navigation sur internet, PGP d'envoyer des mails sécurisés et cryptés et le bitcoin est la fameuse monnaie internet utilisée pour faciliter les transactions anonymes.

Même si une large variété de produits apparaissent sur ces plate-formes, les drogues traditionnelles (cannabis, Lsd, Mdma, héroïne…) et les drogues issues de prescriptions médicales sont les plus achetées. Sur Silk Road, aux USA, en Grande Bretagne ou en Australie, c'est le MDMA qui était la drogue la plus achetée, suivie par le cannabis et le LSD. La vente des nouvelles drogues de synthèse sur le deep web semble limitée.

Sur le site de Psychoactif, Mai complète l'explication du fonctionnement de ces marchés online : "J'utilise principalement Evolution : l'interface est propre et claire, et les vendeurs ont des profils qui donnent accès facilement aux informations de bases comme les conditions de vente ou les commentaires des clients (positif, neutre, négatif). Les vendeurs sont également classés par "niveau" en fonction des commentaires positifs, du nombre de vente et de l'ancienneté.

J'ai réalisé, pour le moment, plus d'une dizaine de commandes. La majorité arrive chez moi en moins d'une semaine, tout dépend des vendeurs et du pays d'origine (la plupart sont envoyés d'Amsterdam). Mon adresse ainsi qu'une fausse adresse de retour (avec souvent le nom d'une fausse entreprise) sont imprimées sur une enveloppe de format classique. Le produit est souvent dissimulé dans des prospectus et protégé par un ou plusieurs emballages afin d’éviter les altérations du produit (moisissures, lumière, etc....) et les chiens renifleurs.

Comme l'a dit romain1412 le système d'"escrow" permet de libérer l'argent au vendeur qu'une fois le produit reçu et conforme. Certains vendeurs demande de "Finalize Early" (FE), c'est à dire de libérer les fonds avant l'expédition du produit. Sur le site que j'utilise, seuls les vendeurs ayant atteint un certain niveau peuvent se permettre de demander ce moyen de paiement. Ces modes de paiement sont spécifiés avant l'achat.

Dans le cas d'un problème avec la commande il est possible d'ouvrir une "dispute" ce qui alerte automatiquement un modérateur qui va alors participer à la discussion entre le vendeur et l'acheteur mécontent. Cette dispute peut aboutir au remboursement du client.

J'ai toujours reçu mes commandes, que ce soit en mode escrow ou FE. Les seuls soucis auxquels j'ai dû faire face ont été des problèmes de retard de livraison.

Souvent les sites possèdent un forum de discussion. C'est un élément important dans le choix d'un vendeur car il permet d'avoir des commentaires plus détaillés sur chaque vendeur : communication, délai de livraison, emballage, discrétion, qualité du produit, etc...
En ce qui concerne la qualité, les utilisateurs donnent leur opinion en fonction de leur expérience, parfois certains acheteurs testent leurs produits à l'aide de kit de test et transmettent les résultats sur le forum, certains utilisent même des laboratoires, il ne reste plus qu'à s'assurer de la véracité de ces résultats.
Le forum est également utile pour des conseils variés sur le deep web, la livraison de drogue, des conseils en réduction des risques, l'alerte des modérateurs concernant des arnaques possible d'un vendeur, etc...

Il m'est arrivé plusieurs fois d'obtenir des échantillons gratuits de la part de nouveaux vendeurs qui souhaitent se créer une réputation ou de vendeurs installés qui souhaitent donner une idée de la qualité de leur nouvel arrivage ou d'un nouveau produit."

Les avantages des marchés en ligne

Dans une étude des tendances consacrées à l'achat de drogues sur internet , l'EMCDDA (European Monitoring Center for Drugs and Drug Addiction) recense les principales raisons invoquées par les utilisateurs de ces plateformes : «un large éventail de drogues», «une meilleure qualité», «il est plus facile à commander en ligne» et «un achat plus confortable à des vendeurs avec des notes élevées". En outre, l'anonymat des sites, leurs forums de discussions et leurs systèmes de transactions avec une livraison rapide sont cités comme des bénéfices, ainsi que la réduction du risque de violence, acheteurs et vendeurs ne se rencontrant jamais face à face.

Les utilisateurs de Psychoactif qui ont utilisé ces marchés en ligne confirment ces avantages : Gastox témoigne : "Moi personnellement j'ai été attiré par les prix et la qualité, car dans mon coin, pour le shit ou la weed, c'est soit cher ou soit de mauvaise qualité (pas tout le temps). Sur les marketplace on peut trouver de la bonne qualité à prix raisonnable et surtout une étendue de choix énorme ! ". Ou encore Brak : "perso je trouve que c'est un moyen très chic de se faire un petit extra ! Ayant coupé les ponts avec le milieux depuis plusieurs années après 16 années de dépendance et 5 ans d'abstinence, (sans parler de mon Sub quotidien) j'avoue que de se faire livrer son keps par le facteur, alors qu'avant ct galère, stress et tutti quanti y'a un côté jouissif..." ou encore Luceed "Etant client et usager régulier de Evolution Marketplace, je reçois pratiquement toute ma drogue par internet et par la poste. C'est pratique quand on a pas de plan dans sa ville, ou qu'on est trop timide pour aller demander aux gens... Bref, j'ai passé déjà une quinzaine de commandes, toutes sont arrivées à quelques exceptions près. Les vendeurs sont courtois et répondent aux messages (ça dépends duquel hein) et on peut savoir à l'avance a qui l'on aura à faire grâce au système de réputation/level et aux feedbacks. Les prix sont beaucoup moins chers que dans la rue pour un produit de meilleure qualité souvent.". Ou encore JMZ : "Après le truc cool du deep web c'est qu'au moins ça pourri pas la vie des gens dans la cité ( et ça écarte les gamins aussi), c'est entre autre pour ça que je boycotte les cités. Et ça évite aussi les tarés comme le mec qui voulait te casser les jambes, ce genre de mec se croit dans un flm pcq ils vends des drogues"

Les autres avantages des ces marchés par rapport au deal de rue sont la possibilité de réduire les risques liés à l'usage de drogue pendant l'achat. Ça peut être par exemple de pouvoir avoir accès aux témoignages sur les drogues vendues, les discussions en ligne sur la réduction des risques, et à des ressources pour les personnes qui souhaitent réduire leur consommation. La réduction des risques peut se faire encore plus tôt dans le parcours de l'usager. L'exemple le plus fameux étant le Docteur X (www.elsubmarinodeldoctorx.com) qui a fourni des services de réduction des risques aux utilisateurs de Silk Road, telles que des informations, des conseils et un service d'analyse des drogues.

Il n'y a pas que les usagers qui trouvent des avantages à ces marchés en ligne, les dealers aussi, car ils y trouvent (Selon l'EMCDDA) (1) un marché mondial pour leurs produits; (2) la capacité de vendre à des clients qui ne sont pas déjà connues d'eux; (3) la capacité de négocier de manière anonyme; et (4) la possibilité de commercer dans un relativement environnement à faible risque. C'est un nouveau paradigme pour le trafic : là ou le deal de rue est fortement localisé, le deal en ligne bénéficie de la toute la puissance de l'internet mondialisé et ouvert à tous, là ou le deal de rue est très voyant et risqué, le deal en ligne se cache derrière des outils cryptés et sécurisés qui résistent même à la NSA (comme Tor ou PGP).

Et les inconvénients...

Les marchés anonymes de drogue en ligne ont aussi, pour les usagers et comme pour les dealers, une série d’inconvénients. Ils n'échappent pas complètement à la répression, la stratégie des forces de l'ordre est dans ce cas d’organiser la perturbation du marché (et non son éradication impossible). Cela inclut la réduction de la confiance en l'anonymat des marchés en ligne, l'identification et l'arrestation des dealers. Pratiquement, elles organisent des opérations pour infiltrer les marchés online, s'établir en tant que dealer de confiance, et arranger un rendez-vous en face à face. D’autres actions ont pour but de faire connaître la présence policière aux usagers et d’en faire parler dans les médias. C'est le cas de l'opération Onymous en novembre 2014, lorsque le FBI a fait tomber plusieurs site du deep web dont Silk Road 2. Cette opération, essentiellement médiatique, était destinée à faire peur plus qu’à véritablement réprimer : la moitié des sites dont le FBI avait revendiqué la destruction n'était en réalité que des clones et des arnaques.

Ces marchés en ligne n'échappent pas non plus aux effets pervers du commerce. Comme tous les marchés, légaux ou illégaux, ils ont leur lot d'arnaques. Ji Air un acheteur chevronné du deep web raconte ainsi quelques expériences: "Mes premières commandes se sont très bien passées, et puis j'ai eu mon premier scam (carrotte), un anglais archi bien noté qui a décidé de changer d'air et en a profité pour arnaquer tous ses clients. Et la aucun recours, le mec se faisait payer en FE (Finalyse Early), c'est à dire que tu paies avant d'avoir reçu (à éviter quand on peut).. Peu de temps après, j'ai reçu un g de coke d'un mec avec 100% d'opinions favorable qui était de la merde, direct à la poubelle. Je l'ai contacté et le mec m'a rembourser illico et ce truc m'est arrivé plusieurs fois : le dealer vend de la fausse coke et quand un mec se plaint il le rembourse et comme la plupart ne le font pas –ou n'étant pas connaisseur, en sniff ils ont rien vu- ainsi il conserve sa réputation et peut continuer d'enfler les gens".

Mais le principal inconvénient se trouve dans la distribution postale qui relativise l’anonymat. C’est le principal talon d’Achille du système : les drogues arrivant dans une boite au lettre nominative, les douanes peuvent venir vous cueillir chez vous, surtout pour les grosses livraisons. Les dealers, qui connaissent l'adresse des acheteurs, peuvent aussi en profiter. Ji air raconte comment des dealers ont essayé de le faire chanter : « Faut faire gaffe à un truc sur le deep c'est qu'il y'a des vendeurs qui peuvent faire du chantage en menaçant de balancer ton adressse. Ca m'est arrivé 1 fois pasque le mec voulait me forcer à écrire un bon feedback alors que son truc était de la merde, mort de rire mais vas y balance mon grand, TOUT le monde sait déjà que je me défonce, tu parles d'un scoop.
Mais bon je suis pas fou, je commande jamais plus de 2g à la fois (ça limite les pertes et les risques)
Ce qui peut être délicat c'est pour ceux qui habitent chez leur parents ou qui se défoncent en loucedé de leur femme ou famille. Mais c'est clair que dans l'idéal tous les mecs qui se font envoyer des paquets genre stups devraient par sécurité avoir un drop anonyme
 »

Un nouveau paradigme

Le changement rapide des technologies en ligne et le web 2.0 transforme nos façons d'interagir à la fois commercialement et socialement. Au final, même si ces marchés en ligne ont leurs travers, ils révolutionnent les pratiques d'achat et de vente de drogues. Pour s'en convaincre, il suffit de regarder comment l'application online Amazone a changé le marché du livre, comment l'application Booking.com a révolutionner le marché des réservation d'hôtel, ou comment l'application Smartphone Uber à changer la donne pour les taxis. Il n'y a aucune raison pour que les drogues ne fassent pas leur révolution internet de la même manière. D'ailleurs, d'après l'EMCDDA, ce phénomène serait exponentiel. Nous en doutons d'autant moins quand on voit sur Psychoactif d’anciens usagers, habitués du deal de rue, témoigner de leur conversion à l'achat de drogues en ligne, ou de nouveaux usagers, comme Silmarien, n‘envisager que ce type d’achat : "pour ma part, je n'ai jamais chopé dans la street non plus, tout sur le deep web. Je pense qu'une nouvelle génération de tox se dessine."
Sans naïveté, il est important que les acteurs de la réduction des risques, notamment issus de l’auto-support, s’impliquent sur ce marché, eux aussi, et y apportent leur expertise, qui doit d’ailleurs se renouveler au regard des nouveaux enjeux.

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Purple drank, la nouvelle drogue des ados ?

Le purple drank, une boisson à base de sirop à la codéine et de sprite

Le purple drank, une boisson à base de sirop à la codéine et de sprite

Depuis quelques mois, pas une semaine ne se passe sans que les termes purple drank, lean ou sizzurp, sorte de sirop à la codéine, ne soient évoqués sur la communauté Psychoactif*. Serait ce une nouvelle tendance de consommation de la codéine ? Une recherche sur Google Trend le confirme. Mais quel est cet étrange sirop, dont une recette se retrouve sur 1001cocktails.com ?
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La politique française des drogues : l’impossible évolution ?

Le récent rapport du comité d’évaluation des politiques publiques consacré à la politique de lutte contre les drogues dresse un constat édifiant des résultats : la confrontation entre l’augmentation des usages et celle des sanctions, entre la diversification des usages et la complexification de la politique judiciaire, signe l’échec d’une politique centrée sur l’interdit pénal, notamment pour le cannabis. Cette double tendance à la hausse devrait ouvrir un débat sur la nécessaire évolution de la politique. Mais le système politique français manichéen aboutit à la triste juxtaposition de deux propositions qui s’ignorent. Certes, et c’est une première, ces propositions évoquent la nécessité de dépasser la loi de 70, mais comment ne pas regretter ce face à face stérile.
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Drogues : changer de politique pour mieux réguler

Le 4ème rapport de la commission mondiale sur les drogues « Prendre le contrôle : Vers des politiques des drogues qui marchent » sort aujourd'hui. Il fera date.
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Le New York Times dénonce les dangers de la prohibition du cannabis

Un grand quotidien américain, le New York Times, vient de prendre position pour une évolution de la législation sur le cannabis. Comparant sa pénalisation à la prohibition et ses conséquences, il a clairement titré «Abroger la prohibition, à nouveau».
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Mort d’Alexander Shulgin, « parrain » de l’ecstasy  et des nouvelles drogues de synthèse

Le chimiste et pharmacologue américain Alexander "Sasha" Shulgin, connu pour avoir introduit la MDMA (ecstasy), est décédé ce lundi à 88 ans.

Shulgin a été une icône du mouvement psychédélique. Synthétisant plus de 230 substances psychoactives, les testant sur lui-même puis faisant des rapports détaillés de ses expériences, il a mis ses connaissances au service des usagers et des professionnels, les retranscrivant dans de nombreux livres, comme PiHKAL (Phénéthylamines que j'ai connues et aimées) et TiHKAL (Tryptamines que j'ai connues et aimées). Avec un groupe d'amis, il a testé régulièrement ses créations et développé un classement systématique des effets des différentes drogues, connu sous le nom de « Rating Scale Shulgin », avec un vocabulaire permettant de décrire les sensations visuelles, auditives et physiques. Parmi ses découvertes, les composés de la famille 2C-x (comme le 2C-B) et de la famille DOx (comme DOM) sont devenus depuis des « nouvelles drogues » très recherchées.
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LA LEGALISATION DU CANNABIS EN URUGUAY : PARTAGER LA LIMITE

Le mardi 6 mai, l’Uruguay va publier les décrets d’applications de la loi  votée en décembre 2013 et autorisant la consommation de cannabis. Présentés il y a quelques jours, ces textes fixent le prix (moins d’un dollar le gramme), le lieu de vente, dans des pharmacies volontaires, par autoproduction ou dans des clubs de producteur, la quantité maximale autorisé à l’achat, soit 10g par semaine. L’inscription sur un registre national sera nécessaire, excluant l’achat par des mineurs ou des étrangers. Enfin, les décrets déterminent les conditions d’agrément des producteurs (le gouvernement lancera un appel au privé pour accorder les licences nécessaires) et des clubs de consommateurs. Elle en interdit la publicité. La première récolte sera donc attendu au plus tôt à la fin de l’année.
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CANNABIS : l’abus (de polémique) nuit gravement à la santé !

L’Académie nationale de médecine avait consacré sa séance du 25 mars 2014 au cannabis et aux nouveaux cannabinoïdes de synthèse. Nous n’avions pas réagi, tant sur ce sujet elle persiste dans des avis monothématiques qui listent des dangers et exhortent à la sanction. Celui-ci ne déroge pas à la règle, il prône une pédagogie soutenue en direction des jeunes que personne ne conteste, une vigilance particulière au sein des établissements psychiatriques et le refus de toute concession vis à vis de « ceux qui contribuent à l’expansion de cette  toxicomanie ».  Il désigne deux cibles nouvelles : les achats sur internet de graines ou nouveaux cannabinoïdes de synthèse et la vente aux mineurs du matériel permettant la culture et la consommation.
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