Oran, juin 2010 par Malika Rahal

Textures du temps, carnet du mois d’Août 2015

Hier, à 12h, nous avons clôturé les votes en ligne du mois de Juillet pour l’élection du carnet du mois d’Août.

Les raisons de l’organisation de ce vote informel, sur les réseaux, et comme entrée nouvelle dans la diversité et la richesse d’Hypothèses, mêlent convivialité, exploration et découverte d’abord, valorisation bien sûr et militantisme en faveur de l’écriture imaginative, généreuse et donc partagée, comme pratique de valeur de la pratique scientifique.

Si vous avez déniché dans vos lectures des carnets créatifs et vivants, n’hésitez pas à nourrir la liste collaborative amorcée ici, en prévision des mois à venir.

Les jeux donc étaient fait à 12h, le 4 Août, avec 45 participations, et la belle victoire du carnet Textures du temps – Algérie contemporaine.

Des trois carnets en lice, je dois avouer que je n’étais pas encore lectrice de celui-ci, par méconnaissance, alors que fidèle de (Dis)cursives et de Damoclès.

La découverte d’un nouveau carnet-pépite, l’un des enjeux de ce petit jeu, j’en bénéficie donc directement : merci aux participants et à Marie-Anne pour la suggestion !

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Vivant, c’est peut-être le plus pertinent des qualificatifs pour ce carnet, qui s’intéresse à l’histoire récente de l’Algérie. L’intérêt de la chercheuse pour l’Algérie contemporaine, Malika Rahal, accompagnée depuis l’ouverture du carnet en avril 2012 d’au moins 8 auteur.e.s, se confronte au questionnement permanent sur sa pratique même d’historienne, dans un élan réflexif et épistémologique, et à l’urgence de saisir l’histoire du temps présent auprès des témoins vivants d’aujourd’hui. L’accroche même, présentation du carnet, est saisissante :

Une fois franchi le seuil de 1962, faire de l’histoire est (presque) un autre métier. Outre la question des archives qui deviennent très difficilement accessibles, c’est la texture même du temps qui apparaît transformée. (…) Mais, pour l’heure, les témoins sont tout ce que nous avons, nous autres historiens, pour travailler. Sauf à renoncer entièrement à l’histoire, nous n’avons pas le choix, car si la réapparition d’archives est incertaine, la disparition progressive des témoins, elle, est inéluctable.

Grâce à ce carnet, ce sont des mondes et des regards qui sont partagés, des rencontres dans la puissance de la transmission de celle ou celui qui parle à l’historien.ne, et livre un témoignage. Le rapport au temps, saisi une seule fois, mais pour dire longtemps ; et le rapport à sa propre pratique historienne, à l’enjeu de la rencontre, des histoires qui se disent, se croisent, et à l’enjeu de l’Histoire, viennent se tisser au rapport à l’écriture en ligne, au témoignage en abîme des chercheur.e.s qui reçoivent précieusement la parole des témoins, et le disent, le partagent, construisent une histoire contemporaine, en construisent en ligne les traces, les archives, pour lutter contre « le temps sans trace ». La prégnance de ces interrogations, et ce sentiment sous-jacent de la responsabilité, dans le témoignage, de la transmission et de la compréhension, sont à mon sens la source même de la créativité et de la richesse de ce carnet.

On plonge dans les archives des billets, comme dans une galerie de rencontres et de moments capturés pour lutter contre l’éphémère de la mémoire, qui nous touchent et nous parlent sous forme de billets, qui disent la violence de la guerre. En tant que non-historienne, ces billets me parlent presque plus, peut-être, que si la continuité avait déjà été reconstruite : le sens est en cours d’émergence, et on se sent au plus près des témoins vivants, grâce au propos de l’historien.ne que ne s’efface pas dans la perspective qu’elle/il nous donne à voir.

Le soin de l’illustration, le risque ou plutôt la force de l’interrogation permanente partagée de l’historien, la présence du « je », et de l’émotion dans l’écriture, font des auteur.e.s des témoins que le lecteur du carnet a lui aussi le privilège de rencontrer.

De l’émotion et de l’incarnation de l’histoire, par les témoins et les chercheurs

« Nedjib Sidi Moussa (…) revient (…) sur les difficultés de l’histoire du temps présent, lorsqu’une génération de témoins avance en âge, lorsque leurs témoignage deviennent plus secs, lorsqu’ils disparaissent en nous laissant – nous les historiens – avec nos enregistrements, et avec notre chagrin. »

En tant que carnetière, ce carnet me donne envie d’échanger, d’écrire, de faire des entretiens, de croiser les perspectives, au-delà des disciplines et des sujets de nos recherches : pour revenir à la chair et au sel de nos pratiques de recherche. Et c’est ce que je trouve et recherche sur Hypothèses.

Les votants ne s’y sont pas trompés, Textures du temps a la matière dense et précieuse des carnets qui surprennent de billet en billet, car les auteurs sont de véritables habitants du lieu numérique qu’ils se sont construits, et Malika Rahal sait visiblement lui donner corps, dans une dynamique individuelle ouverte ensuite au collectif.

Et parce qu’un carnet se saisit vraisemblablement mieux quant on le suit dans le temps, dans sa construction, sa logique, ses errances, mais surtout sa richesse, celle que les auteurs ouvrent dans un rapport aigu au temps de la recherche, j’invite celles et ceux qui ont voté pour ce magnifique lieu numérique, que je vais suivre désormais, à témoigner de ce qui les arrêtent, les interpellent, les captent dans ce carnet. Leur parole, est la bienvenue, dans les commentaires !

En vous souhaitant de belles lectures et une surtout une belle continuation aux trois carnets-pépites du mois de juillet, et en particulier à celui qui cherche à saisir le temps morcelé, dans toute sa précieuse texture !

Crédit de l’image d’en-tête : Malika Rahal, Oran Juin 2010

Vote pour le carnet du mois, juillet 2015

Pour cette première élection du carnet du mois (le détail de l’organisation est ici), nous avons choisi les trois carnets suivant :

Damocles for ever. Tenir le pas gagné, carnet de Marie Ménoret

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À propos

Ce carnet a pour but de converser sur les thèmes suivants éclairés à la lueur de la sociologie : Cancer, Maladie, Médecine, Science, Santé.

Premier billet

«Nos premiers maîtres de philosophie sont nos pieds, nos mains, nos yeux. Substituer des livres à tout cela, ce n’est pas nous apprendre à raisonner, c’est nous apprendre à nous servir de la raison d’autrui» (Rousseau JJ, Émile(…), 1762). Mes premiers maîtres et mes premières maitresses de sociologie y ressemblent encore et toujours : pieds, mains, yeux et choses écrites. Raisonnées ou non. C’est donc ce que je tenterai d’utiliser ici.

(Dis)cursives. Linguistique discursive, études de genre, féminisme, carnet d’Anne-Charlotte Husson

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Premier billet

Déjà habituée à l’écriture bloguesque, que je pratique sur un blog militant consacré à la vulgarisation des études de genre et au féminisme, j’ouvre avec ce carnet un espace de réflexion (non monologique, je l’espère) sur les rapports et multiples points de rencontre entre les linguistiques discursives, les études de genre et les théories féministes. Lire la suite…

N.B. : Anne-Charlotte Husson est encadrée en thèse par l’une des carnetières, mais c’est l’autre qui a choisi ce carnet !

Textures du temps. Algérie contemporaine – تاريخ الجزائر المعاصر – Contemporary Algeria, carnet de Malika Rahal

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À propos

Dans l’Algérie contemporaine, il semble qu’il ne puisse y avoir d’histoire que de la guerre d’indépendance. Une fois franchi le seuil de 1962, faire de l’histoire est (presque) un autre métier. Outre la question des archives qui deviennent très difficilement accessibles, c’est la texture même du temps qui apparaît transformée. Nous pourrions bien sûr attendre que le « printemps arabe » touche l’Algérie et permette d’accéder à d’hypothétiques archives de d’état – encore qu’il puisse tout aussi bien conduire à la destruction massive des archives de sécurité. Mais, pour l’heure, les témoins sont tout ce que nous avons, nous autres historiens, pour travailler. Sauf à renoncer entièrement à l’histoire, nous n’avons pas le choix, car si la réapparition d’archives est incertaine, la disparition progressive des témoins, elle, est inéluctable. Ce carnet sera celui d’une plongée dans l’histoire contemporaine de l’Algérie, où les sentiments d’urgence permanente et de « temps haché » exprimés par les témoins touchent aussi les historiens. Il sera le lieu d’une réflexion nécessaire sur ce temps sinueux, constamment interrompu, temps sans trace, répète-t-on, et où la rencontre avec les témoins est à l’origine de toute tentative de restitution de la continuité.

Pour voter, c’est simple, il suffit de se rendre

⇓ au bureau de vote ci-dessous ⇓

Attention le vote sera clos le 4 août à 12h00, résultat  le 5 août !

Bureau de vote pour le carnet du mois

(au fond de la galerie est, juste devant le bureau d’Infusoir)

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Le carnet du mois

HHKB-Gold-plated-keyboardHôtesses de la Villa réflexive ou récentes propriétaires du Palais des mille et un carnets, vous connaissez vos carnetières : on est aussi un peu animatrices boute-en-train sur les bords, et on aime bien les jeux de société. Après le grand vote de décembre dernier pour le thème annuel du carnet Espaces réflexifs, voici notre nouveau concept : le concours mensuel du meilleur carnet sur la plateforme Hypothèses de la communauté francophone (même si certains carnets sont anglophones, hébergés sur Hypothèses antérieurement à l’internationalisation). Chaque mois, un carnet sera récompensé d’une sorte de clavier d’or absolument virtuel à l’issue d’un vote ouvert à tou.te.s, lancé sur Twitter et nos autres réseaux. Lire la suite

“140 caractères”, un drôle de petit carnet

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La carnetière-rédactrice du très riche Digital Intellectuals, blog du groupe de recherche junior “Berliner Intellektuelle 1800-1830“ ouvert en 2011, est une femme drôlement numérique et numériquement drôle. Les billets de Digital Intellectuals étaient déjà pleins d’humour, écrits dans un style alerte qui n’a peur ni de la subjectivité, ni de l’émotion, en français, en anglais ou en allemand. Lire la suite

Focus sur des carnets animés

Pour l’une de mes premières explorations transversales de la matière d’Hypothèses, j’ai choisi un fil conducteur animé, celui des carnets qui aiment le mouvement, le mettent en mots et en scène.

J’ai trouvé en creusant quatre carnets qui m’ont attirée et arrêtée, et dont je voudrais partager quelques extraits choisis, en toute subjectivité. Lire la suite

Hypothèses, Ouvre toi !

Il était une fois, au cœur de la plateforme Hypothèses, deux exploratrices-carnetières nommées Marie-Anne et Mélodie. Marie-Anne était linguiste-blogueuse tandis que Mélodie était STS-blogueuse1. Pour partager leurs coups de foudre, des pépites du blogging scientifiques et des carnets d’un nouveau genre, elles ouvrirent un carnet intitulé “Parcours – Il était une fois mille et un carnets“, et composèrent un hymne à l’imagination, à la créativité et à l’originalité de celles et ceux qui font vivre Hypothèses. Lire la suite

  1. STS : Science and Technological Studies []