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Genèses et valeurs

Ontogenèse d’un mythe événementiel en Australie

Laurent Dousset

Résumés

Cet article illustre combien il est difficile d’analyser la mythologie australienne du Désert de l’Ouest comme des récits sur les origines et les raisons d’être du vivant et des choses. Elle doit plutôt être comprise comme un véhicule appliqué permettant de vivre dans le monde et ses transformations. Davantage, la mythologie n’a de réelle substance que dans les expériences vécues, justifiant ainsi l’existence telle qu’elle est, et non pas telle qu’elle a été, ou devrait être. En s’inspirant d’Anscombe, le récit mythologique est interprété comme une intention, et les intentions sont comprises comme des pratiques, et non comme des constructions intellectuelles uniquement. Un mythe dit de la « tradition » et ses versions « modernes » ou « feuilleton » illustrent cette approche.

Ontogenesis of a factual myth in Australia
This paper’s aim is to illustrate how it is difficult to interpret Australian Western Desert mythology as accounts of the origins and of the reasons for and of the existence of things. Quite the opposite, mythology must be understood as the applied vehicle for living in the actual world, including its transformations. Moreover, mythology only takes substance in lived experiences, thus justifying existence as it is, and not as it was or shall be. Drawing on Anscombe, the mythological narrative is analysed as an intention; and intentions are understood as actual practices, not solely intellectual constructs. A so-called « traditional » myth and its « modern » sequel illustrate this approach.

Ontogénesis de un mito cronológico en Australia
Este artículo ilustra cuanto difícil es analizar la mitología australiana del Desierto del Oeste como relatos sobre los orígenes y razón de ser del viviente y de las cosas. Se entiende más bien como un veículo que permite vivir en el mundo y sus transformaciones. Mucho más, la verdadera substancia de la mitología radica en las experiencias vividas, justificando la existencia como es y no como ha sido o tendría que ser. Inspirándose de Anscombe, el relato mitológico se interpreta como prácticas y no solamente como construcciones intelectuales. Un mito dicho de la « tradición » y su versión « moderna » ilustran este enfoque.

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Texte intégral

Texte intégral en libre accès disponible depuis le 15 avril 2007.

1Cet article présente un mythe australien qui se révèle davantage comme événement que comme élément structurel. Il explique la genèse d’une tradition, les origines de la conception du monde des humains, et à la fois intègre le contemporain, le vécu. Subtile union d’une rationalité tangible et d’un traditionnel mythique, ce récit, comme tant de mythes australiens, reproduit l’histoire cosmologique, les origines des manières de faire et de penser, ainsi que la description d’une réalité seconde, à ce point analogue à la première qu’elle en devient le moteur principal. Si les structures cognitives qui articulent cette pensée sont difficiles à appréhender, il paraît toutefois manifeste que la complexité de ces récits nous conduit à les considérer comme une combinaison de structures et d’événements, substrat de la reproduction des phénoménologies et intégrant de fait les visions cosmologiques sociales et les idéologies individuelles. L’ambition est ici de démontrer comment la mythologie, la culture définie comme une toile symbolique, et les pratiques qui peuvent être décrites dans un cadre technolo­gique, ont du sens-en-commun et un sens-pour-tout, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent être indépendamment extraites de l’ensemble qu’elles constituent pour l’acteur aborigène et que, en conséquence, vouloir décrire la partie du mythe d’origine d’une manière de faire, c’est-à-dire d’une technique, ne peut que résulter d’un artifice épistémologique.

2Ainsi, cette contribution ne propose guère de révélations. Je montrerai simplement que l’efficacité d’une distinction analytique du domaine mythologique en entités dites originelles et en moyens d’action —les aspects pragmatiques du mythe— est limitée en ce qui concerne l’Australie. Cette position théorique se justifiera d’elle-même par le biais des données ethnographiques qui seront examinées, car elles résument un mythe qui décrit, tel un feuilleton télévisé, un épisode dit de la tradition et sa suite contemporaine, mais les distinguer est davantage le produit d’un style littéraire, particulier peut-être à l’anthropologie, que le reflet de la réalité sur laquelle elle se fonde. Mais examinons d’abord le contexte géographique et social de cette mythologie événementielle.

Le Désert de l’Ouest australien

3D’une surface de plus de 600 000 kilomètres carrés, cette région couvre les déserts de Gibson, Great Victoria et Sandy, qui s’étendent de Jigalong dans le nord-ouest jusqu’à Yalata dans le sud-est. Cette aire, dite « culturelle » depuis Berndt (1959), est habitée par une quarantaine de groupes dialectaux dont certains sont entrés dans l’histoire de l’anthropologie. Les Pitjantjatjara, avec les travaux de Yengoyan (1968), puis de Godelier (1977) et de nombreux autres chercheurs; les Pintupi étudiés par Myers (1986) entre autres, ou encore les Mardu avec l’œuvre de Tonkinson (1991), font sans aucun doute partie des populations les plus citées dans la littérature australienne. Ces « groupes dialectaux », notion que l’on distinguera vigoureusement de celle —inapplicable dans cette région— de « tribu », sont, linguistiquement comme anthropologiquement, cognats de par leur langue commune, le Wati, dont ils parlent des dialectes, et de par leurs similitudes culturelles, tant matérielles qu’immatérielles. D’ailleurs, les Aborigènes de ces divers groupes dialectaux se considèrent comme des semblables culturels et sociaux, sinon des identiques, proclamant ainsi une double identité. La première, que l’on nommera locale, exprime l’intensité des rapports entre des familles au parler commun et aux pratiques similaires. La seconde, plutôt globale, reflète la reconnaissance —parfois idéelle— d’un ensemble culturel s’accomplissant par des réseaux d’échanges, des solidarités rituelles et économiques, des inter-mariages et des mythes partagés.

4Pour la parenté, à part quelques variations locales, ces groupes possèdent sans exception un système qui depuis Elkin (1938-40) est appelé Aluridja. Dans un univers moral qui n’est peuplé que de parents (Tonkinson 1991 : 57), avoir les mêmes principes classificatoires favorise indiscutablement cette identité globale. Fondamentalement dravidien, ce système est rendu particulier par l’existence de niveaux hawaïens dans certains contextes discursifs et par l’existence d’une terminologie qui, au-delà de la désignation des parents croisés, distingue également les affins réels, ce qui est commun dans des systèmes de type iroquois, mais ne l’est pas dans le dravidien (voir Dousset 1999, 2002a et 2003).

5Gould (1969 : 273), un ethno-archéologue qui a travaillé dans les années 1960 auprès de l’un de ces groupes dialectaux, qualifiait le Désert de l’Ouest d’environnement le plus rigoureux jamais habité par l’homme avant la révolution industrielle; perception certes idiosyncrasique mais résumant fort bien le contexte écologique. L’eau, élément principal qui régit l’organisation du quotidien est rarissime. On ne la trouve que dans des crevasses rocailleuses ou des petits puits couverts de branchage dans le sable. En outre, ce n’est pas tant la rareté des averses qui rendait laborieuses les activités de ces nomades chasseurs-collecteurs, que surtout leur imprédictibilité, dans le temps comme dans l’espace. L’importance de l’eau dans la vie des Aborigènes pourrait être illustrée par de simples exemples linguistiques. Kapi, le terme local pour « eau », et ngurra, désignant le territoire ou les sites d’affiliations, pourront être employés indifféremment : ainsi la question « D’où viens-tu ? » est-elle également exprimée par « Quelle est ton eau ? ». Une démarche analogue régit la cartographie indigène : ce sont les points d’eau qui constituent le plus souvent les lieux nommés dans l’espace.

6Une organisation sociale et territoriale peu rigide tenant compte des imprévisibilités écologiques apparaît donc comme une nécessité vitale. Car interdire à autrui l’accès aux ressources par des mécanismes sociaux et territoriaux trop stricts aurait écarté toute possibilité d’entraide.

7Parmi les fondations du modèle du Désert de l’Ouest et sa capacité d’expansion ou d’infiltration spatiale et d’intégration sociale, il faut citer les mariages entre groupes dialectaux, qui soudent des solidarités régionales, la co-responsabilité de sites dont les histoires mythiques traversent la totalité de l’aire culturelle et s’étendent souvent au-delà, et les modes d’affiliation territoriaux qui s’articulent autour d’une accumulation de critères revendicatifs plutôt que sur des principes de filiation et de descendance inaliénables. Le tout est justifié, formellement pourrait-on dire, par l’existence des moitiés générationnelles constituant des tranches de solidarité horizontales dont la capacité de croissance est, en principe du moins, illimitée. Ces moitiés regroupent les personnes d’un même niveau générationnel, quelles que soient leur résidence ou leur appartenance dialectale, qu’elles soient des croisées ou des parallèles, en un ensemble solidaire aux obligations réciproques, notamment dans le domaine du rituel.

8Pour ce qui est des alliances, notons qu’elles ne satisfont pas seulement la règle de l’exogamie sociale et locale, mais qu’elles participent au maintien des réseaux entre groupes, s’accordant ainsi à des principes qui ressemblent fortement à ceux des systèmes dits semi-complexes. Les groupes dans lesquels le père et le fils trouvent une épouse ne sont pas identiques; ne le sont souvent pas non plus ceux dans lesquels deux frères se marient. L’inverse féminin suit évidemment ce même principe, que l’on trouve également ailleurs en Australie et que Keen (2002) résume fort bien par la notion de shifting web (« toile mouvante »), faisant référence aussi à McKinley (1971 : 411) et à sa dispersed affinal alliance (« alliance dispersée »).

9On pouvait s’y attendre : les principes d’affiliation territoriale —terme que nous préférons dans ce cas à celui de propriété foncière— obéissent à une logique similaire. Sans trop entrer dans les détails, soulignons simplement que ce n’est pas un groupe défini par des principes de recrutement formels, tel un clan, qui constitue le collectif des « possesseurs », mais plutôt un ensemble de personnes accumulant des critères d’affiliation qui l’établissent temporairement. Ces critères intègrent certes des principes structuraux, tel le renouvellement ambilinéaire (en ne choisissant que la ligne maternelle ou la ligne paternelle) ou bilinéaire (en s’associant à la ligne maternelle et à la ligne paternelle) de l’affiliation territoriale des parents et grands-parents, mais s’enrichissent d’arguments tiers, souvent plus importants pour les droits et les responsabilités d’un individu sur tel ou tel site géographique. Citons à ce sujet le lieu de conception, qui détermine le totem individuel (tjuma), le lieu de naissance, les lieux de résidence prolongée, la pro­fondeur des connaissances rituelles, mythologiques et musicales relatives à une série de sites, les lieux auxquels s’associent les affins et, enfin, les ressemblances corporelles avec l’un des héros mythiques parcourant les contrées. Le parler (wangka) d’une personne sera d’autant plus écouté que les critères accumulés par elle seront nombreux. Il s’ensuit que la détermination de l’affiliation territoriale d’un individu, tout comme la constitution temporaire d’un groupe foncier asso­ciatif, est avant tout un processus de négociation.

10Hormis le nomadisme —qui consiste aujourd’hui en des voyages motorisés de communauté en communauté—, la chasse et la collecte, qui ne s’effectuent souvent que les samedis et dimanches —héritage incontestable des missionnaires qui introduisirent l’idée de week-end et de balade dominicale, rapidement re-interprétée en chasse dominicale—, les principes évoqués ci-dessus sont encore à l’œuvre pour la grande majorité des groupes dialectaux du Désert de l’Ouest. À l’exception des zones périphériques, l’occupation occidentale s’y est faite tardivement et in absentia. Des réserves naturelles et indigènes (Native Reserves) furent déclarées, au début du XXe siècle, seulement sur carte et avant même que le pou­voir colonial ne s’y installe, car le bétail n’y trouvant guère de pâturages ni d’abreuvages convenables, la région présentait peu d’intérêt. Pour ce qui est des Ngaatjatjarra, vivant autour et au nord des Rawlinson Ranges, groupe dialectal sur lequel nous allons nous pencher plus particulièrement, il faudra attendre les années 1950 avant de voir débarquer des administrateurs et autres patrouilleurs gouvernementaux, matérialisant pour nombre de Ngaatjatjarra le premier contact soutenu avec le Blanc. Certes, la mission de Warburton fut établie dès 1934 à quelque 200 kilomètres des Rawlinsons, mais les contacts avec ces étrangers ne furent longtemps qu’indirects, c’est-à-dire réalisés par le biais d’échanges de vêtements ou d’outils métalliques avec les groupes voisins.

11L’histoire connut un tournant important en 1955, lorsque les administrateurs du Weapons Research Establishment, institution fédérale de recherche sur l’armement —notamment nucléaire— décidèrent d’établir une station de contrôle à mi-chemin entre la rampe de lancement des missiles à Woomera, au nord d’Adélaïde, et l’aire prévue de leur chute dans le Great Sandy Desert, à l’autre bout du Désert de l’Ouest (Dousset 2002b).

12En résumé, les Ngaatjatjarra, dont une partie fut déportée et une autre quitta délibérément les contrées traditionnelles pour une courte durée, visitant entre autres la mission de Warburton, côtoyèrent ainsi depuis 1957 deux aspects parti­culiers de la société occidentale : la politique ambiguë et souvent impénétrable des agences gouvernementales sur l’armement, et l’intégrisme chrétien par le biais des missionnaires de la United Aborigines Mission, réputés pour leur intransigeance vis-à-vis des pratiques et croyances indigènes, et même de la langue vernaculaire. Au cours des années 1970, patrouilleurs et missionnaires quittent les Rawlinsons et Warburton; les Ngaatjatjarra vivent depuis sur leur territoire traditionnel, dans de petits villages appelés communautés, attendant que la responsabilité sur cette région leur soit enfin restituée. Mais passons plutôt à la mythologie.

De l’ontogenèse à l’événement mythologique

13Deux domaines analytiques ont accompagné l’anthropologie australienne depuis ses premiers jours. Le premier est la parenté, et plus généralement l’organisation et les catégories sociales. Le second concerne l’intérêt particulier pour le champ religieux ou la cosmologie australienne, exprimé dans la notion de Dreamtime, ou « Temps du Rêve ». Ces deux domaines, pas vraiment distingués par les Aborigènes eux-mêmes (du moins ceux du Désert de l’Ouest), sont pourtant à l’origine de quelques-uns des ouvrages et théories ethnologiques les plus cités et connus. Dès Morgan, en passant par Malinowski, Radcliffe-Brown, Lévi-Strauss, Dumont, Hiatt, Scheffler et, plus récemment, Trautmann, Viveiros de Castro et bien d’autres, la parenté australienne, véritable laboratoire pour les théories générales, a retenu l’attention des chercheurs les plus renommés, qui ont manifesté un intérêt tout particulier pour les systèmes à catégories sociales, telles les sections et sous-sections.

14La religion et la cosmogonie prêtent davantage à polémique. Aux grandes œuvres qu’elle a servies, comme celles de Frazer, Durkheim et bien d’autres, s’ajoute une récupération politique et folklorique, d’abord par l’emploi d’un terme unique, le Dreamtime, notion que forgea Gillen pour l’Australie centrale, afin de désigner un ensemble de croyances et de pratiques qui peuvent pourtant varier de région à région et de langue à langue; ensuite parce que la description de sa centralité dans la ou les cultures aborigènes sert à justifier une spiritualité particulière. Depuis les années 1940 et 1950, le phénomène du Dreamtime s’insère parmi les arguments autorisant les anthropologues et activistes politiques, alors baignés dans les complexités de la politique australienne d’assimilation, à contrebalancer la catégorisation populaire des cultures aborigènes comme « primitives » et non sophistiquées. Évidemment, l’argument de cette primitivité se fondait, dans le milieu politique entre autres, sur le retard technologique et sur l’absence de démarcations explicites de la propriété, notamment foncière. De plus, une distinction explicite entre nature sauvage et nature domestiquée semblait faire défaut. En guise de réponse à ces dévalorisations populaires, les anthropologues soulignaient l’existence pan-australienne ou pan-aborigène d’une structure intellectuelle complexe et élaborée pour laquelle la dénomination Dreamtime fut globalement adoptée. Depuis, la notion s’est fermement installée dans les discours publics, de la politique au tourisme, mais aussi dans celui des groupes aborigènes eux-mêmes. Le Dreamtime est devenu l’incarnation par excellence de ce que l’on pourrait nommer la « distinctivité » aborigène, en même temps qu’un moyen d’action (agency) dans la revendication d’une identité particulière et la démonstration d’une authenticité culturelle. Cependant, extraire certaines représentations et pratiques d’un ensemble social plus général pour en faire un moyen d’action politique n’est pas une compétence que les habitants du Désert de l’Ouest revendiquent vraiment, car le complexe que nous nommons par commodité Dreamtime est à la fois caractéristique et contexte, contenu et contenant, temporel et intemporel, manières de penser le monde tout comme l’outil qui permet de le penser.

15Les habitants du Désert de l’Ouest ont pourtant un terme propre, Tjukurrpa, qui désigne un ensemble de structures et pratiques sociales que le terme de Dreamtime prétend englober. Tjukurrpa s’opposerait, selon certains interprètes et chercheurs (Hansen & Hansen 1992) au terme Mularrpa, qui pour sa part désigne « la réalité », « le vrai ». Telle n’est pas tout à fait mon interprétation —et le mythe présenté en témoigne—, car les définitions proposées par les Hansen impliquent une disjonction temporelle et conceptuelle entre le Tjukurrpa et le Mularrpa qui n’a pas lieu d’être. Le premier décrirait un temps mythique passé, le second un temps réel présent. L’inexactitude d’un tel découpage avait déjà été reconnue par Stanner (1979 : 24) qui pour définir le Temps du Rêve proposa d’inventer un mot dans sa fameuse phrase « One cannot “fix” The Dreaming in time : it was, and is, everywhen » —le partout-toujours.

16Nous allons voir que Tjukurrpa est en effet davantage un monde parallèle au Mularrpa qu’un monde qui le précède. Le Tjukurrpa, qui inclut les catégories du mythe, du rituel, de la cosmologie et des origines des manières de faire et de penser, se révèle un concept par lequel l’essence des choses est présentée et définie par leur existence. De ce fait, il n’est pas seulement histoire et cosmogonie, mais s’implante aussi dans le contemporain, car aucune structure ou technique nouvelle ne peut échapper à son prisme. Le mythe rapporté ci-dessous intègre indiscutablement ces deux aspects dont la distinction paraît être le fruit d’un regard autre qu’aborigène plutôt que le véritable reflet du concept : il possède ce caractère mythologique associé sans réserve au Dreamtime australien, mais il comprend également cet aspect existentiel et contemporain que nous venons d’évoquer.

17La scène de ce mythe est un site cérémoniel important au cœur du désert de Gibson, que je nommerai Yurntakurlta pour ne pas avoir à dévoiler son vrai nom. Ce site est constitué de deux parties principales. La première, localisée dans une plaine, est une dépression profonde et sombre, tel un gigantesque puits. Seuls les hommes initiés peuvent progresser jusqu’au bord de cet affaissement. La seconde est une colline avoisinante qui forme un paravent entre le lieu de campement des familles, où les femmes et les enfants sont admis, et la dépression en question. Les parois en sont abruptes, raides, impressionnantes. Lors de leur première visite à Yurntakurlta, les jeunes hommes récemment initiés sont guidés par des anciens qui leur couvrent les yeux jusqu’à ce que leurs orteils dépassent le bord et côtoient le vide; à cet instant, leurs yeux sont découverts, et les anciens soulignent qu’il est nécessaire de retenir les jeunes gens qui sinon, attirés par la profondeur de la dépression, tomberaient dans le vide.

18Le mythe qui accompagne et explique Yurntakurlta est celui de Tjilkamarta, l’échidné, qui voyageait par là, venant du nord-ouest et se dirigeant vers le sud-est. De campement en campement, Tjilkamarta suivait les traces des humains depuis plusieurs jours sans succès. Un jour, il trouva les cendres chaudes d’un foyer et sut qu’il s’approchait des humains; il se mit à les appeler : « Où sont les hommes, où sont les femmes, où sont les enfants ? » Il ne reçut aucune réponse et continua à suivre les traces (tjina). Notons au passage que tjina, l’empreinte laissée par les pieds, notion centrale dans ce mythe, est un concept important pour les Ngaatjatjarra et les autres groupes dialectaux du Désert de l’Ouest. Elle est la marque de l’identité et de l’individualité des hommes et des femmes. Seul un enfant qui laissera des traces —qui sait donc marcher— recevra un nom définitif. Ou encore, c’est la similitude des traces (donc des pieds), et non les traits du visage, qui permettront d’affirmer une ressemblance entre un enfant et l’un de ses parents ou grands-parents. Tjilkamarta suivait donc ces traces, identifiant chacune d’entre elles. Elles étaient parfois floues et non reconnaissables car les humains avaient mis des pantoufles de plumes d’émeu. Parfois aussi, les traces se séparaient : celles des femmes et des enfants partaient d’un côté, celles des hommes de l’autre. Elles ne se rejoignaient que là où il avait été décidé d’établir un campement pour la nuit. Car les hommes partaient pour chasser des kangou­rous et des émeus, alors que les femmes ramassaient des fruits et des graines. Puis, un matin, après avoir marché toute la nuit malgré les mamu, ces mauvais esprits qui dans les ténèbres dévorent les humains et surtout les enfants, Tjilkamarta arriva à Yurntakurlta. Il entendit des voix et derrière des acacias il aperçut les femmes assises qui discutaient autour d’un feu, tandis que les enfants jouaient. Tjilkamarta s’approcha et demanda : « Vous êtes là, les femmes et les enfants. Mais où sont les hommes ? Qu’avez-vous fait des hommes ? » Les femmes lui répondirent d’une seule voix en indiquant l’est : « Ils sont partis par là ». Suivant les indications des femmes, Tjilkamarta se remit en route vers l’est, mais après une longue marche sans trouver les hommes ni leurs traces, il revint sur ses pas. De retour au campement, il demanda à nouveau : « Où sont les hommes ? Ils ne sont pas allés vers l’est ». Les femmes lui répondirent encore : « Oh, alors ils sont partis par là », et elles indiquèrent le sud. Tjilkamarta partit vers le sud, mais comme la première fois, il dût rebrousser chemin : il n’y avait ni hommes ni traces. C’est ainsi que les femmes envoyèrent Tjilkamarta dans toutes les direc­tions et cela dura toute la journée. Tjilkamarta, ne trouvant pas les hommes, se mit en colère. Il prit son bâton à fouir et commença à frapper le sol, en hurlant : « Où sont les hommes, où sont les hommes ? Les femmes m’ont envoyé dans toutes les directions, je les ai écoutées, mais je n’ai pas trouvé les hommes. » Et il frappa si longuement et si violemment que ses coups creusèrent un trou dans le sable, un trou qui devenait à chaque coup plus profond. Le sable giclait et s’entassait sur le côté, formant la colline derrière laquelle campent aujourd’hui les femmes; quant à la cavité, elle devint Yurntakurlta. Tjilkamarta se fatigua et finalement partit pour de nouvelles péripéties, abandonnant son bâton à fouir sur place. Les hommes que Tjilkamarta chercha si longtemps et avec tant d’ardeur sortirent du trou qu’il avait creusé; l’un après l’autre, ils escaladèrent les parois de Yurntakurlta. Ils étaient les hommes Tingari; c’est la tjina tingari, la trace ou voie des Tingari, que Tjilkamarta cherchait. Or, les Tingari sont un groupe de « pré-humains » dont les hommes naquirent déjà adultes, et qui voyagèrent à l’instar des autres héros du Dreamtime. Ils créèrent la morphologie géographique, vécurent des aventures, enseignèrent à leurs jeunes les secrets religieux, se reproduisirent selon les règles —mais commirent aussi des incestes—, chassèrent, cueillirent et campèrent; ils vécurent donc à la manière d’une société humaine. (Le terme Tingari désigne également un ensemble de cycles de chants et d’itinéraires mythiques, associés à ces « pré-humains », qui traversent de larges parties du Désert de l’Ouest —Myers 1986 : 62 et suiv.)

19Voilà donc la première séquence du tjuma (lit. histoire ou mythe, totem, marque de naissance) de Yurntakulta. Attardons-nous quelque peu sur les principaux éléments évoqués avant de présenter la seconde séquence. C’est le bâton à fouir qui est central dans cet épisode, puisque c’est par son utilisation que les Tingari sont, en quelque sorte, libérés de Yurntakulta. Mais le mythe n’explique ni son origine ni sa raison d’être —pas plus qu’il n’éclaire sur la présence des pantoufles de plumes, ou encore sur le fait qu’hommes et femmes empruntent des chemins différents avant de se retrouver le soir en un lieu de campement prédéfini. Il ne décrit pas non plus les matières, outils et gestes nécessaires à sa fabrication ou à son emploi. Sa justification cosmogonique n’implique pas un savoir-faire, mais seulement son existence. Les humains, les héros mythologiques, les savoir-faire et les outils sont présents; ce qui est créé est une géographie particulière et le mythe donne une explication implicite de son importance sociale. C’est la caractéristique essentielle de cette mythologie, qui met en scène le monde et les choses non pas par des récits essentialistes, mais par le travail sur un existant, c’est-à-dire par l’action et l’événement. Loin d’en faire une particularité, cela permettra au contraire d’entrevoir les raisons d’une équivalence qualitative entre la première et la seconde séquence rapportée plus loin.

20Une analyse plus approfondie de ce mythe ne se justifierait qu’à partir de son récit complet, qui n’est pas possible ici. Quelques pistes paraissent toutefois intéressantes, notamment les contradictions ou oppositions systématiques. Un principe, que j’avais tenté de mettre en évidence ailleurs (1996), accompagnant les rites de multiplication des espèces, se retrouve ici : le bâton à fouir, outil féminin par excellence, est tenu par un héros masculin, Tjilkamarta. Il creuse un trou d’où sortent les hommes véritables, les Tingari, suggérant que, même par le biais d’un outil ou principe féminin, seul le travail masculin peut générer les choses. En effet, le travail rituel des hommes vise, entre autres, à réalimenter en substances —notamment le sang qu’ils ont hérité des femmes et dont ils ne sont que les porteurs temporaires— le cycle de la reproduction. Autre piste intéressante : la synchronie des causalités, ou plutôt la diachronie bouleversée des ontogenèses. Comment se fait-il que Tjilkamarta cherche ces hommes qui pourtant sont libérés par lui ? Comment peut-il les libérer des sous-sols alors qu’il les avait suivis pendant des jours à la surface ? Ces interrogations ne peuvent que renforcer le caractère « everywhen » du Dreamtime australien, et partant, la futilité de vouloir faire l’historiographie des événements mythiques, ou même de les mettre en opposition avec Mularrpa, la réalité contemporaine. Il est vain de vouloir trouver un ordre temporel, spatial ou conceptuel entre ces événements, car seuls les scénarii restreints et relatifs à des sites particuliers font sens (Berndt 1970 : 222; Swain 1993 : 32). Et l’élucidation d’un mythe australien, qui n’est toujours qu’une séquence d’un mythe plus vaste, comme étant un « mythe d’origine », devient une entreprise délicate.

21Passons à la seconde séquence qui illustrera mieux le propos. En effet, à cette première séquence, sorte de mythe d’arrière-plan, toujours présent dans les consciences, s’ajoutent les récits effectivement vécus. Les humains vivent le mythe tout en l’enrichissant, ou plus exactement, ils l’enrichissent en vivant.

22Voici ce qui nous en a été rapporté lors d’un retour sur le terrain en 2002.

Pendant que tu n’étais pas là, nous sommes retournés à Yurntakurlta, tous ensemble, hommes, femmes et enfants. Tu sais, avec le camion quatre roues motrices de la communauté. C’était un long voyage. Certaines dunes avaient bougé et il fallait trouver de nouveaux chemins pour les contourner, pour se frayer un passage. En quelque sorte, c’était plus simple quand on y allait à pied, car on passait par-dessus. Nous sommes arrivés à Yurntakurlta et les vieux se sont mis à pleurer, comme pour le deuil. Il fallait le faire, parce que ça faisait plus d’un an ou peut-être deux ans que nous n’étions pas retournés, et le vieux (Tjilkamarta) devait se sentir seul.

Nous avons campé de l’autre côté, derrière la colline, là où campaient les femmes lorsqu’il cherchait les Wati (lit. hommes initiés ; il s’agit là des hommes Tingari). Nous (les hommes), nous sommes allés voir Yurntakurlta. Nous avons contourné la colline et sommes arrivés près du trou, et nous avons fait tout ce qu’il fallait faire : nettoyer les lieux, chanter les chansons, avancer pas à pas. Nous avons chanté tout l’après-midi et une grande partie de la nuit; puis nous sommes retournés au campement.

Mais la nuit, je me suis réveillé, et d’autres avec moi. Et nous avons vu une lumière dans le ciel qui venait de derrière la colline, beaucoup de lumière. Nous nous sommes avancés et nous avons entendu des enfants jouer et crier, et il y avait des bruits de voiture et de générateur, et il y avait des gens qui parlaient. Parce qu’à Yurntakurlta, il y a les Tingari, ils sont toujours là et ils sont comme nous. Eux aussi vivent dans une communauté (village), ils ont tout, tout pareil. Ils font comme nous et nous faisons comme eux. Mais nous avions peur et nous nous sommes couchés. Le lendemain nous sommes repartis ailleurs, car nous avions vu que c’était bien, qu’on avait tout bien fait.

Intention du conteur et intentionnalité du système mythologique

23« Description épaisse » oblige, le contexte de ce second récit est celui du doute de l’ethnologue quant à une histoire autre mais similaire, qui mélangeait subtile­ment mythologie et affaires ordinaires. À vrai dire, ce doute concernait davantage une interrogation sur les schémas cognitifs qui articuleraient une telle pensée qu’une vérification rationnelle des faits; car comment douter de l’acceptation par l’Aborigène de ses propres représentations culturelles ? Cet autre récit, mentionnons-le au passage, concernait un fait historique des années 1960 : une fusillade entre un Blanc et un Aborigène, blessé, dont on dit qu’il se transforma en aigle, s’envola et survécut grâce au travail des hommes-médecins (ngangkari). Cet homme, encore vivant il y a quelques années, fut appelé Pullitjarra (pulli est une adaptation de bullet, « balle de fusil » et tjarra signifie « avec »). Comme si le conteur présupposait que notre doute articulait l’imbrication problématique d’une catégorie mythologique avec le réel, il s’était empressé de nous rapporter la suite de l’histoire de Yurntakurlta, qu’il utilisait comme preuve de l’inefficacité, voire de l’inexistence, d’une distinction entre mythe et vécu. Soulignant ainsi la véracité des événements rapportés, le conteur termine le récit par le mot palya : nul besoin d’explications ou discussions supplémentaires.

24Que faire de cet épisode, sinon et au moins en inférer que diachronie et synchronie, histoire et présent s’entremêlent, que l’effet devient la cause… Plus encore, ce mythe, car il faut bien l’interpréter comme un mythe, est un événement qui se joue avec ou entre la réalité « réelle » et une réalité (peut-être) imaginaire. Pour le conteur toutefois, cette distinction que nous venons d’établir n’est pas porteuse de sens et n’a pas lieu d’être. Le conteur a évolué en même temps que ce monde miroir de Yurntakurlta dont il dit avoir été le témoin et qui légitime son existence, sa manière de faire et de penser. Si les Ngaatjatjarra se trouvent maintenant confrontés à un nouveau monde, celui de la technologie et de la bureaucratie, il en est forcément de même pour les Tingari.

25Si le projet anthropologique est de rationaliser les structures et les événements culturels et de rendre compte de la relation entre consciences individuelles et société, alors nous devons nous interroger sur la question de l’intention du conteur et de la finalité du mythe dans la deuxième séquence. Une réponse triviale se présente immédiatement : la seconde partie du mythe ne fait rien d’autre que masquer un mode de vie contemporain et transformé derrière une vitrine « traditionnelle », exprimant ainsi deux mécanismes : une nostalgie, propre au conteur, d’un passé qu’il ne veut pas voir disparaître, et un moyen d’action extérieur appliqué comme preuve de cette authenticité culturelle nécessaire à toute revendication indigène en Australie. Car pour exister il faut être vrai, et pour le système légal et politique australien, ne sont vrais que ceux qui reproduisent quotidiennement des images similaires à celles rapportées par les premiers aventuriers et explorateurs occidentaux. Le sens attribué par le conteur au récit, dans ce contexte, est alors celui de la réappropriation d’une mémoire idéelle du passé; réappropriation qui s’exprime par une construction implicite de la notion de culture, car comme le remarque Myers (1986 : 14) en citant Sapir, les individus ont la capacité de transformer et de réinterpréter la tradition culturelle. Évidemment, cela n’est possible que parce que les acteurs ont, jusqu’à un certain degré, conscience du monde (ou du mode) socioculturel qu’ils reproduisent (Giddens 1979).

26Pourtant, élucider le sens de l’intention par une nostalgie intérieure au conteur se révèle une entreprise délicate. À ce sujet, Anscombe (2002) nous met en garde contre l’interprétation des intentions comme reflétant des états intérieurs de l’acteur; interprétation qu’elle attribue à la théorie dite mentaliste dont les analyses aboutissent à des difficultés insurmontables. Descombes interprète la pensée d’Anscombe de la manière suivante :

« Si l’agent confère un sens intentionnel à son action extérieure [dans notre cas le récit du mythe] par un acte intérieur [la confusion du contemporain avec une tradition], la question se pose de savoir si l’acte intérieur est lui-même intentionnel. » (Descombes 2002 : 11)

27En d’autres termes, si la quête de l’authenticité culturelle et le sentiment de nostalgie sont les intentions d’un amalgame entre récits mythiques et vécu contemporain, quelle est l’intention de la nostalgie elle-même ? Selon Anscombe (2002 : 92), « l’intention d’un homme, c’est son action ». Sans entrer plus en détail dans ce texte complexe, notons toutefois que l’énoncé d’Anscombe ouvre une piste intéressante : c’est parce que l’intention est une action, qu’agir sur le mythe, le créer par le vécu, est une action sur le monde dans sa totalité. Ainsi, l’intentionnalité du système mythique ne serait pas de reproduire une structure, mais de faire vivre le mythe comme la véritable intention du mythe lui-même. C’est dans ce sens que nous avions, en introduction, parlé d’un sens-en-commun et d’un sens-pour-tout, parce que, en quelque sorte, les récits contiennent leurs propres analyses et conclusions.

28L’identité entre intention du récit et action ou forme d’action de l’indigène devient ainsi apparente, puisque, à défaut d’expliquer de véritables chaînes opératoires, il en décrit le produit fini qui n’existe que parce qu’il est vécu. Déchiffrer ce récit comme un mythe d’origine —du bâton à fouir ou du générateur électrique— s’avère donc, comme nous avons eu l’occasion de l’énoncer plus haut, une entreprise délicate, voire inféconde; car est expliquée la chose qui existe parce qu’elle existe, et non parce qu’elle a été créée. Il n’existe pas de narratifs fictionnels dans le Désert de l’Ouest. Un mythe rappelle un événement vrai, ou il ne le fait pas. S’il ne le fait pas, c’est un mensonge (Myers 184 : 49).

29Il paraît évident que plusieurs années seront nécessaires avant d’intégrer la seconde séquence dans le mythe dit de la tradition; non, certes, sans quelques modifications résultant du bouche à oreille et d’un formatage stylistique et sémantique —peut-être pouvons-nous l’appeler la mythification—, qui transforme l’expérience racontée en un récit de conteur. Il n’y aura guère alors de justifications épistémologiques à distinguer le générateur électrique et la voiture du bâton à fouir et des pantoufles d’émeu : des technologies intégrées parce que vécues sans être forcément expliquées.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Laurent Dousset, « Ontogenèse d’un mythe événementiel en Australie », Techniques & Culture [En ligne], 43-44 | 2004, mis en ligne le 15 avril 2007, Consulté le 23 mars 2010. URL : http://tc.revues.org/1128

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Auteur

Laurent Dousset

EHESS, Centre de Recherche et de Documentation sur l’Océanie, Marseille

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  • Que reste-t-il du social quand on ne chasse plus ? Les Ngaatjatjarra du désert de l'ouest australien
    Paru dans Techniques & Culture, 33 | 1999
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