Présentation du Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux

Le Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux est né en réaction à la répression qui s’est abattue contre les jeunes participant aux mouvements lycéens et étudiants de ces dernières années – plus particulièrement depuis l’hiver 2009, pour ce qui est des interpellations, des gardes à vue et des procès. En ce sens, il n’y a pas un avant et un après-10 octobre 2009.

Devant l’acharnement montré par la police et les tribunaux à l’égard de cette jeunesse parce qu’elle était politisée et active, il s’est agi pour le comité antirépression de les sortir de leur isolement, les « désenclaver » en quelque sorte, en leur montrant une solidarité active.

L’objectif du comité a été d’entrée d’élargir cette solidarité à tous les acteurs et actrices des mouvements sociaux en butte à la répression, en les soutenant non seulement face à celle-ci mais aussi dans leurs luttes mêmes. Le comité ne se cantonne donc pas à une attitude défensive : il entend avoir une démarche offensive en favorisant le développement des luttes sociales par leur mise en rapport et la recherche de leur conjonction.

Notre analyse de la répression

• La répression actuelle n’est pas spécifiquement poitevine, mais se développe partout à l’échelle mondiale. C’est pourquoi la politique sécuritaire française doit être replacée dans le contexte européen – il s’agit d’une mise en conformité avec les normes répressives en vigueur dans la « forteresse Europe ».

Elle correspond à une offensive généralisée des classes dominantes contre les classes populaires, pour favoriser une phase d’expansion du capitalisme et profiter de la relative faiblesse des mouvements sociaux. Le comité considère donc la « violence » pointée par les gouvernants pour exercer une répression comme devant être replacée dans le contexte d’une société aux rapports entre les classes eux-mêmes très violents : la violence est d’abord celle des rapports sociaux existants.

L’expérience de l’année 2008-2009 a montré, en France, que des mouvements sociaux pouvaient être puissants, mais ne pas parvenir pour autant à s’unifier en dépassant l’inertie des séries de journées d’action sans perpectives. Et si les forces de l’ordre se permettent aujourd’hui d’intervenir dans les manifestations pour y photographier, interpeller et provoquer de diverses manières les personnes qu’elles ont dans le collimateur, c’est bien parce que le rapport de forces joue en leur faveur : il y a quelques décennies, elles n’auraient pu procéder de telle manière. Le comité s’inscrit donc comme partie prenante, à sa modeste échelle, dans les tentatives faites pour inverser ce rapport de forces, dans une optique anticapitaliste ; il cherche à favoriser une dynamique sociale contribuant à une jonction entre les différentes luttes menées sur Poitiers et sa région, à partir de la répression exercée contre elles (ainsi y a-t-il eu ces derniers mois plusieurs démarches communes au comité et aux sans-papiers ainsi qu’aux associations les soutenant). Car seule la création d’un rapport de forces favorable peut permettre de gagner dans une lutte, ou du moins déjà de faire reculer le pouvoir (par exemple, l’organisation de rassemblements, la diffusion d’informations à travers tracts ou affiches, bref une activité militante suivie pour dénoncer un montage policier dans une inculpation peut obliger la « justice » à en admettre la réalité).

La répression aux multiples facettes qui s’exerce aujourd’hui dans l’hexagone ne peut en aucun cas être analysée comme une « dérive » par rapport à une situation antérieure « normale ». Cela fait de nombreuses décennies que, de loi d’exception en loi d’exception, d’extension en extension de la législation répressive, les gouvernements qui se sont succédé ont accompagné, chacun à leur manière, les offensives patronales pour « restructurer l’économie » (c’est-à-dire baisser le prix de la main-d’œuvre) et prévenir les velléités de révolte susceptibles d’en découler (les différentes réformes de l’enseignement allant elles aussi dans ce sens). De même, l’action policière actuelle est à dénoncer non comme une « dérive » ponctuelle, mais comme s’inscrivant dans une logique coercitive d’envergure.

Elle est essentiellement préventive : il s’agit de faire peur, de dissuader les jeunes mais aussi plus largement tous les salariés, les chômeurs, etc., de se politiser et d’agir. On assiste à une remise en cause de plus en plus évidente de la liberté d’opinion – le délit d’opinion venant s’ajouter à tous les moyens d’action aujourd’hui laissés à la libre disposition des forces de l’ordre. D’une part, la police anticipe, sans attendre qu’un quelconque fait ait justifié son intervention, en s’en prenant avec de moins en moins de retenue aux personnes qui, par leurs idées ou leur style de vie, refusent l’ordre établi. D’autre part, le pouvoir prépare sans cesse de nouveaux dispositifs législatifs visant à empêcher toute occupation du terrain politique par des mouvements contestataires radicaux. C’est pourquoi le comité estime avoir un rôle de solidarité mais aussi de politisation à jouer, en ce qu’il peut par ses interventions susciter des débats et aider à une réflexion dépassant le cadre de l’antirépression au sens strict.

La structure du comité

Le Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux est composé d’individus et soutenu par les associations, les partis ou les syndicats qui le désirent. Cette structuration basiste est fondamentale car si le comité devenait un jour un enjeu pour certaines structures organisationnelles, quelles qu’elles soient, et finissait par n’être plus qu’un cartel d’organisations il serait dévoyé de son objectif originel et perdrait toute efficacité et dynamique. C’est sa base individuelle qui en fait la vie et en crée la dynamique, par sa pratique ; et cette dynamique qui fait que depuis plusieurs mois des structures associatives, partidaires ou syndicales se sont déclarées soutien du comité et ont contribué à élargir la solidarité. Mais nous gardons à l’esprit que des préoccupations électorales aussi bien que la position d’opposants à un pouvoir de droite peuvent jouer dans le relatif « succès » du comité aujourd’hui – succès dont nous nous réjouissons. Quoi qu’il en soit, la démarche du comité n’est pas d’aller à la pêche aux signatures, et, de même, il n’amendera pas les principes de base qu’il défend pour en obtenir davantage.

Ses positionnements de base

Le comité défend tous les acteurs et actrices des mouvements sociaux contre la répression menée à leur encontre, sans opérer de tri entre les « bons » et les « mauvais » en fonction de leur culpabilité ou de leur innocence supposée. Ce positionnement ne signifie pas l’absence de critiques à l’égard des actions menées, et moins encore une adhésion obligatoire ou obligée à elles ; en revanche, le comité manifeste sa solidarité envers toutes et tous face à la répression ; nous les soutenons contre ce que l’appareil d’Etat leur fait, pas pour ce qu’ils et elles ont ou n’ont pas fait.

Le comité dénonce les manœuvres du pouvoir visant à criminaliser tour à tour des fractions de la population – les jeunes, les libertaires, les marginaux… – en les étiquetant aujourd’hui « extrémistes », « anarchistes » ou « anarcho-autonomes », et demain autrement ; et il n’aura de cesse de rappeler que les politiques répressives, une fois installées par un pouvoir quel qu’il soit, peuvent s’exercer contre n’importe qui.

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