Invité du dernier numéro de l’émission
Expression Libre, le président du Mouvement des Démocrates Sénégalais,
Mady Gassama, s’est prononcé sur la situation socio-politique du
Sénégal. Analysant les dernières actualités nationales, l’opposant qui vit à
Paris s’est dit favorable à l’envoi de soldats sénégalais dans des opérations de maintien de la paix à travers le monde. «
Mais, nuance t-il, à condition que cela se fasse dans le cadre d’une résolution des
Nations Unies. »
Et puisqu’aucun cadre légal n’encourage ni n’accompagne cette mission sénégalo-saoudienne -qui ressemble plutôt à du mercenariat-, le président du
MDS s’en est démarqué. A l’en croire, « la volonté de
Macky Sall d’envoyer les
Diambars faire le boulot que les saoudiens semblent faire leur, ne prédirait rien de bon pour le Sénégal. »
Pour rappel, c’est pour des raisons de rivalité avec l’
Iran -qui soutient les milices Houthis qui ont mis un terme au régime sunnite yéménite- que les monarques saoudiens bombardent le
Yemen, en toute illégalité depuis plusieurs semaines; dans l’indifférence totale de la communauté internationale.
Légaliste, M. Mady Gassama est d’avis que « c’est un précédent dangereux que d’envoyer les Diambars au Yemen sans mandat."
Prémonitoire, il a soutenu que « demain, si le Yemen portait plainte contre Macky Sall, il pourrait se retrouver devant la Cour Pénale internationale. »
Jean Pierre Bemba, le vice-président congolais qui avait envoyé ses hommes au secours de
Ange Félix
Patassé, l’ancien président centrafricain, est poursuivi, aujourd’hui, par la justice internationale dans le même cadre.
Pour lui, ce n’est ni « les liens ancestraux qui lient le Sénégal à l’
Arabie Saoudite » ni les prétextes de « voler au secours des lieux saint de l’islam« , comme l’ont prétexté le chef de l’Etat sénégalais et sa cour pour justifier leur décision qui y changeront quoi que ce soit. «La raison cachée, selon lui, pourrait être les pétrodollars et le soutien des monarques sur le plan international.»
Bien qu’étant un opposant déterminé, Mady Gassama reste, aussi, un homme juste et mesuré dans son jugement. Et lorsque le chef de l’Etat sénégalais a déclaré sa volonté de supprimer les visas d’entrée au Sénégal, il a salué « la lucidité de Macky Sall qui, en tant que humain, peut se tromper et reconnaitre son tort.»
En réalité, c’est Mady Gassama et son parti, le MDS, qui les premiers ont dénoncé la mise en place de ce visa d’entrée au Sénégal et déclaré ouvertement que le pays n’avait rien mis en place avant cette décision; et cela pendant que tout le monde applaudissait cette « décision non réfléchie.» Et lorsque Macky Sall leur a donné raison sans les nommer, lui, « ’opposant responsable» l’a remercié.
Alors, se prononçant sur la crise scolaire que traverse son pays, l’opposant a soutenu que « l’Etat et les syndicalistes doivent tout faire pour trouver une solution pérenne; afin de sauver les enfants du Sénégal. » Car, conseille t-il, si rien n’est fait, le pays ne pourra pas former ses futures élites. Et c’est le manque de formation des jeunes africains qui les poussent à prendre, par milliers, les embarcations dans l’espoir de trouver un meilleur avenir en
Europe.
Mais, en lieux et places de l’
Eldorado qui n’existe plus, nombreux, parmi eux, ne voient jamais les côtes occidentales.
Outré par le silence des institutions africaines face à la mort par noyade de milliers de jeunes dont les embarcations ont sombré dans la
Méditerranée, Mady Gassama pense que «c’est une honte qu’aucune voix forte ne se soit levée ni à l’
Union Africaine ni dans aucune autre structure pour pleurer et déplorer ces cas douloureux.»
Après tout, quand des présidents s’accrochent au pouvoir pendant des décennies et tuent toute idée de développement et de démocratie en ses concitoyens, ils participent à ces meurtres de masses.
Accompagnateur dans la régularisation de personnes sans-papiers en
France, le président du MDS pense que "l’Europe n’est plus la solution à la pauvreté si elle l’a une fois été. Et cela doit être dit avec fermeté afin de sauver nos jeunes. Nos autorités doivent faire le maximum pour former et garder les jeunes sur place. »
Confronté chaque jour à la déchéance des immigrés, au parcours, parfois, chaotique des migrants en France, il a rappelé l’exemple d’un sans-papier qui doit quitter la France, ce 20 mai, pour le Sénégal après avoir vécu plus de 20 ans dans l’irrégularité.
20 ans à être cloitrée dans une chambre si il en trouve, balloté de chambres d’hébergement d’urgence en centres d’accueil précaires.
Une vie perdue. Une de plus, dont les autorités sont, en partie, responsables.
Babacar Touré
- published: 20 May 2015
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